Frankly Speaking : Comment la Russie compte-t-elle mettre fin à la guerre avec l’Ukraine ?

Andrey Baklanov, diplomate russe et ancien ambassadeur en Arabie saoudite, répond à Katie Jensen, animatrice de Frankly Speaking. (Photo AN)
Andrey Baklanov, diplomate russe et ancien ambassadeur en Arabie saoudite, répond à Katie Jensen, animatrice de Frankly Speaking. (Photo AN)
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Publié le Dimanche 30 juillet 2023

Frankly Speaking : Comment la Russie compte-t-elle mettre fin à la guerre avec l’Ukraine ?

  • Le diplomate russe Andrey Baklanov estime qu’un règlement négocié de la guerre est improbable et insiste sur la nécessité que le gouvernement ukrainien soit anéanti
  • Il remercie les pays arabes, en particulier l’Arabie saoudite, pour leur médiation en vue de l’échange de prisonniers, et considère qu’un rôle plus important de la Chine au Moyen-Orient sert également les intérêts de la Russie

DUBAÏ : Une trêve entre la Russie et l’Ukraine n’est pas envisageable et la normalité ne pourra être atteinte qu’après « l’anéantissement » de l’actuel gouvernement de Kiev, déclare Andrey Baklanov, diplomate russe et ancien ambassadeur en Arabie saoudite.

Faisant part de ses réflexions dans le dernier épisode de Frankly Speaking, l’émission hebdomadaire d’Arab News consacrée aux questions d’actualité, M. Baklanov estime qu’un règlement négocié de la guerre est improbable.

« Je pense qu’il n’y a aucune possibilité de trêve entre le gouvernement actuel — le soi-disant gouvernement, composé des fascistes de Kiev — et nous », ajoute-t-il, faisant référence au gouvernement du président ukrainien Volodymyr Zelensky.

« Je suis absolument certain que la seule option dont nous disposons est d’anéantir ce régime en Ukraine et de ramener l’Ukraine à la normalité. »

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Le président ukrainien Volodymyr Zelensky ( à droite) pose pour un selfie avec un militaire lors d'une visite dans la région de Donetsk. (File/AFP) 

Outre le conflit ukrainien, l’entretien portait sur des questions allant de l’échec de l’initiative céréalière de la mer Noire et du groupe Wagner aux relations de la Russie avec la Syrie et à l’accord de normalisation entre l’Iran et l’Arabie saoudite, conclu sous l’égide de la Chine.

Selon M. Baklanov, les objectifs de la Russie en Ukraine restent inchangés.

« Le premier objectif est la dénazification, le deuxième la démilitarisation et le troisième la fin des activités criminelles du régime criminel, qui a fait un coup d’État en 2014 », précise-t-il, faisant référence aux manifestations qui ont permis d’écarter du pouvoir le dirigeant pro-russe Viktor Ianoukovytch cette année-là.

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Un employé marche près d'entrepôts mutilés dans une installation céréalière à Pavlivka, en Ukraine, samedi 22 juillet 2023, à la suite d'attaques de missiles russes. (File/AFP) 

Bien que l’affirmation russe selon laquelle l’Ukraine est contrôlée par une clique fasciste ait été vigoureusement contestée, M. Baklanov s’est appuyé sur les événements de la Seconde Guerre mondiale pour justifier l’« opération militaire spéciale » lancée contre l’Ukraine il y a 18 mois.

« Nous considérons ce qui se passe en Ukraine comme une prolongation de la Seconde Guerre mondiale », poursuit-il. 

Dans la situation actuelle, il décrit le président Zelensky comme un « traître » qui, avec « beaucoup d’autres criminels, répondra devant notre tribunal des activités criminelles menées pendant huit ou même neuf ans contre notre peuple au Donbass. Ils seront arrêtés et emprisonnés. »

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Le président ukrainien Volodymyr Zelensky ( à gauche) achète une glace lors d'une visite dans la région de Donetsk. (File/AFP) 

M. Baklanov a également profité de l’interview pour défendre la décision de la Russie de renoncer à un accord conclu sous l’égide de l’ONU et de la Turquie, qui permettait d’expédier des céréales, des denrées alimentaires, des engrais et d’autres produits de base depuis les ports ukrainiens de la mer Noire, soumis à un blocus, vers certains des pays du monde les plus touchés par l’insécurité alimentaire.

Il affirme que le Kremlin a été contraint d’annuler l’accord, conclu dans la ville turque d’Istanbul en juillet 2022, afin de préserver les exportations de céréales et d’engrais de la Russie.

Dmitri Peskov, porte-parole du gouvernement russe, a annoncé le 17 juillet que la Russie se retirerait de l’initiative céréalière de la mer Noire. « Lorsque la partie de l’accord de la mer Noire concernant la Russie sera mise en œuvre, la Russie reviendra immédiatement à la mise en œuvre de l’accord », a-t-il déclaré.

Le Kremlin a donné trois mois à l’ONU pour accepter ses conditions.

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Les armoiries soviétiques sur le bouclier d'un monument de 62 mètres à Kiev vont être remplacées par les armoiries de l'Ukraine, conformément à la loi sur la décommunisation. (File/AFP) 

M. Baklanov qualifie l’accord de « frauduleux », affirmant que la majorité des céréales étaient en fait destinées à l’Europe, et non aux pays africains souffrant d’insécurité alimentaire, et que les agriculteurs russes ne bénéficiaient pas de l’accord.

« Seuls 3% des céréales sont allées au continent africain et aux populations qui souffrent de la faim. La majorité absolue des céréales est allée aux pays occidentaux prospères, en particulier aux pays européens », ajoute-t-il.

Affirmant que seule « la moitié de l’accord » était reconnue, il fait remarquer qu’aucun progrès n’est visible sur un accord connexe destiné à faciliter les exportations alimentaires et agricoles russes dans le cadre des sanctions occidentales imposées à Moscou en réponse à l’invasion de l’Ukraine.

En ce qui concerne la guerre en Ukraine, M. Baklanov note que les pourparlers de paix ne sont pas à l’ordre du jour, même si la Russie est « très reconnaissante aux pays arabes et à l’Arabie saoudite pour leurs tentatives de médiation ».

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Une vue aérienne montre des bâtiments détruits à la suite de combats intenses, lors de l'invasion russe, à Bakhmut, en Ukraine, sur cette image tirée d'une vidéo distribuée. (File/AFP) 

Près de 300 prisonniers ont été échangés entre l’Ukraine et la Russie dans le cadre d’un accord négocié par l'Arabie saoudite et la Turquie en septembre. Les deux parties avaient capturé des centaines de combattants ennemis depuis que la guerre entre la Russie et l’Ukraine a éclaté le 24 février 2022, mais seuls quelques échanges de prisonniers ont eu lieu depuis.

M. Baklanov estime que la médiation peut être très utile, mais seulement en ce qui concerne certains « aspects humanitaires », tels que l’échange de prisonniers de guerre.

«L’origine de la guerre est quelque chose que nos collègues des pays arabes et africains devraient mieux comprendre. Il est nécessaire de ressentir l’histoire, pas seulement de la connaître.»

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Des prisonniers de guerre sont vus sur le tarmac après leur arrivée de Russie à l'aéroport international King Khalid, à Riyad, à la suite des efforts de médiation déployés par l'Arabie saoudite. (File/SPA) 

«Ce sont seulement ces personnes-là — comme moi et quelques autres — qui comprennent l’origine, la source, de ce conflit. Pour les personnes extérieures, il est assez difficile de comprendre cette origine comme il se doit.» 

«Nous sommes donc très reconnaissants de ces tentatives de médiation, mais je pense qu’en réalité, cette médiation ne peut être utile que sur le plan humanitaire» souligne-t-il.

M. Baklanov regrette que la Russie n’ait pas commencé plus tôt à coordonner ses politiques avec l’Arabie saoudite, notamment en ce qui concerne le pétrole.

«Malheureusement, je dois admettre que pendant de nombreuses années, nous n’avons pas donné de réponse claire aux propositions de l’Arabie saoudite de conclure un accord commun sur ce front. C’était une grave erreur de la part de l’Union soviétique et de la Fédération de Russie.»

«Mais aujourd’hui, heureusement, nous avons l’OPEP+, et je répète que l’initiative est venue de l’Arabie saoudite, que nous l’avons soutenue, et qu’il s'agissait, pendant une longue période, d’une très bonne décision de la part de la Fédération de Russie. Nous apprécions également beaucoup l’initiative de l’Arabie saoudite de sacrifier ses propres intérêts », poursuit-il.

Il indique ensuite que, d’après son expérience, il existe « une grande différence » entre les politiques de l’ère soviétique et celles de la Fédération de Russie.

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Des soldats biélorusses des forces d'opérations spéciales et des combattants mercenaires de la société militaire privée Wagner participent aux manœuvres d'une semaine menées sur un champ de tir près de la ville de Brest, en Biélorussie. (File/AFP)

« Lorsque j’ai été pendant cinq ans ambassadeur en Arabie saoudite, je n’ai jamais demandé aux autorités saoudiennes de prendre une quelconque (décision) concernant leurs liens avec les États-Unis. Jamais. Nous parlions de nos propres intérêts. Nous avions des choses intéressantes à faire sur le plan bilatéral », raconte-t-il. 

« Nous ne faisons pas de propagande contre les pays tiers. Nous critiquons certains éléments de la politique lorsque nous les voyons, mais nous ne poussons pas ces pays — les pays du Golfe et l’Arabie saoudite — à faire quoi que ce soit qui aille à l’encontre des intérêts des pays tiers. » 

Saluant l’état actuel des relations entre l’Arabie saoudite et la Russie, il ajoute : « Il est plus facile d’entretenir de bonnes relations avec nous, d’être sur un pied d’égalité avec nous, d’être en bons termes avec la Fédération de Russie. Nous n’encourageons pas d’autres personnes à avoir des relations tendues avec d’autres pays. »

«C’est là que réside la différence avec les États-Unis, qui exercent une pression sur les nations pour qu’elles participent aux sanctions qu’ils nous ont imposées. Les approches de notre côté et celles des pays occidentaux sont absolument différentes.»

« Je pense que les peuples du Moyen-Orient connaissent cette différence et qu’ils sont plus amicaux envers nous parce qu’ils connaissent ces faits. » 

Étant donné que la Russie a favorablement accueilli la normalisation des relations entre l’Arabie saoudite et l’Iran à la suite d’un accord négocié par la Chine, la question qui se pose naturellement est de savoir pourquoi Moscou n’a pas joué le rôle de médiateur honnête, compte tenu de ses propres liens étroits avec Riyad et Téhéran.

M. Baklanov affirme que la Russie est effectivement prête à assurer une médiation, tout en admettant qu’en tant que spécialiste des pays arabes et du Moyen-Orient, il est « un peu déçu de voir que nos amis chinois ont réussi. »

Néanmoins, il fait remarquer que la Russie est surtout intéressée par le résultat.

« Si cette médiation aboutit à un début de normalisation des relations entre l’Arabie saoudite et l’Iran, nous nous y intéressons. Si les Chinois ont remporté cette victoire politique et diplomatique, nous les félicitons (simplement pour cet exploit). »

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Le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Faisal ben Farhane, le ministre chinois des Affaires étrangères, Qin Gang (au centre), et le ministre iranien des Affaires étrangères, Hossein Amir-Abdollahian (à gauche), posent lors d'une réunion à Pékin. (File/AFP) 

« Cependant, nous sommes également prêts à suivre la même voie, nous sommes donc tous les deux dans le même bateau. Nous sommes intéressés par la stabilisation et la normalisation de la situation dans l’ensemble de la région. Récemment, nous avons à nouveau repris notre proposition d’accord sur un système de sécurité régional », mentionne-t-il.

M. Baklanov a écarté l’idée que le rôle croissant de la Chine au Moyen-Orient constituait une menace pour l’influence de la Russie en tant qu’alternative à une puissance diplomatique régionale non occidentale.

« Nous voyons ce qui se passe au Moyen-Orient sous un angle différent. Nous n’avons pas de différends avec la Chine et nous ne cherchons pas à y jouer un rôle monopolistique contre l’influence de la Chine. Non. » 

Il décrit l’intérêt de la Russie pour le Moyen-Orient comme étant très simple.

« Nous aimerions que la situation à proximité de nos frontières soit bonne et tranquille. Si nous sommes (au service de la paix), c’est bon. Si la Chine est (au service de la paix), c’est également une bonne chose. L’objectif principal pour nous n’est pas d’être les meilleurs dans ces activités diplomatiques, mais d’obtenir des résultats positifs », insiste-t-il.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


"A la maison": Merz promet le retour d'une Allemagne active en Europe

Le secrétaire général de l'OTAN, Mark Rutte (à droite), et le chancelier allemand, Friedrich Merz (à gauche), s'expriment lors d'une conférence de presse à l'issue de leur réunion bilatérale au siège de l'OTAN à Bruxelles, le 9 mai 2025. (AFP)
Le secrétaire général de l'OTAN, Mark Rutte (à droite), et le chancelier allemand, Friedrich Merz (à gauche), s'expriment lors d'une conférence de presse à l'issue de leur réunion bilatérale au siège de l'OTAN à Bruxelles, le 9 mai 2025. (AFP)
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  • Le nouveau chancelier allemand, Friedrich Merz, a promis vendredi de donner un nouvel élan à l'Europe lors d'une rencontre avec les responsables de l'Union européenne à Bruxelles

BRUXELLES: Le nouveau chancelier allemand, Friedrich Merz, a promis vendredi de donner un nouvel élan à l'Europe lors d'une rencontre avec les responsables de l'Union européenne à Bruxelles, où son arrivée, en pleine période de tensions géopolitiques, suscite de grands espoirs.

Le dirigeant, qui a promis d'être un chancelier "très européen" s'est engagé à ce que l'Allemagne joue un rôle "fort" et "actif" au sein de l'UE.

"Les défis auxquels nous sommes confrontés sont de taille et nous ne pourrons les relever qu'ensemble", a-t-il lancé, évoquant longuement ses déplacements à Paris et Varsovie en milieu de semaine.

Le dossier sur lequel le nouveau chancelier est le plus attendu est sans aucun doute la défense, l'Europe cherchant à muscler considérablement ses efforts dans le domaine, face à un allié américain de plus en plus incertain.

- "Bâton de pèlerin" -

Longtemps un chantre de l'orthodoxie budgétaire, M. Merz a déjà marqué des points auprès de Bruxelles en se disant favorable à un assouplissement de certaines règles fiscales européennes pour permettre aux Etats de l'UE d'investir davantage dans la défense.

Il s'est aussi plongé sans attendre dans l'épineux dossier des droits de douane, échangeant jeudi soir avec le président américain Donald Trump, qui, assure-t-il, l'a invité à Washington.

Lors d'une conférence de presse aux côtés de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, le sexagénaire a rappelé son passé d'eurodéputé au début des années 1990, un mandat qui l'a "marqué", assure-t-il.

"D'une certaine manière, je rentre à la maison à Bruxelles, je rentre à la maison en Europe", a-t-il lancé, se réjouissant que sa visite coïncide avec la Journée de l'Europe, qui célèbre cette année les 75 ans de la construction européenne.

"C'est un signal très important, parce que vous montrez clairement que la politique européenne est pour vous une priorité absolue", a salué la cheffe de l'exécutif européen, Allemande comme lui.

"Il était temps!", souffle un diplomate. "On attend et on a besoin d'une Allemagne forte, qui soit capable de tenir son bâton de pèlerin", assure-t-il, sous couvert d'anonymat.

Voilà six mois que les Européens étaient suspendus aux rebondissements de la politique allemande, impatients de relancer un continent confronté à une cascade de crises.

- Auf Wiedersehen Scholz-

La rupture de style entre Friedrich Merz et Olaf Scholz est appréciée par de nombreux Européens.

A la tête de l'Allemagne de 2021 à 2025, l'ancien chancelier social-démocrate a laissé un souvenir amer à Bruxelles, des diplomates lui reprochant son attentisme et une proximité jugée excessive avec Washington.

"Un nouveau leader est toujours synonyme d'une nouvelle dynamique", a relevé vendredi Antonio Costa, le président du Conseil européen, qui réunit les chefs d’État et de gouvernement des 27 Etats membres.

Le retour de l'Allemagne sur le devant de la scène européenne, s'il se confirme, ne se fera toutefois pas sans frictions.

Elu sur une ligne de fermeté, notamment en matière migratoire, le nouveau chancelier a déjà suscité des tensions en décidant unilatéralement de refouler la plupart des demandeurs d'asile aux frontières de l'Allemagne - un geste qui a froissé plusieurs partenaires.

"L'immigration est un défi européen commun qui nécessite une solution européenne commune", a d'ailleurs commenté Mme von der Leyen aux côtés de M. Merz.

Le chancelier allemand a promis de ne "pas faire cavalier seul" sur cette question: "je suis un partisan du marché unique européen et de l'espace Schengen et je tiens à le faire savoir à tous les chefs d'État et de gouvernement d'Europe qui pourraient craindre une escalade".


Robert Francis Prevost devient Léon XIV, le premier pape américain

Le pape nouvellement élu Léon XIV, Robert François Prévost, arrive pour la première fois sur le balcon de la loggia centrale de la basilique Saint-Pierre, après que les cardinaux ont terminé le conclave, au Vatican, le 8 mai 2025. (AFP)
Le pape nouvellement élu Léon XIV, Robert François Prévost, arrive pour la première fois sur le balcon de la loggia centrale de la basilique Saint-Pierre, après que les cardinaux ont terminé le conclave, au Vatican, le 8 mai 2025. (AFP)
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  • Pour la première fois de son histoire, l'Eglise catholique a élu un pape américain, Robert Francis Prevost, 69 ans, devenu jeudi Léon XIV
  • Son premier message au balcon de la basilique Saint-Pierre a été un "appel de paix" à "tous les peuples" devant une foule en liesse

Cité du Vatican, Saint-Siège: Pour la première fois de son histoire, l'Eglise catholique a élu un pape américain, Robert Francis Prevost, 69 ans, devenu jeudi Léon XIV, dont le premier message au balcon de la basilique Saint-Pierre a été un "appel de paix" à "tous les peuples" devant une foule en liesse.

C'est le cardinal "protodiacre", le Français Dominique Mamberti, qui a prononcé la célèbre formule "Habemus papam" ("nous avons un pape") et a présenté le successeur de François, près de 24 heures après le début du conclave des cardinaux dans la chapelle Sixtine.

Dans la foulée, Léon XIV s'est adressé, très ému, aux plus de 1,4 milliard de catholiques: "Que la paix soit avec vous tous!", ont été ses premiers mots, dans un italien teinté d'accent américain. "Merci au pape François", décédé le 21 avril à 88 ans, a-t-il aussi lancé remerciant ses collègues cardinaux de l'avoir élu.

Fidèles et touristes massés sur la place Saint-Pierre ont salué par un tonnerre d'applaudissements son apparition tandis que les cloches sonnaient à toute volée, un peu plus d'une heure après que la fumée blanche fut sortie de la mince cheminée installée sur le toit de la chapelle Sixtine.

Vêtu d'une mozette rouge et d'une étole, des habits liturgiques que François avait abandonnés, Léon XIV a appelé à "construire des ponts par le dialogue, par la rencontre, nous unissant tous pour être un seul peuple, toujours en paix".

Une vidéo diffusée par le Vatican dans la soirée le montre sortant de la chapelle Sixtine après son élection, chaleureusement salué par les cardinaux, avant une prière dans la chapelle Pauline voisine.

Du Liban à l'Espagne en passant par l'Italie, l'UE ou Israël, les réactions internationales se sont multipliées dès l'annonce de son élection.

Donald Trump a félicité le nouveau pape, parlant d'un "grand honneur" pour les Etats-Unis tandis que le président français Emmanuel Macron a plaidé pour que le "nouveau pontificat soit porteur de paix et d'espérance".

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu lui a souhaité de "réussir à promouvoir l'espoir" et le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva a souhaité qu'il "poursuive l'héritage de François".

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a dit espérer que le Vatican continue à soutenir "moralement et spirituellement" Kiev, et Vladimir Poutine s'est dit certain qu'une coopération constructive se poursuivra entre la Russie et le Vatican.

- "Critères géopolitiques" -

Au Vatican la joie était grande chez les Américains présents place Saint-Pierre. "On ne s'attendait pas à ça, c'est une surprise complète et merveilleuse", affirme à l'AFP Kathy Hewitt, 58 ans, venue de Philadelphie, en agitant un petit drapeau américain.

"C'est l'Histoire, je n'ai pas de mots. Quand j'ai entendu qu'il était de Chicago... Je suis heureuse d'être ici", ajoute Gabrielle Estrada, une Américaine de 30 ans venue de San Antonio au Texas.

Robert Francis Prevost, homme d'écoute et de synthèse, classé parmi les cardinaux modérés et connaissant autant le terrain que les rouages du Vatican, était considéré comme l'un des candidats sérieux pour succéder au pape François, qui l'avait placé à la tête du puissant ministère chargé des nominations de évêques.

Les cardinaux ont donc opté pour la continuité, même si cet Américain, créé cardinal en 2023 par François qui a porté son ascension au Vatican, devrait mettre davantage les formes que son prédécesseur, qui avait bousculé le Saint-Siège avec son exercice du pouvoir personnel, voire cassant, froissant les plumes de la hiérarchie vaticane.

"C'est à la fois une opposition au gouvernement américain et la prise en considération des critères géopolitiques", a affirmé à l'AFP François Mabille, directeur de l'Observatoire géopolitique du religieux.

"Et c'est également, à la fois par le choix de son nom Léon XIV, et par son origine missionnaire, un lien qui est fait avec l'Amérique latine, où il vivait", a-t-il ajouté.

Léon XIV célèbrera vendredi à 11H00 (09H00 GMT) une messe avec les cardinaux dans la chapelle Sixtine, présidera la prière du Regina Coeli dimanche à 12H00 (10H00 GMT) et rencontrera lundi matin les journalistes au Vatican.

- Consensus -

Le 267e pape de l'Eglise catholique est le quatrième non italien de suite après le Polonais Jean-Paul II (1978-2005), l'Allemand Benoît XVI (2005-2013) et l'Argentin François (2013-2025).

Il a été élu au deuxième jour du conclave, qui s'annonçait très ouvert, du fait notamment des 133 cardinaux présents, un record. Il a réuni une majorité des deux tiers, soit au moins 89 voix. Mais le secret absolu entourant le conclave empêche de connaître les détails du scrutin.

Le natif de Chicago devra rapidement affronter des défis considérables pour une Eglise en perte de vitesse en Europe: finances, lutte contre la pédocriminalité, baisse des vocations...

Mais il devra aussi ressouder les différents courants d'une institution où cohabitent des sensibilités culturelles très diverses, entre une Europe sécularisée et des "périphéries" en croissance.

Il devra aussi apaiser une institution parfois bousculée par un pontificat de 12 ans ponctué de réformes qui ont fait l'objet de vives critiques internes.

Sa connaissance parfaite de l'ensemble de la Curie romaine (l'appareil administratif du Saint-Siège) devrait l'aider grandement dans sa tâche.


Commémorations du 8-Mai: Charles III mène l'hommage du Royaume-Uni

Le roi Charles III de Grande-Bretagne marche avec le doyen de Westminster David Hoyle alors qu'il arrive pour assister à un service d'action de grâce pour marquer le 80e anniversaire du VE Day, ou Jour de la Victoire en Europe, marquant la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe, à l'abbaye de Westminster à Londres, le 8 mai 2025. (AFP)
Le roi Charles III de Grande-Bretagne marche avec le doyen de Westminster David Hoyle alors qu'il arrive pour assister à un service d'action de grâce pour marquer le 80e anniversaire du VE Day, ou Jour de la Victoire en Europe, marquant la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe, à l'abbaye de Westminster à Londres, le 8 mai 2025. (AFP)
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  • Charles III a rendu hommage aux soldats britanniques morts durant la Seconde Guerre mondiale lors d'une cérémonie jeudi à l'abbaye de Westminster, à l'occasion du 80e anniversaire de la fin du conflit en Europe

LONDRES: Charles III a rendu hommage aux soldats britanniques morts durant la Seconde Guerre mondiale lors d'une cérémonie jeudi à l'abbaye de Westminster, à l'occasion du 80e anniversaire de la fin du conflit en Europe.

Le roi et la reine Camilla sont accompagnés notamment par le prince héritier William et son épouse Kate sans leurs trois enfants (George, Charlotte et Louis) qui avaient été présents lundi, au premier jour des commémorations au Royaume-Uni.

A 12H00 locale, (11H00 GMT) deux minutes de silence ont été observées lors de cette cérémonie --qui se déroule en présence du Premier ministre Keir Starmer et d'anciens combattants-- et partout dans le pays.

L'arrière-arrière-petit-fils de Winston Churchill, âgé de 10 ans, doit allumer une bougie de la paix.

"C'est vraiment super de pouvoir représenter ma famille et aussi la jeune génération afin qu'elle se souvienne de tous ceux qui ont participé à la Seconde Guerre mondiale", a déclaré jeudi matin le garçon à la chaine de radio BBC 4.

Le souverain de 76 ans et son fils William doivent déposer des couronnes de fleurs sur la tombe du soldat inconnu. Le roi le fera au nom de la nation et William au nom des anciens combattants.

À l'extérieur de l'abbaye, Camilla et Kate doivent déposer des fleurs au mémorial des victimes, en hommage aux morts de la guerre.

Un concert sur la place de Horse Guards Parade de Londres doit conclure la journée, marquant ainsi la fin des quatre jours d'événements pour le 80e anniversaire de la fin du conflit.

Cet anniversaire est l'une des dernières grandes commémorations de la Seconde Guerre mondiale à avoir lieu en présence d'un nombre substantiel de vétérans.

Lundi, un défilé militaire en fanfare et une apparition de la famille royale au balcon du palais de Buckingham avaient lancé les célébrations dans le pays.