Après son inculpation, Trump à l'assaut du «ministère de l'Injustice»

L'ancien président américain et candidat à la présidentielle de 2024 Donald Trump fait un geste alors qu'il quitte les lieux après avoir pris la parole lors de la convention du parti républicain de Caroline du Nord à Greensboro, en Caroline du Nord, le 10 juin 2023. (Photo, AFP)
L'ancien président américain et candidat à la présidentielle de 2024 Donald Trump fait un geste alors qu'il quitte les lieux après avoir pris la parole lors de la convention du parti républicain de Caroline du Nord à Greensboro, en Caroline du Nord, le 10 juin 2023. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 14 juin 2023

Après son inculpation, Trump à l'assaut du «ministère de l'Injustice»

  • Le ministre de la Justice Merrick Garland, qui supervise l'appareil judiciaire fédéral, a pris soin de confier le dossier à un procureur spécial connu pour sa rigueur, Jack Smith, et le président Biden se garde de tout commentaire
  • Malgré tout, Donald Trump se pose en victime d'un «ministère de l'Injustice», «corrompu» et à la solde «de la gauche radicale»

WASHINGTON: Il le qualifiait déjà de "monstre méchant". Depuis son inculpation, Donald Trump a encore accentué ses attaques contre le ministère de la Justice, au risque de miner la confiance des Américains envers l'Etat de droit.

Accusé d'avoir conservé illégalement des secrets de la Maison Blanche, le milliardaire de 76 ans est le premier ex-président américain poursuivi par la justice fédérale. Le républicain est aussi le principal rival pour l'élection de 2024 de son successeur démocrate Joe Biden.

"Ca met le pays dans une situation très risquée", souligne Edward Foley, professeur à l'université de l'Ohio.

Pour cet expert en droit électoral, il y a une tension "inévitable" entre deux principes démocratiques de base: "personne n'est au-dessus de la loi" et "le gouvernement ne doit pas utiliser son pouvoir contre ses opposants".

Pour éviter cet écueil, le ministre de la Justice Merrick Garland, qui supervise l'appareil judiciaire fédéral, a pris soin de confier le dossier à un procureur spécial connu pour sa rigueur, Jack Smith, et le président Biden se garde de tout commentaire.

Malgré tout, Donald Trump se pose en victime d'un "ministère de l'Injustice", "corrompu" et à la solde "de la gauche radicale".

"Quand on fait arrêter son principal opposant politique, nous ne sommes plus en démocratie", a-t-il répété mardi soir lors d'un discours devant ses partisans.

Comme lors de sa croisade contre sa défaite à la présidentielle de 2020, ses griefs font mouche auprès de sa base électorale: selon un sondage You Gov, 76% des électeurs républicains jugent que les poursuites contre Donald Trump sont "motivées par la politique".

«Du Trump classique»

"C'est du Trump classique", relève Thomas Holbrook, professeur de sciences politiques à l'Université du Wisconsin. "Ca l'aide à rallier ses partisans", à lever des fonds et à détourner l'attention des accusations lourdes proférées contre lui.

Au passage, ce pilonnage "érode la confiance du public dans la neutralité du ministère de la Justice et du FBI", regrette Shirley Anne Warshaw, une politologue qui a écrit de nombreux ouvrages sur les présidents américains.

Pour elle, l'impact reste toutefois limité. "Le ministère perd seulement le soutien des partisans de Trump", dit-elle. "La plupart des Américains pensent que Trump n'aurait pas dû emporter ces documents et les garder dans son aire de jeu de Mar-a-Lago".

Thomas Holbrook pense même que la gauche américaine, très critique envers les tribunaux depuis leur remaniement par Donald Trump, pourrait être rassurée par ces poursuites.

"Ce qui fera la différence" à terme ne sera pas l'attitude de Donald Trump, qui "continuera à proférer ses accusations", mais celle "des élites républicaines", estime pour sa part Mary Stuckey, professeure de communication à l'Université Penn.

Certaines figures ont pris leur distance avec l'ex-président. Bill Barr, qui fut son ministre de la Justice, a ainsi qualifié l'acte d'accusation d'"accablant". "Si rien que la moitié de tout cela est vrai, alors (Trump) est grillé", a-t-il dit dimanche.

«Fanatiques»

Ces voix restent pour l'instant isolées dans le parti. Au contraire, les plus fidèles alliés de Donald Trump multiplient les propos incendiaires.

La candidate malheureuse au poste de gouverneure d'Arizona, Kari Lake, a ainsi souligné que les supporteurs de Donald Trump avaient leur "carte de membre de la NRA", le puissant lobby des armes. L'élu Andy Biggs a évoqué "une situation de guerre".

Ces propos font craindre un nouveau déferlement de violences, comme lorsque des centaines des partisans de l'ex-président s'étaient lancés à l'assaut du Capitole le 6 janvier 2021 pour tenter de bloquer la certification de la victoire de Joe Biden.

"Donald Trump a une base de fanatiques qui feraient n'importe quoi pour le protéger", estime Shirley Anne Warshaw.

"Les forces de l'ordre sont très conscientes du risque d'action violente", relève pour sa part Mary Stuckey, en référence à l'important dispositif policier déployé à Miami, autour du tribunal fédéral où le magnat de l'immobilier a comparu mardi.

Grâce à leur vigilance, "on arrivera peut-être à éviter la violence à court-terme", espère-t-elle. "Mais il ne fait aucun doute que Trump continuera à pousser ses partisans à agir."


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
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  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.