La réduction du gaspillage de nourriture au Moyen-Orient persistera-t-elle au-delà de la pandémie de coronavirus ?

Le problème du gaspillage de nourriture se pose à l'échelle mondiale. (AFP)
Le problème du gaspillage de nourriture se pose à l'échelle mondiale. (AFP)
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Publié le Jeudi 10 décembre 2020

La réduction du gaspillage de nourriture au Moyen-Orient persistera-t-elle au-delà de la pandémie de coronavirus ?

  • La réduction du gaspillage de nourriture laisse présager un avenir prometteur pour une région connue pour sa surconsommation et sa dépendance excessive à l'égard des importations
  • Les agences des Nations unies estiment qu'environ un tiers de la nourriture dans le monde est gaspillé, ce qui représente environ 1,43 milliard de tonnes chaque année

DUBAÏ, LONDRES - La pandémie de Covid-19 a certes constitué un désastre pour le secteur de l'hôtellerie et de la restauration. On a ainsi vu des restaurants, des bars et des cafés fermer pendant des mois, durant lesquels leurs profits se sont évaporés et beaucoup d'entre eux ont définitivement fermé leurs portes.

Cependant, si le nuage de la pandémie présente quelques points positifs, c'est notamment sur le plan de la réduction substantielle du gaspillage alimentaire et l'adoption d'une approche plus consciencieuse de la consommation.

À travers le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord, les signes sont prometteurs, du moins pour le moment. Une enquête menée cette année auprès de 284 personnes en Tunisie par le Centre national pour les informations biotechnologiques (NCBI), basé aux États-Unis, montre que 85 % des répondants ne jettent pas les restes de nourriture, tandis qu'une majorité d'entre eux affirment avoir adopté une stratégie pour conserver, stocker et consommer les restes.

« La prévention des déchets alimentaires serait probablement plus influencée par le contexte socio-économique du verrouillage imposé par la Covid-19, que par le souci de préserver l'environnement. Parmi ces motifs figurent le manque de nourriture, les restrictions sur les déplacements ou la suppression de revenus », a révélé le Centre national pour les informations biotechnologiques (NCBI) dans son étude.

Ce n'est pas un secret que les pays du CCG figurent parmi les pays qui produisent le plus de déchets par habitant dans le monde. Cependant, le volume de déchets alimentaires a diminué aux EAU en 2020, une fois que les plus grands gaspilleurs de nourriture ont fermé leurs cuisines, comme les hôtels par exemple. De même, les ménages ont transformé leurs habitudes d'achat, en achetant uniquement ce dont ils ont besoin et en économisant ce qu'ils ne peuvent pas entièrement consommer.

« Au cours de la période de verrouillage, beaucoup d'entre nous sont devenus autosuffisants. Nous avons réexaminé la valeur de notre confort qui nous semblait normalement acquis », explique Ivano Iannelli, directeur général du groupe de réflexion sur l'économie verte Dubai Carbon.

Certains employeurs ont choisi de baisser les salaires pour surmonter la tempête économique. Cette mesure a contraint les familles à réduire leur consommation quotidienne en cuisinant en plus grandes quantités et en stockant les restes.

Pour leur part, les détaillants alimentaires de la région du CCG résistent plutôt bien à la pandémie, avec de plus en plus de clients qui commandent à domicile les produits alimentaires, selon un rapport publié en 2020 par la société américaine de renseignements commerciaux Altios International Inc.

Par ailleurs, les consommateurs se sont mis à acheter davantage d'articles essentiels en vrac pour éviter de se rendre régulièrement dans les magasins, selon les données. « Aux EAU, la catégorie des snacks continue à augmenter et on prévoit qu'elle connaîtra une forte croissance car les consommateurs restent cloîtrés chez eux pendant la pandémie de Covid-19 », indique le rapport.

Deux résidentes des EAU interrogées par Arab News sont un exemple de la popularité du marché numérique. May Adel, responsable de comptes de commerce électronique, affirme qu'elle s'est complètement tournée vers les achats d'épicerie en ligne depuis le début de la pandémie, dans la mesure où cette méthode lui semble plus sûre et plus pratique.

Zaheda Muntazir, spécialiste en marketing des médias sociaux, raconte qu’elle a  « commencé à acheter plus souvent en ligne, notamment pour la livraison des produits d'épicerie ; c'est plus facile, surtout en cette période critique ».

Évidemment, le monde concret de la consommation est plus complexe. Preeti Bisht, spécialiste de la gestion des déchets organiques et des emballages alimentaires compostables, affirme que nombre de personnes ont repris leurs anciennes habitudes d'achat après la levée et l'allègement des mesures de confinement. Néanmoins, en raison du climat général d'insécurité financière, les clients semblent être beaucoup plus conscients quant à leurs dépenses mensuelles.

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En Arabie Saoudite, environ 33 % des aliments sont gaspillés. (AFP)

« La plupart des gens achètent des produits d'épicerie une fois par semaine. Ils font la liste des courses avant de se rendre au supermarché pour éviter d'acheter des produits non désirés », explique-t-elle à Arab News.

En outre, en raison de la distanciation sociale, les réunions familiales sont devenues moins fréquentes cette année. Ceci a permis de réduire le gaspillage que représente la préparation de grandes quantités de nourriture pendant les vacances. « On estime que durant le Ramadan, le gaspillage de nourriture est deux fois supérieur à la normale », indique Mme Bisht.

« Selon des estimations prudentes, 15 à 25 % de tous les produits alimentaires achetés ou préparés pendant le Ramadan se retrouvent dans les poubelles avant même d'être utilisés ou consommés ».

En Arabie Saoudite, environ 33 % de la nourriture est gaspillée. Ce gaspillage coûte au pays 10,6 milliards de dollars par an, selon une étude menée par la Saudi Grains Organization.

« À ma connaissance, le Royaume enregistre le taux de gaspillage alimentaire le plus élevé de la région du Moyen-Orient. Il génère en moyenne 427 kg de déchets alimentaires par habitant et par an », précise Mme Bisht.

Il est évident que le problème du gaspillage alimentaire se pose à l'échelle mondiale. L'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) estime qu'environ un tiers de la nourriture dans le monde est gaspillée, ce qui équivaut à environ 1,43 milliard de tonnes chaque année.

Un rapport publié en 2020 par Deloitte, le réseau de services professionnels, présente les mêmes conclusions. Non seulement il indique que 33 % des aliments produits dans le monde sont gaspillés, mais il prévoit que ce chiffre augmentera au cours de la pandémie.

« (Cela) est dû aux restaurateurs qui doivent se débarrasser des produits alimentaires périmés, aux entreprises de production de denrées alimentaires qui sont obligées de réorienter leurs activités des produits achetés hors foyer vers les produits de détail et aux consommateurs qui stockent (inutilement) les denrées alimentaires », indique le rapport.

Cette année, la municipalité de Dubaï a précisé que les déchets alimentaires mondiaux s'élèvent à environ 1 000 milliards de dollars par an, et que leur élimination coûte environ 410 milliards de dollars par an. Pour ce qui est des habitants des Émirats arabes unis, ils achètent des quantités de nourriture « alarmantes » qui dépassent largement leurs besoins.

M. Iannelli, du groupe Dubai Carbon, affirme que la réduction des déchets alimentaires est avantageuse en « amont et en aval ». Moins de déchets entraîne au final une baisse de la production, ce qui se traduit par la consommation de moins de ressources comme l'eau, l'énergie et le transport, avec pour résultat une réduction des émissions de carbone.

On ne peut pas non plus passer outre les dimensions morales et éthiques de cette problématique, dans la mesure où près d'un milliard de personnes dans le monde souffrent de la famine. « Si l’on parvient à épargner le quart de la nourriture gaspillée, cela suffira à nourrir environ 870 millions de personnes affamées dans le monde », précise la municipalité de Dubaï.

Au Yémen, plus de 20 millions de personnes souffrent d'insécurité alimentaire et 13 millions dépendent de l'aide apportée par le Programme alimentaire mondial (PAM) pour subvenir à leurs besoins quotidiens, selon un rapport du PAM publié en 2020. « Trois millions de personnes de plus risquent de souffrir d'une faim plus accrue en raison du coronavirus qui balaie le Yémen sans être contrôlé », note le rapport.

Si la livraison de nourriture fait partie d'une consommation plus frugale, elle ne permet pas d'éviter totalement le gaspillage de nourriture. Les repas mal manipulés ou retardés peuvent être rejetés et finir à la poubelle. Les appels bidon qui passent de fausses commandes peuvent également générer du gaspillage, selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO).

Les entreprises sont elles aussi responsables du gaspillage alimentaire en proposant des offres spéciales, explique Ryan Ingram, fondateur de TerraLoop Food Waste Consulting, basé aux Émirats arabes unis.

« Les magasins en ligne qui proposent des offres multiples - une portion gratuite pour tout achat, des portions plus grandes, etc. - favorisent le sur-achat et donc le gaspillage », explique-t-il à Arab News.

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En raison de la propagation du coronavirus, les consommateurs achètent plus d'articles essentiels en vrac pour éviter de se rendre régulièrement dans les magasins. (AFP)

Les restes finissent généralement à la poubelle, car les plats à emporter ont souvent une durée de conservation plus courte que les plats cuisinés à la maison, explique M. Ingram.

De toute évidence, il faudra du temps pour que les habitudes de consommation au Moyen-Orient changent. En attendant, les gouvernements, les organisations internationales et les figures publiques influentes peuvent y remédier.

Le problème de la réduction du gaspillage alimentaire est mis en évidence dans les Objectifs de développement durable (SDG) des Nations unies ; les objectifs 2 et 12 demandent respectivement que la faim soit éliminée, que le gaspillage alimentaire soit réduit de moitié et que les pertes de nourriture soient réduites d'ici 2030.

« La perte et le gaspillage de nourriture constituent un scandale éthique. Dans notre monde qui dispose de nourriture suffisante pour nourrir tout le monde et tous les pays, 690 millions de personnes souffrent encore de la faim et 3 milliards ne peuvent pas se payer une alimentation saine », a déclaré António Guterres, secrétaire général des Nations unies, dans un message délivré le 19 septembre, à l'occasion de la première Journée internationale de Sensibilisation aux pertes et gaspillages de nourriture.

Le Comité national pour la réduction du gaspillage et des pertes de nourriture des EAU a mis en place des initiatives destinées à réduire le taux de gaspillage de nourriture de 15 % d'ici la fin 2021, selon un rapport de l'agence de presse économique Zawya.

« Nous avons l'habitude de consommer avec excès et nous devons contrôler cette tendance », a déclaré le prince héritier d'Abou Dhabi, cheikh Mohammed ben Zayed, au cours d'un majlis du ramadan en ligne tenu en mai. « Si cet excès ou ces dépenses excessives servent une bonne cause, comme la charité, nous y sommes favorables. Mais trop dépenser sans raison est une mauvaise habitude ».

Avec un peu de chance, les vaccinations collectives devraient mettre fin à la pandémie de coronavirus vers le milieu de l'année 2021 en permettant ainsi au secteur de l'hôtellerie et de la restauration de prospérer à nouveau. Toutefois, les experts estiment que le passage des magasins traditionnels, sous l’effet de la pandémie, au commerce de détail en ligne devrait se poursuivre. Seul le temps déterminera si cette tendance débouchera à terme sur une culture de consommation consciencieuse des aliments.


L'UE condamne les frappes israéliennes au Liban, exige le respect du cessez-le-feu

Un soldat de l'armée libanaise discute avec un ouvrier alors qu'il déblaye les décombres d'un site visé pendant la nuit par une frappe aérienne israélienne dans le village d'Et Taybeh, dans le sud du Liban. (AFP)
Un soldat de l'armée libanaise discute avec un ouvrier alors qu'il déblaye les décombres d'un site visé pendant la nuit par une frappe aérienne israélienne dans le village d'Et Taybeh, dans le sud du Liban. (AFP)
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  • L’Union européenne condamne les frappes israéliennes au sud du Liban et appelle Israël à respecter la résolution 1701 ainsi que le cessez-le-feu signé avec le Hezbollah en novembre 2024
  • L’UE exhorte toutes les parties libanaises, notamment le Hezbollah, à éviter toute escalade et à préserver les progrès réalisés vers la stabilité régionale

BRUXELLES: L'Union européenne a condamné les récentes frappes israéliennes sur le sud du Liban et appelé à respecter le cessez-le-feu conclu en novembre 2024 avec le Hezbollah, dans un communiqué publié samedi par sa diplomatie.

"L'UE appelle Israël à mettre fin à toutes les actions qui violent la résolution 1701 et l'accord de cessez-le-feu conclu il y a un an, en novembre 2024", souligne Anouar El Anouni, porte-parole de l'UE pour les Affaires étrangères.

"Dans le même temps, nous exhortons tous les acteurs libanais, et en particulier le Hezbollah, à s'abstenir de toute mesure ou réaction susceptible d'aggraver encore la situation. Toutes les parties doivent s'attacher à préserver le cessez-le-feu et les progrès accomplis jusqu'à présent", insiste le porte-parole.

De nouvelles frappes ont été menées jeudi sur le sud du Liban par Israël, qui a dit viser des cibles du mouvement pro-iranien Hezbollah, accusé de vouloir se réarmer.

L'armée israélienne avait appelé auparavant des habitants de quatre villages à évacuer des bâtiments en prévenant qu'elle allait frapper des infrastructures militaires du mouvement libanais.

L'armée libanaise a elle estimé que les raids israéliens visaient à "empêcher l'achèvement" de son déploiement dans cette région, conformément à l'accord de cessez-le-feu qui avait mis fin il y a près d'un an à la guerre entre le Hezbollah et Israël.

Ces frappes israéliennes ont déjà été condamnées par le président libanais Joseph Aoun et par l'Iran, qui a dénoncé vendredi des "attaques sauvages" et appelé la communauté internationale à réagir.


Le Soudan au bord du gouffre, selon un haut responsable de l’ONU

Le conseiller spécial des Nations unies pour la prévention du génocide a déclaré vendredi que le Soudan pourrait être proche d'un point de basculement vers des atrocités, alors que les informations faisant état de meurtres et d'attaques généralisés contre des civils à El-Fasher se multiplient. (AFP)
Le conseiller spécial des Nations unies pour la prévention du génocide a déclaré vendredi que le Soudan pourrait être proche d'un point de basculement vers des atrocités, alors que les informations faisant état de meurtres et d'attaques généralisés contre des civils à El-Fasher se multiplient. (AFP)
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  • Des attaques directes contre les civils” soulignent la nécessité d’une action urgente, alerte Chaloka Beyani
  • L’ONU met en garde contre l’aggravation de la situation au Darfour-Nord, où des centaines de milliers de personnes font face à des pénuries aiguës de nourriture, d’eau et de soins médicaux

NEW YORK : Le conseiller spécial de l’ONU pour la prévention du génocide a déclaré vendredi que le Soudan pourrait être sur le point de basculer dans des atrocités massives, alors que se multiplient les rapports faisant état de meurtres et d’attaques contre des civils à El-Fasher.

Mettant en garde contre le fait qu’“un seuil est sur le point d’être franchi”, Chaloka Beyani a affirmé que “lorsque notre bureau tire la sonnette d’alarme, c’est que la situation dépasse largement les violations ordinaires des droits humains ou du droit humanitaire international.”

Il a ajouté que “l’ampleur des atrocités montre qu’une action précoce doit être engagée.”

Beyani a dénoncé de “graves violations massives du droit international des droits de l’homme” et de “nouvelles attaques directes contre les civils” perpétrées par les belligérants au Darfour.

Des rapports et vidéos, apparus fin octobre, montrent des atrocités présumées commises par les Forces de soutien rapide (RSF) après leur prise de contrôle d’El-Fasher sur les troupes gouvernementales, mettant fin à un siège qui durait depuis plus de 500 jours.

Le coordinateur des secours d’urgence de l’ONU, Tom Fletcher, a récemment déclaré devant le Conseil de sécurité que “l’horreur se poursuit” au Darfour, avertissant que les civils restaient piégés dans une spirale de violences généralisées.

Le bureau de Beyani a indiqué que plusieurs indicateurs de risque d’atrocités étaient désormais présents au Soudan, tout en rappelant que seule une cour internationale pourrait déterminer si un génocide avait été commis.

La Cour pénale internationale (CPI) a également fait part de sa “profonde inquiétude” cette semaine, précisant qu’elle recueillait des éléments de preuve concernant des massacres, viols et autres atrocités présumés à El-Fasher.

Parallèlement, plusieurs sources indiquent que les RSF ont accepté un “cessez-le-feu humanitaire” proposé par les États-Unis, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis.

L’ONU a par ailleurs averti que les conditions humanitaires continuaient de se détériorer au Darfour-Nord, où des centaines de milliers de déplacés d’El-Fasher souffrent de pénuries extrêmes de nourriture, d’eau et de soins médicaux.

Les agences humanitaires installent de nouveaux camps à Tawila et dans d’autres zones voisines, mais plus de 650 000 personnes restent dans un besoin urgent d’aide.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le Conseil de sécurité de l’ONU lève les sanctions contre le président syrien Ahmad al-Chareh

Le président syrien Ahmed al-Chareh rend visite au secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres (hors champ) lors de l'Assemblée générale au siège des Nations unies à New York, le 24 septembre 2025. (AFP)
Le président syrien Ahmed al-Chareh rend visite au secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres (hors champ) lors de l'Assemblée générale au siège des Nations unies à New York, le 24 septembre 2025. (AFP)
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  • Résolution présentée par les États-Unis, qui retirent également de la liste le ministre de l’Intérieur Anas Hasan Khattab, adoptée avec 14 voix pour, aucune contre ; la Chine s’abstient
  • L’envoyé américain à l’ONU, Mike Waltz, déclare que le Conseil envoie « un signal politique fort reconnaissant que la Syrie entre dans une nouvelle ère » après la chute du régime Assad en décembre dernier

NEW YORK: Le Conseil de sécurité des Nations unies a voté jeudi la levée des sanctions visant Ahmad al-Chareh, retirant ainsi le président syrien de la Liste des sanctions Daech et Al-Qaïda, dans une décision largement considérée comme un signe de reconnaissance internationale du nouvel ordre politique post-Assad en Syrie.

La résolution 2729, déposée par les États-Unis, a été adoptée par 14 voix pour, aucune contre, et une abstention, celle de la Chine. Elle retire également le ministre syrien de l’Intérieur, Anas Hasan Khattab, auparavant désigné dans le cadre du même régime de sanctions.

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations unies, le Conseil a déclaré jeudi que les deux responsables ne sont plus soumis aux gels d’avoirs ni aux interdictions de voyager imposés par les précédentes mesures de lutte contre le terrorisme.

Al-Chareh est arrivé jeudi à Belém, au Brésil, pour la Conférence des Nations unies sur le changement climatique de 2025 (COP 30), et doit rencontrer le président américain Donald Trump à la Maison-Blanche à Washington lundi.

Al-Chareh a dirigé la coalition Hayat Tahrir Al-Sham lors de l’offensive de décembre 2024 qui a renversé le régime Assad, après quoi il est devenu le dirigeant de facto de la Syrie.

Washington exhortait depuis plusieurs mois les quinze membres du Conseil de sécurité à assouplir les sanctions visant la Syrie et les responsables de son nouveau gouvernement.

Le représentant permanent des États-Unis auprès de l’ONU, Mike Waltz, a déclaré qu’en adoptant la résolution, le Conseil envoyait « un signal politique fort reconnaissant que la Syrie est entrée dans une nouvelle ère depuis que Assad et ses associés ont été renversés en décembre 2024 ».

Il a ajouté : « Il existe aujourd’hui un nouveau gouvernement syrien, dirigé par le président Ahmad al-Chareh, qui travaille dur pour remplir ses engagements en matière de lutte contre le terrorisme et les stupéfiants, d’élimination de tout reste d’armes chimiques, et de promotion de la sécurité et de la stabilité régionales, ainsi que d’un processus politique inclusif, conduit et possédé par les Syriens eux-mêmes.

« Comme le président Trump l’a précédemment indiqué, la Syrie a désormais sa chance de grandeur. »

En rendant sa décision, le Conseil de sécurité a rappelé une série de résolutions précédentes visant Daech, Al-Qaïda et les groupes qui leur sont affiliés, et a réaffirmé son « engagement fort en faveur de la souveraineté, de l’indépendance, de l’intégrité territoriale et de l’unité nationale de la République arabe syrienne ».

Le texte de la résolution, consulté par Arab News, souligne que le retrait des responsables syriens de la liste est conforme aux efforts visant à promouvoir « la reconstruction à long terme, la stabilité et le développement économique » du pays, tout en maintenant l’intégrité du cadre mondial des sanctions antiterroristes.

La résolution salue l’engagement de la République arabe syrienne à garantir « un accès humanitaire complet, sûr, rapide et sans entrave » conformément au droit humanitaire international ; à lutter contre le terrorisme, y compris les combattants terroristes étrangers, ainsi que les individus, groupes, entreprises et entités affiliés à Daech ou Al-Qaïda ; à protéger les droits humains et à assurer la sécurité de tous les Syriens, quelle que soit leur appartenance ethnique ou religieuse ; à poursuivre les efforts de lutte contre les stupéfiants ; à promouvoir la justice transitionnelle ; à œuvrer pour la non-prolifération et l’élimination des restes d’armes chimiques ; à renforcer la sécurité et la stabilité régionales ; et à mener un processus politique inclusif, dirigé et possédé par les Syriens eux-mêmes.

Le Conseil a exprimé son attente que les autorités syriennes respectent ces engagements et contribuent à la stabilité régionale.

Al-Chareh avait été sanctionné par l’ONU en mai 2014, lorsque Hayat Tahrir Al-Sham, alors affiliée à Al-Qaïda, avait été ajoutée à la Liste des sanctions Daech et Al-Qaïda. Cette désignation imposait une interdiction de voyager et un gel des avoirs qui devaient rester en vigueur pendant plus d’une décennie.

Le vote de jeudi au Conseil de sécurité fait suite à la décision de Washington, en mai, de lever la plupart des sanctions américaines contre la Syrie. Ces mesures, instaurées en 1979 et considérablement élargies après le déclenchement de la guerre civile syrienne en 2011, limitaient le commerce, l’investissement et les exportations d’énergie. Bien que la majorité de ces restrictions aient été levées, certaines dispositions du Congrès restent en place dans l’attente d’un examen ultérieur.

En retirant officiellement Ahmad al-Chareh de la liste, la résolution du Conseil de sécurité est considérée comme un tournant dans l’engagement international envers les nouvelles autorités syriennes.

Des diplomates ont décrit cette décision à la fois comme une reconnaissance pragmatique des nouvelles réalités sur le terrain et comme une incitation à poursuivre la coopération en matière d’accès humanitaire, de lutte contre le terrorisme et de réforme politique.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com