New York divisée entre un rassemblement palestinien et une prière juive pour les morts d'Israël

Des manifestants soutiennent les Palestiniens lors d'une manifestation devant le siège des Nations Unies à New York, le 9 octobre 2023. (AFP)
Des manifestants soutiennent les Palestiniens lors d'une manifestation devant le siège des Nations Unies à New York, le 9 octobre 2023. (AFP)
Une personne tient un drapeau israélien alors que des gens assistent à un service de prière et à une veillée aux chandelles pour Israël au Temple Emanu-El à New York City le 9 octobre 2023, après que le groupe militant palestinien Hamas ait lancé une attaque contre Israël. (AFP)
Une personne tient un drapeau israélien alors que des gens assistent à un service de prière et à une veillée aux chandelles pour Israël au Temple Emanu-El à New York City le 9 octobre 2023, après que le groupe militant palestinien Hamas ait lancé une attaque contre Israël. (AFP)
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Publié le Mercredi 11 octobre 2023

New York divisée entre un rassemblement palestinien et une prière juive pour les morts d'Israël

  • Depuis dimanche, la police de la mégapole, une mosaïque multiculturelle de près de neuf millions d'âmes, prend soin d'encadrer les rassemblements afin d'éviter tout affrontement direct
  • Si les recensements officiels basés sur la religion ne sont pas possibles aux Etats-Unis, le pays de 335 millions d'habitants compte le plus grand nombre de juifs au monde, derrière Israël

NEW YORK: Ambiance lourde lundi à New York, divisée entre un rassemblement pro-palestinien de colère contre Israël et une prière juive en mémoire des centaines de civils tués depuis samedi par le mouvement islamiste Hamas.

Pour la seconde journée consécutive depuis l'attaque surprise du Hamas contre l'Etat hébreu, New York - qui compte quelque deux millions de juifs et des centaines de milliers de musulmans - est le théâtre de manifestations sous haute tension: d'un côté des soutiens à la cause palestinienne, de l'autre des rassemblements pour défendre les juifs et Israël.

Depuis dimanche, la police de la mégapole, une mosaïque multiculturelle de près de neuf millions d'âmes, prend soin d'encadrer ces rassemblements afin d'éviter tout affrontement direct.

«New York au côté de Gaza»

Au coeur de Manhattan, quelques centaines d'Américains et d'étrangers pro-palestiniens, vent debout contre le gouvernement très à droite à Jérusalem se sont rassemblés sous les slogans "New York au côté de Gaza" et "Israël va en enfer", tout en réclamant que les Etats-Unis cessent d'aider militairement leur allié au Proche-Orient.

Des gens plutôt jeunes et de milieux populaires se sont massés en face du consulat général israélien, brandissant des drapeaux palestiniens et des pancartes aux slogans contre des "colons" israéliens et un régime "sioniste raciste".

Parqués derrière des barrières de sécurité et bien encadrés par des policiers, les manifestants ont fait face, de l'autre côté de la rue, à un groupe pro-israélien très agressif qui les a copieusement injuriées.

De jeunes militants coiffés d'un kéfié se sont succédé au mégaphone pour exiger "la libération de la Palestine" et "la fin de la colonisation et de l'occupation de territoires arabes".

«Gaza, nouveau ghetto de Varsovie»

"Pas de justice sans paix" ou "pas de justice sur une terre volée", ont-ils scandé tandis que leurs pancartes comparaient la bande de "Gaza (au) nouveau ghetto de Varsovie".

Leena Abukuwaik, une Palestino-Américaine de 45 ans, a confié à l'AFP avoir "un frère, deux soeurs et nombre de cousins" à Gaza, dont elle dit être sans nouvelles: "Je ne sais pas s'ils ont été bombardés, s'ils sont vivants, blessés, sains et saufs", a-t-elle soufflé en retenant ses larmes.

Ray Gordon, un retraité blanc de 81 ans, qui vit entre le Maryland et la Floride, s'est dit "furieux que ses impôts en dollars arment, financent et aident diplomatiquement Israël".

De son côté, Maryam Alaniz, doctorante de 27 ans "non pacifiste", ne pense pas que les "victimes civiles soient justifiées".

Cette "non pacifiste" dit "dénoncer les méthodes et les tactiques du Hamas" et voudrait que "la lutte des Palestiniens (soit) organisée depuis la base, par le peuple, de manière démocratique".

«Le peuple d'Israël, notre peuple»

Atmosphère beaucoup plus solennelle et de recueillement sur la très huppée 5e Avenue, le long de Central Park: la synagogue Temple Emanu-El de New York, première congrégation de la communauté juive libérale de la ville, a accueilli à l'extérieur des centaines de juifs et de fidèles d'autres cultes pour un "kaddish", la prière des morts dans la liturgie juive.

Des personnes de tous âges, de milieux plutôt bourgeois, ont chanté, prié, tenu des bougies, agité des fanions aux couleurs d'Israël et parfois pleuré.

En conviant ces New-Yorkais, le rabbin américain du Temple Emanu-El, Joshua Davidson, a assuré dans un communiqué: "Nous nous tenons avec force au côté du peuple d'Israël, notre peuple".

Sa collègue, la rabbine Melissa Buyer-Witman, a affirmé à l'AFP que "la communauté juive new-yorkaise et d'autres communautés amies comme l'Eglise catholique allaient se serrer les coudes par solidarité dans les jours et mois à venir".

Si les recensements officiels basés sur la religion ne sont pas possibles aux Etats-Unis, le pays de 335 millions d'habitants compte le plus grand nombre de juifs au monde, derrière Israël. Il y avait en 2020, selon l'institut Pew Research Center, 5,8 millions d'adultes juifs, religieux ou pas, auxquels s'ajoutent 2,8 millions d'adultes qui revendiquent un parent juif.

Et le pays compte environ 4,5 millions de musulmans, dont 600.000 à 750.000 vivent à New York.


Nouveaux bombardements israéliens au Liban malgré des discussions «positives»

Israël a de nouveau bombardé jeudi le sud du Liban, disant viser des sites du Hezbollah pro-iranien qu'elle accuse de se réarmer, au lendemain des premières discussions directes depuis plusieurs décennies entre des représentants des deux pays. (AFP)
Israël a de nouveau bombardé jeudi le sud du Liban, disant viser des sites du Hezbollah pro-iranien qu'elle accuse de se réarmer, au lendemain des premières discussions directes depuis plusieurs décennies entre des représentants des deux pays. (AFP)
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  • Le président libanais Joseph Aoun, saluant les réactions "positives" à la réunion de mercredi, a annoncé que les discussions reprendraient le 19 décembre afin d'éloigner "le spectre d'une deuxième guerre" au Liban
  • "Il n'y a pas d'autre option que la négociation", a-t-il ajouté

JBAA: Israël a de nouveau bombardé jeudi le sud du Liban, disant viser des sites du Hezbollah pro-iranien qu'elle accuse de se réarmer, au lendemain des premières discussions directes depuis plusieurs décennies entre des représentants des deux pays.

L'armée israélienne, qui a multiplié ses frappes ces dernières semaines, a encore frappé jeudi le sud du Liban après avoir appelé des habitants de plusieurs villages à évacuer.

Les bombardements ont touché quatre localités, où des photographes de l'AFP ont vu de la fumée et des maisons en ruines.

Dans le village de Jbaa, Yassir Madir, responsable local, a assuré qu'il n'y avait "que des civils" dans la zone. "Quant aux dégâts, il n'y a plus une fenêtre à 300 mètres à la ronde. Tout le monde est sous le choc", a-t-il ajouté. 


« La Syrie n’est pas condamnée » : les leçons d’un an de transition, selon Hakim Khaldi

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  • Parmi les scènes les plus marquantes, Khaldi se souvient d’une vieille dame de Homs qui, voyant les portraits d’Assad retirés des bâtiments officiels, murmure : « On peut respirer ? Est-ce que c’est vrai ? »
  • Mais ce soulagement intense laisse rapidement place à une inquiétude plus sourde : celle du vide

PARIS: La Syrie post-Assad, carnets de bord, de Hakim Khaldi, humanitaire chez Médecins sans frontières, publié chez L’Harmattan, n’est pas seulement un récit de témoins, mais une immersion dans la réalité d’un pays brisé mais pas vaincu, où la chute d’un pouvoir omnipotent n’a pas suffi à étouffer l’exigence de dignité.
Ce qu’il raconte, c’est l’envers des discours diplomatiques, la géographie vécue d’une société projetée brutalement hors d’un demi-siècle d’autoritarisme dans un vide politique, économique et moral.

Les premiers jours après la chute du régime de Bachar Al-Assad ressemblent, selon Khaldi, à un moment de bascule irréel.

Dans ses carnets, comme dans ses réponses à Arab News en français, revient une même conviction : la chute d’un régime ne signifie pas la naissance immédiate d’un pays. La Syrie, aujourd’hui, est entre les deux, « en état de transformation ».

Les premiers jours après la chute du régime de Bachar Al-Assad ressemblent, selon Khaldi, à un moment de bascule irréel : « On ne savait pas si c’était la fin d’une époque ou le début d’une autre tragédie », confie-t-il.
Dans les villes « libérées », les scènes oscillent entre euphorie et sidération ; la population découvre, sans y croire encore, la possibilité de parler librement, de respirer autrement.

Il raconte ces familles qui, pendant quarante ans, n’avaient jamais osé prononcer le mot « moukhabarat » (services secrets en arabe), ne serait-ce qu’à voix basse chez elles.
Et brusquement, les voilà qui se mettent à raconter : les disparitions, les tortures, les humiliations, et la peur devenue routine.
Des parents ressortent des photos d’adolescents morts sous la torture, des certificats de décès maquillés, des lettres écrites depuis la prison mais jamais envoyées.

Parmi les scènes les plus marquantes, Khaldi se souvient d’une vieille dame de Homs qui, voyant les portraits d’Assad retirés des bâtiments officiels, murmure : « On peut respirer ? Est-ce que c’est vrai ? »
Ce qui l’a le plus frappé, c’est « ce sentiment presque physique d’un poids qui tombe. C’est ce que j’ai le plus entendu », affirme-t-il.

Mais ce soulagement intense laisse rapidement place à une inquiétude plus sourde : celle du vide. En quelques jours, l’État s’est évaporé : plus de police, plus d’électricité, plus d’école, plus de justice.
Les anciens bourreaux disparaissent dans la nature, mais les réseaux de corruption se reconstituent, et les premières milices locales émergent, prêtes à occuper le terrain déserté par les institutions.

Pourtant, au fil de ses déplacements, Khaldi est frappé par la force de résilience et d’auto-organisation de la population : « Les Syriens n’ont jamais cessé d’exister comme société, même quand l’État les avait réduits au silence », assure-t-il.
Dans les villages, des comités improvisés se forment et organisent la distribution alimentaire, la remise en marche d’une station d’eau, la sécurité ou la scolarisation d’urgence.

Un an après la chute du régime (le 8 décembre 2024), la Syrie tente de se relever lentement, mais elle demeure une mosaïque de composants hybrides.

Cette responsabilité populaire est, pour Khaldi, l’un des rares points lumineux du paysage syrien, la preuve qu’une société peut exister en dehors de l’appareil répressif qui prétendait être l’État.

Un an après la chute du régime (le 8 décembre 2024), la Syrie tente de se relever lentement, mais elle demeure une mosaïque de composants hybrides, de milices rivales, de zones d’influence et d’ingérences étrangères. « Une mosaïque qui ne ressemble plus au pays d’avant », estime Khaldi.
Le territoire est éclaté entre forces locales, groupes armés (notamment les milices druzes à Soueida, au nord-est du pays), gouvernances provisoires ou structures étrangères. Les routes sont coupées, les administrations doublées ou contradictoires.

Avec des infrastructures détruites, une monnaie en chute libre et un secteur productif quasi paralysé, la survie quotidienne est devenue un exercice d’équilibriste.
Les Syriens ne nourrissent plus d’illusions sur l’arrivée immédiate d’un modèle démocratique idéal : il s’agit d’abord de survivre, de reconstruire, de retrouver un minimum de continuité.

Le traumatisme est profond, à cause des disparitions massives, de l’exil et des destructions psychologiques. Pourtant, affirme Khaldi, « jamais je n’ai entendu un Syrien regretter que la dictature soit tombée ».

De ses observations et des témoignages qu’il a collectés en arpentant le pays, Khaldi tire les priorités pour éviter que la Syrie ne devienne ni un conflit gelé ni un espace livré aux milices.
De son point de vue, la reconstruction politique ne peut se réduire à remplacer un gouvernement par un autre : il faut rebâtir les fondations, à savoir une justice indépendante, une police professionnelle et des administrations locales.

Des dizaines de groupes armés contrôlent aujourd’hui une partie du territoire, et une transition politique sérieuse est impensable sans un processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration, soutenu par une autorité légitime et par un cadre international solide.
Au-delà des aides internationales, la Syrie a besoin d’un cadre empêchant la capture des fonds par les anciens réseaux de corruption ou les factions armées.
Elle doit donner la priorité à la relance de l’agriculture, au rétablissement de l’électricité, des réseaux routiers et des petites industries, les seules capables à court terme de soutenir la vie quotidienne.

Le pays porte une blessure immense : celle des prisons secrètes, des fosses communes, des disparitions et des exactions documentées. « Sans justice, il n’y aura pas de paix durable », affirme Khaldi.
Il ne s’agit ni de vengeance ni de tribunaux-spectacle, mais de vérité et de reconnaissance, conditions indispensables à une réconciliation nationale.

De cet entretien se dégage une idée forte : malgré la faim, la peur, les ruines, malgré la fragmentation politique et l’ingérence étrangère, les Syriens n’ont pas renoncé à eux-mêmes.
Ils ouvrent des écoles improvisées, réparent des routes avec des moyens dérisoires, organisent l’entraide, résistent au chaos. « La Syrie n’est plus la Syrie d’avant, mais elle n’est pas condamnée pour autant », affirme Khaldi.
Son témoignage rappelle qu’un pays ne meurt pas quand un régime tombe ; il meurt lorsque plus personne ne croit possible de le reconstruire. Et les Syriens, eux, y croient encore.


Liban: Israël annonce des frappes dans le sud, appelle à des évacuations

L'armée israélienne a annoncé jeudi après-midi des frappes imminentes dans le sud du Liban contre ce qu'elle présente comme des infrastructures du mouvement islamiste Hezbollah, et a appelé à des évacuations dans deux villages de cette région. (AFP)
L'armée israélienne a annoncé jeudi après-midi des frappes imminentes dans le sud du Liban contre ce qu'elle présente comme des infrastructures du mouvement islamiste Hezbollah, et a appelé à des évacuations dans deux villages de cette région. (AFP)
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  • Les forces israéliennes vont "bientôt attaquer des infrastructures terroristes du Hezbollah à travers le sud du Liban afin de contrer ses tentatives illégales de rétablir ses activités dans la région"
  • Dans un "message urgent" en arabe, le colonel Adraee signale, cartes à l'appui, deux bâtiments dans les villages de Jbaa et Mahrouna, dont il appelle les riverains dans un rayon d'au moins 300 mètres à s'écarter

JERUSALEM: L'armée israélienne a annoncé jeudi après-midi des frappes imminentes dans le sud du Liban contre ce qu'elle présente comme des infrastructures du mouvement islamiste Hezbollah, et a appelé à des évacuations dans deux villages de cette région.

Cette annonce survient au lendemain d'une rencontre entre responsables civils libanais et israélien, lors d'une réunion de l'organisme de surveillance du cessez-le-feu entré en vigueur il y a un an, présentée comme de premières discussions directes depuis plus de 40 ans entre les deux pays toujours techniquement en état de guerre.

Les forces israéliennes vont "bientôt attaquer des infrastructures terroristes du Hezbollah à travers le sud du Liban afin de contrer ses tentatives illégales de rétablir ses activités dans la région", a annoncé le colonel Avichay Adraee, porte-parole de l'armée israélienne pour le public arabophone.

Dans un "message urgent" en arabe, le colonel Adraee signale, cartes à l'appui, deux bâtiments dans les villages de Jbaa et Mahrouna, dont il appelle les riverains dans un rayon d'au moins 300 mètres à s'écarter.

Accusant le Hezbollah de se réarmer dans le sud du pays et de violer ainsi les termes de la trêve entrée en vigueur fin novembre 2024, l'armée israélienne a multiplié depuis plusieurs semaines les frappes aériennes dans le sud du Liban mais a marqué une pause dans ses attaques pendant la visite du pape Léon XIV cette semaine.

Israël a même frappé jusque dans la banlieue de Beyrouth le 23 novembre pour y éliminer le chef militaire du Hezbollah, Haitham Ali Tabatabai.

Le Liban dénonce ces attaques comme des violations patentes du cessez-le-feu.

Mais Israël, qui peut compter sur l'aval tacite des Etats-Unis pour ces frappes, affirme qu'il ne fait qu'appliquer la trêve en empêchant le Hezbollah, allié de la République islamique d'Iran, ennemie d'Israël, "de se reconstruire et de se réarmer".

Tout en déclarant que les discussions directes de mercredi avec le Liban s'étaient déroulées dans "une atmosphère positive", le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a rappelé mercredi soir que le désarmement du Hezbollah restait une exigence "incontournable" pour son pays.