Pas de répit après deux mois de combats au Soudan

Les combats, qui ont commencé le 15 avril, se sont jusqu'à présent essentiellement concentrés à Khartoum, la capitale de cinq millions d'habitants (Photo, AFP).
Les combats, qui ont commencé le 15 avril, se sont jusqu'à présent essentiellement concentrés à Khartoum, la capitale de cinq millions d'habitants (Photo, AFP).
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Publié le Vendredi 16 juin 2023

Pas de répit après deux mois de combats au Soudan

  • Les combats se sont jusqu'à présent essentiellement concentrés à Khartoum et au Darfour, une vaste région frontalière du Tchad
  • Parallèlement, l'armée soudanaise a accusé mercredi les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) d'avoir "enlevé et assassiné" le gouverneur de l'Etat du Darfour-Ouest

KHARTOUM: Après deux mois de combats meurtriers, le conflit au Soudan a connu une escalade avec le meurtre d'un gouverneur dans la région du Darfour, où les témoignages sur des violences de grande ampleur contre les civils se multiplient.

Les affrontements ont éclaté le 15 avril dans ce pays d'Afrique de l'Est, l'un des plus pauvres du monde, entre l'armée, commandée par le général Abdel Fattah al-Burhane, et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), du général Mohamed Hamdane Daglo.

"Même en imaginant le pire, nous ne pensions pas que cette guerre durerait si longtemps", a confié jeudi à l'AFP Mohamad al-Hassan Othman, un habitant du sud de Khartoum qui a fui.

"Nous ne savons pas si nous rentrerons chez nous ou si nous devrons commencer une nouvelle vie", ajoute-t-il.

Les combats se sont jusqu'à présent essentiellement concentrés à Khartoum et au Darfour, une vaste région frontalière du Tchad, déjà meurtrie par une guerre civile dans les années 2000.

«Plus rien»
Le chef de l'armée a accusé jeudi les FSR d'avoir capturé et tué le gouverneur de l'Etat du Darfour-Ouest, Khamis Abdullah Abakar, après qu'il a donné un entretien par téléphone à une télévision saoudienne mercredi, où il critiquait les paramilitaires.

Les FSR ont nié être responsables de cet "assassinat" mais selon l'ONU, "des récits convaincants de témoins attribuent cet acte aux milices arabes et aux FSR".

Jeudi, Washington a dénoncé les "atrocités" commises au Darfour-Ouest et jugé "crédibles" des informations faisant état de violations des droits humains par les paramilitaires, notamment des "viols et d'autres formes de violences sexuelles".

En deux mois, aucun scénario de retour à la paix ne se dessine. A Khartoum, des quartiers entiers n'ont plus d'eau potable. L'électricité fonctionne quelques heures par semaine et la plupart des hôpitaux dans les zones de combat sont hors d'usage.

Les violences ont fait plus de 2.000 morts, selon le dernier bilan de l'ONG ACLED.

Plus de 2,2 millions de personnes ont fui, dont plus d'un million ont quitté Khartoum, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), tandis que plus de 528.000 réfugiés sont arrivés dans les pays voisins.

Pendant plusieurs semaines, l'Arabie saoudite et les Etats-Unis ont servi de médiateurs à des négociations en vue d'un cessez-le-feu.

Mais les nombreuses trêves annoncées n'ont quasiment jamais été respectées, empêchant l'aide humanitaire de parvenir aux millions de civils désespérés.

Dans une nouvelle tentative de médiation, l'Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) avait annoncé lundi que le Kenya allait présider un quatuor comprenant l'Ethiopie, la Somalie et le Soudan du Sud.

Le lendemain, le ministère soudanais des Affaires étrangères avait exigé le retour à la tête du comité du président sud-soudanais Salva Kiir, affirmant jeudi que le gouvernement kenyan avait "adopté les positions de la milice FSR" et "lui avait proposé diverses formes de soutien".

Près de la moitié de la population, soit 25 millions des 45 millions d'habitants du Soudan, dépend désormais de l'aide humanitaire pour survivre, selon l'ONU.

Washington condamne les violences au Darfour, cible les forces paramilitaires

Les Etats-Unis ont condamné jeudi avec force les "horribles violences" commises au Soudan, en particulier au Darfour, "sinistre rappel" des atrocités commises dans les années 2000, selon Washington, qui pointe la responsabilité des paramilitaires dans les exactions récentes.

"Des victimes et des groupes de défense des droits humains ont de façon crédible accusé les soldats des RSF (Forces de soutien rapide, des paramilitaires du général Mohamed Hamdane Daglo, ndlr) et des milices alliées de viols et d'autres formes de violences sexuelles liées au conflit", a dénoncé le porte-parole du département d'Etat, Matthew Miller, dans un communiqué.

"Les atrocités commises aujourd'hui au Darfour-Ouest et dans d'autres zones sont un sinistre rappel des horribles événements qui ont conduit les Etats-Unis à déterminer en 2004 qu'un génocide avait été commis au Darfour", a-t-il poursuivi.

«Massacres»
"De nombreux déplacés arrivant de la capitale ont perdu non seulement tous leurs biens et leur maison, mais aussi des membres de leur famille pendant les combats à Khartoum", raconte Anja Wolz, une coordinatrice de Médecins sans Frontières.

L'organisation a parlé jeudi d'une "augmentation préoccupante" des habitants fuyant la capitale.

Selon l'ONU, l'aide humanitaire est parvenue jusqu'à 1,8 million de personnes, soit une fraction de ceux qui en ont besoin.

Une conférence internationale sur l'aide au Soudan parrainée par Riyad est prévue le 19 juin à Genève.

"Le Darfour se dirige rapidement vers un désastre humanitaire", a alerté jeudi le responsable de l'ONU pour les affaires humanitaires, Martin Griffiths.

"Le monde ne peut permettre que cela se produise. Pas une nouvelle fois", a-t-il déclaré dans un communiqué, alors que cette région a été le théâtre au début des années 2000 d'une guerre qui a fait environ 300.000 morts et plus de 2,5 millions de déplacés.

Le chef de la mission de l'ONU au Soudan, Volker Perthes, avait estimé mardi que les violences au Darfour pourraient constituer des "crimes contre l'humanité".

"Les attaques de grande ampleur contre les civils, basées sur leurs origines ethniques, qui seraient commises par des milices arabes et par des hommes armés en uniformes des FSR, sont très inquiétantes", a-t-il expliqué.

Les avocats du Darfour ont décrit "des massacres et un nettoyage ethnique" à El-Geneina, la capitale du Darfour-Ouest, commis par "des milices transfrontalières soutenues par les FSR".

La guerre y a fait environ 300.000 morts et près de 2,5 millions de déplacés, selon l'ONU. Les Janjawid ont officiellement donné naissance en 2013 aux FSR.


La coalition arabe met en garde contre toute action militaire compromettant la désescalade au Yémen

Des membres yéménites des tribus Sabahiha de Lahj lors d'un rassemblement pour manifester leur soutien au Conseil de transition du Sud (STC) dans la ville portuaire côtière d'Aden, le 14 décembre 2025. (AFP)
Des membres yéménites des tribus Sabahiha de Lahj lors d'un rassemblement pour manifester leur soutien au Conseil de transition du Sud (STC) dans la ville portuaire côtière d'Aden, le 14 décembre 2025. (AFP)
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  • Le porte-parole de la coalition, le général de division Turki Al-Maliki, a indiqué que cet avertissement fait suite à une demande du Conseil présidentiel yéménite pour prendre des mesures urgentes

DUBAÏ : La coalition arabe soutenant le gouvernement yéménite internationalement reconnu a averti samedi que tout mouvement militaire compromettant les efforts de désescalade serait traité immédiatement afin de protéger les civils, a rapporté l’Agence de presse saoudienne.

Le porte-parole de la coalition, le général de division Turki Al-Maliki, a déclaré que cet avertissement fait suite à une demande du Conseil présidentiel yéménite visant à prendre des mesures urgentes pour protéger les civils dans le gouvernorat de Hadramout, face à ce qu’il a qualifié de graves violations humanitaires commises par des groupes affiliés au Conseil de transition du Sud (CTS).

Le communiqué précise que ces mesures s’inscrivent dans le cadre des efforts conjoints et continus de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis pour réduire les tensions, faciliter le retrait des forces, remettre les camps militaires et permettre aux autorités locales d’exercer leurs fonctions.

Al-Maliki a réaffirmé le soutien de la coalition au gouvernement yéménite internationalement reconnu et a appelé toutes les parties à faire preuve de retenue et à privilégier des solutions pacifiques, selon l’agence.

Le CTS a chassé ce mois-ci le gouvernement internationalement reconnu de son siège à Aden, tout en revendiquant un contrôle étendu sur le sud du pays.

L’Arabie saoudite a appelé les forces du CTS à se retirer des zones qu’elles ont prises plus tôt en décembre dans les provinces orientales de Hadramout et d’Al-Mahra.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Les Émirats arabes unis saluent les efforts de l’Arabie saoudite pour soutenir la stabilité au Yémen

Les Émirats arabes unis ont également réaffirmé leur engagement à soutenir toutes les initiatives visant à renforcer la stabilité et le développement au Yémen. (WAM)
Les Émirats arabes unis ont également réaffirmé leur engagement à soutenir toutes les initiatives visant à renforcer la stabilité et le développement au Yémen. (WAM)
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  • Les Émirats arabes unis ont salué le rôle constructif du Royaume dans la promotion des intérêts du peuple yéménite

DUBAÏ : Les Émirats arabes unis ont salué vendredi les efforts de l’Arabie saoudite pour soutenir la sécurité et la stabilité au Yémen, a rapporté l’agence de presse officielle WAM.

Dans un communiqué, les Émirats ont loué le rôle constructif du Royaume dans la promotion des intérêts du peuple yéménite et dans le soutien de leurs aspirations légitimes à la stabilité et à la prospérité.

Les Émirats ont également réaffirmé leur engagement à soutenir toutes les initiatives visant à renforcer la stabilité et le développement au Yémen, en soulignant leur appui aux efforts contribuant à la sécurité et à la prospérité régionales.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le Liban adopte le projet de loi sur le gap financier malgré l’opposition du Hezbollah et des Forces libanaises

Le Premier ministre libanais Nawaf Salam s'exprimant lors d'une conférence de presse après une réunion du Conseil des ministres à Beyrouth, le 26 décembre 2025. (AFP)
Le Premier ministre libanais Nawaf Salam s'exprimant lors d'une conférence de presse après une réunion du Conseil des ministres à Beyrouth, le 26 décembre 2025. (AFP)
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  • Le texte vise à trancher le sort de milliards de dollars de dépôts bloqués et devenus inaccessibles pour les citoyens libanais depuis l’effondrement financier du pays

BEYROUTH : Le Conseil des ministres libanais a approuvé vendredi un projet de loi controversé visant à encadrer la relance financière et à restituer les dépôts bancaires gelés aux citoyens. Cette décision est perçue comme une étape clé dans les réformes économiques longtemps retardées et exigées par le Fonds monétaire international (FMI).

Le texte a été adopté par 13 voix pour et neuf contre, à l’issue de discussions marathon autour du projet de loi dit du « gap financier » ou de récupération des dépôts, bloqué depuis des années après l’éclatement de la crise bancaire en 2019. Les ministres de la Culture et des Affaires étrangères étaient absents de la séance.

La législation vise à déterminer le sort de milliards de dollars de dépôts devenus inaccessibles pour les Libanais durant l’effondrement financier du pays.

Le projet a été rejeté par trois ministres des Forces libanaises, trois ministres du Hezbollah et du mouvement Amal, ainsi que par la ministre de la Jeunesse et des Sports, Nora Bayrakdarian, le ministre des Télécommunications, Charles Al-Hajj, et le ministre de la Justice, Adel Nassar.

Le ministre des Finances, Yassin Jaber, a rompu avec ses alliés du Hezbollah et d’Amal en votant en faveur du texte. Il a justifié sa position par « l’intérêt financier suprême du Liban et ses engagements envers le FMI et la communauté internationale ».

Le projet de loi a suscité une vive colère parmi les déposants, qui rejettent toute tentative de leur faire porter la responsabilité de l’effondrement financier. Il a également provoqué de fortes critiques de l’Association des banques et de plusieurs blocs parlementaires, alimentant les craintes d’une bataille politique intense au Parlement, à l’approche des élections prévues dans six mois.

Le Premier ministre Nawaf Salam a confirmé que le Conseil des ministres avait approuvé le texte et l’avait transmis au Parlement pour débat et amendements avant son adoption définitive. Cherchant à apaiser les inquiétudes de l’opinion publique, il a souligné que la loi prévoit des audits judiciaires et des mécanismes de reddition des comptes.

« Les déposants dont les comptes sont inférieurs à 100 000 dollars seront intégralement remboursés, avec intérêts et sans aucune décote », a déclaré Salam. « Les grands déposants percevront également leurs premiers 100 000 dollars en totalité, le reste étant converti en obligations négociables garanties par les actifs de la Banque centrale, estimés à environ 50 milliards de dollars. »

Il a ajouté que les détenteurs d’obligations recevront un premier versement de 2 % après l’achèvement de la première tranche de remboursements.

La loi comprend également une clause de responsabilité pénale. « Toute personne ayant transféré illégalement des fonds à l’étranger ou bénéficié de profits injustifiés sera sanctionnée par une amende de 30 % », a indiqué Salam.

Il a insisté sur le fait que les réserves d’or du Liban resteront intactes. « Une disposition claire réaffirme la loi de 1986 interdisant la vente ou la mise en gage de l’or sans l’approbation du Parlement », a-t-il déclaré, balayant les spéculations sur une utilisation de ces réserves pour couvrir les pertes financières.

Reconnaissant que la loi n’est pas parfaite, Salam l’a néanmoins qualifiée de « pas équitable vers la restitution des droits ».

« La crédibilité du secteur bancaire a été gravement entamée. Cette loi vise à la restaurer en valorisant les actifs, en recapitalisant les banques et en mettant fin à la dépendance dangereuse du Liban à l’économie du cash », a-t-il expliqué. « Chaque jour de retard érode davantage les droits des citoyens. »

Si l’Association des banques n’a pas publié de réaction immédiate après le vote, elle avait auparavant affirmé, lors des discussions, que la loi détruirait les dépôts restants. Les représentants du secteur estiment que les banques auraient du mal à réunir plus de 20 milliards de dollars pour financer la première tranche de remboursements, accusant l’État de se dédouaner de ses responsabilités tout en accordant de facto une amnistie à des décennies de mauvaise gestion financière et de corruption.

Le sort du texte repose désormais sur le Parlement, où les rivalités politiques à l’approche des élections de 2025 pourraient compliquer ou retarder son adoption.

Le secteur bancaire libanais est au cœur de l’effondrement économique du pays, avec des contrôles informels des capitaux privant les déposants de leurs économies et une confiance en chute libre dans les institutions de l’État. Les donateurs internationaux, dont le FMI, conditionnent toute aide financière à des réformes profondes du secteur. 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com