Bribes de réponses du tireur et frustration de la cour au procès du Thalys

Ayoub El Khazzani lors de son audience du 20 Novembre 2020 (Photo, AFP).
Ayoub El Khazzani lors de son audience du 20 Novembre 2020 (Photo, AFP).
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Publié le Jeudi 10 décembre 2020

Bribes de réponses du tireur et frustration de la cour au procès du Thalys

  • La cour d'assises spéciale à Paris espérait mercredi des réponses de la part du tireur du Thalys,  elle n'en a obtenu que des bribes
  • Ayoub El Khazzani est monté en août 2015 à bord du Thalys Amsterdam-Paris armé d'une kalachnikov et de près de 300 munitions, sur ordre d'Abdelhamid Abaaoud

PARIS: Sa radicalisation express, la planification de l'attentat, le rôle d'Abdelhamid Abaaoud... La cour d'assises spéciale à Paris espérait mercredi des réponses de la part du tireur du Thalys,  elle n'en a obtenu que des bribes et n'a pas caché sa frustration.

"Y a pas de doute aujourd'hui, j'ai la certitude qu'Abaaoud m'a menti". Depuis le box, Ayoub El Khazzani, chemise à carreaux, cheveux noirs ramenés en petit chignon, le répète : il veut dire "la vérité".

Très vite pourtant, il exaspère la cour. En août 2015, il est monté à bord du Thalys Amsterdam-Paris armé d'une kalachnikov et de près de 300 munitions, sur ordre d'Abdelhamid Abaaoud, coordinateur de cette attaque déjouée par des passagers et des attentats du 13-Novembre en France. Sa mission: tuer les "soldats Américains" et les membres de la "Commission européenne" qui se trouveraient, selon Abaaoud, à bord du train. 

"Et vous partez, on l'a déjà dit 15 fois, avec un arsenal assez impressionnant pour ne tuer que quelques personnes, et alors que l'Etat islamique privilégie les attentats de masse", rappelle le président Franck Zientara. "Oui... Je ne sais pas", répond Ayoub El Khazzani, 31 ans.

Ce Marocain, résident espagnol, était arrivé en Belgique début 2015, y travaillait avec des Syriens.

"Ils parlaient de leur pays, de leurs proches qui sont morts là-bas. Ca fait mal au coeur", explique l'accusé. En "recherche" à l'époque, il écoute, regarde des vidéos de propagande, voit les "massacres" de civils de l'armée de Bachar al-Assad. Deux mois plus tard, il rejoint l'Etat islamique. "Pour faire quoi ? Humanitaire, combattant ?", demande l'avocat général.

"Je pensais aider les médecins qui aident les gens, peut-être combattre Bachar... tout était mélangé", dit celui qui persiste souvent à parler le français, qu'il maîtrise mal, rendant ses explications encore plus confuses.

Arrivé en Syrie, "deuxième déclencheur", dit-il, il voit une mosquée bombardée. "L'odeur des corps brûlés, la fumée (...) j'avais la haine, comme un feu là", dit-il, la main sous la gorge. Au premier jour du procès, il s'était mis à pleurer en évoquant cet épisode.

Il est repéré, notamment par Abaaoud. "Tu veux te venger ?", lui propose ce dernier. Ayoub El Khazzani accepte, demande à ce qu'on se serve de lui comme "objet". Il est entraîné pendant quelques jours : "Il m'a donné une kalachnikov, il mettait des points sur les murs et je devais tirer dessus".

Comme un poulpe

Une semaine après son arrivée il repart, prend la route des Balkans "sans connaître la destination finale" ni le projet, avec Abaaoud qui va, lui, piloter la cellule jihadiste des attentats de Paris depuis la Belgique.

"Qu'est-ce que vous pouvez nous dire d'Abaaoud ?", demande le président.

- "Il est comme un poulpe, il s'adapte, il sait comment vous parler".

- "C'est un poulpe, il sait parler d'accord, mais, je sais pas, est-ce qu'il était sympathique ?"

- "Comment vous dire, c'était une personnalité, il avait confiance en lui".

"Vous traversez quatre frontières ensemble, ça semble curieux que vous ne posiez pas de questions", s'exaspère le président.

L'avocat général tente à son tour : "Vous êtes celui qui a le plus partagé son intimité en 2015".

"En vrai, il n'y a pas d'intimité, c'est mon chef", corrige Ayoub El Khazzani.

L'interrogeant longuement sur les détails de sa préparation, la cour qui le prie de "mobiliser son intelligence et sa mémoire" n'obtiendra pas non plus les réponses qu'elle attend. "Je ne suis pas un coordinateur, Abaaoud ne discutait pas avec moi", soutient l'accusé, assurant n'avoir été mis au courant du projet d'attentat du Thalys que quelques jours avant sa date. 

"Mensonges, mensonges", dit un avocat sur le banc des parties civiles. Ayoub El Khazzani lui s'excuse une fois encore auprès des victimes, à qui il pense "H24".

En fin d'audience, son avocate Sarah Mauger-Poliak lui fait lire la lettre qu'il a écrite aux passagers du train. "Je veux dire qu'il n'y a pas un jour où je ne pense à pas vous. Rien ne peut justifier de s'en prendre à un autre être humain".

 

 


Macron met en garde contre la mort de l'Europe

Le président français Emmanuel Macron prononce un discours sur l'Europe, devant un slogan qui dit "La fin d'une Europe compliquée" dans un amphithéâtre de la Sorbonne à Paris, le 25 avril 2024 (Photo, AFP).
Le président français Emmanuel Macron prononce un discours sur l'Europe, devant un slogan qui dit "La fin d'une Europe compliquée" dans un amphithéâtre de la Sorbonne à Paris, le 25 avril 2024 (Photo, AFP).
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  • Le président français a évoqué une Europe «dans une situation d'encerclement» face aux grandes puissances régionales
  • Dans un contexte géopolitique alourdi par la guerre en Ukraine, il a appelé l'UE à renforcer encore sa défense au sein de l'Otan

PARIS: "Notre Europe est mortelle, elle peut mourir". Emmanuel Macron a dressé jeudi un portrait alarmiste à un mois et demi d'élections européennes compliquées pour son camp, en exhortant à un sursaut des Vingt-Sept pour bâtir une "Europe puissance" et une défense "crédible".

"Cela dépend uniquement de nos choix mais ces choix sont à faire maintenant" car "à l'horizon de la prochaine décennie, (...) le risque est immense d'être fragilisé, voire relégué", a-t-il asséné devant 500 invités, dont les ambassadeurs des 26 autres Etats membres de l'UE, des étudiants, des chercheurs et le gouvernement au complet.

Le président français a évoqué dans un discours-fleuve une Europe "dans une situation d'encerclement" face aux grandes puissances régionales et a jugé que les valeurs de la "démocratie libérale" étaient "de plus en plus critiquées" et "contestées".

"Le risque, c'est que l'Europe connaisse le décrochage et cela, nous commençons déjà à le voir malgré tous nos efforts", a averti le chef de l'Etat, en plaidant pour une "Europe puissante", qui "se fait respecter", "assure sa sécurité" et reprend "son autonomie stratégique".

Dans un contexte géopolitique alourdi par la guerre en Ukraine, il a annoncé qu'il inviterait les Européens à se doter d'un "concept stratégique" de "défense européenne crédible", en évoquant la possibilité pour elle de se doter d'un bouclier antimissiles.

Il a aussi appelé l'Europe à renforcer son industrie de défense et plaidé pour un "emprunt européen", sujet tabou notamment en Allemagne, pour investir dans l'armement en appliquant le principe de "préférence européenne".

Entrée en campagne

Face aux débats sur l'immigration portés par la droite et l'extrême droite, il a affirmé que l'UE devait "retrouver la maîtrise" de ses "frontières" et "l'assumer", proposant "une structure politique" continentale pour prendre des décisions sur les sujets de migration, de criminalité et de terrorisme.

Sur le plan économique, pour aboutir à une "Europe de prospérité", Emmanuel Macron a défendu un "choc d'investissements commun", en doublant la capacité financière de l'UE pour faire face aux défis de défense, climatique, numérique et industriel.

Devant les pratiques commerciales chinoises et américaines, le président français a également demandé une "révision" de la politique européenne "en défendant nos intérêts".

"Ca ne peut pas marcher si on est les seuls au monde à respecter les règles du commerce telles qu'elles avaient été écrites il y a 15 ans, si les Chinois, les Américains, ne les respectent plus en subventionnant les secteurs critiques", a-t-il déclaré.

Réagissant peu après, le chancelier allemand Olaf Scholz, pas toujours sur la même longueur d'ondes que son homologue, a salué les "bonnes impulsions" du discours pour que "l'Europe reste forte" et promis de continuer à la "faire avancer ensemble".

Le discours d'Emmanuel Macron est largement considéré comme une entrée en campagne du chef de l'Etat français, alors que son camp patine à six semaines des élections européennes du 9 juin, pour lesquelles le Rassemblement national (RN, extrême droite) fait largement course en tête.

Selon un récent sondage Opinionway, la liste de la majorité présidentielle, à 19%, se situait toujours loin derrière celle du RN (29%), mais gardait une nette avance sur celle des socialistes (12%).

"Sur la scène européenne, cela fait sept ans qu'Emmanuel Macron confond ses incantations et ses gesticulations avec des réalisations", a ironisé Marine Le Pen, cheffe de file des députés du RN, sur X, accusant le chef de l'Etat de "brader des pans entiers de souveraineté" nationale.

Le palais présidentiel de l'Elysée a réfuté toute tactique électoraliste et affirmé que M. Macron ambitionnait d'"influer sur l'agenda" de la prochaine Commission européenne à l'issue des élections de juin.

Une légitimité qui sera mesurée à l'aune des réactions européennes. Et aux retours des Français, qui estiment à 57% que le président n'a pas eu "d'influence réelle" sur l'UE depuis 2017, selon un sondage Elabe publié jeudi.

Vendredi, le président prendra aussi la température lors d'un échange avec des étudiants à Strasbourg (Est), où il signera un nouveau contrat triennal pour conforter la stature européenne de la capitale alsacienne qui accueille le parlement européen.

 

 


UE: une majorité de Français doute de l'influence réelle de Macron, selon un sondage

Le président français Emmanuel Macron arrive pour une conférence de presse à la fin du sommet du Conseil européen au siège de l'UE à Bruxelles, le 18 avril 2024. (Photo de Ludovic MARIN / AFP)
Le président français Emmanuel Macron arrive pour une conférence de presse à la fin du sommet du Conseil européen au siège de l'UE à Bruxelles, le 18 avril 2024. (Photo de Ludovic MARIN / AFP)
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  • 66% des Français estiment qu'Emmanuel Macron ne doit pas «s'impliquer davantage dans la campagne» car «ce n'est pas son rôle en tant que président de la République»
  • Pour autant 61% des Français jugent qu'une «défaite nette» de la liste Renaissance serait un «échec personnel» pour le président

PARIS: Une majorité de Français (57%) doute de l'influence réelle d'Emmanuel Macron sur le fonctionnement et les décisions prises par l'Union européenne depuis 2017, selon un sondage Elabe publié jeudi pour BFMTV.

Alors qu'Emmanuel Macron va mettre en avant son bilan européen lors d'un discours jeudi matin à la Sorbonne, seuls 42% des Français estiment que le chef de l'État a eu "une influence réelle sur le fonctionnement et les décisions prises par l’Union européenne" depuis 2017.

L'électorat d’Emmanuel Macron porte un regard très positif sur son rôle (70%), alors que la majorité des électeurs de gauche (56%) et d'extrême droite (68%) sont plutôt négatifs.

A un mois et demi des européennes, 66% des Français estiment qu'Emmanuel Macron ne doit pas "s'impliquer davantage dans la campagne" car "ce n'est pas son rôle en tant que président de la République".

Pour autant 61% des Français jugent qu'une "défaite nette" de la liste Renaissance serait un "échec personnel" pour le président.

En cas de large défaite du camp présidentiel, une majorité (61%) souhaite qu'Emmanuel Macron "change significativement d'orientation politique", une opinion partagée par 43% des électeurs du président au premier tour de l'élection présidentielle en 2022.

Pour autant, seule une minorité de Français (46% contre 54%) réclame une dissolution de l’Assemblée nationale et l'organisation d'élections législatives anticipées. Encore moins (39% contre 61%) souhaitent un changement de Premier ministre.

Si 58% des sondés déclarent tenir compte avant tout d'enjeux de politique européenne dans leur décision de vote, 41% concèdent qu'ils feront leur choix avant tout sur des enjeux nationaux, surtout parmi les électeurs RN (61%).

Ce sondage a été réalisé par internet du 23 au 24 avril à partir d'un échantillon de 1.001 personnes, représentatif des résidents de France métropolitaine âgés de 18 ans et plus. Selon les résultats, la marge d'erreur est comprise entre +/- 1,4 point et +/-3,1 points.


Evénements climatiques extrêmes: la Croix-Rouge souhaite un sac d'urgence par Français

Cette photographie prise le 5 avril 2024 montre une enseigne de pharmacie affichant une température de 31 degrés Celsius à Bordeaux, dans le sud-ouest de la France. (AFP)
Cette photographie prise le 5 avril 2024 montre une enseigne de pharmacie affichant une température de 31 degrés Celsius à Bordeaux, dans le sud-ouest de la France. (AFP)
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  • Le dérèglement climatique fait déjà partie du quotidien des Français mais ils ne sont pas prêts y répondre, estime une étude de la Croix-Rouge
  • «75% (des Français) ne se sentent pas préparés face aux inondations, 73% face aux incendies de forêt, 59% face à la canicule», selon un sondage OpinionWay

PARIS: Un "sac d’urgence" pour chaque Français en cas d’évacuation face aux événements climatiques extrêmes: c’est l’une des préconisations de la Croix-Rouge française dans un rapport sur la résilience de la société française, qui fait état d'un manque de préparation.

Canicule, sécheresse, incendies de forêt, inondations: le dérèglement climatique fait déjà partie du quotidien des Français mais ils ne sont pas prêts y répondre, estime une étude de la Croix-Rouge, en collaboration avec le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Crédoc), publiée jeudi.

"75% (des Français) ne se sentent pas préparés face aux inondations, 73% face aux incendies de forêt, 59% face à la canicule", selon un sondage OpinionWay pour la Croix-Rouge française.

"La préparation face aux crises est l'affaire de tous. Elle concerne bien entendu les pouvoirs publics, mais aussi les acteurs associatifs et privés, ainsi que les citoyens", déclare à l'AFP Philippe Da Costa, président de la Croix-Rouge française.

Pour affronter "l’inévitable", l’association a dix recommandations. Dont la constitution du "Catakit", un sac d'urgence par personne, prêt en cas d'évacuation et comprenant par exemple de la nourriture non périssable, de l'eau, une trousse de secours, des vêtements et une lampe torche, pour attendre l'arrivée de l'aide.

"Seuls 11% des Français disposent d’un sac d’urgence prêt, et moins de la moitié connaît les objets indispensables qu’il faut y glisser", détaille le sondage OpinionWay.

Autre recommandation: la formation aux gestes et aux comportements qui sauvent. "On estime aujourd’hui à seulement 40% le nombre de Français ayant récemment suivi une formation aux gestes qui sauvent, contre 95% Norvège ou 80% en Allemagne", note le rapport.

Or, rappelle la Croix-Rouge, "si les individus sont informés et formés, l’impact des événements climatiques extrêmes sur les populations sera moindre et les dégâts matériels réduits".

L'association suggère que chaque Français ait a minima connaissance des réflexes vitaux: "savoir identifier les alertes sonores, avoir les bons comportements en cas de catastrophes" en plus de la maîtrise des gestes qui sauvent.

"Les événements climatiques extrêmes se manifestent de manière plus fréquente, plus intense, plus longue, et plus étendue géographiquement, rappelle Philippe Da Costa. "Tous les territoires de l'Hexagone et d’Outre-mer sont concernés".

Pour la Croix-Rouge, "il n’y a pas de fatalité". "Se préparer pour savoir comment agir avant les crises et comment réagir pendant les crises" pourra limiter l'impact des évènements climatiques extrêmes sur les populations.