«Moria, par-delà l'enfer» ou l'espoir dans la détresse des réfugiés

« Chaque jour le sang coule à Moria », renchérit Candie, réfugiée de RDC (Photo, AFP)
« Chaque jour le sang coule à Moria », renchérit Candie, réfugiée de RDC (Photo, AFP)
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Publié le Lundi 14 décembre 2020

«Moria, par-delà l'enfer» ou l'espoir dans la détresse des réfugiés

  • Pendant plus de six mois, ils partagent ces tranches de vie, la colère, la détresse, l'injustice, mais surtout l'espoir et la lumière au bout du tunnel
  • «Combien de réfugiés n'ont jamais été regardés dans ce camp?»

ATHENES: Les cerfs-volants des exilés afghans flottent au-dessus du camp insalubre de Moria, aujourd'hui disparu, comme « un pied de nez à la mort, à la lourdeur, à la gravité »: « Protestez, existez, l'espoir reste important à entretenir en vous », martèle le jésuite Maurice Joyeux, qui a passé six mois de confinement aux côtés des réfugiés de Lesbos. 

Le tristement célèbre camp de Moria, le plus important camp de réfugiés d'Europe, a été réduit en cendres en septembre. Son tentaculaire bidonville a été entièrement détruit par le feu, jetant à la rue des milliers de réfugiés, dont la plupart sont aujourd'hui toujours coincés dans un camp d'urgence érigé à la hâte sur l'île grecque de Lesbos. 

Mais avant la destruction de Moria, Martouza Behboudi, un journaliste afghan réfugié en France, et le père Joyeux, alors responsable du Service jésuite des réfugiés à Athènes, décident de vivre le confinement avec les « grands oubliés » de la pandémie de coronavirus.  

Pendant plus de six mois, ils partagent ces tranches de vie, la colère, la détresse, l'injustice, mais surtout l'espoir et la lumière au bout du tunnel, comme le montre le documentaire « Moria, par-delà l'enfer », diffusé lundi sur la chaîne catholique KTO. 

Sa réalisatrice Laurence Monroe a « souhaité filmer des réfugiés qui en créant des liens, en aidant les autres, en étant créatifs trouvaient dans cet enfer un sens à leur vie ». 

Elle croise son regard avec celui de Mortaza Behboudi, reporter d'images afghan désormais français, qui a connu en 2015 l'errance dans les rues de Paris. 

« Etre attentif à ce qui est beau » 

Alors que la Grèce est déconfinée au printemps, l'enfermement des migrants de Moria est prolongé à six reprises depuis mars, en l'absence du moindre cas de coronavirus.  

Mais « au coeur des détresses (...) il est important d'être attentif à ce qui est beau », souligne Maurice Joyeux dans le film, coproduit par Tita Productions et KTO. 

« Combien de réfugiés n'ont jamais été regardés dans ce camp? », demande le prêtre qui arpente le bidonville, sandales et bermuda, se met « au rythme des personnes », les écoute et les soutient dans leurs rêves. 

L'un rêve de guitares pour mettre de la musique dans la tête des jeunes réfugiés, l'autre de fabriquer des cerfs-volants pour faire sourire les Afghans.   

L'adolescente Elaha rêve de faire l'école aux petits de Moria. Elle rêve de cahiers, de stylos. Et quand le rêve devient réalité, « les enfants m'appellent professeure, çà me remplit de joie », sourit la jeune Afghane. 

« Il y a de la souffrance, de la violence, mais ce n'est pas pour cela qu'on me volera mon espérance », prêche Maurice Joyeux à un groupe de réfugiés africains qui laissent exploser leur colère devant la caméra.  

« L'Europe c'est quoi? On n'est pas des humains? », hurle l'un d'eux. « Vous êtes en train de dormir bien, vous vivez bien, vous mangez bien, mais pourquoi vous nous traitez comme çà? », s'étrangle-t-il au milieu d'un sanglot. 

« La rudesse de leurs paroles et de leurs cris vient réveiller en nous des ressources qui peut-être ont été enfouies dans nos embourgeoisements, nos sécurités, nos peurs et nos nombrilismes », observe le père Joyeux. 

« Chaque jour, le sang coule » 

Dans ce « lieu de torture », avant le feu et les cendres, il y avait la faim, la peur, la maladie, la crasse, l'abandon de milliers de réfugiés entassés sous des abris de fortune, au milieu des détritus. 

« La nuit, je pisse dans une bouteille car j'ai peur de sortir », rapporte un Africain dans le documentaire. 

« Chaque jour le sang coule à Moria », renchérit Candie, réfugiée de RDC. « Moi on m'a violée ici à Moria », confie cette femme-médecin qui a peur d'être tuée si elle parle.   

Mais sous sa tente, elle distribue aux migrants malades les quelques médicaments qu'elle a pu réunir, du paracétamol surtout, car elle manque cruellement d'antibiotiques.  

Dans cette « prison à ciel ouvert », un autre « trouve un peu de réconfort en essayant d'aider » comme interprète.  

Le Congolais Olivier sillone Moria pour retrouver les Africains et organiser « une solidarité alimentaire comme alibi pour se lever». 

Mais « en septembre, le camp brûle totalement. Par miracle pas de mort" conclut Mortaza, en refermant le documentaire. « Mais plus rien des guitares, des cerfs-volants, des tableaux, des cahiers, tout est réduit en cendres ». Et « tout reste à faire pour accueillir dignement les réfugiés ». 


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.


Ouragan Melissa: près de 50 morts dans les Caraïbes, l'aide afflue

Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
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  • L’ouragan Melissa, le plus puissant à frapper la Jamaïque en près de 90 ans, a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque, laissant derrière lui des destructions massives et des centaines de milliers de sinistrés
  • L’aide internationale afflue vers les Caraïbes, avec des secours venus des États-Unis, du Venezuela, de la France et du Royaume-Uni, alors que les experts rappellent le rôle du réchauffement climatique dans l’intensification de ces catastrophes

CUBA: L'aide internationale afflue vendredi vers les Caraïbes dévastées par le passage de l'ouragan Melissa qui a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque.

Habitations en ruines, quartiers inondés et communications coupées... L'heure est à l'évaluation des dégâts causés par Melissa qui devrait désormais faiblir au dessus dans l'Atlantique nord après avoir passé les Bermudes.

Selon le Centre national américain des ouragans (NHC), les inondations devraient s'atténuer aux Bahamas, mais les crues pourraient demeurer à un niveau élevé à Cuba, en Jamaïque, en Haïti et en République dominicaine voisine.

Rendu plus destructeur par le réchauffement climatique, l'ouragan a été le plus puissant à toucher terre en 90 ans lorsqu'il a frappé la Jamaïque mardi en catégorie 5, la plus élevée sur l'échelle Saffir-Simpson, avec des vents d'environ 300 km/h.

"Le bilan confirmé est désormais de 19 morts" dont neuf à l'extrémité ouest de l'île, a déclaré jeudi soir la ministre jamaïcaine de l'Information Dana Morris Dixon, citée par les médias locaux.

De nombreux habitants n'ont toujours pas pu contacter leurs proches, ont expliqué les autorités. L'armée jamaïcaine s'emploie à dégager les routes bloquées, selon le gouvernement.

"Il y a eu une destruction immense, sans précédent, des infrastructures, des propriétés, des routes, des réseaux de communication et d'énergie", a déclaré depuis Kingston Dennis Zulu, coordinateur pour l'ONU dans plusieurs pays des Caraïbes. "Nos évaluations préliminaires montrent que le pays a été dévasté à des niveaux jamais vus auparavant".

- Melissa "nous a tués" -

A Haïti, pas directement touché par l'ouragan mais victime de fortes pluies, au moins 30 personnes, dont dix enfants, sont mortes, et 20 portées disparues, selon le dernier bilan des autorités communiqué jeudi. Vingt-trois de ces décès sont dus à la crue d'une rivière dans le sud-ouest du pays.

A Cuba, les communications téléphoniques et routières restent largement erratiques.

A El Cobre, dans le sud-ouest de l'île communiste, le son des marteaux résonne sous le soleil revenu: ceux dont le toit s'est envolé s'efforcent de réparer avec l'aide d'amis et de voisins, a constaté l'AFP.

Melissa "nous a tués, en nous laissant ainsi dévastés", a déclaré à l'AFP Felicia Correa, qui vit dans le sud de Cuba, près d'El Cobre. "Nous traversions déjà d'énormes difficultés. Maintenant, évidement, notre situation est bien pire."

Quelques 735.000 personnes avaient été évacuées, selon les autorités cubaines.

- Secouristes -

L'aide promise à l'internationale s'achemine dans la zone dévastée.

Les États-Unis ont mobilisé des équipes de secours en République dominicaine, en Jamaïque et aux Bahamas, selon un responsable du département d'État. Des équipes étaient également en route vers Haïti.

Le secrétaire d'État Marco Rubio a également indiqué que Cuba, ennemi idéologique, est inclus dans le dispositif américain.

Le Venezuela a envoyé 26.000 tonnes d'aide humanitaire à son allié cubain.

Le président du Salvador Nayib Bukele a annoncé sur X envoyer vendredi "trois avions d'aide humanitaire en Jamaïque" avec "plus de 300 secouristes" et "50 tonnes" de produits vitaux.

Kits de première nécessité, unités de traitement de l'eau: la France prévoit de livrer "dans les prochains jours" par voie maritime une cargaison d'aide humanitaire d'urgence en Jamaïque, selon le ministère des Affaires étrangères.

Le Royaume-Uni a débloqué une aide financière d'urgence de 2,5 millions de livres (2,8 millions d'euros) pour les pays touchés.

Le changement climatique causé par les activités humaines a rendu l'ouragan plus puissant et destructeur, selon une étude publiée mardi par des climatologues de l'Imperial College de Londres.

"Chaque désastre climatique est un rappel tragique de l'urgence de limiter chaque fraction de degré de réchauffement, principalement causé par la combustion de quantités excessives de charbon, de pétrole et de gaz", a déclaré Simon Stiell, secrétaire exécutif de l'ONU chargé du changement climatique, alors que la grande conférence climatique des Nations unies COP30 s'ouvre dans quelques jours au Brésil.

Avec le réchauffement de la surface des océans, la fréquence des cyclones (ou ouragans ou typhons), les plus intenses augmente, mais pas leur nombre total, selon le groupe d'experts du climat mandatés par l'ONU, le Giec.