Les Arabes israéliens de Kafr Qasim, «entre le marteau et l'enclume»

De la fumée s'échappe lors des frappes aériennes israéliennes dans la ville de Gaza le 12 octobre 2023 alors que les combats font rage entre Israël et le mouvement Hamas se poursuivent pour la sixième journée consécutive. (AFP)
De la fumée s'échappe lors des frappes aériennes israéliennes dans la ville de Gaza le 12 octobre 2023 alors que les combats font rage entre Israël et le mouvement Hamas se poursuivent pour la sixième journée consécutive. (AFP)
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Publié le Jeudi 12 octobre 2023

Les Arabes israéliens de Kafr Qasim, «entre le marteau et l'enclume»

  • Tout le monde à Kafr Qasim est Arabe israélien, descendant des Palestiniens restés sur leur terre à la création d'Israël et détenteurs de la nationalité israélienne
  • «On est pris entre le marteau et l'enclume, on n'est protégés d'aucun côté, ni des roquettes palestiniennes ni d'Israël qui ne nous traite pas comme de vrais citoyens et ne nous respecte pas»

KAFR QASIM: A Kafr Qasim, le silence règne, les rues sont désertées. Et les rares habitants visibles n'ont qu'un mot à la bouche: "la peur". Comme à chaque guerre entre Palestiniens et Israéliens, les Arabes israéliens sont pris entre deux feux.

"On a très très peur et on est très très inquiets car des choses qu'on n'imagine même pas pourraient arriver", assure à l'AFP Ahlam, 38 ans, qui témoigne sous pseudonyme.

Tout le monde à Kafr Qasim est Arabe israélien, descendant des Palestiniens restés sur leur terre à la création d'Israël et détenteurs de la nationalité israélienne.

"On est pris entre le marteau et l'enclume, on n'est protégés d'aucun côté, ni des roquettes palestiniennes ni d'Israël qui ne nous traite pas comme de vrais citoyens et ne nous respecte pas", poursuit Ahlam.

Dans cette ville de 26.000 âmes, à 20 kilomètres à l'est de Tel-Aviv, peu de magasins sont ouverts. Les familles sont à la maison, le regard vissé sur les images qui passent en boucle à la télévision de la guerre qui a éclaté samedi entre le Hamas palestinien, au pouvoir dans la bande de Gaza, et Israël.

«Comment m'identifier?»

Samedi, dans une offensive qui a surpris l'armée et le renseignement israéliens, le mouvement islamiste Hamas a tué plus de 1.200 Israéliens et étrangers, parfois dans leur maison. En rétorsion, Israël pilonne depuis  Gaza, où déjà plus de 1.300 Palestiniens ont été tués.

Ahlam est travailleuse sociale et veut aider sa communauté. Mais, dit-elle, "quand je quitte la maison, je m'inquiète pour mes enfants".

"On vit dans un Etat auquel on est liés par tout: l'éducation, la santé, le travail. Mais les Palestiniens sont notre peuple", résume-t-elle.

"Je ne sais pas comment m'identifier: un Juif peut s'exprimer comme il veut, moi, si je le fais, j'aurai une grosse campagne de harcèlement et les gens déformeront mes propos", assure-t-elle.

Wissam Ali, chauffeur de bus de 54 ans, n'a lui pas oublié les tristes souvenirs d'octobre 2000.

Les Territoires palestiniens occupés --la Cisjordanie et la bande de Gaza-- mais aussi Israël et Jérusalem étaient alors à feu et à sang, la seconde Intifada battant son plein. Et les Arabes israéliens avaient décidé de manifester en soutien aux Palestiniens.

Treize d'entre eux ont été tués et les relations entre l'Etat et ses citoyens arabes - 21% de la population d'Israël - ont radicalement changé.

"L'Etat s'est retourné contre nous à l'époque, alors aujourd'hui, on ne veut plus se mêler de tout ça, on veut la paix pour tout le monde, on espère que ni les Arabes ni les Juifs ne souffriront", dit-il à l'AFP.

«Personne n'est venu»

L'histoire douloureuse de Kafr Qasim remonte bien plus loin encore.

La ville est tristement célèbre pour le "massacre de Kafr Qasim", lorsqu'en 1956, aux premières heures de la crise du Canal de Suez, des garde-frontières israéliens y ont abattu 49 civils.

Ils ont été reconnus coupables et condamnés mais la cicatrice est encore à vif.

Pour autant, après les tueries lancées samedi, sa municipalité a annoncé sur les réseaux sociaux et dans les médias que ses habitants accueilleraient, le temps de la guerre, des habitants, Arabes et Juifs, du sud d'Israël fuyant les tirs de roquettes du Hamas.

Saëd Issa a monté une équipe de secouristes au cas où ces bombardements toucheraient Kafr Qasim.

"On fait ça pour pouvoir aider les gens", dit-il à l'AFP, car "nous, les Arabes d'Israël, on vit à la marge pour l'Etat et on est toujours victimes d'incitations à la haine".

"Dès le premier jour" de guerre, poursuit-il, "on a appelé les gens du Sud, Juifs et Arabes, à venir chez nous, on a préparé nos maisons pour eux, sans distinction de religion, mais personne n'est venu".

D'abord, dit-il, parce que "l'Etat a prévu des chambres d'hôtel pour les déplacés juifs".

Et peut-être aussi parce que "dans la plupart des villes et villages arabes, il n'y a pas d'abris antiaériens, contrairement aux autres villes".

Malgré tout, "il y a eu beaucoup de réactions positives" et seuls "quelques extrémistes de droite ont mal réagi", se félicite-t-il.


«Gaza brûle», déclare le ministre israélien de la Défense après des frappes intenses

Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza. (AFP)
Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza. (AFP)
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  • "Gaza brûle. Tsahal frappe d'une main de fer les infrastructures terroristes, et les soldats de Tsahal se battent vaillamment pour créer les conditions nécessaires à la libération des otages et à la défaite du Hamas"
  • "Nous ne céderons pas et ne reculerons pas jusqu'à ce que la mission soit achevée"

JERUSALEM: Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza.

"Gaza brûle. Tsahal frappe d'une main de fer les infrastructures terroristes, et les soldats de Tsahal se battent vaillamment pour créer les conditions nécessaires à la libération des otages et à la défaite du Hamas", a déclaré M. Katz sur X.

"Nous ne céderons pas et ne reculerons pas jusqu'à ce que la mission soit achevée", a-t-il ajouté.

 


Le Qatar est le seul pays capable d'être un médiateur concernant Gaza, souligne Rubio

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  • Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a estimé mardi que le Qatar était le seul pays capable de jouer le rôle de médiateur pour Gaza
  • "Evidemment, ils doivent décider s'ils veulent le faire après la semaine dernière ou non, mais nous voulons qu'ils sachent que, s'il existe un pays dans le monde qui pourrait aider à mettre fin à cela par une négociation, c'est le Qatar"

TEL-AVIV: Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a estimé mardi que le Qatar était le seul pays capable de jouer le rôle de médiateur pour Gaza, malgré une frappe israélienne ciblant des dirigeants du Hamas dans l'émirat.

"Evidemment, ils doivent décider s'ils veulent le faire après la semaine dernière ou non, mais nous voulons qu'ils sachent que, s'il existe un pays dans le monde qui pourrait aider à mettre fin à cela par une négociation, c'est le Qatar," a déclaré M. Rubio aux journalistes alors qu'il se rendait à Doha depuis Israël.

 

 


Forts bombardements sur la ville de Gaza après le soutien de Rubio à Israël

La ville de Gaza a été touchée par des bombardements forts et soutenus dans la nuit de lundi à mardi, ont indiqué plusieurs témoins à l'AFP, au lendemain d'une visite à Jérusalem du secrétaire d'Etat américain qui a réitéré l'appui des Etats-Unis à Israël. (AFP)
La ville de Gaza a été touchée par des bombardements forts et soutenus dans la nuit de lundi à mardi, ont indiqué plusieurs témoins à l'AFP, au lendemain d'une visite à Jérusalem du secrétaire d'Etat américain qui a réitéré l'appui des Etats-Unis à Israël. (AFP)
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  • Marco Rubio a promis lundi au gouvernement de Benjamin Netanyahu le "soutien indéfectible" des Etats-Unis à Israël pour éliminer le mouvement islamiste palestinien Hamas dans la bande de Gaza
  • Quelques heures plus tard, de très fortes frappes se sont fait entendre dans la bande de Gaza, assiégée et affamée, selon des témoins

GAZA: La ville de Gaza a été touchée par des bombardements forts et soutenus dans la nuit de lundi à mardi, ont indiqué plusieurs témoins à l'AFP, au lendemain d'une visite à Jérusalem du secrétaire d'Etat américain qui a réitéré l'appui des Etats-Unis à Israël.

Marco Rubio a promis lundi au gouvernement de Benjamin Netanyahu le "soutien indéfectible" des Etats-Unis à Israël pour éliminer le mouvement islamiste palestinien Hamas dans la bande de Gaza.

Quelques heures plus tard, de très fortes frappes se sont fait entendre dans la bande de Gaza, assiégée et affamée, selon des témoins.

"Il y a des bombardements massifs et incessants sur la ville de Gaza et le danger ne cesse d'augmenter", a déclaré à l'AFP Ahmed Ghazal, un habitant de cette zone.

Cet homme de 25 ans a décrit une "explosion qui a violemment secoué le sol du quartier" peu après 01H00 locale mardi (22H00 GMT lundi).

"J'ai couru dans la rue, sur le site de la frappe", "trois maisons" d'un bloc résidentiel "ont été complètement rasées". "De nombreuses personnes sont emprisonnées sous les débris et on peut entendre leurs cris."

Le porte-parole de la Défense civile de la bande de Gaza, Mahmoud Bassal, a déclaré à l'AFP que "les bombardements se (poursuivaient) intensément dans toute la ville de Gaza", précisant que "le nombre de morts et de blessés (continuait) d'augmenter".

"Il y a des morts, des blessés et des personnes disparues sous les décombres suite à des frappes aériennes israéliennes visant un bloc résidentiel près de la place Al-Shawa dans la ville de Gaza", a-t-il détaillé, évoquant "un massacre majeur".

La Défense civile avait fait état de 49 Palestiniens tués lundi, dont plus de la moitié à Gaza-ville, où l'armée a intensifié ses attaques avec l'objectif de s'en emparer.

Compte tenu des restrictions imposées aux médias à Gaza et des difficultés d'accès sur le terrain, l'AFP n'est pas en mesure de vérifier de manière indépendante les informations des différentes parties.

Le déplacement de M. Rubio dans la région intervient après une attaque israélienne inédite le 9 septembre au Qatar contre des chefs du Hamas.

Rassurer Doha 

Après Jérusalem, M. Rubio se rend mardi à Doha, où il devrait rencontrer le cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani, afin de "réaffirmer le soutien total des Etats-Unis à la sécurité et la souveraineté du Qatar après l'attaque israélienne", selon le département d'Etat.

La frappe aérienne au Qatar, pays médiateur entre Israël et le Hamas et qui abrite la plus grande base aérienne américaine de la région, avait provoqué de rares critiques de Donald Trump contre Israël.

Le président américain a assuré lundi à des journalistes dans le Bureau ovale qu'Israël "ne frappera pas au Qatar".

Réunis lundi à Doha après l'attaque israélienne, les dirigeants arabes et musulmans ont appelé à "revoir les relations diplomatiques et économiques avec Israël et à engager des poursuites à son encontre".

Le secrétaire d'Etat américain s'est montré pessimiste quant à la possibilité d'une solution "diplomatique" à Gaza, qualifiant le Hamas d'"animaux barbares".

L'offensive israélienne à Gaza a suivi l'attaque du 7-Octobre qui a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.

Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts à Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire. L'ONU y a déclaré la famine, ce qu'Israël dément.

M. Rubio a aussi affiché la solidarité des Etats-Unis avec Israël avant un sommet coprésidé par la France et l'Arabie saoudite le 22 septembre à l'ONU, destiné à promouvoir la reconnaissance d'un Etat de Palestine, au côté d'Israël.

Une initiative largement symbolique dans la mesure où Israël s'oppose fermement à la création d'un tel Etat auquel aspirent les Palestiniens.

En soirée, le secrétaire d'Etat a rencontré à Jérusalem des familles d'otages, selon un responsable du département d'Etat. Sur les 251 personnes enlevées durant l'attaque du 7-Octobre, 47 sont encore retenues à Gaza, dont 25 décédées selon l'armée israélienne.