Au Yémen, la dévaluation atteint un niveau record, les prix de la nourriture flambent

Un agent de change détient des liasses de monnaie yéménite dans un bureau de change à Sanaa, au Yémen. (Reuters/Fichier)
Un agent de change détient des liasses de monnaie yéménite dans un bureau de change à Sanaa, au Yémen. (Reuters/Fichier)
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Publié le Jeudi 05 novembre 2020

Au Yémen, la dévaluation atteint un niveau record, les prix de la nourriture flambent

  • Les tentatives de stabilisation du riyal par la Banque centrale d’Aden n’ont pas réussi à stopper la chute du riyal par rapport au dollar et à affaiblir le système de hawala
  • «C'est comme si on assistait à un match entre les deux Banques centrales. Chacune essaie de mettre les activités financières du pays sous sa coupe», a affirmé le responsable d’une société de change dans la ville d’Al-Mukalla

AL-MUKALLA : La monnaie yéménite a chuté à un niveau record par rapport au dollar américain, malgré les nouvelles mesures prises par la Banque centrale du pays pour reprendre le contrôle du système de change chaotique dans le pays.

Le taux de change a plongé de 800 ces dernières semaines, oscillant autour de 840 riyals pour un dollar tôt mercredi.

Pour tenter de stabiliser la monnaie, la Banque centrale basée à Aden a fermé des sociétés de change sans licence, interdit le réseau de transfert interne entre les sociétés de change – connu sous le nom de « hawala » – et a fourni des dollars aux importateurs de pétrole.

Lors d’une réunion qui s’est tenue avec des représentants des bureaux de change locaux le mois dernier, les responsables de la Banque centrale ont proposé de mettre en place une méthode officielle de transfert d’argent sous sa supervision afin de remplacer le système de hawala.

Les mesures de la Banque centrale ont aidé le riyal à passer de 850 en septembre à 780 le même mois avant qu’il chute à nouveau face au dollar quasiment au même niveau mercredi.

Malgré les menaces répétées de la Banque de punir les sociétés de change locales qui n’ont pas respecté les mesures, de nombreuses entreprises ont continué à utiliser le système hawala, transférant des millions de dollars et de riyals saoudiens à l’intérieur du pays, en contradiction avec les mesures prises par la Banque centrale, ont souligné des responsables d’entreprises locales à Arab News.

Alors que les rebelles houthis ont imposé un taux de change fixe aux entreprises locales sur leur territoire et ont fait surveiller les transactions quotidiennes par des superviseurs, la Banque centrale d'Aden a largement échoué à appliquer les politiques monétaires qu’elle avait mises au point.

Une économie dans un état alarmant

« Personne n'a adhéré aux mesures », a expliqué à Arab News un responsable d'une société de change dans la ville portuaire d'Al-Mukalla. Le responsable, qui a préféré l’anonymat, a déclaré que les dernières mesures soulignaient la concurrence croissante qui existait entre la Banque centrale d’Aden et la Banque centrale contrôlée par les Houthis à Sanaa. « C'est comme si on assistait à un match entre les deux Banques centrales. Chacun essaie de mettre les activités financières du pays sous sa coupe », a affirmé le responsable.

En plus du conflit qui fait rage au Yémen, les économistes affirment que les raisons de la chute de la monnaie sont multiples: impression de milliards de nouveaux billets de riyals au cours des quatre dernières années, baisse des transferts financiers de l’étranger et des revenus pétroliers et gaziers, ou encore mauvaise gestion des importants dépôts saoudiens faits à la Banque centrale. 

Pour l’économiste yéménite Ali Bawazer, la récente chute du riyal démontre que la Banque centrale a perdu le contrôle du marché des changes. « La spéculation des agents de change a conduit à la chute du riyal et les appels des Banques centrales n’ont rien pu faire », a-t-il déploré. 

Ali Bawazer a déclaré que la Banque centrale devrait demander aux nouvelles compagnies de déposer 1 million de dollars au lieu des 500 000 dollars actuels avant qu'une licence ne soit délivrée. Les agents de change ont cependant décliné toute responsabilité dans la chute du riyal, exigeant que la Banque centrale et le gouvernement resserrent leur contrôle sur le marché.

Subhi Baghafar, porte-parole de l’association des agents de change à Aden, a rappelé que le riyal s'était stabilisé en septembre après que les sociétés de change locales ont injecté des millions de dollars dans la Banque centrale à court de liquidités. « Nous avons cessé tout achat et vente de devises étrangères et sommes mis en lien avec la Banque centrale pour les consultations d'importation de pétrole », a-t-il affirmé à Arab News.

« La Banque centrale devrait injecter une quantité adéquate de devises étrangères sur le marché pour atteindre un réel équilibre entre l'offre et la demande. Il devrait rouvrir tous les fonds externes aux importateurs », a-t-il déclaré.

Baisse des salaires

La valeur fluctuante du riyal au cours des cinq dernières années a fait grimper le coût des denrées alimentaires de base, du carburant et du loyer, obligeant de nombreux Yéménites à accepter plus d'un emploi pour arriver à boucler leurs fins de mois.

Les fonctionnaires qui se vantaient autrefois de leurs revenus se battent maintenant pour se maintenir à flot. Les salaires ont en effet perdu près du tiers de leur valeur, à la suite de la dévaluation du riyal et de l’arrêt des primes annuelles.

Abu Abdallah, un responsable gouvernemental d'Al-Mukalla, a raconté à Arab News que, au début de 2015, son salaire mensuel de 100 000 SR (environ 22 500 euros) couvrait toutes les dépenses de sa famille, et qu’il pouvait placer quelques milliers de riyals sur son compte épargne. « Je menais une vie décente. Maintenant, mon salaire n'a pas changé depuis des années en raison de la suspension des primes annuelles. Je dépense désormais tout mon salaire en quinze jours. »  

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com 

 


Le pétrole faiblit après l'augmentation de la production de l'Opep+

Cette décision marque la dernière étape d'un renversement progressif des réductions volontaires de production de 2,2 millions de barils par jour mises en œuvre par huit membres de l'OPEP+ en 2023.
Cette décision marque la dernière étape d'un renversement progressif des réductions volontaires de production de 2,2 millions de barils par jour mises en œuvre par huit membres de l'OPEP+ en 2023.
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  • Ryad, Moscou et six autres membres du cartel ont annoncé une hausse de leur « production de 547 000 barils par jour en septembre 2025 par rapport au niveau de production » en août, a indiqué l'Opep dans un communiqué.
  • Pour l'instant, les prix du pétrole ont mieux résisté que prévu au début de la réouverture des vannes en avril, soutenus par une demande estivale traditionnellement forte et une prime de risque géopolitique élevée.

LONDRES : Les cours du pétrole ont baissé lundi, après l'annonce dimanche par l'Organisation des pays exportateurs de pétrole et ses alliés (Opep+) d'une forte hausse de la production, le marché anticipant une offre abondante au quatrième trimestre.

Ryad, Moscou et six autres membres du cartel ont annoncé une hausse de leur « production de 547 000 barils par jour en septembre 2025 par rapport au niveau de production » en août, a indiqué l'Opep dans un communiqué.

Cette décision, attendue par le marché, marque le retour complet de l'une des trois tranches de réduction de la production, celle de 2,2 millions de barils par jour, que l'Opep+ avait mises en œuvre en 2022 et 2023 pour lutter contre l'érosion des prix.

Vers 9 h 30 GMT (11 h 30 à Paris), le prix du baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en octobre perdait 1,15 % à 68,87 dollars.

Son équivalent américain, le baril de West Texas Intermediate pour livraison en septembre, perdait 1,22 % à 66,51 dollars. 

« La question est maintenant de savoir si le groupe va commencer à mettre en œuvre la prochaine série, soit 1,66 million de barils par jour », affirme Arne Lohmann Rasmussen, de Global Risk Management.

Pour l'instant, les prix du pétrole ont mieux résisté que prévu au début de la réouverture des vannes en avril, soutenus par une demande estivale traditionnellement forte et une prime de risque géopolitique élevée.

Mais à partir de l'automne, « l'équilibre entre l'offre et la demande indique des prix du pétrole plus bas », précise l'analyste.

Si rien ne change sur le marché, « le groupe a terminé ses hausses d'approvisionnement », selon les analystes d'ING. Beaucoup dépend cependant « de ce qui arrivera aux flux pétroliers russes ».

La semaine dernière, Donald Trump a menacé Moscou de sanctions si le conflit en Ukraine ne prenait pas fin d'ici « dix jours ».

Il a notamment évoqué des « droits de douane secondaires » pour les pays qui continuent d'acheter des produits provenant de Russie, ciblant notamment l'Inde, deuxième acheteur de pétrole russe après la Chine, avec près de 1,6 million de barils par jour.

« Si aucun autre acheteur ne se présentait pour ce pétrole, l'excédent prévu pour le quatrième trimestre et l'année 2026 serait effacé, ce qui laisserait l'opportunité à l'Opep+ d'augmenter encore sa production », expliquent les analystes d'ING.


Le dollar hésitant, le franc suisse toujours affecté par les droits de douane

Le président du Credit Suisse, Axel Lehmann, affirme que la banque a déjà pris « le médicament » pour réduire les risques (Shutterstock)
Le président du Credit Suisse, Axel Lehmann, affirme que la banque a déjà pris « le médicament » pour réduire les risques (Shutterstock)
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  • Vendredi, le rapport mensuel du ministère du Travail a montré que moins d'emplois avaient été créés aux États-Unis en juillet, mais aussi les mois précédents, ce qui a fait bondir la probabilité d'une baisse des taux en septembre.
  • Le franc suisse continue de pâtir des droits de douane exorbitants de 39 % visant les importations suisses aux États-Unis, annoncés par Donald Trump le 1er août.

LONDRES : Le dollar tangue lundi, après avoir dévissé en fin de semaine en raison de la dégradation du marché de l'emploi américain, tandis que le franc suisse souffre des surtaxes douanières qui doivent entrer en vigueur jeudi.

Vers 9 h 40 GMT (11 h 40, heure de Paris), la devise américaine progressait de 0,09 % par rapport à l'euro, à 1,1576 dollar, et reculait de 0,20 % contre la livre britannique, à 1,3306 dollar.

Vendredi, le rapport mensuel du ministère du Travail a montré que moins d'emplois avaient été créés aux États-Unis en juillet, mais aussi les mois précédents, ce qui a fait bondir la probabilité d'une baisse des taux en septembre.

Mais les membres de la Réserve fédérale (Fed) ont récemment « rejeté l'idée qu'une telle baisse était acquise », tempère Derek Halpenny, de MUFG.

Après un début d'année en forte baisse (- 10,7 % sur les six premiers mois de l'année), la devise américaine avait remonté d'environ 3,3 % au mois de juillet, d'après l'indice dollar, qui la compare à un panier d'autres grandes monnaies.

M. Halpenny souligne que « l'une des conséquences des mauvaises données de vendredi est la possibilité » que le dollar réagisse à nouveau « négativement » aux nouvelles annonces douanières, alors qu'il semblait y être immunisé depuis quelque temps.

Les menaces de Donald Trump sur l'indépendance de la Fed constituent une nouvelle ombre au tableau pour le dollar.

Vendredi, le président républicain a demandé le renvoi de la cheffe de la principale agence de statistiques économiques des États-Unis, l'accusant de manipuler les chiffres de l'emploi à des fins politiques, ce qui a surpris certains économistes.

Le même jour, l'une des gouverneurs de la Fed, Adriana Kugler, a annoncé sa démission, à quelques mois de la fin de son mandat.

Son successeur, qui sera désigné par Donald Trump, pourrait à terme remplacer le président de la Fed, Jerome Powell, lorsqu'il quittera son poste en mai prochain. Il sera probablement « plus enclin à acquiescer aux demandes de baisse des taux du président Trump », estime Kathleen Brooks, de XTB.

Le franc suisse continue de pâtir des droits de douane exorbitants de 39 % visant les importations suisses aux États-Unis, annoncés par Donald Trump le 1^(er) août.

La devise helvétique reculait de 0,53 % lundi, à 0,8083 franc suisse pour un dollar.

Les analystes s'attendent par ailleurs à ce que la Banque d'Angleterre abaisse son taux directeur d'un quart de point de pourcentage jeudi, pour le ramener à 4 %. 

Cours du lundi et celui du vendredi 

09:40 GMT – 21:00 GMT

EUR/USD: 1.1576 to 1.1587

EUR/JPY: 170.97 – 170.79

EUR/CHF: 0.9357 – 0.9315

EUR/GBP: 0.8699 – 0.8725

USD/JPY: 147.69 to 147.40

USD/CHF: 0.8083–0.8040

GBP/USD: 1.3306/1.3279


Pétrole : dernière salve de l'Opep+ avant une pause

Une réunion virtuelle a eu lieu en marge de la 38e réunion ministérielle de l'OPEP et des pays non membres de l'OPEP. (Photo Fournie)
Une réunion virtuelle a eu lieu en marge de la 38e réunion ministérielle de l'OPEP et des pays non membres de l'OPEP. (Photo Fournie)
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  • En pleine reconquête de parts de marché, Ryad, Moscou et six autres producteurs de pétrole de l'Opep+ se réunissent dimanche pour, selon toute attente, augmenter une nouvelle fois leurs quotas.
  • Bousculé à la fois par la politique commerciale erratique de Donald Trump et par les tumultes géopolitiques mondiaux qui menacent l'approvisionnement, l'avenir du marché pétrolier est difficile à prédire pour les experts.

LONDRES : C'est devenu un rendez-vous mensuel : en pleine reconquête de parts de marché, Ryad, Moscou et six autres producteurs de pétrole de l'Opep+ se réunissent dimanche pour, selon toute attente, augmenter une nouvelle fois leurs quotas.

La rencontre en ligne des huit ministres de l'Énergie doit fixer l'objectif pour septembre et parachever une série de hausses entamée en avril.

Début juillet, ils avaient déjoué les pronostics en accélérant le rythme à 548 000 barils par jour (b/j), contre 411 000 les mois précédents. Ils devraient poursuivre sur cette cadence, selon les analystes interrogés par l'AFP.

Selon Giovanni Staunovo d'UBS, cette hausse est « largement prise en compte dans les prix » et il ne prévoit pas de remous à la réouverture des marchés lundi.

Le cours du Brent, référence mondiale, évolue actuellement autour de 70 dollars. Si l'on est loin des sommets à 120 dollars atteints au printemps 2022 à la suite de l'invasion russe de l'Ukraine, l'Organisation des pays exportateurs de pétrole et ses alliés (Opep+) préfèrent désormais se concentrer sur la reconquête du terrain.

Ils ont opéré ce tournant ces derniers mois, après avoir longtemps lutté contre l'érosion des prix en organisant une raréfaction de l'offre via plusieurs coupes de production.

C'est l'une d'entre elles, de 2,2 millions de barils par jour, consentie par l'Arabie saoudite, la Russie, l'Irak, les Émirats arabes unis, le Koweït, le Kazakhstan, l'Algérie et Oman, qui est actuellement réintroduite sur le marché. 

- « Trouver un équilibre » -

Une hausse de 548 000 barils par jour signifierait le retour complet de cette tranche, avant des horizons plus incertains.

« Notre scénario de base parie sur le fait que le groupe marquera ensuite une pause dans ses hausses », avance Warren Patterson, chez ING.

Les prix du pétrole ont mieux résisté que prévu au début de la réouverture des vannes en avril, soutenus par une demande estivale traditionnellement forte et une prime de risque géopolitique élevée, notamment depuis le début de la guerre entre l'Iran et Israël.

De plus, entre mars et juin, l'augmentation effective de la production a été moindre que celle des quotas affichés sur la même période, comme le soulignait récemment M. Staunovo dans une note.

Cependant, « le marché devrait connaître un excédent important d'offre de pétrole à partir du quatrième trimestre de cette année, et l'Opep+ devra veiller à ne pas aggraver cet excédent », estime M. Patterson.

« L'alliance s'efforce de trouver un équilibre entre regagner des parts de marché et éviter une chute brutale des cours du pétrole », ajoute Tamas Varga, de PVM.

L'Arabie saoudite, son membre le plus influent, compte particulièrement sur la rente pétrolière pour financer ses projets d'investissement et de modernisation du pays.

Pour l'instant, le retour des autres coupes de production (environ 3,7 millions de barils par jour) doit être discuté lors de la prochaine réunion ministérielle de l'Opep+ fin novembre, avec l'ensemble des 22 membres cette fois. 

- Environnement instable -

Bousculé à la fois par la politique commerciale erratique de Donald Trump et par les tumultes géopolitiques mondiaux qui menacent l'approvisionnement, l'avenir du marché pétrolier est difficile à prédire pour les experts.

Dernier rebondissement en date, le président américain a donné mardi un délai de « dix jours » à Moscou pour mettre un terme au conflit en Ukraine, sous peine de sanctions américaines contre la Russie.

« Nous allons imposer des droits de douane et d'autres choses », a averti le milliardaire républicain, qui avait précédemment évoqué une surtaxe indirecte de 100 % sur les pays qui achètent des produits russes, notamment des hydrocarbures, afin d'assécher les revenus de Moscou.

Le locataire de la Maison Blanche a notamment ciblé l'Inde, deuxième importateur de barils russes avec environ 1,6 million de barils par jour depuis le début de l'année.

Cela pourrait inciter l'Opep+ à poursuivre son offensive. Mais elle « ne réagira qu'en cas de perturbations réelles de l'offre », estime Giovanni Staunovo.