Nagorny Karabakh: les séparatistes négocient le retrait de leurs troupes et rendent les armes

Cette photographie prise du côté arménien de la frontière, près de la ville de Kornidzor, le 23 septembre 2023, montre une vue générale du couloir de Lachin et du pont Hakari. (ALAIN JOCARD / AFP)
Cette photographie prise du côté arménien de la frontière, près de la ville de Kornidzor, le 23 septembre 2023, montre une vue générale du couloir de Lachin et du pont Hakari. (ALAIN JOCARD / AFP)
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Publié le Samedi 23 septembre 2023

Nagorny Karabakh: les séparatistes négocient le retrait de leurs troupes et rendent les armes

  • Des milliers de civils restent confrontés à une situation d'urgence humanitaire au Nagorny Karabakh disent les autorités locales, encerclée par les soldats azerbaïdjanais
  • L'opération militaire azerbaïdjanaise, qui s'est achevée en 24 heures mercredi à la mi-journée, a fait au moins 200 morts et 400 blessés, d'après les séparatistes arméniens

KORNIDZOR: Les séparatistes du Nagorny Karabakh négocient samedi avec l'Azerbaïdjan qui vient de leur infliger une lourde défaite militaire le retour à la paix dans cette région dont la population en majorité arménienne s'angoisse pour son avenir.

Après leur capitulation et le cessez-le-feu conclu mercredi à l'issue d'une offensive éclair déclenchée un jour auparavant par Bakou, ils doivent notamment évoquer le retrait de leurs troupes, tout en continuant de déposer leurs armes.

Cette enclave montagneuse, qui avait été rattachée en 1921 par le pouvoir soviétique au territoire azerbaïdjanais, avait été par le passé le théâtre de deux guerres entre les anciennes républiques soviétiques que sont l'Azerbaïdjan et l'Arménie : l'une de 1988 à 1994 (30 000 morts) et l'autre à l'automne 2020 (6 500 morts).

"Conformément aux accords de cessation des hostilités, les formations armées du Karabakh ont commencé à remettre" leurs armes "sous le contrôle des forces russes de maintien de la paix", a fait savoir vendredi le ministère russe de la Défense.

Six blindés, plus de 800 armes légères et environ 5.000 munitions ont pour l'instant été rendus, a précisé le contingent de la paix russe.

Les pourparlers des autorités du Nagorny Karabakh avec la partie azerbaïdjanaise entamés jeudi "sous les auspices des soldats de maintien de la paix russes" doivent permettre d'"organiser le processus de retrait des troupes et assurer le retour dans leurs foyers des citoyens déplacés par l'agression militaire", selon les séparatistes.

Les parties discutent également de "la procédure d'entrée et de sortie des citoyens" de cette région, ont-ils ajouté.

Le tout à un moment où des milliers de civils restent confrontés à une situation d'urgence humanitaire au Nagorny Karabakh, dont la "capitale" Stepanakert est, disent les autorités locales, encerclée par les soldats azerbaïdjanais.

Les grandes dates du Nagorny Karabakh depuis la fin de l'URSS

Peuplé principalement d'Arméniens, mais reconnu comme partie de l'Azerbaïdjan, le petit territoire montagneux du Nagorny Karabakh a été le théâtre de décennies de violences entre Erevan et Bakou.

Voici les principales dates de son histoire récente:

 

- 1988, violences interethniques -

En février 1988, en pleine perestroïka, de premières manifestations ont lieu en faveur du rattachement à l'Arménie du Nagorny Karabakh, enclave du Caucase rattachée en 1921 à l'Azerbaïdjan par Staline avec, à partir de 1923, un statut d'autonomie.

Des violences interethniques éclatent, une trentaine de personnes, essentiellement arméniennes, sont tuées dans la ville azerbaïdjanaise de Soumgaït.

Alors que l'Arménie et l'Azerbaïdjan sont encore dans l'URSS, Mikhaïl Gorbatchev refuse tout changement de frontière. Les violences entre communautés azérie et arménienne se multiplient.

 

- 1991, indépendance non reconnue -

A la dislocation de l'URSS en 1991, le Nagorny Karabakh organise un référendum boycotté par la communauté azerbaïdjanaise et proclame le 2 septembre son indépendance de Bakou avec le soutien d'Erevan. Cette indépendance n'a été reconnue par aucun Etat membre de l'ONU.

 

-1994, victoire de l'Arménie -

Le départ de l'armée soviétique de la région laisse place à une escalade des violences et à une guerre ouverte jusqu'à un cessez-le-feu négocié par Moscou, le 17 mai 1994. Ces années de conflit ont fait 30.000 morts et poussé des centaines de milliers de réfugiés à fuir l'un ou l'autre pays. La défaite de Bakou permet à Erevan de contrôler la région et des zones azerbaïdjanaises proches.

 

- 2016, quatre jours d'hostilités -

Début avril 2016, d'intenses combats opposent forces azerbaïdjanaises et arméniennes pendant quatre jours. Ces affrontements, les pires depuis 1994, se soldent par la mort d'au moins 110 personnes, civils et militaires des deux côtés.

 

- 2020, deuxième guerre -

Le 27 septembre 2020, l'Azerbaïdjan lance une opération militaire contre les séparatistes arméniens et bombarde la capitale du Nagorny Karabakh, Stepanakert.

Ce nouveau conflit se solde cette fois par une écrasante défaite de l'Arménie, contrainte de céder à l'Azerbaïdjan d'importants territoires dans et autour du Nagorny Karabakh. Parrain du cessez-le-feu signé le 10 novembre, Moscou déploie un contingent de maintien de la paix, mais les quelques milliers de soldats russes déployés n'empêchent pas la multiplication des accrochages dans l'enclave séparatiste.

 

- 2022, blocus -

Fin 2022, l'Azerbaïdjan installe des points de contrôle avant de bloquer la circulation sur le corridor de Latchine, la seule route reliant le Nagorny Karabakh à l'Arménie, entraînant de graves pénuries de nourriture et de médicaments dans l'enclave.

 

- 2023, offensive éclair de Bakou -

Le 19 septembre, l'Azerbaïdjan annonce lancer des "opérations antiterroristes" au Nagorny Karabakh, après la mort de quatre policiers et deux civils azerbaïdjanais dans l’explosion de mines posées, selon Bakou, par des "saboteurs" arméniens.

Dès le lendemain, les autorités du territoire sécessionniste, lâchées par Erevan, capitulent, et un cessez-le-feu est conclu. Au moins 200 personnes sont mortes et 400 blessées, selon les séparatistes arméniens, et le Nagorny Karabakh est confronté à une situation d'urgence humanitaire. Des négociations sur la "réintégration" de l’enclave à l’Azerbaïdjan s’ouvrent.

«On espère des évacuations pour bientôt»

Originaire de cette ville, Yana Avanessian, une enseignante en droit âgée de 29 ans assure, comme bien d'autres Arméniens réussissant tant bien que mal à contacter leurs proches, que la situation sur place est "horrible".

"On espère des évacuations pour bientôt, notamment des gens dont les habitations ont été détruites", confie à l'AFP la jeune femme, au milieu d'un petit groupe de personnes comme elle rongées par l'inquiétude présentes au poste de contrôle arménien de Kornidzor tout proche du Nagorny Karabakh.

"Ça fait trois jours et trois nuits que j'attends. Je dors dans la voiture", raconte à cet égard Garik Zakarian, qui habitait jusqu'en décembre dernier dans le village d'Eghtsahog, presque à portée de main, de l'autre côté de la vallée, et où des amis, sa belle-mère et son beau-frère vivent toujours.

"Je n'ai pas d'espoir (de les voir rapidement évacués) mais je ne pouvais pas ne rien faire. Juste être là, voir la base russe à un kilomètre, je me sens mieux physiquement", déclare encore cet homme de 28 ans.

Et chacun s'écarte docilement quand passent des voitures remplies de soldats arméniens ou des convois de la force russe d’interposition, les seuls autorisés à poursuivre leur route.

Petite lueur d'espoir 

Un correspondant de l'AFP a pour sa part constaté que Stepanakert était privée d'électricité et de carburant. Ses habitants, qui ne peuvent pas retrouver leurs proches disparus faute de listes des morts et des blessés, manquent par ailleurs de nourriture et de médicaments.

Les troupes azerbaïdjanaises "sont partout autour de Stepanakert, elles sont à la périphérie", a quant à elle affirmé à l'AFP une porte-parole des autorités locales, Armine Hayrapetian, disant que des gens se terraient "dans les caves".

Petite lueur d'espoir, d'après un conseiller du président azerbaïdjanais Ilham Aliev, l'Azerbaïdjan a promis au Comité international de la Croix-Rouge (CICR) d'envoyer de l'aide et de prendre en charge les soldats séparatistes blessés, avec des ambulances autorisées à se rendre à partir de l'Arménie au Nagorny Karabakh.

L'opération militaire azerbaïdjanaise, qui s'est achevée en 24 heures mercredi à la mi-journée, a fait au moins 200 morts et 400 blessés, d'après les séparatistes arméniens.

Et la victoire remportée par Bakou nourrit les craintes d'un départ de nombre des 120.000 habitants du Nagorny Karabakh, même si l'Arménie a promis qu'aucune évacuation de masse n'était prévue. Elle s'est néanmoins dit prête à accueillir "40.000 familles" de réfugiés.

Kornidzor, dernier arrêt avant le Nagorny Karabakh coupé du monde

La route qui serpente et les villages accrochés à flanc de montagne, de l'autre côté de la vallée, c'est déjà le Nagorny Karabakh. Tout proche mais inaccessible. Tenu par une poignée de soldats, le poste de contrôle arménien de Kornidzor empêche les civils rongés par l'inquiétude d'aller plus loin.

Fumant cigarette sur cigarette, enchaînant les cafés dont les gobelets en carton s'empilent sur le bas-côté, quelques dizaines d'hommes attendent là, certains depuis des jours, une hypothétique ouverture. Ce qui permettrait le retour de leurs proches bloqués dans ce territoire sécessionniste en majorité peuplé d'Arméniens repris par les troupes azerbaïdjanaises à l'issue de l'offensive éclair qu'elles ont déclenchée mardi .

Aucune tension palpable. Quelques bergers prennent des chemins de traverse par les prairies à l'herbe jaunie. Indolents, les militaires arméniens partagent leurs impressions. Tout le monde s'écarte docilement quand passent des voitures remplies de soldats arméniens ou des convois de la force russe d’interposition, les seuls autorisés à poursuivre leur route.

Plus loin, caché dans la vallée, c'est un ultime poste arménien et le corridor de Latchine : sa fermeture par les autorités azerbaïdjanaises, en décembre 2022, a coupé le Nagorny Karabakh de l'Arménie et posé les jalons des 24 heures de bombardements et de combats au début de la semaine.

Ici, chacun a une histoire à raconter sur la fermeture du corridor et sur des proches qu'il n'a pas vus depuis plus de neuf mois.

«Pas d'espoir»

A l'aide d'une longue vue empruntée aux soldats, un homme tente de d'identifier les dégâts dans le village d'Eghtsahog, presque à portée de main, de l'autre côté de la vallée. "Il y avait une église avant à cet endroit. Je ne vois plus le clocher : elle a été détruite", grommelle-t-il avant de s'éloigner.

Garik Zakarian, plus loquace, habitait jusqu'en décembre dernier dans cette localité. Pressentant le danger, il a déménagé avec sa famille trois jours avant le blocus mais des amis, sa belle-mère et son beau-frère y vivent toujours.

Mardi, Eghtsahog a été bombardé. Par chance, personne n'a été tué et les 150 habitants ont trouvé refuge autour d'un camp de l'armée russe. Mais ils sont désormais coincés. Jeudi, deux jeunes ont tenté de retourner dans ce village récupérer des victuailles : ils en sont repartis ventre à terre après que des soldats azerbaïdjanais ont tiré sur eux.

C'est Garik qui raconte. Il le tient des amis qu'il a réussi à joindre. "Ça fait trois jours et trois nuits que j'attends. Je dors dans la voiture", confie cet homme de 28 ans.

"Je n'ai pas d'espoir (de les voir rapidement évacués) mais je ne pouvais pas ne rien faire. Juste être là, voir la base russe à un kilomètre, je me sens mieux physiquement".

A l'automne 2020, la "guerre de 44 jours", comme beaucoup l'appellent en Arménie, s'était soldée par la victoire sans appel de l'Azerbaïdjan, qui avait récupéré d'importantes portions de territoires.

Si un cessez-le-feu sous médiation russe avait été signé, la plupart des Arméniens se doutaient que Bakou voudrait récupérer l'intégralité du Nagorny Karabakh.

C'est chose faite depuis mercredi, quand les autorités du territoire séparatiste ont capitulé sous un déluge de feu ennemi. Mais ses 120.000 habitants, qui subissaient déjà le blocus et manquaient d'électricité, d'eau et de nourriture, sont piégés et terrorisés.

L'attente

S'ils devaient être évacués, le plus logique serait qu'ils passent par le corridor de Latchine et que la première localité arménienne qu'ils traversent soit Kornidzor.

En bordure de ce village déshérité, sans chemin asphalté, un centre d'accueil a été monté par le ministère arménien des Affaires étrangères et la fondation Tufenkian, une ONG locale.

Yana Avanessian, 29 ans, en a la charge. Enseignante en droit à l'université de Stepanakert, la "capitale" du Nagorny Karabakh, elle avait reçu une bourse d'un an pour aller aux Etats-Unis en août 2022. Comme tant d'autres, le blocus l'a piégée. Elle ne reverra pas sa ville natale.

Selon elle et les nombreux Arméniens réussissant, quand les appels téléphoniques passent, à contacter leurs proches dans cette région, la situation sur place est "horrible".

"On espère des évacuations pour bientôt, notamment des gens dont les habitations ont été détruites", confie la jeune femme.

"Ce ne sera pas facile de les héberger, l'Arménie est un petit pays. Mais les habitants du Nagorny Karabakh ont beaucoup de proches ici et ils attendent d'eux qu'ils les aident".

Dans le centre, les ordinateurs qui permettront d'enregistrer les futurs réfugiés sont déjà allumés, prêts à l'emploi. Mais rien n'indique leur arrivée prochaine.

Pachinian sous pression 

Accusé de passivité face à l'Azerbaïdjan, le Premier ministre arménien Nikol Pachinian a reconnu vendredi que "la situation" restait "tendue" au Nagorny Karabakh où "la crise humanitaire se poursuit".

Mais "il y a un espoir de dynamique positive", a ajouté le chef du gouvernement, pour qui le cessez-le-feu est "globalement" respecté.

Des personnes hostiles à M. Pachinian manifestent tous les jours à Erevan, la capitale de l'Arménie, pour protester contre la gestion de la crise par l'exécutif.

Plusieurs dirigeants de l'opposition ont de leur côté fait connaître leur intention d'ouvrir au Parlement une procédure de destitution à l'encontre du chef du gouvernement.

Selon la police arménienne, 98 manifestants ont été arrêtés vendredi, tandis que M. Pachinian appelle au calme et à emprunter "le chemin" de la paix, bien que ce soit "pas facile".


Un médecin syrien condamné à perpétuité en Allemagne pour crimes contre l'humanité sous Assad

L'Allemagne a déjà poursuivi et jugé des auteurs de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre commis hors de son territoire, notamment des Syriens et des Irakiens, au nom du principe juridique de compétence universelle. (AFP)
L'Allemagne a déjà poursuivi et jugé des auteurs de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre commis hors de son territoire, notamment des Syriens et des Irakiens, au nom du principe juridique de compétence universelle. (AFP)
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  • Agé de 40 ans, il réfutait toutes les accusations, parmi lesquelles celles d'avoir mis le feu aux parties génitales d'un adolescent et d'avoir administré une injection létale à un détenu qui avait résisté aux coups
  • "Il a tué deux personnes et blessé grièvement neuf autres", a affirmé en rendant son verdict le juge Christoph Koller, soulignant que ces actes commis en 2011 et 2012 "s'inscrivaient dans la réaction brutale du régime dictatorial et injuste d'Assad"

FRANCFORT: Un médecin syrien, accusé de tortures d'opposants au régime de Bachar al-Assad, a été condamné à la prison à vie lundi par la justice allemande, après un procès fleuve de plus de trois ans à Francfort.

Arrivé en Allemagne en 2015, où il a exercé comme chirurgien orthopédique jusqu'à son arrestation en 2020 après avoir été reconnu par d'autres réfugiés syriens, Alaa Moussa était jugé pour de multiples crimes sur des détenus dans des hôpitaux militaires de Damas et de Homs durant la guerre civile en Syrie.

Agé de 40 ans, il réfutait toutes les accusations, parmi lesquelles celles d'avoir mis le feu aux parties génitales d'un adolescent et d'avoir administré une injection létale à un détenu qui avait résisté aux coups.

"Il a tué deux personnes et blessé grièvement neuf autres", a affirmé en rendant son verdict le juge Christoph Koller, soulignant que ces actes commis en 2011 et 2012 "s'inscrivaient dans la réaction brutale du régime dictatorial et injuste d'Assad" aux manifestations des opposants.

Dénonçant "une violation massive des droits de l'Homme" par l'accusé, le juge a souligné que le verdict était aussi une façon de montrer "que la souffrance des victimes n'est pas oubliée".

"Outre les difficultés inhérentes à un délai de 12 ans, le régime syrien a tenté jusqu'à sa chute (en décembre 2024, ndlr) d'exercer une influence sur la procédure" allemande, a-t-il poursuivi, évoquant des menaces sur des proches des témoins.

Etant donné la gravité des faits, la condamnation à la perpétuité d'Alaa Moussa a été assortie d'une peine de sûreté pour une durée non encore définie (qui sera décidée au bout de quinze ans d'incarcération).

Lors de son procès commencé le 19 janvier 2022, entouré de hautes mesures de sécurité, Alaa Moussa avait été confronté à plus d'une cinquantaine de témoins et d'anciennes victimes.

Certains avaient témoigné masqués et beaucoup avaient fait état de menaces et d'intimidation à l'encontre de leur famille restée au pays alors que l'ombre des services secrets syriens planait sur les audiences.

Une situation qui s'est détendue après la chute, durant le procès, du dictateur Bachar al-Assad, renversé en décembre 2024 et désormais réfugié en Russie.

Parmi les témoins, un ancien lieutenant d'Alep, âgé aujourd'hui d'une quarantaine d'années, emprisonné après avoir refusé de tirer sur des manifestants en novembre 2011.

"Puni pour ses actes" 

Il avait affirmé avoir vu Alaa Moussa infliger des injections à des malades allongés sur le sol, qui sont décédés peu après, dans l'hôpital militaire où il sévissait.

"Aucun tortionnaire, quel que soit le lieu où il a commis son crime, ne peut être certain d'échapper à la justice. Il devra toujours s'attendre à être puni pour ses actes", a asséné le juge Christoph Koller lors de son verdict.

L'Allemagne a déjà poursuivi et jugé des auteurs de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre commis hors de son territoire, notamment des Syriens et des Irakiens, au nom du principe juridique de compétence universelle.

Il y a deux semaines, la justice allemande avait ainsi condamné à la prison à vie un ancien chef d'une milice syrienne soutenant l'ex-président Bachar al-Assad, reconnu coupable notamment de meurtre, d'actes de torture et de séquestration entre 2012 et 2014.

Lors du premier procès au monde sur des exactions du régime de Bachar al-Assad tenu en Allemagne, Anwar Raslan, un ex-gradé des services de renseignement syriens, avait été condamné en janvier 2022 à la prison à vie pour le meurtre de 27 prisonniers et des faits de torture sur au moins 4.000 autres, en 2011 et 2012, dans la prison Al-Khatib.

Des procès sur les crimes commis en Syrie ont également eu lieu ailleurs en Europe, notamment en France et en Suède.

Le conflit en Syrie, déclenché par des protestations pacifiques violemment réprimées en 2011, a fait plus d'un demi-million de morts, déplacé des millions de personnes et ravagé l'économie et les infrastructures du pays.


Ukraine: l'aide européenne compense le désengagement américain, selon le Kiel Institute

Gabriel Felbermayr, économiste autrichien et président de l'Institut de Kiel pour l'économie mondiale, participe à une conférence de presse le 11 mars 2020 à Berlin afin de commenter l'impact économique et politique de l'épidémie du nouveau coronavirus. (Photo de Tobias SCHWARZ / AFP)
Gabriel Felbermayr, économiste autrichien et président de l'Institut de Kiel pour l'économie mondiale, participe à une conférence de presse le 11 mars 2020 à Berlin afin de commenter l'impact économique et politique de l'épidémie du nouveau coronavirus. (Photo de Tobias SCHWARZ / AFP)
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  • « L'Europe comble largement le retrait de l'aide américaine », écrit l'institut dans un communiqué, qui recense l'aide militaire, financière et humanitaire promise et livrée à l'Ukraine depuis l'invasion russe du 24 février 2022.
  • Début 2025, les données du Kiel Institute montrent que « la récente augmentation de l'aide européenne a été tirée par un petit groupe de pays », au premier rang desquels se trouvent « les pays nordiques et le Royaume-Uni ».

PARIS : Selon l'institut de recherche allemand Kiel Institute, une hausse de l'aide des pays européens à l'Ukraine a permis début 2025 de combler le vide laissé par le désengagement de la nouvelle administration américaine de Donald Trump.

« L'Europe comble largement le retrait de l'aide américaine », écrit l'institut dans un communiqué, qui recense l'aide militaire, financière et humanitaire promise et livrée à l'Ukraine depuis l'invasion russe du 24 février 2022.

Alors que « les États-Unis, qui étaient auparavant le plus gros donateur à l'Ukraine, n'ont pas annoncé de nouvelle enveloppe depuis début janvier », l'Ukraine a tout de même reçu plus d'aide de janvier à avril 2025 qu'en moyenne les années précédentes sur la même période. 

« Reste à savoir s'il s'agit d'une hausse temporaire ou du début d'une évolution plus durable du rôle de l'Europe en tant que principal soutien de l'Ukraine », a déclaré Christoph Trebesch, qui dirige l'équipe du Kiel Institute chargée de suivre les engagements en faveur de l'Ukraine, cité dans le communiqué.

Début 2025, les données du Kiel Institute montrent que « la récente augmentation de l'aide européenne a été tirée par un petit groupe de pays », au premier rang desquels se trouvent « les pays nordiques et le Royaume-Uni ».

En revanche, « il est frappant de constater le peu d'aide allemande allouée ces derniers mois », a-t-il commenté. « Au lieu d'augmenter son soutien après l'arrivée de Trump au pouvoir, nous observons une forte baisse de l'aide allemande par rapport aux années précédentes. »

« La tendance est la même pour l'Italie et l'Espagne », a-t-il précisé. 

Au 30 avril 2025, 294 milliards d'euros au total ont été alloués à des dépenses précises en faveur de l'Ukraine (sur 405 milliards promis), selon les derniers chiffres du Kiel Institute. Les 111 milliards restants ont été promis à long terme, mais pas encore alloués.

Sur la somme déjà donnée, 140 milliards d'euros correspondent à de l'aide militaire, 133 milliards à de l'aide financière et 21 milliards à de l'aide humanitaire.

Les principaux donateurs sont l'Union européenne et ses membres (131 milliards d'euros donnés ou alloués), les États-Unis (115 milliards) et le Royaume-Uni (19 milliards).

En matière d'aide militaire, l'Europe, le Royaume-Uni compris, « dépasse pour la première fois depuis juin 2022 les États-Unis », selon le Kiel Institute. Les Européens ont déjà donné ou alloué 72 milliards d'euros d'aide militaire à l'Ukraine depuis le début de la guerre, contre 65 milliards pour les États-Unis. 


Les dirigeants du G7, dont Trump, se rejoignent au Canada tandis qu'un conflit oppose l'Iran et Israël

Le logo du G7 2025 est visible sur la pelouse devant le centre des médias de Banff, à l'approche du sommet du Groupe des Sept (G7) qui se tiendra à Kananaskis, dans la province canadienne de l'Alberta, le 16 juin 2025. (Photo : Ben Sheppard / AFP)
Le logo du G7 2025 est visible sur la pelouse devant le centre des médias de Banff, à l'approche du sommet du Groupe des Sept (G7) qui se tiendra à Kananaskis, dans la province canadienne de l'Alberta, le 16 juin 2025. (Photo : Ben Sheppard / AFP)
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  • Les pays du G7 ont entamé dimanche des négociations dans l'espoir de trouver un langage commun concernant le conflit entre l'Iran et Israël.
  • La priorité absolue pour tous sera d'éviter les drames, malgré les nombreux sujets de frictions, des droits de douane imposés par Donald Trump à la guerre en Ukraine, ou encore à celle du Moyen-Orient.

KANANASKIS, CANADA : Les pays du G7 ont entamé dimanche des négociations dans l'espoir de trouver un langage commun concernant le conflit entre l'Iran et Israël, alors que leurs dirigeants, dont le président américain, se retrouvent pour un sommet sous tension dans les Rocheuses canadiennes.

Il s'agit du premier grand sommet depuis que Donald Trump est revenu au pouvoir en janvier, ce qui a fragilisé l'unité du club des grandes démocraties industrialisées (Allemagne, Royaume-Uni, Canada, États-Unis, France, Italie et Japon).

Le président américain, qui n'a cessé de menacer le Canada ces derniers mois, est arrivé en fin de journée dans ce pays, avec sur la tête une casquette blanche portant son slogan « Make America Great Again » (« Rendre sa grandeur à l'Amérique »).

Pour cette réunion qui se déroule à Kananaskis, dans le parc national de Banff, dans l'ouest du Canada, il retrouvera ses alliés du G7 ainsi que les dirigeants de nombreux autres pays invités : l'Inde, l'Ukraine, le Mexique, l'Afrique du Sud et l'Australie seront notamment présents.

La priorité absolue pour tous sera d'éviter les drames, malgré les nombreux sujets de frictions, des droits de douane imposés par Donald Trump à la guerre en Ukraine, ou encore à celle du Moyen-Orient.

Mais parviendront-ils à parler d'une voix commune, notamment sur cette région du monde ?

Israël a stupéfié le monde vendredi en ouvrant un nouveau front avec une campagne militaire surprise et massive contre l'Iran.

Selon une source gouvernementale citée par l'AFP, les dirigeants du G7 travaillent à une déclaration commune. Reste à décider s'il s'agit d'appeler à la désescalade ou simplement de soutenir Israël en affirmant que le pays a le droit de se défendre. 

Mais cette guerre n'est pas le seule enjeu des discussions à Kananaskis. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky est parmi les invités et doit s'entretenir avec Donald Trump

Le président américain, qui s'est rapproché de façon spectaculaire de Moscou, a de nouveau eu un entretien téléphonique samedi avec le président russe Vladimir Poutine. Ce dernier lui a dit être prêt à un nouveau round de négociations.

De leur côté, les Européens tentent de convaincre Donald Trump de promulguer de nouvelles sanctions contre Moscou, ciblant plus précisément les ventes de pétrole russe. 

Tous les pays souhaitent par ailleurs aborder l'aspect commercial avec le président Trump. En imposant des taxes douanières d'au moins 10 % sur la plupart des produits entrant aux États-Unis, ce dernier a dévié le cours de la mondialisation et menacé l'économie mondiale d'un ralentissement général. 

Ce sommet du G7 est la première visite du président américain sur le sol canadien depuis qu'il a menacé son voisin du nord, estimant qu'il serait préférable qu'il devienne le 51^e État américain.

Le Premier ministre canadien, Mark Carney, et Donald Trump se rencontreront lundi matin lors d'un tête-à-tête. Outre MM. Carney et Zelensky, le dirigeant américain doit aussi rencontrer la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum.