Comment le magnat arabe Mohammed al-Fayed a bâti un empire commercial et a défié l'establishment britannique

Alors que le combat d'Al-Fayed contre le Parti conservateur oscillait entre victoire et défaite, il a soutenu son empire en achetant le Fulham Football Club en 1997, le faisant passer de l'obscurité à un membre constant de la Premier League (Photo, AFP).
Alors que le combat d'Al-Fayed contre le Parti conservateur oscillait entre victoire et défaite, il a soutenu son empire en achetant le Fulham Football Club en 1997, le faisant passer de l'obscurité à un membre constant de la Premier League (Photo, AFP).
Mohammed al-Fayed fait un geste alors qu'il quitte l'ouverture de l'enquête britannique sur la mort de la princesse Diana en 1997, à Londres, le 6 janvier 2004 (Photo, Reuters).
Mohammed al-Fayed fait un geste alors qu'il quitte l'ouverture de l'enquête britannique sur la mort de la princesse Diana en 1997, à Londres, le 6 janvier 2004 (Photo, Reuters).
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Publié le Dimanche 03 septembre 2023

Comment le magnat arabe Mohammed al-Fayed a bâti un empire commercial et a défié l'establishment britannique

  • L'homme d'affaires d'origine égyptienne a commencé sa vie comme porteur à Alexandrie et est mort comme l'un des hommes les plus riches du monde arabe
  • Son acquisition de propriétés de prestige a été suivie de conflits avec les institutions britanniques et même avec la famille royale britannique

LE CAIRE : Le décès de l'homme d'affaires d'origine égyptienne Mohammed al-Fayed à l'âge de 94 ans a mis un terme à une remarquable saga faite de succès, de revers, de tragédies et de redressements.

Pour les personnes d'une certaine génération, qui se souviennent des événements des années 1980, 1990 et du début des années 2000, sa mort au Royaume-Uni mercredi a véritablement marqué la fin d'une époque.

Dans une interview accordée au New York Times en 1995, Al-Fayed a fait part de son étonnement quant à la façon dont les Britanniques le percevaient.

«Ils ont tendance à considérer toute personne originaire d'une ancienne colonie comme l'Égypte comme insignifiante», a-t-il déclaré. «Mais lorsque vous prouvez vos capacités et réalisez de grandes choses, vous devenez le sujet de conversation de la ville. Ils se demandent comment quelqu'un comme moi, un simple Égyptien, a pu accomplir cela.»

Cette déclaration résume une grande partie de la vie d'Al-Fayed, qui a notamment amassé une fortune et s'est finalement heurté à la famille royale britannique.

EN BREF

Mohammed al-Fayed a commencé à amasser sa fortune après avoir quitté l'Égypte pour s'installer au Royaume-Uni dans les années 1970.

L’Empire commercial d’Al-Fayed englobe des secteurs tels que le transport maritime, l'immobilier, les banques, le pétrole, le commerce de détail et la construction.

Sa notoriété s'est accrue lorsqu'il a racheté avec son frère l'hôtel Ritz Paris en 1979.

Il a racheté le grand magasin Harrods à Londres en 1985, après une longue bataille de rachat.

Il a réalisé d'importants investissements dans Harrods et a ouvert d'autres magasins sous la marque Harrods avant de la vendre en 2010 au fonds souverain du Qatar.

Il a racheté le Fulham F.C. en 1997. Sous sa direction, le club est monté en première division anglaise, et a également atteint la finale de la Ligue européenne.

Le Fulham F.C. a été vendu en 2013 à l'homme d'affaires Chahid Khan.

Sa fortune a atteint 2 milliards de dollars (1 dollar = 0,93 euro), ce qui place Al-Fayed à la 12e place de la liste Forbes 2023 des Arabes les plus riches. Sa fortune au niveau mondiale le place au 1 516e rang.

Les exploits commerciaux d'Al-Fayed n'ont certainement pas été faciles à réaliser. Il a forgé cet empire à force de détermination, aidé par sa personnalité complexe.

Il a commencé sa vie dans la ville animée d'Alexandrie comme porteur de sacs et vendeur de boissons non alcoolisées et, plus tard, de machines à coudre, avant de devenir l'un des milliardaires les plus connus au monde dans les années 1990.

Après ces débuts modestes, il n'a jamais refusé une occasion, à condition qu'elle le conduise au succès et à une plus grande indépendance financière.

Sa personnalité ambitieuse lui a permis de nouer des liens avec l'écrivaine Samira Khachoggi, sœur du milliardaire Adnan Khachoggi, avec qui il a fini par se marier. Son mariage lui a ouvert les portes des États du Golfe et de la haute société britannique.

Al-Fayed a continué à accumuler des richesses de manière indépendante, en commençant par de petites entreprises qui ont ouvert la voie à des contrats lucratifs avec de nombreuses personnes fortunées.

Il est devenu millionnaire dans les années 1960 à la suite de rencontres avec le dirigeant haïtien Doc Duvalier et est devenu conseiller financier du sultan de Brunei, devenant ainsi l'un des hommes d'affaires les plus renommés au monde.

EN BREF

Nom : Mohammed al-Fayed

Date de naissance : le 27 janvier 1929

Lieu de naissance : Alexandrie, Égypte

Domicile : Grande-Bretagne, depuis les années 1970.

Épouse : Samira Khachoggi, Heini Wathen

Principales acquisitions : Hôtel Ritz Paris ; le groupe de grands magasins britanniques House of Fraser, notamment le grand magasin Harrods ; Fulham F.C. (1997)   

Le défunt souverain de Dubaï, le cheikh Rachid al-Maktoum, a autorisé Al-Fayed à contribuer au développement de l'émirat. L'homme d'affaires réagit en engageant des entreprises britanniques pour lancer des projets de construction qui préfigurent la modernisation de Dubaï.

La richesse et le statut d'Al-Fayed lui ont permis d'obtenir la résidence complète en Grande-Bretagne en 1974. Il a ajouté «Al» à son nom, devenant ainsi «Mohammed al-Fayed» au lieu de simplement Mohammed Fayed. Le magazine satirique Private Eye le surnomme alors «le faux pharaon».

Ce faisant, il a marqué le début de ses relations tendues avec la Grande-Bretagne, ce qui était peut-être prédestiné.

Al-Fayed et son frère ont acquis l'hôtel Ritz à Paris en 1979. En 1985, ils ont acheté le grand magasin haut de gamme Harrods à Londres pour 615 millions de livres sterling (1 livre sterling = 1,17 euro), à la suite d'une longue bataille juridique avec l'homme d'affaires britannique Roland Rowland. Ce dernier a ensuite ouvert d'autres magasins sous la marque Harrods.

Ces acquisitions historiques se sont heurtées à des obstacles et à des réticences. Une enquête gouvernementale sur le rachat du groupe de magasins House of Fraser, en particulier Harrods, publiée officiellement en 1990, a révélé qu'Al-Fayed et son frère avaient été malhonnêtes au sujet de leur richesse et de leurs origines. Les deux hommes ont qualifié ces allégations d'injustes, mais cinq ans plus tard, la première demande de citoyenneté britannique d'Al-Fayed a été rejetée.

«Pourquoi ne m'accordent-ils pas un passeport britannique ? Je possède Harrods et j'emploie des milliers de personnes dans ce pays», a-t-il protesté.

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Sur cette photo du 13 novembre 1996, le propriétaire du grand magasin Harrods, Mohammed al-Fayed, montre une carte en forme de passeport surdimensionné lors d'une conférence de presse à Londres après que lui et son frère Ali ont gagné une bataille judiciaire contre le refus du gouvernement britannique de leur accorder la citoyenneté (Photo, Reuters).

Sans se laisser décourager, Al-Fayed a décidé d'intensifier sa lutte pour la citoyenneté en accusant deux ministres conservateurs, Neil Hamilton et Tim Smith, d'avoir accepté de l'argent de sa part en échange de la défense de ses intérêts à la Chambre des communes.

En conséquence, les deux politiciens ont été contraints de démissionner de leurs fonctions gouvernementales, un sort qui attendait également Jonathan Aitken, alors ministre d'État chargé des marchés publics de la défense, après qu'Al-Fayed eut révélé qu'il avait séjourné gratuitement à l'hôtel Ritz de Paris en même temps qu'un groupe de trafiquants d'armes. La chute d'Aitken a été importante puisqu'il a été emprisonné pour parjure.

En 1997, Al-Fayed a acquis le club de football anglais Fulham. Sous sa direction, Fulham est monté en première division anglaise et a atteint la finale de la Ligue européenne. Il a vendu le club en 2013 à un autre homme d'affaires, Chahid Khan, pour un montant estimé à 300 millions de dollars.

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L'histoire de Fulham ne peut être racontée sans un chapitre sur l'impact positif de Mohammed al-Fayed en tant que président, déclare Chahid Khan, l'actuel propriétaire du Fulham Football Club (Photo, AFP).

À cette époque, Al-Fayed se bat surtout avec le parti politique britannique au pouvoir plutôt qu'avec la famille royale. Ses relations avec cette dernière étaient principalement basées sur des intérêts mutuels, tels que le parrainage de courses de chevaux.

La relation de son fils Imad, plus connu sous le nom de «Dodi», avec la princesse Diana, épouse du prince Charles, l'actuel roi, allait changer radicalement la donne. Cette relation allait changer le cours de la vie d'Al-Fayed et de sa famille.

En 1997, Diana et Dodi ont été tués lorsque leur voiture a heurté une colonne de béton dans le tunnel de l'Alma à Paris. Les rapports criminels ont confirmé que le conducteur était en état d'ébriété au moment de l'accident.

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Le président de Harrods, Mohammed al-Fayed (à droite), dévoile un mémorial (à gauche) dédié à son fils Dodi et à Diana, princesse de Galles, à Harrods, à Londres, le 1er septembre 2005 (Photo, Reuters).

En plus de ses divergences croissantes avec la famille royale, Al-Fayed a parcouru l'Europe en insistant sur le fait que l'élite dirigeante britannique était responsable de la mort de son fils et de Diana. Bien qu'il n'ait pas directement accusé qui que ce soit, ces accusations lui ont coûté cher.

Harrods a perdu le privilège royal que lui accordait le prince Philip, et les relations commerciales du palais de Buckingham avec le prince et le célèbre grand magasin se sont dégradées. En réponse, Al-Fayed a révoqué tous les privilèges restants pour la famille royale.

Après s'être réinstallé en Suisse en 2002, Al-Fayed est devenu plus virulent dans ses accusations contre l'establishment britannique.

En février 2008, il a accusé Philip, l'époux de la reine Elizabeth II, d'avoir ordonné la mort de son fils et de Diana. Il a également affirmé que les services de renseignement britanniques étaient impliqués.

En 2010, Al-Fayed a vendu Harrods à Qatar Holding pour 1,5 milliard de livres sterling.

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Le monument de la Flamme de la Liberté à Paris est devenu un mémorial officieux pour Diana, princesse de Galles, qui est décédée dans un accident de voiture dans un tunnel voisin aux premières heures du 31 août 1997, avec son petit ami Dodi Fayed et le chauffeur Henri Paul (Photo, AFP).

L'année suivante, il finance la production d'un documentaire intitulé «Unlawful Killing» («Homicide illégal»), dans lequel il accuse à nouveau Philip d'être responsable de la mort de son fils et de Diana. Le film a été présenté au Festival de Cannes, mais n'a pas été diffusé en raison de problèmes juridiques.

L'antagonisme d'Al-Fayed à l'égard de la monarchie britannique l'a conduit à soutenir la sécession de l'Écosse du Royaume-Uni. En 2012, il a déclaré à la BBC qu'il s'installerait en Écosse si celle-ci devenait indépendante, et qu'il envisageait d'obtenir le statut de résident écossais et de se présenter à la présidence de l'Écosse.

Il a même prétendu que l'Écosse avait des origines égyptiennes sur la base d'une princesse pharaonique qui aurait voyagé dans ce pays dans le passé.

Tout au long de sa vie, Al-Fayed a bâti un empire couvrant divers secteurs, notamment le transport maritime, l'immobilier, les banques, le commerce de détail et la sous-traitance, mais il est resté attaché à la philanthropie. Avec une fortune estimée à 2 milliards de dollars, il est mort en homme riche et figurait en 12e position sur la liste Forbes des Arabes les plus riches de cette année.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


Washington cible l'Autorité palestinienne, en plein débat sur la reconnaissance d'un Etat de Palestine

Le président de l'Autorité palestinienne Mahmud Abbas. (File/AFP)
Le président de l'Autorité palestinienne Mahmud Abbas. (File/AFP)
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  • Les Etats-Unis ont annoncé jeudi des sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), en pleine offensive en faveur d'un Etat de Palestine

WASHINGTON: Les Etats-Unis ont annoncé jeudi des sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), en pleine offensive en faveur d'un Etat de Palestine.

L'annonce des sanctions américaines survient en effet au moment où de nombreux Etats, dont la France et le Canada, ont promis de reconnaître un Etat de Palestine en marge de l'Assemblée générale de l'ONU en septembre, provoquant la colère d'Israël et des Etats-Unis qui parlent d'une "récompense" faite au Hamas dans la bande de Gaza.

La France et l'Arabie saoudite ont co-présidé lundi et mardi à l'ONU une conférence internationale, plaidant ainsi pour la solution à deux Etats, israélien et palestinien, seul chemin pour parvenir à la paix au Proche-Orient.

Washington, qui rejette toute reconnaissance unilatérale d'un Etat palestinien, a décrit la conférence comme étant une "insulte" faite aux victimes de l'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023.

Dans un communiqué jeudi, le département d'Etat américain a fait part de sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'OLP, sans les identifier, accusés notamment d'"internationaliser le conflit avec Israël".

Washington reproche aux deux institutions de "soutenir des actions au sein d'organisations internationales qui sapent et contredisent les engagements antérieurs" notamment à travers la Cour internationale de justice (CIJ) et la Cour pénale internationale (CPI).

Washington avait sanctionné en juin quatre magistrates de la CPI, estimant que leurs procédures visant l'exécutif israélien étaient "illégitimes" et "politisées".

Washington, principal allié d'Israël, accuse aussi l'OLP et l'Autorité palestinienne de "continuer à soutenir le terrorisme, y compris par l'incitation et la glorification de la violence" dans les livres scolaires, une accusation de longue date.

Les sanctions consistent en un refus de visa pour des membres des deux institutions.

- "Distorsion morale" -

"Il est dans l'intérêt de notre sécurité nationale d'imposer des sanctions et de tenir l'OLP et l'Autorité palestinienne responsables du non-respect de leurs engagements et de la remise en cause des perspectives de paix", a indiqué le département d'Etat.

Le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar, s'est aussitôt félicité de cette décision, jugeant que "l'Autorité palestinienne doit payer le prix de sa politique actuelle consistant à verser des indemnités aux terroristes et à leurs familles pour les attentats commis et pour l'incitation à la haine contre Israël dans les écoles, les manuels scolaires, les mosquées et les médias palestiniens".

Il a également relevé, sur X, que cette mesure "met en évidence la distorsion morale de certains pays qui se sont empressés de reconnaître un Etat palestinien virtuel tout en fermant les yeux sur le soutien de l'Autorité palestinienne au terrorisme et à l'incitation à la haine".

L'Autorité palestinienne, dont le président est Mahmoud Abbas, administre la Cisjordanie occupée, tandis que l'OLP, créée en 1964, est le mouvement fondateur représentant les Palestiniens, longtemps dirigée par leur leader historique Yasser Arafat.

L'OLP rassemble la majorité des mouvements politiques palestiniens mais pas le mouvement islamiste Hamas, qui s'est emparé du pouvoir à Gaza en 2007.

Des pays arabes et occidentaux voudraient voir l'Autorité palestinienne, très affaiblie, jouer un rôle dans la gouvernance de la bande de Gaza après la guerre qui y fait rage depuis octobre 2023.

Depuis son retour au pouvoir en janvier, le président Donald Trump, qui a accueilli le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu par trois fois à la Maison Blanche, plus qu'aucun autre dirigeant étranger, a apporté un soutien inconditionnel à Israël, tout en oeuvrant sans succès pour un cessez-le-feu à Gaza.

Mais il s'est montré peu disert sur l'Autorité palestinienne, décriée pour le manque de réformes et la corruption.

Parmi ses premiers décrets, le président Trump avait levé des sanctions imposées sous son prédécesseur Joe Biden visant des colons israéliens extrémistes en Cisjordanie, en proie à une recrudescence des violences.


L'envoyé de Trump rencontre Netanyahu, Israël face à des critiques accrues

L'envoyé du président américain Donald Trump pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, rencontre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu jeudi. (GPO)
L'envoyé du président américain Donald Trump pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, rencontre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu jeudi. (GPO)
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  • L'émissaire américain Steve Witkoff a discuté jeudi à Jérusalem avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu de la guerre à Gaza, à l'heure où de nombreux pays ont dit envisager de reconnaître un Etat palestinien au grand dam d'Israël
  • Les morts tombés sous les tirs et bombardements israéliens se comptent par dizaines chaque jour dans le territoire palestinien assiégé par Israël

Jérusalem, Non défini: L'émissaire américain Steve Witkoff a discuté jeudi à Jérusalem avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu de la guerre à Gaza, à l'heure où de nombreux pays ont dit envisager de reconnaître un Etat palestinien au grand dam d'Israël.

Après 22 mois d'une guerre dévastatrice déclenchée par une attaque du Hamas sur le sol israélien le 7 octobre 2023, la bande de Gaza est menacée d'une "famine généralisée" selon l'ONU et est totalement dépendante de l'aide humanitaire distribuée par camions ou larguée depuis les airs.

Les morts tombés sous les tirs et bombardements israéliens se comptent par dizaines chaque jour dans le territoire palestinien assiégé par Israël, selon la Défense civile locale qui a fait état de 38 Palestiniens tués jeudi.

Plusieurs dizaines de corps gisaient empilés à la morgue de l'hôpital al-Chifa dans le nord de Gaza, dans l'attente d'être collectés par leurs proches, a constaté un correspondant de l'AFP.

"Le moyen le plus rapide de mettre fin à la crise humanitaire à Gaza est que le Hamas CAPITULE ET LIBÈRE LES OTAGES !!!", a déclaré le président américain Donald Trump sur X.

Rien n'a filtré de la rencontre entre MM. Witkoff et Netanyahu mais en début de semaine, M. Trump a semblé se distancer de son allié israélien en évoquant une "vraie famine" à Gaza.

Avant l'arrivée jeudi de l'émissaire de M. Trump, des dizaines de mères et proches d'otages encore aux mains du Hamas ont manifesté devant le bureau du Premier ministre à Jérusalem, exigeant un "accord global" qui garantirait la libération des 49 otages encore détenus à Gaza, dont 27 ont été déclarés morts par l'armée.

- "Position minoritaire" -

L'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023 a entraîné du côté israélien la mort de 1.219 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de données officielles.

En riposte, Israël a juré de détruire le Hamas et lancé une offensive dévastatrice à Gaza qui a fait au moins 60.249 morts, en majorité des civils, d'après les données du ministère de la Santé à Gaza jugées fiables par l'ONU. La campagne aérienne et terrestre a dévasté le territoire et provoqué un désastre humanitaire.

Le chef de la diplomatie allemande Johann Wadephul a lui rencontré à Jérusalem son homologue israélien Gideon Saar, avant de rencontrer M. Netanyahu.

Avant de décoller pour Israël, M. Wadephul a estimé qu'Israël était "de plus en plus en position minoritaire", alors qu'un "nombre croissant de pays, y compris européens, sont prêts à reconnaître un Etat palestinien sans processus de négociation préalable".

Ces visites interviennent après la multiplication des alertes d'organisations internationales sur une famine à Gaza et l'échec de négociations indirectes, sous médiation américaine, qatarie et égyptienne, entre Israël et le Hamas en vue d'un cessez-le-feu.

Le gouvernement israélien a annoncé dimanche une pause limitée dans l'offensive afin de permettre l'acheminement de l'aide dans le petit territoire pauvre où s'entassent plus de deux millions de Palestiniens.

Mais ces aides sont jugées insuffisantes par les organisations internationales face aux besoins immenses de la population.

- "Pression déformée"

Le Portugal a indiqué jeudi envisager de reconnaître l'Etat de Palestine, après que plusieurs pays dont le Canada, la France et le Royaume-Uni ont annoncé leur intention de faire de même en marge de l'Assemblée générale de l'ONU en septembre.

Une telle reconnaissance reste néanmoins largement symbolique en raison du refus d'Israël de la création d'un tel Etat auquel aspirent les Palestiniens.

Dans ce contexte, Israël a dénoncé une "campagne de pression internationale déformée" venant "récompenser le Hamas et nuire aux efforts visant à obtenir un cessez-le-feu à Gaza".

Les Etats-Unis, qui ont dénoncé les annonces sur la reconnaissance d'un Etat palestinien, ont imposé des sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), accusant les deux organismes d'avoir pris des mesures pour "internationaliser leur conflit avec Israël" et de "continuer à soutenir le terrorisme".

Le gouvernement Netanyahu, qui veut chasser le Hamas de Gaza et a annoncé son intention de contrôler le territoire, semble peiner à trancher sur une solution politique d'après-guerre.

Dans ce contexte, la frange la plus radicale de sa coalition gouvernementale plaide pour un retour des colonies à Gaza, évacuées en 2005 avec le retrait unilatéral israélien du territoire après 38 ans d'occupation.

L'armée israélienne a par ailleurs annoncé le retrait du nord de Gaza de sa 98e Division, composée d'unités parachutistes et de commandos d'élite, qui a "se prépare désormais à de nouvelles missions".


Une experte de l’ONU : « La famine imposée à Gaza est une atteinte grave à la dignité humaine »

Des Palestiniens se rassemblent pour recevoir de la nourriture d'une cuisine caritative dans la ville de Gaza, le 28 juillet 2025. (Reuters)
Des Palestiniens se rassemblent pour recevoir de la nourriture d'une cuisine caritative dans la ville de Gaza, le 28 juillet 2025. (Reuters)
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  • Alice Jill Edwards dénonce une privation prolongée de nourriture entraînant malnutrition, défaillances d’organes et décès, notamment chez les nourrissons et femmes enceintes
  • « Des règles changeantes, une distribution militarisée et l’incertitude permanente sur l’accès aux besoins de base provoquent désespoir, stress et traumatismes », alerte-t-elle

NEW YORK: La rapporteuse spéciale de l’ONU sur la torture, Alice Jill Edwards, a exprimé mercredi sa vive inquiétude face à l’augmentation du nombre de décès liés à la famine parmi les Palestiniens de Gaza.

Elle a qualifié la famine infligée aux civils de « meurtrière, inhumaine et dégradante », appelant à une aide humanitaire rapide et sans entrave vers l’enclave dévastée.

« Priver des gens de nourriture, d’eau et de dignité constitue une violation grave et répétée dans ce conflit. Cela doit cesser », a-t-elle déclaré, citant des rapports « choquants » de civils tués en faisant la queue pour se nourrir, et des cas généralisés de faim et de malnutrition.

Elle a alerté sur un risque croissant de famine généralisée à Gaza, soulignant que toutes les parties au conflit ont des obligations juridiques, au regard du droit international, d’assurer un accès à l’eau et à la nourriture pour les civils sous leur contrôle, et de faciliter l’aide humanitaire.

« Ils ne doivent ni voler, ni détourner, ni bloquer délibérément l’acheminement de l’aide », a-t-elle averti.

Elle a décrit les « conséquences physiologiques catastrophiques » de la privation prolongée de calories : malnutrition, défaillance d’organes et décès, touchant particulièrement les groupes vulnérables comme les nourrissons et les femmes enceintes.

« L’impact psychologique d’un tel déni est d’une cruauté intrinsèque », a-t-elle poursuivi.

« Des règles constamment changeantes, des distributions militarisées, et une incertitude quotidienne sur l’accès aux besoins fondamentaux plongent les gens dans un désespoir et une détresse extrêmes. »

Elle a salué l’annonce par Israël de pauses humanitaires permettant au Programme alimentaire mondial d’opérer pendant trois mois, tout en soulignant que « davantage doit être fait » pour mettre fin aux hostilités et établir une paix durable fondée sur la solution à deux États.

« Personne ne devrait subir l’humiliation de devoir mendier pour se nourrir, surtout quand des stocks suffisants sont disponibles », a-t-elle déclaré.

Edwards a également renouvelé son appel à la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages, à la libération des Palestiniens détenus arbitrairement, et à la mise en place d’enquêtes indépendantes sur les allégations de torture, de mauvais traitements et d’éventuels crimes de guerre, de la part de toutes les parties.

Elle a indiqué avoir exprimé ses préoccupations à plusieurs reprises aux autorités concernées et continuer de réclamer une pleine reddition de comptes.

Les rapporteurs spéciaux font partie des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme de l’ONU. Ils sont indépendants, ne sont pas membres du personnel des Nations unies et travaillent bénévolement.