La stratégie de l’Arabie saoudite pour faire du développement durable une pratique usuelle

L'Arabie saoudite cherche à intensifier ses efforts pour stimuler le développement durable (Photo fournie).
L'Arabie saoudite cherche à intensifier ses efforts pour stimuler le développement durable (Photo fournie).
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Publié le Jeudi 14 septembre 2023

La stratégie de l’Arabie saoudite pour faire du développement durable une pratique usuelle

La stratégie de l’Arabie saoudite pour faire du développement durable une pratique usuelle
  • De nombreuses sociétés lancent de nouvelles réflexions sur le développement durable dans leurs structures organisationnelles
  • La tendance à intégrer la durabilité dans les opérations et à faire preuve de transparence à ce sujet est de bon augure pour les entreprises saoudiennes

Un changement tangible est en train de se produire au Moyen-Orient, où des entreprises de toute taille prennent des mesures concrètes pour passer du mode «start-up» à un mode «scale-up», plus novateur et plus profond en matière de durabilité.

Dans une enquête sur les questions environnementales, sociales et de gouvernance (ESG) récemment publiée par PwC, plus de 60% des personnes interrogées nous ont confié que leurs entreprises avaient intégré les questions ESG dans leurs stratégies commerciales.

L'Arabie saoudite ne fait pas exception: elle cherche à intensifier ses efforts pour stimuler le développement durable dans la mesure où les entreprises souhaitent de plus en plus intégrer des mesures environnementales dans leur stratégie commerciale globale.

La Saudi Arabian Oil Co, par exemple, fournit désormais des données annuelles sur son impact environnemental, notamment sur la consommation d'eau, les déversements d'hydrocarbures et les émissions d'oxyde de soufre, ainsi que des informations détaillées sur ses émissions directes et indirectes de carbone.

L’entreprise saoudienne Basic Industries Corp, qui publie également des données détaillées sur les émissions, s'est engagée à rendre toutes ses activités neutres en carbone d'ici à 2050. Elle vise désormais à rendre ses matières premières renouvelables et circulaires.

Entre-temps, la Bourse saoudienne a publié des lignes directrices sur la divulgation des informations ESG afin de sensibiliser le public.

Dans la pratique, cela signifie que la bourse rend compte de manière plus cohérente de l'empreinte environnementale de ses entreprises cotées dans le cadre d'une pression réglementaire de plus en plus forte en faveur de la transparence. Certaines entreprises sont même allées au-delà de la conformité pour apporter plus de clarté.

De nombreuses sociétés lancent de nouvelles réflexions sur le développement durable dans leurs structures organisationnelles. Notre enquête a mis en évidence la montée en puissance du responsable de la durabilité dans la région, un nouveau poste de haut niveau doté d'une responsabilité spécifique pour les questions liées au climat. Plus d'une entreprise régionale sur quatre comptes aujourd'hui une personne qui joue ce rôle.

La politique gouvernementale contribue également à l'élan des entreprises. Dans le prolongement de sa Vision 2030, publiée en 2016, le royaume d'Arabie saoudite a lancé en 2021 l'Initiative verte saoudienne.

Cette dernière vise à unir les programmes de protection de l'environnement, de transition énergétique et de durabilité afin de compenser les émissions, d'accroître l'utilisation d'énergies propres au sein du Royaume et de lutter contre le changement climatique.

Dans le cadre de ce programme, le gouvernement a annoncé plus de 60 initiatives, pour un montant de 700 milliards de riyals saoudiens (174,3 milliards d’euros) d'investissements.

Ces dernières années ont été marquées par une forte augmentation de l'émission d'obligations vertes et d'autres outils liés au développement durable

Omar al-Sagga

Malgré ces efforts, il reste encore beaucoup à faire pour intégrer le développement durable dans la stratégie des entreprises. Les secteurs du pétrole, du gaz et de la pétrochimie, qui sont au cœur de l'économie saoudienne, ont plus de mal à s'adapter aux exigences du développement durable en raison de la nature de leurs activités et de leur production. Toutefois, ils adoptent les nouvelles tendances avec un enthousiasme croissant et cherchent des moyens pour tirer parti de leur expertise afin de construire une industrie des énergies renouvelables dynamique qui exploite les abondantes ressources solaires et éoliennes du Royaume.

Certaines lacunes importantes doivent également être comblées. Fournir aux travailleurs les nouvelles compétences dont ils ont besoin pour travailler dans une branche d'activité davantage axée sur la durabilité constitue l'un des défis majeurs au Moyen-Orient et pour les entreprises saoudiennes.

Dans notre enquête, deux personnes interrogées sur cinq ont estimé que le manque de compétences et d'expertise interne pour mettre en œuvre les initiatives ESG dans leur entreprise représentait un obstacle majeur. Si les entreprises peuvent faire davantage pour renforcer les programmes de formation, les systèmes éducatifs ont aussi un rôle essentiel à jouer dans la formation d'une nouvelle génération d'ingénieurs en environnement.

Le financement est un autre domaine dans lequel les entreprises régionales doivent rattraper leur retard. Ces dernières années ont été marquées par une forte augmentation de l'émission d'obligations vertes et d'autres outils liés au développement durable à l'échelle mondiale. En effet, en octobre 2022, le fonds souverain du Royaume a introduit une première obligation verte de 3 milliards de dollars à la Bourse de Londres (1 dollar = 0,93 euro), suivie d'une seconde émission importante au début de cette année. Pourtant, l'une des conclusions de l'enquête est que les entreprises de la région n'exploitent pas encore ces instruments financiers innovants autant qu'elles le pourraient. En outre, un tiers des personnes interrogées ont indiqué que les contraintes de financement liées à l'ESG constituaient un obstacle important.

L'enquête a également mis en évidence les demandes des dirigeants d'entreprises et de gouvernements: les individus sollicités souhaitent que les conseils d'administration consacrent plus de temps aux questions de durabilité avant la Conférence des nations unies sur le changement climatique de Dubaï, également appelée «COP28», qui se tiendra au mois de novembre prochain.

Ils attendent des décideurs politiques de la région qu'ils mettent en place des cadres politiques similaires à la loi sur la réduction de l'inflation et au Green New Deal, introduits aux États-Unis et en Europe.

La tendance à intégrer la durabilité dans les opérations et à faire preuve de transparence à ce sujet est de bon augure pour les entreprises saoudiennes, qui progressent dans leurs engagements en matière d'ESG. Il ne s'agit donc plus de s'échauffer dans les starting-blocks. Elles sont sur la bonne voie et prennent de la vitesse.

Omar al-Sagga, KSA, est adjoint CSP et responsable de l'audit chez PwC Middle East, en Arabie saoudite.
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com