Pourquoi le Maroc devient le partenaire de choix de l’Europe en matière d’énergies renouvelables

Les experts considèrent l’énergie solaire comme une solution viable pour les zones sous-développées au Maroc. (AFP)
Les experts considèrent l’énergie solaire comme une solution viable pour les zones sous-développées au Maroc. (AFP)
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Publié le Jeudi 10 août 2023

Pourquoi le Maroc devient le partenaire de choix de l’Europe en matière d’énergies renouvelables

  • Situé aux portes de l’Europe et armé de plans ambitieux visant à produire 52% de son électricité domestique à partir d’énergies renouvelables d’ici à 2030, le Maroc fait figure de partenaire énergétique prometteur
  • Avec plus de 3 100 kilomètres de côtes le long de l’Atlantique et de l’Afrique, le Maroc possède un vaste potentiel inexploité d’énergie houlomotrice qui attire des investissements de diverses sources

DJOUBA (Soudan du Sud): Les vagues de chaleur torride qui ont touché l’hémisphère nord tout au long de cet été nous rappellent brutalement la nécessité de mettre en place des solutions énergétiques durables. Toutefois, il y a une bonne nouvelle: un pays arabe s’est positionné comme un fournisseur potentiel d’énergie solaire pour le marché énergivore européen.

Le Maroc a développé un secteur de l’énergie solaire dynamique, utilisant le soleil toute l’année, de grands espaces ouverts pour des projets d’infrastructure et l’accès à des millions d’euros pour le financement du développement de l’Union européenne (UE).

La crise énergétique en Europe, venant s’ajouter à l’urgence de relever le défi du réchauffement climatique, catalyse les efforts qui visent à rechercher de nouvelles sources d’énergie propre et renouvelable.

Situé aux portes de l’Europe et armé de plans ambitieux qui ont pour ambition de produire 52% de son électricité domestique à partir d’énergies renouvelables d’ici à 2030, le Maroc fait figure de partenaire énergétique prometteur.

L’idée est d’exporter une quantité importante de sa capacité d’énergie solaire au moyen de câbles sous-marins vers l’Europe – une initiative qui promet de renforcer la transition énergétique propre du continent et qui, par ailleurs, aide le Maroc à atteindre ses objectifs en matière de développement.

Plus tôt au cours de cette année, l’UE s’est engagée dans des programmes d’une valeur de 624 millions d’euros pour soutenir la transition du Maroc vers «l’énergie verte», lutter contre la migration irrégulière et faciliter des réformes clés dans des domaines cruciaux comme la protection sociale, les politiques climatiques et l’administration publique.

Malgré son énorme potentiel inexploité, le Maroc fait face à des défis dans l’expansion de sa capacité d’énergie renouvelable. Actuellement, 90% de son énergie dépend des importations, principalement des combustibles fossiles.

L’augmentation de la production d’énergie solaire et éolienne pourrait stimuler la croissance économique, créer des emplois indispensables et dissocier le pays de la volatilité des prix des combustibles fossiles. (AFP)
L’augmentation de la production d’énergie solaire et éolienne pourrait stimuler la croissance économique, créer des emplois indispensables et dissocier le pays de la volatilité des prix des combustibles fossiles. (AFP)

La transition vers les énergies renouvelables nécessite à elle seule des investissements considérables, estimés à 52 milliards de dollars (1 dollar = 0,91 euro) en vue d’atteindre les objectifs du Maroc pour 2030.

Les institutions mondiales ont fourni une aide financière à la croissance du secteur des énergies renouvelables, mais la suppression des obstacles bureaucratiques à l’investissement privé demeure essentielle.

En outre, l’adoption par la région des énergies renouvelables suscite de nombreuses critiques de la part de personnes qui s’inquiètent de l’incidence environnementale des projets d’infrastructure massifs et de l’utilisation accrue de l’eau dans les régions arides.

Ce qui est incontestable, c’est que le Maroc, en se considérant comme un centre pour l’énergie propre, avec le potentiel d’exporter de l’électricité vers l’Europe, est un modèle à suivre pour d’autres pays.

«Les ambitions du Maroc en matière d’énergies renouvelables présentent une proposition bénéfique aussi bien pour l’Europe que pour le pays lui-même», déclare Grammenos Mastrojeni, secrétaire général adjoint de l’Union pour la Méditerranée, dans un entretien accordé à Arab News.

«Historiquement, l’énergie a toujours été considérée comme une question nationale et de souveraineté. Aujourd’hui, le changement climatique a changé la donne. Pour rendre le système fonctionnel, nous devons commencer à raisonner en termes de coopération régionale.»

Le Maroc n’est pas le seul pays arabe à privilégier le développement de l’énergie solaire. Les États du Golfe accélèrent également leur transition vers les énergies renouvelables en lançant d’ambitieux projets d’infrastructures destinés à réduire leur dépendance au pétrole et au gaz pour répondre aux besoins énergétiques domestiques.

L’Arabie saoudite a pour objectif d’augmenter considérablement sa capacité totale d’énergie solaire d’ici à 2030. Parmi les plans de développement spécifiques du Royaume, on compte la ville intelligente Neom, qui comprendra une usine d’hydrogène d’un montant de 5 milliards de dollars, ainsi que le projet de la mer Rouge, qui aura la capacité de générer 400 mégawatts (MW) d’énergie solaire et accueillera le plus grand projet de stockage d’énergie hors réseau du monde à ce jour.

Alors que l’Europe et l’Afrique du Nord sont caractérisées par des marchés fragmentés, des inégalités économiques importantes et des schémas démographiques inégaux, les conséquences potentiellement néfastes du changement climatique ne peuvent être surestimées.

M. Mastrojeni pense qu’une solution pour surmonter ces défis réside dans l’intégration des marchés de l’énergie, puisqu’elle offre un potentiel de sécurité énergétique partagée et des avantages macroéconomiques dans la région.

EN CHIFFRES

 

  • 52% de l’objectif d’énergie renouvelable du Maroc pour 2030
  • 18,3% de l’objectif de réduction des émissions du Maroc d’ici à 2030.

  • Objectif d’énergie renouvelable de 58,7 GW pour l’Arabie saoudite en 2030.

  • Objectif d’énergie propre de 14 GW pour les EAU en 2030.

  • 33 GW supplémentaires à la capacité installée d’énergies renouvelables dans la région Mena d’ici à 2026.

 

«L’un des avantages importants de la production d’énergie intégrée au niveau régional est sa capacité à stimuler une forte croissance économique», précise M. Mastrojeni.

L’augmentation de la production d’énergie solaire et éolienne pourrait stimuler la croissance économique, créer des emplois indispensables et dissocier le pays de la volatilité des prix des combustibles fossiles.

Pour l’Europe, l’approvisionnement en énergie propre du Maroc offre une solution viable pour diversifier les sources d’énergie et réduire la dépendance aux combustibles fossiles, en particulier à la suite de la crise énergétique liée au conflit en Ukraine.

Historiquement, l’Afrique du Nord a été un fournisseur important de combustibles fossiles pour l’Europe, alimentant les voitures et chauffant les maisons à travers le continent.

Cependant, en raison du besoin urgent de transition vers la durabilité, au moins six nouveaux projets sont envisagés pour transporter de l’électricité à partir des installations solaires et éoliennes d’Afrique du Nord vers l’Europe au moyen de câbles sous-marins.

Un projet important, dirigé par Xlinks Ltd., prévoit de connecter un câble sous-marin de plus de 3 200 kilomètres entre la côte atlantique du Maroc et le sud de l’Angleterre. Cette entreprise ambitieuse a suscité un intérêt considérable chez les investisseurs, avec des fonds de 30 millions de livres sterling (34,8 millions d’euros) promis par des investisseurs du Royaume-Uni et des Émirats arabes unis.

Bien que le projet entraîne des coûts considérables, il a le potentiel d’alimenter environ sept millions de foyers au Royaume-Uni et d’aider le pays à atteindre son objectif zéro émission nette de carbone d’ici à 2035. Cependant, certains experts ont mis en garde contre le recours exclusif à un seul fournisseur pour l’énergie.

Laura el-Katiri, spécialiste de l’économie de l’énergie, suggère que la connexion complète des installations solaires et éoliennes en Afrique au réseau européen garantirait un approvisionnement énergétique plus robuste et plus sûr.

Plusieurs pays explorent actuellement des connexions bidirectionnelles qui permettraient également à l’électricité de circuler vers le sud pendant les périodes d’excès de puissance sur les réseaux européens.

Ces propositions mettent en évidence les avantages qui consistent à mettre en rapport des pays aux conditions météorologiques diverses, ce qui leur permettrait de se soutenir mutuellement pendant les périodes de vent local faible ou d’ensoleillement limité.

Malgré les précédentes tentatives, infructueuses, d’exploiter les énergies renouvelables dans la région, les avantages potentiels de l’utilisation des abondantes ressources solaires et éoliennes de l’Afrique du Nord l’emportent sur les risques.

Les progrès du Maroc dans le domaine des énergies renouvelables sont évidents à travers des projets comme le complexe solaire Noor Ouarzazate, qui est la plus grande centrale solaire concentrée du monde.

S’étendant sur des milliers d’hectares avec ses réseaux de miroirs, cette installation illustre le potentiel de transformation de l’exploitation de l’énergie solaire.

Dans une ville côtière du sud-est du Maroc se trouve un autre projet géant d’énergie renouvelable, le parc éolien de Tarfaya, qui constitue l’une des plus grandes installations de ce type dans toute l’Afrique.

Alors que la perspective d’une électricité moins chère et plus propre a suscité des attentes dans une région en proie à un chômage élevé et à un pouvoir d’achat limité, il existe toujours des communautés qui attendent que les promesses soient tenues.

Hajar Knamlichi, membre du conseil d’administration de l’Alliance marocaine pour le climat et le développement durable, un réseau de 800 organisations de la société civile environnementale, fait savoir que toutes les parties régionales concernées devraient s’efforcer d’obtenir des avantages équitables en matière de coopération énergétique.

«Il n’est pas juste de se concentrer uniquement sur la production d’énergie propre pour l’exportation en laissant de côté les avantages auxquels un plus grand nombre de personnes peuvent avoir accès localement comme l’électricité, la lutte contre la précarité électrique et les avantages économiques de la production d’énergie renouvelable à usage local», explique-t-elle à Arab News.

L’énergie solaire est considérée comme une solution viable dans la région élargie de l’Afrique du Nord ainsi qu’un nouveau paradigme industriel pour la production d’électricité. (AFP)
L’énergie solaire est considérée comme une solution viable dans la région élargie de l’Afrique du Nord ainsi qu’un nouveau paradigme industriel pour la production d’électricité. (AFP)

Cependant, face aux phénomènes météorologiques extrêmes et à la hausse des températures, l’adaptation est tout aussi essentielle. Les experts en ressources naturelles soulignent l’importance de la technologie de capture et de stockage du carbone pour atténuer les émissions des installations de production de pétrole et de gaz existantes.

En outre, alors que le Maroc cherche à passer des sources d’énergie traditionnelles à des solutions respectueuses de l’environnement, sa recherche de solutions de pointe a déclenché une vague d’exploration de l’énergie des vagues, qui marque un effort pionnier en Afrique.

En tant que première du genre sur le continent, cette entreprise ambitieuse fait tourner les têtes et suscite un intérêt mondial.

Mohamed Taha el-Ouaryachi, cofondateur de Wave Beat, une entreprise énergétique innovante, a développé des technologies capables d’exploiter la puissance des marées océaniques pour produire de l’électricité.

«L’entreprise est animée par un sens aigu des responsabilités envers la société et l’environnement», indique M. El-Ouaryachi à Arab News. «Nous tentons de contribuer de manière significative à la transition énergétique en cours au Maroc.»

Avec plus de 3 100 kilomètres de côtes le long de l’Atlantique et de l’Afrique, le Maroc possède un vaste potentiel inexploité d’énergie houlomotrice, attirant des investissements de diverses sources, notamment la Banque mondiale et des investisseurs privés du Moyen-Orient, des États-Unis et d’Europe.

Pour M. Mastrojeni, de l’Union pour la Méditerranée, les canicules torrides de l’hémisphère nord et les conditions météorologiques instables sont la preuve que la transition vers des sources d’énergie durables ne peut pas attendre.

Pour cette raison, souligne-t-il, «notre engagement commun à nous adapter, à innover et à renforcer la résilience face aux défis climatiques a le pouvoir de remodeler les réalités du changement climatique», conclut-il.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L'aéroport de Riyad presque à l'arrêt en raison de problèmes opérationnels

 L'aéroport international King Khalid à Riyad. Getty
L'aéroport international King Khalid à Riyad. Getty
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  • Les compagnies aériennes publient des déclarations, tandis que des sources indiquent à Arab News que la pluie est à blâmer
  • Dans son propre communiqué, Saudia a déclaré : "Les clients touchés sont contactés par l'intermédiaire de la compagnie aérienne"

RIYAD: Des milliers de passagers voyageant vers et depuis l'aéroport international King Khalid de Riyad ont été laissés en plan alors que les principales compagnies aériennes se sont efforcées de proposer des vols alternatifs suite à une série d'annulations et de retards.

Saudia et flyadeal ont été parmi les compagnies aériennes qui ont rencontré des difficultés, les deux compagnies ayant publié des déclarations attribuant ces problèmes à des problèmes opérationnels temporaires.

Une déclaration de l'aéroport sur son compte officiel X a exhorté les voyageurs à contacter directement les compagnies aériennes avant de se rendre à la plate-forme d'aviation pour vérifier l'état actualisé et l'horaire de leurs vols.

Le communiqué dit ceci : "L'aéroport international King Khalid souhaite vous informer qu'en raison de la concomitance d'un certain nombre de facteurs opérationnels au cours des deux derniers jours - y compris plusieurs vols détournés d'autres aéroports vers l'aéroport international King Khalid, en plus des travaux de maintenance programmés dans le système d'approvisionnement en carburant - cela a eu un impact sur les horaires de certains vols, y compris le retard ou l'annulation d'un certain nombre de vols opérés par certaines compagnies aériennes".

L'aéroport a ajouté que les équipes opérationnelles travaillent "24 heures sur 24 en étroite coordination avec nos partenaires aériens et les parties prenantes concernées pour faire face aux développements et rétablir la régularité opérationnelle dès que possible", tout en prenant toutes les mesures nécessaires pour minimiser l'impact sur l'expérience des passagers.

Des sources aéroportuaires ont déclaré à Arab News que le problème était lié aux fortes pluies qui se sont abattues sur Riyad plus tôt dans la journée de vendredi. De l'eau s'est apparemment infiltrée dans les réservoirs de carburant censés ravitailler les avions à réaction avant leur décollage, et plusieurs compagnies aériennes se sont alors efforcées de reprogrammer les vols des passagers.

Dans son propre communiqué, Saudia a déclaré : "Les clients touchés sont contactés par l'intermédiaire de la compagnie aérienne : "Les clients concernés sont contactés par le biais de divers canaux de communication, et tous les changements de billets sont effectués sans frais supplémentaires.

Arab News a contacté Saudia pour de plus amples informations.

Toujours dans un communiqué publié sur X, flyadeal a déclaré que tous ses passagers touchés par la perturbation "seront informés directement par e-mail et SMS des options de rebooking et d'assistance".


IA: pour la présidente de Microsoft France, il n'y a pas de «bulle»

 "Je ne crois pas du tout à la bulle" de l'intelligence artificielle (IA), assure lors d'un entretien à l'AFP Corine de Bilbao, présidente de Microsoft France, qui dit constater une diffusion rapide de l'IA chez les entreprises et les consommateurs. (AFP)
"Je ne crois pas du tout à la bulle" de l'intelligence artificielle (IA), assure lors d'un entretien à l'AFP Corine de Bilbao, présidente de Microsoft France, qui dit constater une diffusion rapide de l'IA chez les entreprises et les consommateurs. (AFP)
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  • Microsoft propose son propre assistant IA, baptisé Copilot, et contrôle 27% du capital de la start-up OpenAI, le créateur de ChatGPT, chatbot le plus utilisé au monde
  • En France, 40,9% des citoyens en âge de travailler ont adopté l'IA, assure Mme de Bilbao, contre 26,3% aux États-Unis, ce qui place la France à la cinquième place mondiale en termes d'adoption, selon une étude du Microsoft AI Economy Institute

PARIS: "Je ne crois pas du tout à la bulle" de l'intelligence artificielle (IA), assure lors d'un entretien à l'AFP Corine de Bilbao, présidente de Microsoft France, qui dit constater une diffusion rapide de l'IA chez les entreprises et les consommateurs.

Pour certains experts, les investissements colossaux dans l'IA semblent démesurés par rapport aux bénéfices générés, alimentant la peur d'une survalorisation du secteur.

Mais selon Corine de Bilbao, à la tête de la filiale française du géant américain des logiciels depuis 2021, "il y a des signes forts" de solidité comme le fait que cette technologie se diffuse "dans toutes les sphères de la société".

Microsoft propose son propre assistant IA, baptisé Copilot, et contrôle 27% du capital de la start-up OpenAI, le créateur de ChatGPT, chatbot le plus utilisé au monde, dans laquelle Microsoft a investi plus de 13 milliards de dollars.

En France, 40,9% des citoyens en âge de travailler ont adopté l'IA, assure Mme de Bilbao, contre 26,3% aux États-Unis, ce qui place la France à la cinquième place mondiale en termes d'adoption, selon une étude du Microsoft AI Economy Institute.

Un milliard d'agents IA

L'énergéticien français TotalEnergies utilise par exemple Copilot et des agents IA, capables de réaliser des tâches de façon autonome, à travers des cas d'usage "dans la maintenance, les achats, la sécurité", énumère la patronne.

Tandis que l'assureur italien Generali a "adopté massivement l'IA et automatisé plus d'un million d'opérations", ajoute-t-elle.

"Plus d'un milliard d'agents à l'échelle mondiale vont être diffusés dans les entreprises" d'ici 2028, s'enthousiasme Corine de Bilbao, citant une étude IDC pour Microsoft.

L'irruption de l'intelligence artificielle dans les entreprises peut toutefois se traduire par des vagues de licenciements comme chez Amazon, le groupe informatique HP ou encore l'assureur allemand Allianz Partners.

Microsoft France, qui compte près de 2.000 employés, a de son côté supprimé 10% de ses effectifs via un accord collectif de rupture conventionnelle sur la base du volontariat.  -

"C'est lié à la transformation de certains métiers, mais pas à l'IA", assure la dirigeante, ajoutant qu'en parallèle Microsoft est en train de recruter "des profils plus techniques", comme des "ingénieurs solutions", pour s'adapter aux demandes de ses clients.

"L'IA suscite beaucoup de peur", reconnaît Mme de Bilbao."On préfère parler de salariés augmentés" plutôt que d'emplois supprimés, poursuit-elle, beaucoup de tâches considérées comme rébarbatives pouvant être réalisées avec l'assistance de l'intelligence artificielle.

Selon elle, l'enjeu central est surtout celui de la formation des salariés à ces nouveaux outils.

"Nouvelle économie" 

"Il n'y aura pas de déploiement de l'IA s'il n'y a pas de valeur partagée, si l'ensemble des citoyens, des étudiants, des entreprises ne sont pas formés", souligne la patronne.

En France, le géant de Redmond (Etat de Washington) a déjà formé 250.000 personnes à l'IA sur un objectif d'un million d'ici 2027 et veut accompagner 2.500 start-up françaises.

"Un écosystème complet se développe entre les fournisseurs de modèles de langage, les infrastructures, on est en train de créer une nouvelle économie autour de cette IA", déclare Corine de Bilbao.

Microsoft a ainsi annoncé en 2024 un investissement de 4 milliards d'euros en France lors du sommet Choose France pour agrandir ses centres de données dans les régions de Paris et Marseille (sud), et construire un datacenter dans l'est de la France, près de Mulhouse.

"Ca avance très bien", explique-t-elle, sans donner de date à laquelle le centre sera opérationnel. "Cela ne pousse pas comme des champignons, ce sont des projets qui prennent quelques années en général", entre le dépôt de permis, de construction et l'accompagnement.

Pour 2026, le défi sera de passer d'une intelligence artificielle "expérimentale à une IA opérationnelle, qui délivre de la valeur pour les entreprises, à la fois sur leurs revenus, la productivité, et qui les aide à se transformer", conclut-elle.


Mercosur: Paris et Rome contrarient les plans de l'UE, ultimatum de Lula

Cette photographie montre des drapeaux européens flottant devant le bâtiment Berlaymont, siège de la Commission européenne à Bruxelles, le 2 décembre 2025. (AFP)
Cette photographie montre des drapeaux européens flottant devant le bâtiment Berlaymont, siège de la Commission européenne à Bruxelles, le 2 décembre 2025. (AFP)
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  • L’Italie rejoint la France pour demander un report de l’accord UE–Mercosur, menaçant la signature espérée par Ursula von der Leyen et ouvrant la voie à une minorité de blocage au sein des Vingt-Sept
  • Le Brésil met la pression, tandis que les divisions européennes persistent entre défense des agriculteurs et impératif économique face à la concurrence chinoise et américaine

BRUXELLES: L'Italie a rejoint la France mercredi pour réclamer un report de l'accord commercial entre l'Union européenne et le Mercosur, ce qui risque d'empêcher Ursula von der Leyen de parapher ce traité en fin de semaine, au grand dam du Brésil.

Une signature dans les prochains jours est "prématurée", a lâché Giorgia Meloni à la veille d'un sommet européen à Bruxelles.

La cheffe du gouvernement italien veut d'abord des garanties "suffisantes" pour le secteur agricole, et se dit "convaincue qu'au début de l'année prochaine, toutes ces conditions seront réunies".

Cette sortie est une douche froide pour la Commission européenne. Bruxelles n'a cessé de marteler ces derniers jours qu'une signature était indispensable avant la fin de l'année, pour la "crédibilité" de l'Union européenne et afin de ne pas contrarier les partenaires latino-américains.

Prudent, l'exécutif européen fait mine d'y croire encore. "Les chefs d'Etat et de gouvernement vont en discuter au sommet européen" ce jeudi, a dit à l'AFP Olof Gill, porte-parole de la Commission.

Au Brésil, le président Lula, qui avait appelé à la responsabilité Emmanuel Macron et Georgia Meloni, a posé une forme d'ultimatum.

"Si on ne le fait pas maintenant, le Brésil ne signera plus l'accord tant que je serai président", a-t-il menacé. "Si jamais ils disent non, nous serons désormais fermes avec eux, parce que nous avons cédé sur tout ce qu'il était possible de céder diplomatiquement".

- "Billet remboursable" -

La prise de position de Rome sur ce dossier est potentiellement décisive.

Avec la France, la Pologne et la Hongrie, l'Italie est en capacité de former une minorité de blocage au sein des Vingt-Sept, ce qui empêcherait un examen de l'accord durant la semaine.

"Ca risque d'être très chaud", convient un diplomate européen anonymement, alors que l'Allemagne comme l'Espagne insistent pour approuver ce traité de libre-échange le plus vite possible.

Le chancelier allemand, Friedrich Merz, a promis d'exercer une pression "intensive" sur ses partenaires européens mercredi soir et jeudi matin, en appelant à ne pas "chipoter" avec les grands traités commerciaux.

Emmanuel Macron a prévenu que "la France s'opposerait de manière très ferme" à un éventuel "passage en force" de l'Union européenne, a rapporté la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon.

Paris ne considère pas encore comme "acquis" le report de la signature du traité, mais les déclarations de Giorgia Meloni sont la "preuve" que "la France n'est pas seule", a-t-elle ajouté.

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, espérait parapher ce traité lors du sommet du Mercosur samedi dans la ville brésilienne de Foz do Iguaçu. Mais elle a besoin au préalable de l'aval d'une majorité qualifiée d'Etats membres à Bruxelles.

"J'espère qu'elle a un billet (d'avion) remboursable", glisse une source diplomatique européenne.

- Manifestation à Bruxelles -

Cet accord commercial avec l'Argentine, le Brésil, le Paraguay et l'Uruguay permettrait à l'UE d'exporter davantage de véhicules, de machines, de vins et de spiritueux, tout en facilitant l'entrée en Europe de viande, sucre, riz, miel ou soja sud-américains, ce qui inquiète les filières concernées.

Les agriculteurs européens ne décolèrent pas et annoncent une dizaine de milliers de manifestants jeudi à Bruxelles contre ce traité.

Pour rassurer la profession, l'UE a ajouté des mesures de sauvegarde: un suivi des produits agricoles sensibles et une promesse d'intervention en cas de déstabilisation du marché.

Un compromis a été trouvé mercredi soir sur ce volet entre des eurodéputés et des représentants des États membres: les garanties pour les agriculteurs y sont supérieures à ce qu'avaient voté les Vingt-Sept en novembre, mais en deçà de la position adoptée par le Parlement européen mardi.

Elles ne devraient toutefois pas suffire à la France. Le bras de fer avec Bruxelles s'inscrit dans un contexte de vaste mobilisation agricole dans l'Hexagone contre la gestion par les autorités de l'épidémie de dermatose nodulaire contagieuse (DNC).

Et au sein de l'Union européenne, une série d'États redoutent que Paris ne se contente pas d'un report du Mercosur mais essaye de faire échouer le traité, malgré plus de 25 ans de négociations.

Allemands, Espagnols et Scandinaves comptent quant à eux sur cet accord pour relancer une économie européenne à la peine face à la concurrence chinoise et aux taxes douanières des États-Unis.