Inquiétude, soulagement, désespoir, fierté: des Afghans racontent deux ans de vie sous les talibans

Sur cette photo prise le 3 août 2023, le fermier afghan Rahatullah Azizi saupoudre de l'engrais dans un champ d'aubergines du village de Tilanchi, dans la province de Parwan. (AFP)
Sur cette photo prise le 3 août 2023, le fermier afghan Rahatullah Azizi saupoudre de l'engrais dans un champ d'aubergines du village de Tilanchi, dans la province de Parwan. (AFP)
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Publié le Lundi 14 août 2023

Inquiétude, soulagement, désespoir, fierté: des Afghans racontent deux ans de vie sous les talibans

  • Selon un rapport annuel de la mission d'assistance des Nations unies dans le pays, le conflit armé a fait environ 38 000 morts et plus de 70 000 blessés parmi les civils rien que sur la période 2009-2020
  • L'économie afghane, déjà malmenée par des décennies de guerre, s'est enlisée dans la crise après que des milliards de dollars d'aides internationales ont été coupés à la suite de la prise du pouvoir par les talibans

KABOUL: Deux ans après le retour au pouvoir fracassant des talibans en Afghanistan et la fin de 20 ans de guerre contre l'armée américaine et ses alliés, la vie a radicalement changé pour de nombreux Afghans, en particulier pour les femmes.

A l'approche de l'anniversaire de la chute de Kaboul, le 15 août, quatre Afghans - une femme d'affaires déterminée à garder les portes de son usine ouvertes, un agriculteur soulagé par la fin de la guerre, un ancien combattant taliban fier de servir le nouveau gouvernement et une étudiante en médecine contrainte d'abandonner ses études - ont expliqué à l'AFP l'impact qu'ont eu sur eux les changements survenus dans le pays.

L'entrepreneuse qui s'efforce de maintenir son entreprise à flot

Arezo Osmani, 30 ans, a été "terrifiée et triste" lorsque les talibans sont revenus au pouvoir.

"Je ne suis pas sortie de ma chambre pendant 10 jours, je pensais que tout s'arrêtait pour moi, et que c'était la même chose pour tous les Afghans", confie Arezo qui a lancé son entreprise de fabrication de serviettes hygiéniques réutilisables en février 2021.

"Mais lorsque je suis sortie et que j'ai vu qu'il y avait toujours une activité, cela m'a redonné espoir et je me suis dit que je devais aussi rester ici", poursuit-elle la gorge nouée.

En raison de l'incertitude qui régnait dans le pays à l'arrivée des talibans, l'entrepreneuse, qui a employé jusqu'à 80 femmes, ferme son entreprise. Mais deux mois plus tard elle décide finalement de rouvrir les portes car le secteur privé est l'un des rares endroits "où les femmes pouvaient travailler".

Sous les talibans, elles ont été empêchées de travailler pour les ONG et exclues de la plupart des postes de fonctionnaires. Le mois dernier, les salons de beauté - une autre source importante de revenus pour les femmes - ont également été fermés.

"Nous nous sommes lentement habituées aux conditions, et heureusement, comme nous sommes une entreprise et que nous travaillons dans le secteur de la santé, nous avons pu continuer notre travail, je me sens bien maintenant", dit-elle.

Néanmoins, l'interdiction faite aux Afghanes de travailler pour les associations étrangères, ses principaux clients, a durement touché son entreprise qui n'emploie plus que 35 salariées.

"Actuellement, nous n'avons ni contrat, ni acheteur, (...) si nous ne sommes pas en mesure de vendre les serviettes hygiéniques, il sera difficile de continuer, mais nous essayons de rester debout", ajoute cette mère de deux enfants.

Malgré les difficultés, l'entrepreneuse reste déterminée à faire ce qu'elle peut pour son pays, et ses femmes en particulier. "L'Afghanistan et notre société ont besoin de gens comme nous qui restent", souligne-t-elle.

L'agriculteur qui tente de joindre les deux bouts

Rahatullah Azizi est reconnaissant de l'amélioration de la sécurité apportée par la fin des combats. Aujourd'hui, alors que cet homme de 35 ans cultive quelques champs dans la province de Parwan, au nord de Kaboul, il peut "se déplacer jour et nuit sans inquiétude, grâce à Dieu".

"Il y a eu beaucoup de changements" depuis août 2021. "Avant, c'était la guerre, maintenant c'est calme", se réjouit-il.

Selon un rapport annuel de la mission d'assistance des Nations unies dans le pays (Manua), le conflit armé a fait environ 38.000 morts et plus de 70.000 blessés parmi les civils rien que sur la période 2009-2020.

Cependant, le fermier reste inquiet.

L'économie afghane, déjà malmenée par des décennies de guerre, s'est enlisée dans la crise après que des milliards de dollars d'aides internationales ont été coupés à la suite de la prise du pouvoir par les talibans.

La production économique s'est effondrée et près de 85% du pays vivrait dans la pauvreté, selon le dernier rapport du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). La sécheresse et les invasions de criquets ont également ruiné certaines exploitations du pays.

"Les gens n'achètent plus beaucoup nos produits", déplore le fermier qui cultive à peine plus d'un hectare sur des terres louées.

"Avant je vendais sept kilos de tomates pour 200 afghanis (2,15 euros), aujourd'hui je ne les vends plus que 80 (0,86 centimes d'euros)."

Dans le passé, il percevait des revenus grâce aux plantations de céréales, mais aujourd'hui ce n'est plus le cas.

"J'ai désormais juste assez pour manger, je ne peux pas mettre de l'argent de côté", ajoute Rahatullah qui espère que ses enfants pourront étudier à l'université, contrairement à lui.

Le combattant taliban devenu policier

Pour Lal Muhammad, 23 ans, le retour au pouvoir des talibans a apporté une plus grande stabilité économique.

Il a rejoint le mouvement il y a quatre ans et combattu régulièrement loin de chez lui. Aujourd'hui, il est officier de police dans la deuxième ville du pays, Kandahar, et gagne un salaire d'environ 12.000 afghanis (128 euros) par mois, ce qui est "suffisant" pour sa famille.

Il est heureux d'avoir un salaire régulier, même s'il n'a de toute façon jamais "rêvé d'avoir des voitures ou de gagner beaucoup d'argent".

"Mon rêve était d'étudier et de servir dans le gouvernement de l'Emirat islamique (nom donné au gouvernement par les autorités talibanes). J'y resterai jusqu'au bout", promet Lal. "Grâce à Dieu, ils sont de retour".

Le mouvement taliban, né à Kandahar, dans le sud de l'Afghanistan, a contrôlé une première fois le pays de 1996 à 2001.

"Nous sommes très heureux. Nous n'avons pas de problèmes, il n'y a pas de guerre ni de combats. Nous sommes au service de l'Emirat et de notre peuple", clame Lal Muhammad.

L'ex-étudiante en médecine à la recherche d'un nouvel avenir

Hamasah Bawar envisageait auparavant son futur en Afghanistan et voulait exercer dans le secteur médical. Mais, depuis que les talibans ont pris le pouvoir et interdit aux filles l'accès aux universités, après leur avoir fermé les portes des école secondaires, elle ne voit d'espoir qu'en dehors du pays.

"La fermeture des universités a été dévastatrice, non seulement pour moi, mais aussi pour toutes mes camarades de classe. Nous sommes brisées et c'est la pire chose qu'on pouvait imaginer", dénonce l'ex-étudiante de 20 ans qui habite Mazar-e-Sharif dans le nord de l'Afghanistan.

"Si une fille est éduquée, toute la famille le sera, si une famille est éduquée c'est la société entière qui sera éduquée(...) Si nous ne sommes pas éduquées, toute une génération restera analphabète", déplore Hamasah qui avait trouvé un stage dans une clinique rapidement fermée par les autorités.

"Parce que je veux un avenir meilleur, je n'ai pas d'autre choix que de quitter l'Afghanistan", poursuit Hamasah dont la mère est enseignante en école primaire.

Hamasah a observé "une grande différence" entre le précédent gouvernement, soutenu par les Etats-Unis, et celui des talibans qui n'est pas reconnu par la communauté internationale.

Avant, "il y avait beaucoup de liberté, aujourd'hui on ne peut même pas aller dans l'enceinte de la Mosquée bleue (majestueuse mosquée composée de jardins) pour s'amuser. Aujourd'hui la plupart des activités sont interdites aux filles et aux femmes".

"Pas seulement moi, mais toutes les filles et les femmes d'Afghanistan veulent retrouver leur liberté", implore-t-elle.


Macron, Starmer et Merz se sont entretenus avec Trump sur l'Ukraine

Le chancelier allemand Friedrich Merz, le Premier ministre britannique Keir Starmer, le président ukrainien Volodymyr Zelensky et le président français Emmanuel Macron s'assoient avant une réunion au 10 Downing Street, dans le centre de Londres, le 8 décembre 2025. (AFP)
Le chancelier allemand Friedrich Merz, le Premier ministre britannique Keir Starmer, le président ukrainien Volodymyr Zelensky et le président français Emmanuel Macron s'assoient avant une réunion au 10 Downing Street, dans le centre de Londres, le 8 décembre 2025. (AFP)
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  • Emmanuel Macron a tenu un appel de 40 minutes avec Donald Trump, Keir Starmer et Friedrich Merz pour discuter des efforts de médiation américains et d’une solution durable au conflit en Ukraine
  • Les dirigeants ont souligné un moment critique pour l’Ukraine et la sécurité euro-atlantique

PARIS: Emmanuel Macron a annoncé mercredi s'être entretenu au téléphone avec le président américain Donald Trump et d'autres dirigeants européens au sujet de l'Ukraine, "pour essayer d'avancer".

L'appel a duré 40 minutes, selon le président français. Le Premier ministre britannique Keir Starmer et le chancelier allemand Friedrich Merz ont pris part aussi à cet entretien, a précisé l'Élysée à l'AFP.

De même source, les dirigeants ont "discuté des derniers développements de la médiation engagée par les Etats-Unis et salué leurs efforts pour parvenir à une paix robuste et durable en Ukraine et mettre fin aux tueries".

"Ce travail intensif se poursuit et va se poursuivre dans les prochains jours", a ajouté l'Élysée. "Ils ont convenu qu'il s'agissait d'un moment critique pour l'Ukraine, pour son peuple et pour la sécurité commune de la région euro-atlantique", a-t-on complété.

Les trois dirigeants européens se sont réunis lundi à Londres avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky, pour lui apporter leur soutien appuyé au moment où il est de nouveau sous la pression des États-Unis pour faire des concessions afin de mettre fin à la guerre avec la Russie.

Emmanuel Macron et Keir Starmer doivent aussi présider jeudi une nouvelle réunion, par visioconférence, de la "coalition des volontaires", qui rassemble les soutiens de Kiev disposés à lui apporter des "garanties de sécurité" dans le cadre d'un éventuel futur cessez-le-feu ou accord de paix.


Guerre au Soudan: Washington sanctionne un réseau colombien

Les membres des Forces de soutien rapide célèbrent la prise d'El-Fasher en octobre. Les États-Unis ont sanctionné des individus et des entreprises pour leur implication présumée dans un réseau recrutant d'anciens militaires colombiens afin d'aider le groupe paramilitaire soudanais. (AFP/Fichier)
Les membres des Forces de soutien rapide célèbrent la prise d'El-Fasher en octobre. Les États-Unis ont sanctionné des individus et des entreprises pour leur implication présumée dans un réseau recrutant d'anciens militaires colombiens afin d'aider le groupe paramilitaire soudanais. (AFP/Fichier)
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  • Les États-Unis sanctionnent un réseau majoritairement colombien accusé de recruter d’anciens militaires — y compris des enfants soldats — pour soutenir les Forces de soutien rapide (FSR) au Soudan
  • Washington intensifie ses efforts diplomatiques avec l’Égypte, l’Arabie saoudite et d’autres partenaires pour obtenir une trêve

WASHINGTON: Les Etats-Unis ont annoncé mardi des sanctions à l'encontre d'un réseau principalement colombien, qui recrute des combattants en soutien aux forces paramilitaires au Soudan, tout en poursuivant leurs efforts diplomatiques en vue d'une trêve dans ce pays ravagé par la guerre.

Le chef de la diplomatie américaine Marco Rubio s'est entretenu ce même jour avec ses homologues égyptien Badr Abdelatty et saoudien Fayçal ben Farhane, sur "la nécessité urgente de faire progresser les efforts de paix au Soudan", a indiqué le département d'Etat dans des communiqués.

La guerre au Soudan, qui a éclaté en avril 2023 et oppose les forces paramilitaires à l'armée soudanaise du général Abdel Fattah al-Burhane, a fait des milliers de morts et déplacé des millions de personnes, plongeant le pays dans la "pire crise humanitaire" au monde selon l'ONU.

Washington a récemment durci le ton vis-à-vis des Forces de soutien rapide (FSR), et appelé à l'arrêt des livraisons d'armes et le soutien dont bénéficient les FSR, accusés de génocide au Soudan.

Les efforts diplomatiques en faveur d'une trêve se sont récemment intensifiés, notamment de la part du président Donald Trump qui s'est dit "horrifié" par les violences dans le pays, sans résultat pour le moment.

Concernant le réseau sanctionné, il "recrute d'anciens militaires colombiens et forme des soldats, y compris des enfants, pour combattre au sein du groupe paramilitaire soudanais", selon un communiqué du département du Trésor.

"Les FSR ont montré à maintes reprises qu'elles étaient prêtes à s'en prendre à des civils, y compris des nourrissons et des jeunes enfants", a déclaré John Hurley, sous-secrétaire au Trésor chargé du terrorisme et du renseignement financier, cité dans le communiqué.

Les sanctions américaines visent quatre personnes et quatre entités, dont Alvaro Andres Quijano Becerra, un ressortissant italo-colombien et ancien militaire colombien basé dans les Emirats, qui est accusé de "jouer un rôle central dans le recrutement et le déploiement d'anciens militaires colombiens au Soudan".

Ces sanctions consistent essentiellement en une interdiction d'entrée aux Etats-Unis, le gel des éventuels avoirs et interdit de leur apporter un soutien financier ou matériel.

Selon Washington, depuis septembre 2024, des centaines d'anciens militaires colombiens ont combattu au Soudan aux côtés des FSR.

Ils ont participé à de nombreuses batailles, dont la récente prise d'El-Facher, la dernière grande ville du Darfour (ouest) tombée dans les mains des FSR fin octobre.


Nationalisation du rail: Londres dévoile ses trains aux couleurs de l'Union Jack

Une photographie aérienne montre la gare ferroviaire Temple Mills International, dans l'est de Londres, le 27 octobre 2025. (AFP)
Une photographie aérienne montre la gare ferroviaire Temple Mills International, dans l'est de Londres, le 27 octobre 2025. (AFP)
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  • Le gouvernement travailliste britannique dévoile le nouveau design des trains, aux couleurs de l’Union Jack
  • Après des décennies de privatisation marquées par retards, annulations et scandales, sept opérateurs sont déjà sous contrôle public et Great British Railways deviendra l’entité centrale du système ferroviaire

LONDRES: Le gouvernement travailliste du Royaume-Uni a présenté mardi le nouveau design des trains britanniques, aux couleurs de l'Union Jack, amorçant leur uniformisation dans le cadre de la nationalisation du secteur.

Le logo de la nouvelle entité qui chapeautera les trains britanniques, Great British Railways (GBR), ainsi que les nouvelles couleurs, commenceront à être "déployés au printemps prochain sur les trains" et les sites internet, souligne le ministère des Transports dans un communiqué.

Le projet de loi pour nationaliser le rail, actuellement en débat à la Chambre des Communes, avait été annoncé dès le retour des travaillistes au pouvoir en juillet 2024, après 14 ans de gouvernement conservateur.

"Sept grands opérateurs ferroviaires sont déjà sous contrôle public, couvrant un tiers de l'ensemble des voyages de passagers en Grande-Bretagne", est-il souligné dans le communiqué.

La compagnie ferroviaire South Western Railway, qui opère dans le sud-ouest de l'Angleterre, est devenue en mai dernier la première à repasser dans le giron public. Tous les opérateurs doivent être placés sous contrôle étatique d'ici la fin 2027.

La privatisation du secteur a eu lieu au milieu des années 1990 sous le Premier ministre conservateur John Major, dans la continuité de la politique libérale de Margaret Thatcher dans les années 1980.

Malgré la promesse d’un meilleur service, d’investissements accrus et de moindres dépenses pour l'Etat, le projet était alors très impopulaire, dénoncé par les syndicats, l'opposition, certains conservateurs et une large partie de la population.

Le nombre de passagers s'est accru dans un premier temps, tout comme les investissements.

Mais un déraillement causé par des micro-fissures dans les rails, qui a fait quatre morts en 2000, a profondément choqué l'opinion publique.

Les annulations et les retards sont aussi devenus monnaie courante et les passagers se sont plaints des prix.

Le réseau ferré est déjà redevenu public, géré par la société Network Rail.