Frankly Speaking: Que faudra-t-il pour normaliser les liens entre l’Arabie saoudite et Israël ?

Le Professeur Yossi Mekelberg apparaît dans l'émission «Frankly Speaking» animée par Katie Jensen (Photo : AN).
Le Professeur Yossi Mekelberg apparaît dans l'émission «Frankly Speaking» animée par Katie Jensen (Photo : AN).
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Publié le Lundi 07 août 2023

Frankly Speaking: Que faudra-t-il pour normaliser les liens entre l’Arabie saoudite et Israël ?

  • Le Professeur Yossi Mekelberg de Chatham House affirme qu'Israël doit répondre aux conditions de l'Initiative de paix arabe
  • Netanyahou cherche à laisser un héritage de paix à travers des accords de normalisation, tout en essayant de satisfaire les partis politiques d'extrême droite

DUBAÏ : Israël doit respecter les conditions énoncées dans l'Initiative de paix arabe proposée par Riyad en 2002 pour que tout rêve de normalisation des liens avec l'Arabie saoudite se concrétise, a déclaré Yossi Mekelberg, membre associé du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord à Chatham House.

Dans le dernier épisode de «Frankly Speaking», l'émission hebdomadaire d'actualités d'Arab News, Mekelberg a affirmé que l'Initiative de paix arabe est «aussi pertinente aujourd'hui qu'il y a 21 ans» en tant que moyen de mettre fin au conflit et d'atteindre la normalisation.

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Le Professeur Yossi Mekelberg apparaît dans l'émission «Frankly Speaking» animée par Katie Jensen (Photo : AN).

Les enjeux politiques d'une normalisation

Dans une chronique récente pour le New York Times, Thomas Friedman a estimé qu'un accord de normalisation entre l'Arabie saoudite et Israël contraindrait les éléments d'extrême droite au sein du cabinet du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu à choisir entre l'annexion de nouveaux territoires palestiniens et l'acceptation de la paix avec les mondes arabe et islamique.

Le journaliste lauréat du prix Pulitzer doit connaître l'importance de ce développement potentiel : c'est lui qui a révélé les détails de l'initiative du roi Abdallah dans une célèbre chronique en 2002.

L'Initiative de paix arabe, proposée par le feu roi Abdallah d'Arabie saoudite en 2002, a été approuvée par la Ligue arabe la même année lors du Sommet de Beyrouth. Elle a été réaffirmée lors des sommets de la Ligue arabe en 2007 et en 2017.

Cette initiative offrait une normalisation des relations arabo-israéliennes en échange d'un retrait total d'Israël des territoires arabes occupés, d'un «règlement juste» du problème des réfugiés palestiniens et de l'établissement d'un État palestinien avec Jérusalem-Est comme capitale.

Mekelberg a déclaré : «Je pense que c'est en réalité l'Arabie saoudite qui a donné le bon ton pour la normalisation avec Israël – qu’il s’agit de quelque chose de souhaitable, quelque chose de possible.»

«Or, en même temps, il y a une condition : qu’Israël et les Palestiniens résolvent tous leurs problèmes en suspens.»

«Juste pour rappeler aux téléspectateurs, c'était en 2002, c'était à l'apogée de la deuxième ‘intifada’, à une époque où cette percée ne semblait pas possible. Mais cela aurait pu être une véritable percée si Riyadh avait adopté la bonne approche.

«Israël a en réalité rejeté l'offre qui a été traduite dans l'ensemble de la déclaration. Je pense que c'est aussi pertinent aujourd'hui qu’il y a 21 ans. Et qu’il s’agit peut-être de la direction à suivre.»

L'Arabie saoudite et plusieurs autres États veulent toujours voir l'Initiative de paix arabe mise en œuvre avant de considérer une normalisation formelle avec Israël.

Selon Friedman, tout accord négocié par les États-Unis visant à normaliser les relations entre l'Arabie saoudite et Israël nécessiterait que Washington donne à Riyad certaines garanties de sécurité. Il a déclaré que l'accord pourrait échouer à se concrétiser si les démocrates du Sénat américain étaient rebutés par le tournant anti-démocratique se produisant en Israël.

Il a exhorté le président américain Joe Biden et son administration à exercer des pressions sur leurs homologues israéliens afin de freiner l'agenda extrême du gouvernement et ses tentatives de démantèlement du processus de paix d'Oslo et de la feuille de route pour une solution à deux États.

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Le président américain Joe Biden rencontre le président israélien Isaac Herzog dans le bureau ovale de la Maison Blanche à Washington, DC (Dossier/AFP).

«Si je comprends bien ce que dit Friedman, c'est qu'il est possible de changer l'avis de l'aile droite très conservatrice, du parti religieux sioniste, de personnes comme Itamar Ben-Gvir et Bezalel Smotrich, ainsi que de leurs partisans, afin qu'ils fassent des concessions nécessaires pour la paix, en échange d'une normalisation et d'une acceptation dans la région. Si cela est possible, pourquoi ne pas le faire ? Mais personnellement, je ne vois pas cela se produire,» a déclaré Mekelberg.

Concernant la menace d'un procès pour corruption, Mekelberg a affirmé : «Netanyahu ne peut pas se permettre que le gouvernement s’effondre... sa principale préoccupation est de trouver un moyen de faire dérailler ce procès pour corruption et d'éviter de potentiellement aller en prison.»

Les efforts américains pour une paix régionale

Les États-Unis poussent en faveur d'un accord de paix entre l'Arabie saoudite et Israël depuis la visite du président Biden dans le royaume l'année dernière. D'autres visites de haut niveau du conseiller à la sécurité nationale, Jake Sullivan, et du secrétaire d'État, Antony Blinken, cette année, se sont également concentrées sur les efforts de normalisation.

Cependant, bien que Blinken ait déclaré lors de la conférence de l'AIPAC à Washington en juin que toute normalisation «devrait favoriser le bien-être du peuple palestinien», il n'est pas clair si les États-Unis pousseront pour un gel des colonies israéliennes ou une promesse de ne jamais annexer la Cisjordanie.

Selon des rapports d'Axios, la Maison Blanche souhaite parvenir à un accord entre l'Arabie saoudite et Israël avant la fin de l'année afin de donner un grand élan à l'administration Biden dans la course électorale en vue des élections de 2024.

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Le secrétaire d'État américain Antony Blinken prononce une allocution lors du sommet politique de l'American Israel Public Affairs Committee (AIPAC) à Washington (Fichier/Reuters).

Mekelberg a ajouté : «en principe, Washington peut exercer une grande influence sur Israël en raison de la relation d'alliance étroite entre les deux pays», mais il a déclaré ne pas s'attendre à ce que Biden utilise cette «influence ou pouvoir... pendant (une) année électorale».

Selon Mekelberg, la normalisation ne réussira que si Netanyahu et son gouvernement décident que le procès pour corruption «est secondaire par rapport à la normalisation avec l'Arabie saoudite» et que c'est «important pour l'avenir d'Israël. Il s’agit d’assurer la sécurité et la prospérité d'Israël à long terme.»

Cependant, il a ajouté que cela nécessiterait que les partis politiques israéliens «descendent d'un arbre très, très haut», ce qui serait difficile.

Mekelberg a déclaré que, bien que toute normalisation «soit une cause de célébration», les efforts déployés par d'autres pays de la région visant à améliorer les relations diplomatiques avec Israël par le passé n'ont pas donné les résultats attendus.

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Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et les ministres des Affaires étrangères de Bahreïn et des Émirats arabes unis signent à la Maison Blanche des accords historiques normalisant les relations entre les États juif et arabe (Dossier/AFP).

Il a qualifié les Accords d'Abraham en 2020 entre Israël et des pays tels que les Émirats arabes unis, Bahreïn, le Soudan et le Maroc de «développement positif», mais a ajouté : «Cela vous laissait toujours avec la question palestinienne. C’était le sujet délicat, et cela reste le sujet délicat aujourd’hui.»

Mekelberg estime qu'Israël a utilisé les Accords d'Abraham pour «se sentir plus en sécurité» et «prendre encore plus de risques» contre les Palestiniens. Il a déclaré que le sentiment sous-jacent au sein du gouvernement israélien était que «le monde entier ne se soucie plus des Palestiniens. Nous pouvons obtenir la normalisation gratuitement.»

La perspective d'une normalisation entre l'Arabie saoudite et Israël suscite à la fois l'anticipation et le scepticisme ces dernières semaines. Mekelberg estime que des progrès diplomatiques ont été réalisés, mais que la route vers une normalisation complète reste remplie de défis.

Alors que Netanyahu prétend depuis longtemps que la normalisation est une priorité absolue pour son gouvernement et qu'elle pourrait conduire à la fin du conflit au Moyen-Orient, Mekelberg s'inquiète que Netanyahu soit un «chef faible, pris en otage» par son gouvernement d'ultra-droite.

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Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu s'exprime lors de la réunion hebdomadaire du cabinet au bureau du Premier ministre à Jérusalem (Dossier/AFP).

L'Arabie saoudite a toujours affirmé que le succès d'une normalisation entre l'Arabie saoudite et Israël dépendait de la manière dont Israël aborde la situation du peuple palestinien et trouve une solution juste que ce dernier acceptera.

Le prince héritier saoudien, Mohamed ben Salmane, a souligné cette position lors du Sommet de la Ligue arabe à Djeddah en mai, en affirmant que «la question palestinienne était et reste la question centrale pour les pays arabes, et elle est en tête des priorités du Royaume.»

Mais tandis que l'Arabie saoudite continue de soutenir la création d'un État palestinien et, en fin de compte, la paix au Moyen-Orient, Mekelberg semble sceptique quant aux priorités de Netanyahu.

Il a déclaré que Netanyahou «rêve publiquement d'avoir des trains allant jusqu'à Djeddah et Riyad, mais il oublie que cela implique certaines choses, certaines concessions qu'il doit faire avant que cela devienne une réalité.»

Bien que la normalisation entre des adversaires historiques «soit possible», il ne voit aucune preuve que le gouvernement d'ultra-droite d'Israël fera les concessions nécessaires pour les Palestiniens qui satisferont le Royaume.

Mekelberg a ajouté que «Israël traverse une énorme crise», déstabilisée par les manifestations hebdomadaires et les réformes judiciaires que les critiques estiment menacer la démocratie du pays.

Les défis internes d'Israël: réformes judiciaires et démocratie en jeu

En raison des nouvelles réformes judiciaires de Netanyahou, «des centaines de milliers de personnes sont dans les rues, et en même temps, les colonies se développent. Il s'agit du gouvernement le plus d'ultra-droite en Israël. Donc, la normalisation, oui, mais probablement pas pour le moment.»

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L'animatrice de Frankly Speaking Katie Jensen (Photo : AN).

Les nouvelles réformes politiques adoptées récemment par la Knesset suscitent de vives inquiétudes, notamment la loi abolissant la «doctrine du raisonnable»

Jusqu'à présent, la Cour suprême d'Israël pouvait intervenir lorsque le gouvernement agissait de manière imprudente. Mais le mois dernier, les 64 membres du gouvernement ont voté pour abolir cette loi. Cela signifie que le gouvernement d'Israël peut passer outre à toutes les décisions de la Cour suprême avec une petite majorité.

Ces réformes controversées ont divisé le pays, avec des manifestations de masse et des affrontements avec la police chaque semaine depuis le début de l'année. Des centaines de milliers de personnes ont participé, et un grand nombre ont été arrêtées.

Selon Mekelberg, les réformes judiciaires sont un «véritable danger» pour Israël. Il accuse le gouvernement actuel de s'éloigner de la démocratie.

Selon lui, Netanyahu est maintenant pris dans une impasse politique où il souhaite «laisser un héritage... de paix... avec la normalisation de l'Arabie saoudite (et Israël) et achever les Accords d'Abraham», tout en essayant de satisfaire son gouvernement d'ultra-droite, qui pousse à des changements encore plus radicaux dans la constitution.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com 

 


Le nombre de prix remportés par Arab News s’élève à cent vingt-cinq, avec trois nouvelles récompenses au concours Newspaper Design

Les reconnaissances passées englobent une gamme de projets spéciaux, notamment la couverture du « Règne animal saoudien », le « Guide étape par étape du Hajj 2023 » et l'édition spéciale de la « Coupe du monde de la FIFA Qatar 2022 ». (Photo, AN)
Les reconnaissances passées englobent une gamme de projets spéciaux, notamment la couverture du « Règne animal saoudien », le « Guide étape par étape du Hajj 2023 » et l'édition spéciale de la « Coupe du monde de la FIFA Qatar 2022 ». (Photo, AN)
Les reconnaissances passées englobent une gamme de projets spéciaux, notamment la couverture du « Règne animal saoudien », le « Guide étape par étape du Hajj 2023 » et l'édition spéciale de la « Coupe du monde de la FIFA Qatar 2022 ». (Photo, AN)
Les reconnaissances passées englobent une gamme de projets spéciaux, notamment la couverture du « Règne animal saoudien », le « Guide étape par étape du Hajj 2023 » et l'édition spéciale de la « Coupe du monde de la FIFA Qatar 2022 ». (Photo, AN)
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  • Présidé par Mario Garcia, le jury de cette année a félicité Arab News pour son innovation et ses prouesses en matière de narration visuelle
  • Ces distinctions témoignent de l’évolution éditoriale d’Arab News sous la direction de son rédacteur en chef, Faisal J. Abbas, qui a mené sa relance en 2018

LONDRES: Arab News, le premier quotidien anglophone d’Arabie saoudite, a remporté trois prix d’excellence lors du 6e concours Newspaper Design, ce qui porte le nombre total de récompenses à cent vingt-cinq depuis sa relance, en 2018.

The Kingdom's Bride and Joy La Mariée et la Joie du Royaume»), qui était une édition papier spéciale consacrée au mariage royal jordanien, a remporté le prix de la meilleure page, et Riyadh: A city steeped in history Riyad: une ville chargée d’histoire») celui de la meilleure double page. Accession to the British ThroneL’accession au trône britannique») a obtenu le prix de la meilleure infographie pour la couverture spéciale qu’Arab News a réservée au couronnement du roi Charles III, l’année dernière.

Créé en 2009, Newspaper Design est le premier site Internet d’Asie consacré à la conception de journaux. Il récompense les contributions exceptionnelles à la conception de journaux, tant dans les médias imprimés qu’en ligne.

Présidé par Mario Garcia, un concepteur de médias américano-cubain de renommée mondiale, le jury de cette année a félicité Arab News pour son innovation et ses prouesses en matière de narration visuelle.

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La page The Kingdom's Bride and Joy, qui commémore l’union historique entre le prince héritier Hussein de Jordanie et la Saoudienne Rajwa al-Saif, a été saluée pour son illustration cinématographique, qui soulignait l’importance de l’événement. «Cette page commémore un événement historique. Elle en saisit l’ampleur et la signification grâce à une illustration soignée qui ressemble davantage à une affiche de film remarquablement conçue qu’à une simple première page de journal», ont estimé les juges.

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De même, la page consacrée à la fête nationale de l’Arabie saoudite et à la campagne d’Arab News sur l’Expo 2030 a été saluée pour son mélange innovant de photographies de paysages et d’illustrations. Ce document raconte de manière lumineuse l'histoire de la ville de Riyad.

La couverture par Arab News de l’accession au trône du roi Charles III en mai dernier a été récompensée pour ses infographies élégantes et festives. En décembre, la page a également été récompensée dans la catégorie «Suppléments» pour les occasions spéciales des European Newspaper Awards.

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Ces distinctions témoignent de l’évolution éditoriale d’Arab News sous la direction de son rédacteur en chef, Faisal J. Abbas, qui a mené sa relance en 2018.

Sous la direction d’Omar Nashashibi, chef du département de conception, Arab News continue de recevoir des éloges et a récemment reçu plusieurs prix lors de la 59e édition de la prestigieuse Society of Publications Designers, notamment pour sa première page Onions' tears and inflation fears et pour sa conception personnalisée de l’enquête spéciale The Kingdom vs Captagon («Le Royaume contre le Captagon»).

Les récompenses obtenues par le passé englobent toute une série de projets spéciaux, notamment plusieurs prix internationaux pour la couverture du «Royaume animal saoudien», pour le «Guide du Hajj 2023, étape par étape» et pour l'édition spéciale de la «Coupe du monde de football 2022 au Qatar».

Pour plus d’informations sur Arab News et ses projets primés, consultez le lien suivant: https://www.arabnews.com/greatesthits

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le roi et le prince héritier saoudiens présentent leurs condoléances au président des EAU à la suite du décès d’un haut responsable

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  • Le roi Salmane a fait part de ses «plus profondes et sincères condoléances» après le décès du cheikh Tahnoun ben Mohammed al-Nahyane
  • Le prince héritier, Mohammed ben Salmane, a lui aussi exprimé ses «condoléances les plus chaleureuses et les plus sincères»

RIYAD: Le roi Salmane et le prince héritier d’Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, ont présenté jeudi leurs condoléances au président des Émirats arabes unis (EAU) après le décès d’un haut responsable et membre de la famille royale, a rapporté l’agence de presse saoudienne (SPA).

Dans un télégramme adressé au cheikh Mohammed ben Zayed al-Nahyane, le roi Salmane a fait part de ses «plus profondes et sincères condoléances» après le décès du cheikh Tahnoun ben Mohammed al-Nahyane, représentant de l’émir d’Abu Dhabi à Al-Aïn, le 1er mai 2024.

Le prince héritier, Mohammed ben Salmane, a lui aussi exprimé ses «condoléances les plus chaleureuses et les plus sincères» dans un télégramme séparé adressé au président émirati, selon la SPA.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Gaza: le coût de la reconstruction estimé entre 30 et 40 milliards de dollars, selon l'ONU

Près de sept mois de bombardements israéliens ont causé des milliards de dollars de dégâts, réduisant en tas de nombreux immeubles en béton de grande hauteur de la bande surpeuplée. (AFP)
Près de sept mois de bombardements israéliens ont causé des milliards de dollars de dégâts, réduisant en tas de nombreux immeubles en béton de grande hauteur de la bande surpeuplée. (AFP)
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  • Les estimations du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) pour tout reconstruire dans la bande de Gaza dépassent les 30 milliards de dollars, pouvant aller jusqu'à 40 milliards de dollars
  • Si la reconstruction de Gaza devait être menée selon le processus traditionnel, cela pourrait prendre des décennies, et le peuple palestinien n'a pas le luxe de patientersi longtemps

AMMAN: L'ONU a estimé jeudi entre 30 et 40 milliards de dollars le coût de la reconstruction de la bande de Gaza, ravagée depuis bientôt sept mois par une guerre dévastatrice entre Israël et le Hamas palestinien, à cause de l'ampleur sans précédent des destructions.

"Les estimations du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) pour tout reconstruire dans la bande de Gaza dépassent les 30 milliards de dollars, pouvant aller jusqu'à 40 milliards de dollars", a déclaré Abdallah al-Dardari, directeur du bureau régional pour les Etats arabes du PNUD, lors d'une conférence de presse à Amman.

"L'ampleur de la destruction est énorme et sans précédent (...) C'est une mission à laquelle la communauté internationale n'a pas été confrontée depuis la Seconde Guerre mondiale", a encore dit M. Dardari, également sous-secrétaire général de l'ONU.

Il a indiqué que "des discussions ont eu lieu concernant le financement (de la reconstruction) avec des pays arabes", faisant état de "signaux extrêmement positifs", sans donner plus de détails.

Il a ajouté que si la reconstruction de Gaza devait être menée selon le processus traditionnel, "cela pourrait prendre des décennies, et le peuple palestinien n'a pas le luxe de patienter" si longtemps.

"Il est donc important que nous agissions rapidement pour reloger les gens dans des logements décents et rétablir leur vie normale sur les plans économique, social, sanitaire et éducatif. C'est notre priorité absolue, et cela doit être réalisé dans les trois premières années suivant la cessation des hostilités."

En outre, il a estimé à "37 millions de tonnes" le total des décombres accumulés à la suite des bombardements et des explosions. "Nous parlons d'un chiffre colossal, et ce chiffre augmente tous les jours. Les dernières données indiquent qu'il approche déjà les 40 millions de tonnes".

Chute du PIB

Le responsable de l'ONU a d'autre part précisé que "72% de tous les bâtiments résidentiels avaient été entièrement ou partiellement détruits".

Aussi, "le développement humain à Gaza, dans tous ses aspects, notamment la santé, l'éducation, l'économie et les infrastructures, a reculé de 40 ans. Quarante années d'efforts et d'investissements sont parties en fumée".

"La reconstruction doit être minutieusement planifiée, efficace et d'une manière extrêmement flexible, car nous ignorons comment la guerre prendra fin" et quel type de gouvernance sera établi dans la bande de Gaza, a-t-il encore dit.

M. Dardari a souligné l'importance d'une préparation en amont pour pouvoir agir dès la fin des hostilités. "Nous devons être prêts pour fournir des logements temporaires décents, déblayer les décombres et nous occuper des milliers de cadavres qui se trouvent sous ces décombres".

Le PNUD estime dans un rapport publié jeudi que la guerre devrait entraîner en 2024 une perte de 26,9% du PIB pour l'ensemble des Territoires palestiniens, par rapport aux projections initiales du bureau palestinien des statistiques.

Avant le début de la guerre le 7 octobre, la croissance palestinienne était prévue à 3,5% en 2023, mais l'année s'était achevée sur une récession de 5,5% - une différence presque totalement due à l'effondrement de l'économie gazaouie, qui a reculé de plus 90% sur les trois derniers mois de l'année.

La Cisjordanie occupée est également concernée, son économie chutant de 18,8% sur le dernier trimestre 2023 par rapport à la même période un an plus tôt.

"La guerre dévastatrice à Gaza entraînera un coût économique et social pour les futures générations qui entraveront la reprise post-guerre et le développement dans l'ensemble des territoires palestiniens occupés", a ajouté le rapport.

L'espérance de vie dans l'ensemble des territoires palestiniens a chuté de quatre ans et pourrait même perdre sept années si la guerre dure trois mois de plus.