À la découverte des secrets dissimulés sous le sable de la péninsule arabique

D’anciennes sculptures et d'autres découvertes dans la péninsule témoignent d'une terre qui était autrefois pleine de vie. Les archéologues ont découvert des preuves indiquant que les origines du peuple d'Arabie remontent à plus de 120 000 ans (Photo, AFP).
D’anciennes sculptures et d'autres découvertes dans la péninsule témoignent d'une terre qui était autrefois pleine de vie. Les archéologues ont découvert des preuves indiquant que les origines du peuple d'Arabie remontent à plus de 120 000 ans (Photo, AFP).
Un bas-relief orné représentant un lion et datant du cinquième au premier siècle avant J.-C., est présenté lors de l'exposition Al-Ula : Merveille de l'Arabie à l'Institut du monde arabe (IMA) à Paris, le 7 octobre 2019.
Un bas-relief orné représentant un lion et datant du cinquième au premier siècle avant J.-C., est présenté lors de l'exposition Al-Ula : Merveille de l'Arabie à l'Institut du monde arabe (IMA) à Paris, le 7 octobre 2019.
Une sculpture de dromadaire ou chameau arabe datant du 11ème siècle avant J.-C. est présentée dans le cadre de l'exposition Al-Ula : Merveille de l'Arabie à l'Institut du monde arabe (IMA) à Paris, le 7 octobre 2019. – Al-Ula : Merveille de l'Arabie est la première grande exposition au monde consacrée à l'exploration de l'histoire multidimensionnelle de 7 000 ans de l’Arabie. Elle met en lumière la civilisation préislamique dont on ne connaissait que très peu de choses et qui était très prospère, selon les archéologues.
Une sculpture de dromadaire ou chameau arabe datant du 11ème siècle avant J.-C. est présentée dans le cadre de l'exposition Al-Ula : Merveille de l'Arabie à l'Institut du monde arabe (IMA) à Paris, le 7 octobre 2019. – Al-Ula : Merveille de l'Arabie est la première grande exposition au monde consacrée à l'exploration de l'histoire multidimensionnelle de 7 000 ans de l’Arabie. Elle met en lumière la civilisation préislamique dont on ne connaissait que très peu de choses et qui était très prospère, selon les archéologues.
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Publié le Lundi 21 décembre 2020

À la découverte des secrets dissimulés sous le sable de la péninsule arabique

  • De nouvelles recherches mettent en évidence la riche histoire de cette région qui abritait autrefois des peuples primitifs
  • Les historiens et les archéologues ont découvert des indices qui prouvent que les origines du peuple d'Arabie remontent à plus de 120 000 ans

LA MECQUE: Le sable de la péninsule arabique recouvre des secrets vieux de plusieurs milliers d'années qui relatent l'histoire du peuple d'Arabie.

D'anciennes sculptures gravées sur les pierres et bien d'autres découvertes dans la péninsule témoignent d'une terre qui était autrefois pleine de vie et de civilisations anciennes. Tout comme les détectives, les historiens et les archéologues ont découvert des indices qui prouvent que les origines du peuple d'Arabie remontent à plus de 120 000 ans.

Dans une interview accordée à Arab News, le Dr Salma Hawsawi, professeur d'histoire antique à l'Université du Roi Saoud, explique que la position géographique de la péninsule arabique, au centre du monde antique - Asie, Afrique et Europe - a procuré aux anciennes civilisations un avantage de plus : relier l'Orient et l'Occident.

Selon Hawsawi, depuis le début du premier millénaire avant Jésus-Christ, le sud de la péninsule arabique a été le théâtre de plusieurs royaumes et civilisations, tels que les Maïn, Hadramout, Awsan, Qataban, Sheba et Himyar. En raison de leur position stratégique, les civilisations qui contrôlaient les routes commerciales sur terre et en mer ont prospéré au fur et à mesure que le commerce se développait.

Les royaumes du nord et du nord-ouest de la péninsule arabique, tels que Dadan, Lihyan, Nabatea, l'empire des Palmyre, Tayma et Qédar, ont prospéré à peu près à la même époque.

La région orientale de la péninsule a accueilli les royaumes de Dilmun et Makkan, Gerrha et Thaj étaient actifs, tandis qu'au centre vivaient les Magars et la civilisation Qaryat Al-Faw.

D'après le Dr. Hawsawi, le royaume occupe près d'un tiers de la péninsule arabique et regorge de vestiges architecturaux et écrits, des bâtiments aux inscriptions et aux dessins rupestres.

Elle signale que des dessins rupestres peuvent être observés au Hail, l'ancien fort de Tabouk qui date de 3500 avant JC et dans les palais de Fadak et les forts de Khaybar, le château de Marid à Dumat Al-Jandal datant du premier siècle après JC et dans les anciens cimetières. Elle évoque également des statues, dont certaines sont restées intactes, des poupées, des décorations en bas-relief et des poteries. « Si tous ces vestiges ne sont pas suffisants, nous avons la Sainte Kaaba, le lieu de culte le plus ancien du monde ».

Dr. Hawsawi affirme que « Le Royaume s'est rendu compte de l'importance que revêt cet héritage culturel et a donc créé le ministère de la Culture en 2018 ».

Et d’ajouter que l'Arabie saoudite, ainsi que les missions archéologiques internationales, poursuivent leurs fouilles et annoncent en permanence les découvertes qu'elles font. La dernière en date est la découverte d'empreintes d’hommes, d'éléphants et d'animaux prédateurs autour d'un lac asséché à Tabouk, dans le nord-ouest du Royaume, datant de plus de 120 000 ans. Cette découverte est le fruit d'une collaboration entre les missions archéologiques internationales et saoudiennes.

Les études archéologiques ont également dévoilé plusieurs zones archéologiques dans la péninsule arabique, comme Dumat Al-Jandal, mentionné dans des sources bibliques anciennes.

Dr. Marwan Shuaib

Le Dr Marwan Shuaib, professeur d'histoire antique à l'Université du Roi Abdel Aziz, explique que « L'ancienne région du Proche-Orient est considérée comme le berceau des premières civilisations. Elle suscite l'intérêt des chercheurs occidentaux depuis plus de deux siècles, depuis l'arrivée des Français, dirigés par Napoléon, en Égypte et au Levant (en 1798-1801 après J.-C.). Le besoin d'étudier et d'explorer cette région importante a pris de l'ampleur après la découverte de la pierre de Rosette, qui a facilité le décryptage des hiéroglyphes par les scientifiques ».

On estimait à l’époque que la Mésopotamie ainsi que la région qui bordait le Nil étaient les plus anciennes civilisations connues par les hommes, outre les civilisations chinoise et indienne.

« De plus en plus de voyageurs occidentaux se rendaient dans la péninsule arabique : Le voyageur suisse Johann Ludwig Burckhardt qui a découvert Pétra en 1812, la capitale des Nabatéens dans le sud de la Jordanie, et le voyageur anglais Charles Doughty qui a visité la péninsule arabique entre 1908 et 1909 et a découvert la célèbre pierre de Tayma, qui renferme des informations importantes sur le séjour du roi de Babylone, Nabonidus, à Tayma pendant 10 ans. Ces découvertes ont suscité l'intérêt des chercheurs pour l'histoire ancienne de la péninsule arabique ».


Selon le Dr Shuaib, « le roi Abdel Aziz a permis aux chercheurs occidentaux d’étudier l'archéologie de la péninsule arabique. Le voyageur anglais John Philby, connu plus tard sous le nom d'Abdullah Philby, était un ami du roi fondateur. En 1949 après J.-C., il a été autorisé à visiter les terres de la péninsule arabique et s'est rendu dans l'ancien village de Faw au nord de Najran. Il signale dans ses écrits que ce village est une zone archéologique qui renferme de nombreuses évidences historiques importantes. Le savant belge Ryckmans a lui aussi visité la péninsule arabique en 1951-1952 et a copié un grand nombre des inscriptions qui s’y trouvaient. Des campagnes d'exploration, des forages et des fouilles successives ont été réalisés par la suite dans les zones archéologiques de la péninsule arabique ».

« Les études archéologiques ont également dévoilé de nombreux sites archéologiques dans la péninsule arabique, comme Dumat Al-Jandal, qui était désigné dans les sources bibliques anciennes comme la forteresse de Dumat Ben Ismail, ce qui signifie qu'il remonte au Xe siècle avant J.-C. ».

Au nord-ouest du royaume, Al-Ula recèle un grand nombre d'inscriptions dadanitiques, lihyennes et thamoudiques, ainsi qu'un grand nombre de maisons à caractère nabatéen.

Les chercheurs ont découvert des inscriptions et des dessins remontant à 10 000 ans dans AlUla et Hail, plus précisément dans Jubbah et Al-Shuwaymis. Cela prouve que les habitants de la région ont développé un système d'écriture bien plus tôt que ne le croyaient les archéologues. Pour conclure, le Dr Shuaib a souligné que ces découvertes témoignent de l'histoire riche de la région.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com.


La bibliothèque Jadal est une oasis culturelle dans la province orientale de l'Arabie saoudite

Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
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  • Ali Al-Herz a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres, offrant aux visiteurs un espace où la mémoire, la philosophie et la culture prennent vie.
  • adal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

DHAHRAN : Dans le village tranquille d'Umm Al-Hamam, situé dans la province orientale de l'Arabie saoudite, une passion de longue date pour les livres s'est transformée en un havre culturel.

Ali Al-Herz, bibliophile et archiviste littéraire, a transformé sa maison en une bibliothèque d'exception nommée Jadal, un véritable trésor contenant plus de 37 000 livres, plus de 100 000 journaux et magazines, ainsi que des antiquités, dont certaines datent de plus d'un siècle.

Mais Jadal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

Al-Herz a déclaré à Arab News : « Depuis ma naissance, j'ai été entouré des livres de ma mère. J'ai grandi immergé dans cette passion, à tel point qu'elle m'a complètement envahi ; je suis devenu un rat de bibliothèque. »

L'étincelle qui a tout déclenché a été la rencontre d'Al-Herz avec l'épopée Sirat Antar à l'âge de 13 ans. « À partir de cette épopée, et à travers elle, j'ai commencé à explorer d'autres mondes », a-t-il déclaré. 

C'est cette curiosité et cette fascination qui ont finalement conduit Al-Herz à créer l'une des initiatives les plus originales du royaume d'Arabie saoudite.

Le nom « Jadal » signifie « débat » ou « discussion » en arabe, reflétant l'esprit curieux de la bibliothèque. Pour Al-Herz, l'objectif n'est pas seulement de préserver les textes, mais aussi l'idée de questionner et d'explorer les idées.

Al-Herz a déclaré : « J'ai choisi ce nom pour la bibliothèque, car il est profondément ancré dans l'histoire philosophique de la Grèce antique, ainsi que dans notre propre tradition culturelle arabo-islamique, en particulier dans notre héritage religieux. »

L'atmosphère philosophique imprègne les trois salles principales, nommées d'après Socrate, Platon et Aristote, qui accueillent les visiteurs dans un univers dédié à la lecture et à la réflexion. 

Des manuscrits rares, des textes anciens, des journaux et des antiquités ont été soigneusement archivés. Chaque pièce est un murmure du passé qui s'adresse à l'avenir. 

Al-Herz explique : « Même mon intérêt récent pour l'achat de livres s'est principalement orienté vers les éditions rares et les imprimés anciens, afin de créer une harmonie entre patrimoine et modernité. »

Mais Jadal ne se laisse pas envahir par la nostalgie, car Al-Herz organise toutes les deux semaines une réunion littéraire. Cet événement fait revivre une tradition qui était autrefois importante dans la vie intellectuelle des Arabes.

C'est un environnement où écrivains, universitaires et penseurs se réunissent autour d'un café arabe pour échanger des idées dans une atmosphère animée. 

À une époque où les gens recherchent des informations instantanées en ligne, Al-Herz continue d'utiliser des méthodes traditionnelles. « Il y a une lutte permanente entre deux générations », observe-t-il. « La victoire reviendra finalement à cette dernière génération, une fois que ma génération aura disparu. Les bibliothèques papier seront alors transformées en musées. »

Il a peut-être raison, mais pour l'instant, au cœur de la campagne de Qatif, la bibliothèque Jadal continue d'exister, et c'est un lieu où l'encre, la mémoire, le débat et le patrimoine continuent de façonner l'âme culturelle du Royaume. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com 


Amin Maalouf apporte un soutien inattendu aux langues régionales

Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
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  • Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs,
  • Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale.

PARIS : Une initiative d'un collectif visant à enseigner le patrimoine littéraire dans les langues régionales de France a reçu lundi  un soutien inattendu : celui du secrétaire perpétuel de l'Académie française, Amin Maalouf.

M. Maalouf, écrivain franco-libanais, a été élu en 2023 à la tête d'une institution dont la mission est de veiller au rayonnement et à l'intégrité de la langue française.

Toutefois, il soutient la démarche du Collectif pour les littératures en langues régionales, qui suggère un enseignement de ce type au collège ou au lycée, a indiqué ce collectif à l'AFP.

Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs, afin de sensibiliser à la « richesse de la production littéraire » dans d'autres langues que le français. 

« M. Maalouf, comme nous, est convaincu qu'il est nécessaire que les élèves français découvrent ces trésors culturels », écrit ce collectif à M. Bayrou, qui parle lui-même le béarnais.

Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale (de l'alsacien au tahitien, en passant par le basque ou le corse), traduits en français.

On y trouve entre autres un poème en provençal de Frédéric Mistral (prix Nobel de littérature en 1904) intitulé Mirèio, une chronique en breton de Pierre-Jakez Hélias intitulée Bugale ar Republik, un court récit en créole martiniquais de Raphaël Confiant intitulé Bitako-a, ainsi qu'une chanson en picard d'Alexandre Desrousseaux intitulée Canchon dormoire (plus connue sous le nom de P'tit Quinquin).

« Il ne s'agit pas de donner des cours de langues régionales, mais de présenter des œuvres issues des littératures en langues régionales, que ce soit en français ou en version bilingue », précise le collectif.

Idéalement, selon lui, les élèves aborderaient des langues issues d'autres régions que la leur. « Pourquoi seuls les élèves antillais apprendraient-ils qu'il existe une littérature en créole ? », demande ce collectif, qui présente son initiative à la presse lors d'une visioconférence lundi après-midi. 


L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle

L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle. (Photo Fournie)
L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle. (Photo Fournie)
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  • Fraîchement conçue, cette installation baignée de jaune, ancrée dans les œuvres passées de l'artiste, offre une expérience sensorielle riche et complexe ainsi qu'un commentaire culturel incisif.
  • « The Social Health Club » s'articule autour d'objets trouvés au marché Haraj de Djeddah en 2018.

RIYAD : Ce mois-ci, l'artiste saoudienne Ahaad Alamoudi fait monter la température au Basel Social Club qui se tient jusqu'au 21 juin dans la ville suisse avec sa dernière installation, « The Social Health Club ». 

Fraîchement conçue, cette installation baignée de jaune, ancrée dans les œuvres passées de l'artiste, offre une expérience sensorielle riche et complexe ainsi qu'un commentaire culturel incisif. Elle marque également une première pour l'artiste avec un élément de performance en direct.

Basée à Djeddah, Alamoudi est connue pour créer des installations multimédias immersives s'inspirant de la dynamique complexe de son pays natal en pleine évolution. « The Social Health Club » s'articule autour d'objets trouvés au marché Haraj de Djeddah en 2018, notamment divers équipements de sport, dont un rameur.

« Ce sont des pièces que j'ai chinées dans des brocantes. J'aime le fait qu'aucune instruction n'accompagne ces machines : je ne connais ni leur nom, ni leur provenance, ni leur fabricant. Mais elles font désormais partie du paysage urbain dans lequel j'évolue. J'ai essayé de créer un espace ludique », a-t-elle déclaré à Arab News. 

Dans « The Social Health Club », les équipements, peints principalement dans un jaune vif et saturé, restent intacts, symbolisant une culture obsédée par l'auto-optimisation. Au cœur de l'installation se trouve un caméo représentant un fer à repasser peint en jaune, déjà présent dans son œuvre vidéo de 2020 intitulée « Makwah Man » (Makwah signifie « fer à repasser » en arabe).

« Beaucoup de mes œuvres sont issues d'un récit que je crée dans une vidéo. Dans « Makwah Man », cet homme vêtu d'une thobe jaune repasse un long morceau de tissu jaune au milieu du désert. Et pendant qu'il repasse, il nous dit comment vivre notre vie. Mais en nous disant comment vivre notre vie, il commence aussi à remettre en question la sienne, à comprendre le rôle du pouvoir, à prendre conscience de la pression du changement et de l'adaptation », explique Alamoudi. 

« Le jaune est présent dans la vidéo, mais l'artiste porte également une thobe jaune. Il y a aussi, dans cette version présentée à Art Basel, un portant de thobes jaunes qui tournent dans l'exposition. Pour moi, la thobe jaune est un symbole unificateur. J'essaie de dire que nous vivons tous cela différemment. Ainsi, dans la performance (pour « The Social Health Club »), un culturiste local vêtu d'une thobe jaune fera des exercices sur ces machines. Il n'a pas de règles à suivre. Il ne connaît rien, ne sait pas comment utiliser « correctement » l'équipement. Il entrera dans l'espace et utilisera les machines comme il le pourra.

« La performance sera enregistrée. Mais je pense que c'est plutôt une activation », a-t-elle poursuivi. « Ce n'est pas l'œuvre elle-même. L'œuvre existe sous la forme des machines. 

« Le Social Health Club » a été créé en étroite collaboration avec la conservatrice Amal Khalaf. Ensemble, ils se sont rendus à Djeddah où Alamoudi a pu découvrir avec elle des « machines un peu inhabituelles, différentes des machines classiques que l'on trouve dans les salles de sport et dont tout le monde connaît immédiatement l'utilité », explique Alamoudi.

« Elle est vraiment incroyable », a-t-elle poursuivi. « Nous avons vraiment construit cet espace ensemble. En gros, j'ai principalement créé la vidéo ; tout le reste a été construit à partir de là. Elle m'a beaucoup aidée. Elle s'est vraiment intéressée aux changements sociaux et à la manière dont nous les abordons. Notre collaboration a été parfaite. »

Le jaune domine chaque centimètre carré de l'œuvre, de manière délibérée et intense. 

« Je suis obsédé par les symboles dans certaines de mes œuvres. Et cela s'accompagne également d'une couleur », explique Alamoudi. « Je voulais mettre en valeur quelque chose de luxueux, de coloré, presque comme de l'or, mais qui n'est pas de l'or. Son apparence est assez austère. » 

Le jaune est à la fois une invitation et un avertissement. « Je pense que le jaune est également assez trompeur. J'aime cette couleur qui incite les gens à s'approcher pour voir ce qui se passe, mais qui les amène en même temps à se demander ce que c'est  elle est si agressive qu'elle en devient un peu inconfortable. »

L'interaction du spectateur est essentielle à la signification de l'œuvre. 

« Je pense que les machines représentent quelque chose et qu'elles véhiculent quelque chose, mais elles sont en réalité activées par les gens, par ce que les gens font avec elles », explique Alamoudi. « C'est pourquoi j'encourage beaucoup de spectateurs à interagir avec les œuvres, à les utiliser ou à essayer de les utiliser sans aucune instruction. Beaucoup de personnes qui entrent dans l'espace peuvent avoir peur de les toucher ou d'interagir avec elles. La présence de l'artiste qui active les structures ajoute une autre dimension à l'œuvre elle-même. »

Elle espère que les visiteurs se sentiront libres d'explorer les œuvres, sans être encombrés par des attentes.

« Les gens sont censés les utiliser à leur guise. Ils peuvent s'asseoir dessus, se tenir debout dessus, les toucher — ils peuvent aussi les laisser tranquilles », conclut-elle en riant. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com