Le modèle de développement saoudien suscite l’admiration en Iran

Les personnes qui visitent le Royaume ou qui y résident sont déjà témoins de transformations importantes au sein de la plupart des villes. (AFP).
Les personnes qui visitent le Royaume ou qui y résident sont déjà témoins de transformations importantes au sein de la plupart des villes. (AFP).
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Publié le Vendredi 04 août 2023

Le modèle de développement saoudien suscite l’admiration en Iran

Le modèle de développement saoudien suscite l’admiration en Iran
  • Tous ceux qui visitent le Royaume ou y résident sont déjà témoins de transformations importantes au sein de la plupart des villes
  • Les transformations, que l’on pourrait appeler «le modèle saoudien», ont influencé de nombreux jeunes Iraniens

Le Moyen-Orient connaît actuellement une nouvelle phase de concurrence parallèle. Cette rivalité se concentre sur la conviction et l’attraction, ou sur ce qu’on appelle «le modèle attractif de gouvernance et de développement», ainsi que sur l’investissement dans les ressources humaines de la nation – un modèle que l’Arabie saoudite a adopté il y a plus de huit ans. Au cours des trois dernières années, les caractéristiques de ce modèle de gouvernance sont devenues plus évidentes, complètes et matures, comme en témoignent la modernisation, l’ouverture, le développement, la diversification des revenus et l’amélioration du bien-être sociétal et de la qualité de vie au Royaume.

Il est vrai que bon nombre des projets massifs de réforme, de développement et d’investissement en Arabie saoudite en sont toujours à mi-parcours. La première phase sera à peine achevée lorsque l’initiative Vision 2030 sera mise en place. Cependant, tous ceux qui visitent le Royaume ou y résident sont déjà témoins de transformations importantes au sein de la plupart des villes et du nouvel état d’esprit administratif technocratique dans la gestion de ses ministères et de ses institutions. Cela s’ajoute aux projets d’autonomisation des femmes, aux investissements à grande échelle dans le sport et dans le tourisme ainsi qu’aux efforts qui visent à accroître la contribution du secteur non rentier ou «tiers» au produit intérieur brut du Royaume.

Ces transformations à l’échelle du Royaume sont suivies de près par des jeunes ambitieux qui viennent de l’ensemble de la région, en particulier des pays avec lesquels le Royaume entretient des relations qui sont loin d’être idéales, ou même tendues, comme l’Iran.

Les transformations, que l’on pourrait définir comme «le modèle saoudien», ont influencé de nombreux jeunes Iraniens qui sont particulièrement attentifs à ce qui se passe dans les pays voisins, en particulier les États du golfe Arabique. Ce modèle saoudien est devenu la référence à partir de laquelle on évalue les performances des gouvernements iraniens successifs.

Cette situation s’est produite malgré la promotion continue de stéréotypes négatifs et dépassés sur l’Arabie saoudite inspirés de motifs nationaux ou historiques. Les exploits de l’Arabie saoudite vont au-delà des nombreuses promesses des dirigeants iraniens. En effet, les gouvernements successifs de Téhéran ont fait de nombreuses promesses grandioses au peuple iranien sans les tenir sur le terrain. En outre, chaque gouvernement iranien fait plus de promesses au moment du dépôt du budget. Comme les promesses électorales, non seulement elles ne sont pas tenues, mais elles sont activement contredites par les actions ultérieures du gouvernement, par des bilans négatifs et par les conditions de vie déjà désastreuses au sein du pays. La situation devrait d’ailleurs se détériorer davantage à tous les niveaux.

Les transformations du Royaume sont suivies de près par des jeunes ambitieux qui viennent de l’ensemble de la région.

Dr Mohammed al-Sulami

Permettez-moi de citer des commentaires faits par un certain nombre de personnalités iraniennes sur cette question. Ali Ghanbari, ancien député, vice-ministre du ministère de l’Agriculture et membre du corps professoral de l’université Tarbiat-Modares, déclare ainsi: «L’Iran est tombé dans le piège du développement fictif, puisque le véritable progrès consiste à renforcer les infrastructures et à mettre en place les conditions adéquates dans le pays pour renforcer le bien-être et améliorer les conditions économiques et culturelles.»

M. Ghanbari ajoute: «Entre-temps, les six derniers plans de développement quinquennaux n’ont pas atteint de tels résultats. De plus, les simples chiffres et statistiques qui montrent que la croissance économique est limitée ne signifient pas que le développement réel a été atteint. Nous avons quinze ans de retard par rapport aux pays voisins. Dans le meilleur des cas, nous avons dix ans de retard. De manière réaliste, nous avons quinze ans de retard par rapport à nos voisins comme la Turquie, l’Arabie saoudite, et d’autres.»

Une autre personnalité iranienne de premier plan, l’expert économique Vahid Chakaki-Chahri, soutient: «L’Arabie saoudite a connu la troisième vague de savoir, subissant une transformation substantielle de l’économie centrée sur les connaissances et modifiant ainsi son système de richesse. Elle bénéficie désormais d’éléments générateurs de richesse comme les économies virtuelles, intelligentes et vertes, ainsi que les énergies renouvelables. L’Iran, quant à lui, traverse toujours la deuxième vague de savoir et nous tenons à améliorer les conditions du secteur sur la base de la deuxième vague au moment où nos rivaux ont lancé la troisième vague et élaboré des plans pour le système de génération de richesse future.»

En ce qui concerne le décalage entre l’action et les simples paroles, le professeur Majid Moradi note: «Pendant des années, nous avons lancé des slogans comme “Mort à l’Amérique” en nous moquant de l’Arabie saoudite soumise aux États-Unis. Mais lorsque nous réexaminons la question, nous constatons que c’est l’Iran, plutôt que l’Arabie saoudite, qui est soumis aux États-Unis: nous cherchons à amadouer les États-Unis afin de libérer nos avoirs gelés en Corée du Sud et de les utiliser à des fins civiles. L’Arabie saoudite, elle, résiste aux États-Unis, en invitant la Chine à prendre pied au Moyen-Orient.»

Au sujet du contexte économique, M. Moradi déclare: «Le président de la république a annoncé au cours des deux dernières années que la vie de nos citoyens ne dépendrait pas des pourparlers avec les États-Unis. Mais nous voyons pratiquement que le dollar fluctue à chaque fois qu’il est question de l’accord nucléaire. De son côté, le riyal saoudien est stable et n’a jamais été affecté, quelles que soient les circonstances.»

Les conditions de vie du pays, déjà désastreuses, devraient se détériorer davantage à tous les niveaux.

Dr Mohammed al-Sulami

M. Moradi poursuit en ces termes: «L’économie forte est le facteur clé qui a accordé l’indépendance politique à l’Arabie saoudite, et non les slogans dirigés contre les forces de “l’arrogance mondiale” [expression utilisée par le régime iranien pour qualifier les États-Unis]. Ce qui a pratiquement nui à notre indépendance, c’est la faiblesse de l’économie. C’est la différence entre notre riyal et le riyal saoudien. Notre riyal est faible en raison de politiques faibles, alors que les politiques [de l’Arabie saoudite] portent leurs fruits grâce à leur riyal fort.»

En ce qui concerne la planification, le chroniqueur iranien Ehsan Bodaghi écrit: «L’Arabie saoudite se prépare au moyen de projets géants, comme Neom, la mégapole à 500 milliards de dollars [1 dollar = 0,91 euro], pour augmenter sa population de 50% d’ici à 2030. Pendant ce temps, l’Iran interdit les dépistages d’anomalies fœtales. Cependant, de nombreux législateurs iraniens qualifient les dirigeants saoudiens de réactionnaires et d’ignorants.»

En Iran, selon un utilisateur iranien des réseaux sociaux, l’exposition internationale de la Caspienne a été fermée en raison de la musique qui y était jouée et des femmes qui ont visité l’exposition en retirant leurs voiles. Il explique: «Alors que l’Arabie saoudite recrute des footballeurs pour promouvoir son pays, certains attendent que des femmes exhibent des mèches de cheveux pour interdire une exposition internationale.»

«L’idée du prince héritier d’Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, de transformer les États du Golfe en un bloc similaire à l’Union européenne progresse rapidement. Selon moi, il est peu probable que cette union adopte une monnaie commune. L’écart économique entre le nord et le sud du golfe Arabique va encore se creuser. Selon le World Happiness Report, l’Iran occupe la 101e place mondiale tandis que l’Arabie saoudite est en 30e position», indique pour sa part l’économiste iranien Siamak Qassemi.

De toute évidence, chaque mesure entreprise par l’Arabie contribue au progrès et à l’épanouissement du pays. Les États rivaux feraient bien d’en tirer des leçons et d’adopter le modèle de gouvernance et de développement du Royaume.

Le Dr Mohammed al-Sulami est directeur de l’Institut international d’études iraniennes (Rasanah).

Twitter: @mohalsulami

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com