Macron et Meloni affichent leur volonté de «travailler ensemble» après les turbulences sur l'immigration

Le président français Emmanuel Macron et la Première ministre italienne Giorgia Meloni au palais de l'Élysée à Paris, le 20 juin 2023. (AFP).
Le président français Emmanuel Macron et la Première ministre italienne Giorgia Meloni au palais de l'Élysée à Paris, le 20 juin 2023. (AFP).
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Publié le Mardi 20 juin 2023

Macron et Meloni affichent leur volonté de «travailler ensemble» après les turbulences sur l'immigration

  • Après une brève rencontre informelle à Rome en octobre dans la foulée de la nomination de Mme Meloni, victorieuse aux législatives, le dossier migratoire est venu alimenter les tensions
  • Notamment lorsque l'Italie a refusé en novembre d'accueillir le navire humanitaire Ocean Viking et les 230 migrants à son bord, poussant la France à le laisser accoster tout en dénonçant le comportement «inacceptable» de Rome

PARIS: Emmanuel Macron et Giorgia Meloni ont affiché mardi leur intention de "travailler ensemble" au-delà des "controverses", notamment sur l'épineux dossier de l'immigration qui a jusqu'ici envenimé leurs relations.

Lors de cette première visite à Paris de la cheffe du gouvernement italien, le président français a invoqué "ce rapport si unique qui existe entre l'Italie et la France". "C'est cette amitié qui m'importe en premier lieu", "celle qui permet de faire vivre parfois les controverses, les désaccords mais dans un cadre toujours respectueux parce qu'il s'inscrit dans une histoire plus grande que nous, plus profonde, qui a nourri nos imaginaires, nos artistes, des aventures collectives", a-t-il ajouté face à la presse. Il a plaidé pour un "dialogue franc, ambitieux, exigeant" entre Paris et Rome.

"L'Italie et la France sont deux nations liées, deux nations importantes, centrales, protagonistes en Europe qui ont besoin de dialogue dans un moment comme celui-ci car nos intérêts communs sont très convergents", lui a répondu Giorgia Meloni. "J'ai bon espoir qu'à partir du dialogue d'aujourd'hui, nous allons pouvoir travailler encore mieux et encore plus ensemble".

«Chère Giorgia»

Tout est censé opposer Emmanuel Macron, qui se revendique d'un progressisme franchement pro-européen, et Giorgia Meloni, à la tête d'une coalition ultraconservatrice, elle-même issue d'un parti post-fasciste et qui a épousé par le passé des positions nettement eurosceptiques.

Et de fait, les étincelles n'ont pas tardé.

Après une brève rencontre informelle à Rome en octobre dans la foulée de la nomination de Mme Meloni, victorieuse aux législatives, le dossier migratoire est venu alimenter les tensions.

Notamment lorsque l'Italie a refusé en novembre d'accueillir le navire humanitaire Ocean Viking et les 230 migrants à son bord, poussant la France à le laisser accoster tout en dénonçant le comportement "inacceptable" de Rome.

Ou quand le ministre français de l'Intérieur Gérald Darmanin a suscité ce printemps l'ire transalpine en jugeant Giorgia Meloni "incapable de régler les problèmes migratoires sur lesquels elle a été élue".

Mais en parallèle, les milieux diplomatiques ont oeuvré pour retisser les liens.

Et après plusieurs rencontres en marge de rendez-vous internationaux, la Première ministre italienne a fini par se rendre à Paris où elle était invitée depuis de longs mois -- même si sa venue vise officiellement à défendre la candidature de Rome pour l'Expo 2030.

Les deux dirigeants ont évoqué le dossier migratoire pour montrer qu'une coopération était possible.

"Nous continuons de connaître des drames en Méditerranée", a relevé le chef de l'Etat français. "La coordination et le bon travail entre nos deux pays doit se poursuivre", "il nous faut être en mesure d'organiser plus efficacement l'asile et les migrations en Europe en étant fidèles à nos valeurs", a-t-il ajouté en s'adressant à sa "chère Giorgia".

A ses côtés, Giorgia Meloni a défendu ses positions très dures en la matière, tout en insistant elle aussi sur la nécessité de continuer "à travailler ensemble aussi bien au niveau bilatéral que multilatéral".

"Malgré les différences politiques et idéologiques entre les deux gouvernements, il y a la conscience chez Meloni et chez Macron que la France et l’Italie doivent agir ensemble. Cela correspond aux intérêts des deux pays", relève à l'AFP l'historien Marc Lazar, professeur à Sciences-Po.

«Divergences» sur l'Europe

Selon lui, des "convergences réelles" existent face à la guerre en Ukraine et sur la renégociation du pacte de stabilité budgétaire européen, à l'approche du Conseil européen de fin juin et du sommet de l'Otan prévu les 11 et 12 juillet à Vilnius.

Depuis qu'elle est au pouvoir, Giorgia Meloni s'est de fait montrée très attachée au soutien à Kiev et très mesurée face à Bruxelles.

Le soutien commun à l'Ukraine a d'ailleurs été réaffirmé mardi, au lendemain de l'annonce par Emmanuel Macron du déploiement désormais opérationnel sur le terrain d'un système de missiles sol-air franco-italien SAMP/T.

"On voit bien qu'entre la France et l'Allemagne en ce moment c'est pas folichon", commente pour sa part Jean-Pierre Darnis, professeur à l'université Luiss de Rome. Le duo Meloni-Macron a donc "tout intérêt" à consolider la "convergence" sur le volet économique européen.

D'ici aux élections européennes de juin 2024, "les polémiques ne manqueront pas entre la droite italienne et le parti de Macron", qui ont "de profondes divergences sur l’avenir de l’Europe", ce qui "risque de rejaillir sur la normalisation des relations", prévient toutefois Marc Lazar.


Européennes: Bardella toujours largement en tête, Glucksmann en dynamique, selon une étude

Européennes: Bardella toujours largement en tête, Glucksmann en dynamique, selon une étude
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  • L'écart se réduit entre la liste menée pour les européennes par Raphaël Glucksmann (Place publique-PS) et celle de la majorité présidentielle conduite par Valérie Hayer, les deux listes restant toujours très largement dominées par celle du Rassemblement
  • Derrière ces trois listes, la candidate LFI Manon Aubry enregistre 7% des intentions de vote (stable), l'écologiste Marie Toussaint 6,5% (-2)

PARIS: L'écart se réduit entre la liste menée pour les européennes par Raphaël Glucksmann (Place publique-PS) et celle de la majorité présidentielle conduite par Valérie Hayer, les deux listes restant toujours très largement dominées par celle du Rassemblement national, selon une étude Cevipof-Ipsos-Institut Montaigne-Fondation Jean-Jaurès pour le Monde publiée lundi.

Selon cette nouvelle vague portant sur 10.651 personnes, les intentions de vote le 9 juin pour les européennes placent Jordan Bardella à 32% (+1 par rapport au 11 mars), suivi de Valérie Hayer (Renaissance, Modem, Horizons, UDI) à 17% (-1) puis de Raphaël Glucksmann à 14% (+2,5).

A noter que les électeurs de Jordan Bardella restent les plus sûrs de leur choix (85%) à six semaines du scrutin, alors que 71% seulement sont certains d'aller voter pour la candidate macroniste et 55% pour Raphaël Glucksmann.

Derrière ces trois listes, la candidate LFI Manon Aubry enregistre 7% des intentions de vote (stable), l'écologiste Marie Toussaint 6,5% (-2), comme le candidat LR François-Xavier Bellamy (-0,5) et la candidate d'extrême-droite Marion Maréchal (Reconquête) 5,5% (+0,5).

Il faut dépasser 5% des voix pour envoyer des députés au Parlement européen.

Étude réalisée par internet du 19 au 24 avril auprès de 10.651 personnes constituant un échantillon national représentatif de la population française âgée de 18 ans et + et inscrite sur les listes électorales, selon la méthode des quotas.

La marge d'erreur est de 0,3% à 0,9%, selon les scores.


Finances publiques: le gouvernement sous les tirs croisés des oppositions à l'Assemblée

"Nous tiendrons notre stratégie fondée sur la croissance et le plein emploi, les réformes de structure et la réduction des dépenses publiques", a assuré vendredi le ministre des Finances, Bruno Le Maire, comme il devrait le répéter lundi devant les députés, puis mardi au Sénat. (AFP).
"Nous tiendrons notre stratégie fondée sur la croissance et le plein emploi, les réformes de structure et la réduction des dépenses publiques", a assuré vendredi le ministre des Finances, Bruno Le Maire, comme il devrait le répéter lundi devant les députés, puis mardi au Sénat. (AFP).
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  • "Incompétence", "insincérité", "contournement du Parlement": les critiques fuseront de gauche comme de droite lors d'un "débat d'orientation budgétaire" sans vote
  • A l'approche des élections européennes du 9 juin, les finances publiques sont devenues un angle d'attaque contre la majorité présidentielle, appelée par l'exécutif à mettre en sourdine ses tiraillements internes sur le sujet

PARIS: Epargné pour l'heure par les agences de notation, le gouvernement n'en a pas fini pour autant avec les débats "anxiogènes" sur la dégradation des finances publiques, qui sera la cible lundi des flèches acérées des oppositions à l'Assemblée nationale.

"Incompétence", "insincérité", "contournement du Parlement": les critiques fuseront de gauche comme de droite lors d'un "débat d'orientation budgétaire" sans vote, à partir de 15H00 dans l'hémicycle, après une pause parlementaire de deux semaines.

"A partir du moment où il n'y a aucune sanction de vote, ce sera un peu un couteau sans lame", regrette le président LFI de la commission des Finances, Eric Coquerel. "Mais ça permettra au moins à chacun de donner son positionnement publiquement".

A l'approche des élections européennes du 9 juin, les finances publiques sont devenues un angle d'attaque contre la majorité présidentielle, appelée par l'exécutif à mettre en sourdine ses tiraillements internes sur le sujet, jugés "anxiogènes" pour les Français.

"Nous tiendrons notre stratégie fondée sur la croissance et le plein emploi, les réformes de structure et la réduction des dépenses publiques", a assuré vendredi le ministre des Finances, Bruno Le Maire, comme il devrait le répéter lundi devant les députés, puis mardi au Sénat.

« Leçons de vertu »

Le ministre s'exprimait après l'annonce par Fitch et Moody's de leurs notes inchangées pour la dette française. Des décisions réconfortantes pour le gouvernement, mais qui ne préjugent pas de celle de la plus regardée des agences de notation, S&P, attendue le 31 mai.

Dès février, la révision à la baisse de la croissance attendue en 2024 (de 1,4% à 1%) a conduit le gouvernement à annuler par décret dix milliards d'euros de crédits, dans des domaines allant de l'écologie à l'aide au développement, en passant par l'enseignement supérieur.

Après le dérapage du déficit public attendu (5,1% du PIB au lieu de 4,9%), Bercy a même annoncé la quête de 10 milliards d'économies supplémentaires cette année.

Ces mauvaises nouvelles n'ont pas remis en cause l'objectif gouvernemental d'un retour sous les 3% en 2027, comme le prévoit le "programme de stabilité" présenté mi-avril. Malgré le scepticisme du Haut Conseil des finances publiques face à une trajectoire manquant de "crédibilité".

Le débat lundi "sera utile pour dire ce qu'on en pense, mais la responsabilité aurait commandé un budget rectificatif", dénonce le chef des députés socialistes Boris Vallaud, estimant comme toutes les oppositions que le gouvernement "contourne" le Parlement en corrigeant le budget par décret.

Bruno Le Maire "donne des leçons de vertu financière, mais la situation lui est imputable", tacle M. Vallaud, ciblant des prévisions "irréalistes", des "cadeaux fiscaux jamais financés" ou encore le "siphonnage de la Sécurité sociale".

L'Insoumis Eric Coquerel renchérit: "Le chemin qu'on nous propose est celui qui est en train de mettre à mal la plupart des pays européens: continuer la baisse des dépenses publiques, ne pas toucher aux revenus du capital et s'attaquer à la protection sociale".

LR prêt à la censure ?

A droite, Les Républicains (LR) concentrent leurs griefs sur des dépenses publiques jugées excessives, mais sont eux aussi vent debout contre "l'insincérité budgétaire" du gouvernement.

"Je suis convaincu qu'il y a un plan caché d'augmentation des impôts, qui apparaîtra au lendemain des élections européennes", a dit vendredi dans l'Opinion leur patron Eric Ciotti, agitant à nouveau la menace du dépôt d'une motion de censure dans cette hypothèse.

"Ce sont les LR qui ont permis au gouvernement de faire passer les budgets qu'ils dénoncent" en n'en déposant pas plus tôt, persiffle le député RN Jean-Philippe Tanguy, pour qui la droite redoute une dissolution.

Dans le camp présidentiel, le rapporteur général du budget à l'Assemblée, Jean-René Cazeneuve, martèle que la réduction du déficit "passera par une gestion sérieuse et une maîtrise de la dépense publique".

Le macroniste fait partie des quatre députés chargés par Matignon de réfléchir à une meilleure "taxation des rentes", alors que des voix s'élèvent dans le camp présidentiel pour remettre en cause le dogme de ne pas augmenter les impôts.

Cette mission est "un leurre", balaye Eric Coquerel, convaincu que l'exécutif n'acceptera pas de mettre à contribution les "superprofits" et autres "superdividendes" comme le réclame la gauche.


80 ans après le D-Day, des survivants britanniques continuent de témoigner

Alec Penstone, vétéran du jour J, reçoit un baiser de deux membres des D-Day Darlings, un groupe de chant et de danse sur le thème de la guerre, lors d'un événement visant à lancer les commémorations du 80e anniversaire du débarquement amphibie allié (débarquement du jour J) en France en 1944, dans le centre de Londres, le 26 avril 2024 (Photo, AFP).
Alec Penstone, vétéran du jour J, reçoit un baiser de deux membres des D-Day Darlings, un groupe de chant et de danse sur le thème de la guerre, lors d'un événement visant à lancer les commémorations du 80e anniversaire du débarquement amphibie allié (débarquement du jour J) en France en 1944, dans le centre de Londres, le 26 avril 2024 (Photo, AFP).
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  • Ils jugent très important de continuer à témoigner, et de raconter la guerre aux jeunes générations
  • Transporté en train jusqu'en Pologne avec des dizaines d'autres prisonniers, il est envoyé travailler dans une mine de charbon

LONDRES: Ils portent leurs nombreuses médailles avec fierté mais sans prétention d'être des héros: centenaires ou presque, Donald, Ken et Henry font partie des derniers vétérans britanniques encore en vie à avoir participé au débarquement des Alliés en Normandie en juin 1944.

Ils jugent très important de continuer à témoigner, et de raconter la guerre aux jeunes générations.

Rencontrés par l'AFP à Londres en amont des célébrations du 80e anniversaire du débarquement sur les plages françaises, leurs souvenirs de l'opération militaire qui a contribué à la défaite de l'Allemagne lors de la 2e Guerre mondiale restent précis et vivaces.

Ken Hay, 98 ans, a mis le pied sur Juno Beach à Courseulles-sur-Mer, quelques jours après le 6 juin et les premières vagues de soldats.

"J'aurais dû être effrayé, mais je ne crois pas que nous l'ayons été. Je ne suis pas un héros et je n'essaye pas de me faire passer pour tel, mais cela faisait partie de l'aventure" de faire partie de l'armée, se rappelle-t-il.

Chargée d'avancer vers un poste d'observation à l'intérieur des terres, son unité est prise à revers par des soldats allemands et il est capturé avec quatre autres membres de son régiment.

Transporté en train jusqu'en Pologne avec des dizaines d'autres prisonniers, il est envoyé travailler dans une mine de charbon. Mais l'arrivée des troupes russes pousse les Allemands à évacuer les camps de prisonniers pour revenir plus à l'ouest, les forçant à marcher des centaines de kilomètres.

Ken Hay est finalement libéré par les Américains et rapatrié chez lui en avion "deux jours avant le jour de la Victoire", le 8 mai 1945, date de la capitulation allemande.

Henry Rice, 98 ans également, s'occupait lui des communications à bord du HMS Eastway, chargé de ravitailler les soldats sur les plages de Normandie.

De son envoi en France, il se souvient avoir été "à moitié excité, à moitié hésitant". "Pour un jeune homme, c'était si énorme, (il y avait) tant de bateaux". Mais son regard se voile au souvenir des milliers d'hommes tués sur les plages françaises, dont près de 1.500 Britanniques le premier jour.

"L'image mentale que j'ai des hommes dans l'eau... je n'aime pas penser à ça", dit-il.

«face au danger»

Après avoir participé au débarquement de Normandie, Henry Rice a servi en Méditerranée, en Asie, jusqu'à la capitulation japonaise qui marqua la fin du conflit mondial. "Je me sens chanceux" d'être rentré vivant, dit-il.

"Par rapport aux autres vétérans, particulièrement les soldats qui ont débarqué et qui ont survécu, je me sens +petit+ (en français). Je suis fier d'eux", ajoute-t-il.

S'il a échappé à quelques torpilles ennemies, "je n'étais pas face au danger comme eux", juge-t-il.

Donald Howkins, 103 ans, a lui débarqué deux jours après le D-Day, avec le 90e Middlesex Regiment. Il se souvient de sa peur: "tout bougeait dans la barge, la mer était très forte (...) Mais quand je suis arrivé sur la place, ça allait".

"On faisait ce qu'on avait à faire, et le temps passait vite", ajoute-t-il.

Quand on lui demande ce qu'il ressent en amont du 80e anniversaire de l'évènement, auquel sont attendus de nombreux chefs d'Etat, il répond avec humour: "sacrément trop vieux!".

Il est déjà allé à plusieurs reprises assister à des commémorations, mais ne se rendra pas le 6 juin en Normandie, le voyage devenant trop difficile. Il se déplace désormais en fauteuil roulant.

A l'inverse, Ken ne voulait pas manquer l'évènement, même s'il s'attend à des sentiments "mélangés". "C'est triste de voir les tombes" dans les cimetières militaires, mais "c'est agréable" de partager la "bonne ambiance" avec les Français, surtout les enfants, dont il loue les connaissances sur la 2e Guerre mondiale enseignées dans les écoles.

Comme ses camarades du front, il juge très important de continuer de témoigner, de raconter ce qu'était la guerre, surtout auprès des jeunes générations.

"Je pourrais les prévenir des dangers de la guerre, mais je préfèrerais dire aux chefs d'Etat, arrêtez-ça", avoue aussi Henry. Et ses yeux se voilent de larmes lorsqu'il évoque les "guerres" et les conflits "horribles" qui ont émaillé le monde depuis.