Netanyahou et Biden offrent aux terroristes tout ce dont ils ont toujours rêvé

La déclaration de soutien total à Israël du président américain Joe Biden est devenue un parfait outil de propagande djihadiste. (Reuters).
La déclaration de soutien total à Israël du président américain Joe Biden est devenue un parfait outil de propagande djihadiste. (Reuters).
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Publié le Jeudi 26 octobre 2023

Netanyahou et Biden offrent aux terroristes tout ce dont ils ont toujours rêvé

Netanyahou et Biden offrent aux terroristes tout ce dont ils ont toujours rêvé
  • Des dirigeants internationaux comme Joe Biden, Rishi Sunak et Ursula von der Leyen génèrent eux-mêmes des outils parfaits de propagande djihadiste globale avec leurs déclarations
  • Daech et Al-Qaïda ont grandement ouvert leurs canaux de propagande, exploitant des images horribles de cadavres mutilés de bébés palestiniens à Gaza pour attirer des recrues en colère

Des extrémistes de toutes sortes ont exploité la violence à Gaza pour passer à l'offensive – de Daech et Al-Qaïda au Hezbollah et à la force Al-Qods, en passant par les racistes violents du monde entier et les colons israéliens radicalisés – menaçant de déclencher de nouvelles séries de carnages pires encore que l’atroce effusion de sang à laquelle nous avons assisté jusqu'ici.

L’assassinat de deux ressortissants suédois la semaine dernière à Bruxelles a été la première attaque de Daech sur le sol européen depuis trois ans. Parmi les victimes d’agressions contre des juifs et des musulmans en Occident se trouvait un garçon palestinien américain de six ans à Chicago, décédé après que lui et sa mère ont été poignardés par leur bailleur criant: «Vous, musulmans, devez mourir! Ceux qui dénoncent en toute conscience le massacre de civils des deux côtés ont été confrontés à un déluge de menaces de mort et de messages haineux. Les agences de renseignement occidentales préviennent que le pire est à venir.

Al-Qaïda a décrit avec jubilation le massacre de retraités, de femmes et d’enfants israéliens par le Hamas le 7 octobre comme «le joyau de toutes les batailles islamiques de notre histoire moderne», impliquant qu’il était d’une plus grande importance que le 11-Septembre dans le panthéon djihadiste. Contrairement à l’insistance de Benjamin Netanyahou selon laquelle «le Hamas est Daech», Daech déteste en réalité le Hamas, considérant le groupe comme des «apostats nationalistes» et ordonnant à ses combattants de s’abstenir de combattre à ses côtés.

Néanmoins, Daech et Al-Qaïda ont grandement ouvert leurs canaux de propagande, exploitant des images horribles de cadavres mutilés de bébés palestiniens pour attirer des marginaux en colère vers leur cause diabolique. Le journal Al-Naba de Daech a demandé que le peuple et les lieux de culte juifs soient pris pour cible «partout dans le monde» et d’attaquer les ambassades israéliennes et occidentales. À côté des images d’orphelins endeuillés et de ruines de Gaza jonchées de cadavres, de sinistres chaînes de Telegram donnent des codes QR pour les dons en bitcoins à la cause djihadiste mondiale.

Des dirigeants internationaux comme Joe Biden, Rishi Sunak et Ursula von der Leyen génèrent eux-mêmes des outils parfaits de propagande djihadiste globale. Ils semblent totalement ignorer que toutes les expressions d’amour, d’attachement et de soutien inconditionnel à Israël, ainsi que les promesses d’armes et de fonds, sont rediffusées sur les réseaux sociaux djihadistes pour rappeler à leurs partisans que l’Occident n’a jamais cessé de mener des «guerres de croisade» contre le monde musulman, et les intimidant par rapport à leur «obligation» de s’embarquer dans le jihad contre les citoyens de ces «nations infidèles».

Une telle implacable propagande terroriste capitalise sur la frustration et le désenchantement justifiés ressentis dans tout le monde arabe en raison des attitudes partiales et racistes de longue date de l’Occident à l’égard de cette question qui demeurent inchangées. L'incapacité avérée de certains dirigeants occidentaux à équilibrer leurs commentaires pour reconnaître le massacre de Palestiniens contraste avec les positions plus compatissantes adoptées par des personnalités, comme la ministre canadienne des Affaires étrangères, Mélanie Joly, qui a parlé avec une insistance prononcée de la «situation humanitaire désastreuse à Gaza» et de la nécessité d’«un accès humanitaire rapide et sans entraves».

Les supplétifs iraniens exploitent également les tensions à Gaza pour intensifier leurs attaques contre des cibles occidentales en Irak, en Syrie et ailleurs. Alors que les États-Unis abattent des drones et des missiles de croisière tirés depuis le Yémen sur toute la région, les Houthis n’agissent clairement pas de leur propre initiative. Des personnalités proches de la milice ont fait allusion aux menaces qui pèsent sur la sécurité énergétique mondiale, peut-être en référence à l’accès de Téhéran à des points d’étranglement économiques tels qu’Ormuz, par lequel transite 20 % du pétrole mondial.

«Des dirigeants mondiaux tels que Joe Biden, Rishi Sunak et Ursula von der Leyen génèrent eux-mêmes des outils parfaits de propagande djihadiste globale»

- Baria Alamuddin

Les milices soutenues par Téhéran se sont réinstallées dans les zones frontalières entre Israël, la Syrie et le Liban, et auraient établi une salle d’opérations transnationale commune supervisée par des officiers de la force Al-Qods, pour une coordination avec le Hamas. Parmi les hauts dirigeants d’Al-Hachd al-Chaabi aperçus à la frontière libanaise figure le commandant des Kata’ib Sayyed al-Chouhada, Abou Ala al-Walai. Avec des souvenirs amers de la guerre de 2006, le Hezbollah hésite manifestement à engager pleinement le Liban dans ce conflit. En conséquence, les factions favorables à Téhéran ont utilisé leur position dans la région syrienne du Golan afin d’élargir le front nord contre Israël. Ceci dit, débarrassons-nous du fantasme selon lequel Israël raterait l’occasion de se venger directement et massivement du Liban en cas d’importantes incursions en provenance du nord.

L’objectif impossible de Netanyahou d’éradiquer le Hamas ne fera que créer de nouvelles générations emplies d’amertume, implacablement résolues à chercher à se venger. Comme a clairement mis en garde la femme politique et universitaire palestinienne Hanan Achrawi, l’invasion de Gaza porte essentiellement atteinte aux Palestiniens modérés qui plaident depuis longtemps en faveur du dialogue et de la compréhension mutuelle, tout en offrant un énorme stimulant aux radicaux du monde entier.

Même si Israël affaiblit considérablement le Hamas, la force qui a imposé un certain niveau d’ordre dysfonctionnel dans tout Gaza au cours des vingt dernières années, à quel type d’organisme s’attend-il pour leur remplacement, sinon à des factions infiniment plus radicalisées? Il faut néanmoins affirmer de façon appuyée que le Hamas, par ses propres actions sanglantes, partage la responsabilité de la situation épouvantable à laquelle est confrontée Gaza.

Israël peut sans cesse déposséder, enfermer et bombarder les Palestiniens, mais il ne peut pas simplement les faire disparaître – pas plus que le Hamas ne peut faire disparaître Israël. Pendant plus de vingt-cinq ans à la tête de la politique israélienne, Netanyahou a ignoré les avertissements selon lesquels s’il bloquait toutes les voies menant vers la justice, la paix et l’auto gouvernance palestinienne, Israël risquait de récolter le tourbillon du désespoir, déclenchant à son tour des atrocités extrémistes apocalyptiques sur le monde entier.

Entre-temps, un mouvement de colons sionistes radicalisés, désireux de recourir à la violence terroriste, dévore année après année des milliers d’hectares de terres palestiniennes. Les milices des colons se sont lancées dans une campagne de vengeance depuis les attaques du Hamas, tuant près de 100 Palestiniens et déplaçant des villages entiers – tandis que les généraux israéliens disent qu’elles ne font que commencer.

Au plus fort de la deuxième Intifada palestinienne, les dirigeants arabes et occidentaux ont donné la priorité à l’objectif d’une solution à deux États, juste et mutuellement bénéfique comme condition préalable nécessaire à la paix dans la région et à l’apaisement des tensions géopolitiques vieilles de plusieurs décennies. Le fait que Netanyahou et ses extrémistes du même acabit aient activement contrecarré ces objectifs ne les rend pas moins justes et adéquats.

Tout comme la violence engendre la violence, la justice et l’espoir engendrent la justice et l’espoir. L’abandon par Israël de la solution à deux États a rendu inévitables les effusions de sang actuelles et futures. Comme l’ont fermement soutenu les participants au sommet de paix du Caire samedi, la voie à suivre pour mettre fin aux cycles de carnage actuels est d’une évidence claire: toutes les parties saisissent à pleines mains le chemin vers la paix, dans le cadre de la solution redynamisée à deux États.

Il semble par ailleurs que le monde doive réapprendre douloureusement une leçon: la Palestine n'est pas une question sans conséquences, à éluder, mais plutôt une blessure béante d'injustice et d'inhumanité destructrices d'âmes, avec des répercussions susceptibles de provoquer des tensions mondiales illimitées, et d’entraîner les capitales occidentales dans la ligne de mire des groupes terroristes.

Baria Alamuddin est une journaliste et animatrice ayant reçu de nombreux prix au Moyen-Orient et au Royaume-Uni. Elle est rédactrice en chef du Media Services Syndicate et a interviewé de nombreux chefs d'État.

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est celle de l’auteur et ne reflète pas nécessairement le point de vue d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com