Devant le tribunal, la rocambolesque tentative d'évasion d'une détenue terroriste

A l'été 2021, cela fait quatre ans qu'elle est incarcérée en détention provisoire à la prison de Fresnes, en banlieue parisienne (Photo, AFP).
A l'été 2021, cela fait quatre ans qu'elle est incarcérée en détention provisoire à la prison de Fresnes, en banlieue parisienne (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 14 juin 2023

Devant le tribunal, la rocambolesque tentative d'évasion d'une détenue terroriste

  • Au tribunal de Paris, une détenue a fait le récit de sa tentative d'évasion
  • Elle avait rejoint deux fois les rangs du groupe Etat islamique en Syrie et en Irak, entre 2013 et 2017

PARIS: Six à huit heures par jour pendant des semaines, elle a creusé dans le plafond, scié les barreaux, gratté le mur de sa cellule. Au tribunal de Paris, une détenue dans une affaire de terrorisme a fait le récit de sa rocambolesque tentative d'évasion.

Un projet "minitieusement préparé", avec "détermination, pendant plusieurs mois", a décrit le tribunal correctionnel en condamnant Douha Mounib à trois ans et demi d'emprisonnement.

À l'été 2021, cela fait quatre ans qu'elle est incarcérée en détention provisoire à la prison de Fresnes, en banlieue parisienne.

Elle y attend d'être jugée pour avoir rejoint deux fois les rangs du groupe État islamique en Syrie et en Irak, entre 2013 et 2017 (elle sera condamnée par la cour d'assises spéciale de Paris, en mars 2023, à douze ans de réclusion criminelle).

Quatre ans "à tourner en bourrique", dit-elle, parce qu'on lui pose "les mêmes questions" sur son mari combattant djihadiste. Quatre ans qu'elle bouillonne d'"impuissance" parce qu'elle voit bien, au parloir, que "ça ne se passe pas bien" dans la famille d'accueil de sa fille de 5 ans, née à Raqqa (Syrie).

"J'avais plus d'espoir", lance de son ton brut Douha Mounib, 32 ans, depuis le box de la 16e chambre (spécialisée dans les affaires de terrorisme), où elle est jugée pour la tentative d'évasion.

Alors, elle décide de s'enfuir.

C'est le président du tribunal, dossier sous les yeux, qui retrace son "projet".

Les premiers essais, d'abord. Les "17 jours" à creuser le plafond de sa cellule, redescendant promptement de la chaise posée sur une table dès qu'elle entend les pas d'une surveillante.

"Vous creusez avec quoi ?", demande le président. "Une tige de fer, je l'avais récupérée sur une coupe que j'avais gagnée à une compétition", répond Douha Mounib, silhouette athlétique dans sa veste de sport, cheveux attachés en tresse.

Quand elle heurte une chape de béton, elle abandonne et s'attaque aux barreaux de la cellule au couteau à beurre. Nouvel échec.

«Improvisation totale»

Alors elle gratte le mur de cette vieille prison vétuste, qui s'effrite quand elle y verse du vinaigre mélangé à de l'eau chaude. Chaque jour, elle rebouche le trou avec la terre effritée et le camoufle avec une serpillère.

Pour se "motiver", elle note dans un calendrier ses heures de travail, "six à huit par jour".

Le 13 novembre 2021, c'est "terminé", il ne reste qu'un bloc de pierre à pousser.

Vers 04h00 du matin, Douha Mounib glisse des habits sous ses draps pour faire croire qu'elle dort, puis se contorsionne, "vide l'air" de ses poumons, pour se glisser dans le trou de 23 centimètres sur 42. Et descend en rappel de sa cellule du deuxième étage avec une corde tressée de draps.

Elle escalade un premier mur de 5 mètres de haut, mais n'arrivera pas à franchir le suivant. Et se fera repérer.

"Vous êtes quelqu'un de minutieuse, carrée... c'est curieux que vous ayez laissé la dernière étape de votre projet d'évasion dans l'improvisation totale", peine à comprendre le tribunal.

"Une fois qu'elle passe le mur, elle n'en sait rien", martèle son avocat Me Joseph Hazan. "C'est un acte à la fois préparé et totalement illusoire".

Requérant quatre ans d'emprisonnement, la procureure cite "la détermination, la persévérance et la dissimulation" dont a fait preuve Douha Mounib. "Encore un facteur d'inquiétude ou au minima d'interrogation sur la sincérité" de "l'évolution favorable" qu'elle met en avant, dit la magistrate.

Car l'"inquiétude" en toile de fond, avait tenté de lui faire comprendre le tribunal, c'est son éventuelle "dangerosité". Le véritable "projet" qu'elle aurait pu avoir si elle avait réussi à s'évader, explique l'assesseure, sans prononcer le mot attentat.

Douha Mounib balaie, soutient qu'elle ne comptait qu'"aller chercher" sa fille. Elle garde ce même visage grave, "figé", dit le tribunal. "Une protection", répond la prévenue dans un sourire.

Cette tentative d'évasion, "je la regrette car c'est complétement stupide et ça va me rajouter des problèmes", conclut-elle. "Mais en même temps, ça a été déclencheur d'une nouvelle vie, ça m'a permis de me remettre en question".


Dix passeurs présumés jugés pour un naufrage meurtrier dans la Manche

Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
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  • Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés
  • La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche

LILLE: Dix hommes, dont huit Afghans, sont jugés à partir de lundi à Lille pour leur rôle présumé de passeurs dans le naufrage d'une embarcation clandestine qui avait fait quatre morts et quatre disparus dans la Manche en décembre 2022.

Parti entre 1H00 et 1H30 du matin dans la nuit du 13 au 14 décembre 2022, le canot, qui transportait en majorité des migrants afghans, avait fait naufrage à quelques kilomètres des côtes anglaises.

Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés.

La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche.

Selon les éléments de l'enquête, alors que les migrants gonflaient le bateau avant le départ, plusieurs ont entendu une détonation, synonyme selon eux de crevaison. Les passeurs leur ont dit de ne pas s'en faire et qu'il s'agissait du seul bateau disponible pour eux.

D'après les témoignages des rescapés, il n'y avait pas assez de gilets de sauvetage pour tout le monde et aucune des personnes décédées n'en portait un. La température était glaciale et la mer très agitée.

Après une ou deux heures de traversée, un boudin a commencé à se dégonfler et l'eau à entrer dans l'embarcation, jusqu'à atteindre les genoux des passagers. Paniqués, ils se sont mis debout pour tenter de faire signe à un bateau. Mais le fond du canot, peu solide, a ployé sous leur poids et celui de l'eau, et tous se sont retrouvés à l'eau.

Neuf des prévenus sont jugés, jusqu'à vendredi, pour homicide involontaire par violation d'une obligation de sécurité, deux d'entre eux le sont pour blanchiment, tous pour aide au séjour irrégulier. Huit sont afghans, un syrien, un irakien.

Certains des prévenus sont soupçonnés d'avoir recruté des passeurs et assuré la logistique auprès des passagers, d'autres d'avoir géré l'organisation sur le camp de migrants de Loon-Plage (Nord), où vivaient les migrants avant leur tentative de traversée, toujours selon les éléments de l'enquête. D'autres encore sont jugés pour s'être occupés du transport des migrants vers la plage et de la mise à l'eau du canot, et deux pour avoir collecté une partie des paiements.

Le mineur sénégalais qui pilotait le canot est, lui, inculpé dans le cadre d'une procédure au Royaume-Uni.

Apparu en 2018, le phénomène des traversées de la Manche en petites embarcations est à l'origine de nombreux naufrages, le plus meurtrier ayant coûté la vie à 27 personnes en novembre 2021.

Depuis le début de l'année, au moins 15 migrants sont morts dans la Manche, bras de mer parmi les plus fréquentés du monde et où les conditions météorologiques sont souvent difficiles, selon un décompte de l'AFP à partir de chiffres officiels. En 2024, 78 étaient morts ainsi, un record.


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».