Italie: Plus de 200 personnes condamnées dans un procès XXL contre la mafia calabraise

Plus de 200 personnes ont été condamnées lundi en Italie à des peines allant jusqu'à 30 années de réclusion à l'issue d'un «maxi-procès» contre la 'Ndrangheta (Photo, AFP).
Plus de 200 personnes ont été condamnées lundi en Italie à des peines allant jusqu'à 30 années de réclusion à l'issue d'un «maxi-procès» contre la 'Ndrangheta (Photo, AFP).
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Publié le Mardi 21 novembre 2023

Italie: Plus de 200 personnes condamnées dans un procès XXL contre la mafia calabraise

  • Depuis janvier 2021, trois juges ont auditionné durant des milliers d'heures des témoins, parmi lesquels une cinquantaine de mafieux repentis devenus collaborateurs de justice
  • Basée en Calabre, une région très pauvre située dans la pointe de la Botte italienne, la 'Ndrangheta est la plus riche et la plus puissante des mafias italiennes

LAMEZIA TERME: Plus de 200 personnes ont été condamnées lundi en Italie à des peines allant jusqu'à 30 années de réclusion à l'issue d'un "maxi-procès" contre la 'Ndrangheta, la plus puissante mafia de la péninsule.

Sur les 338 accusés qui comparaissaient en première instance devant le tribunal de Lamezia Terme (sud), 207 ont été reconnus coupables et condamnés, tandis que 131 ont été acquittés.

Le parquet avait requis un total de près de 5.000 années de prison à l'encontre des mafieux ainsi que leurs complices en col blanc, fonctionnaires, élus locaux et même policiers de haut rang.

Les condamnations, lues par la juge Brigida Cavasino, vont de quelques mois de prison à 30 ans de réclusion, une peine écopée par quatre personnes, pour un total d'environ 2.150 années de prison pour l'ensemble des condamnés.

L'un des accusés les plus en vue, l'ex-sénateur Giancarlo Pittelli, 70 ans, a été condamné à 11 ans de réclusion alors que le parquet avait demandé une peine de 17 ans.

Basée en Calabre, une région très pauvre située dans la pointe de la Botte italienne, la 'Ndrangheta est la plus riche et la plus puissante des mafias italiennes.

Présente dans une quarantaine de pays, elle exerce sur sa terre d'origine une emprise étouffante, infiltrant et corrompant l'administration tout en faisant régner sa loi de fer sur la population.

Depuis janvier 2021, trois juges ont auditionné durant des milliers d'heures des témoins, parmi lesquels une cinquantaine de mafieux repentis devenus collaborateurs de justice, sur les activités de la famille Mancuso et de ses associés, un important clan de la 'Ndrangheta contrôlant la province de Vibo Valentia.

«Silence assourdissant»

Ce maxi-procès organisé dans un bunker sous haute surveillance dans la ville de Lamezia Terme est le plus important contre la mafia depuis plus de 30 ans.

Les chefs d'accusation sont nombreux: association mafieuse, trafic de drogue, extorsion, usure, blanchiment d'argent sale...

Au cours du procès, les accusés ont détaillé le fonctionnement violent de la 'Ndrangheta, son emprise sur la population locale, l'extorsion, le trucage des appels d'offre et des élections, l'acquisition d'armes, etc.

Ils ont révélé des secrets sur des caches d'armes dans des cimetières ou des ambulances servant au transport de drogues, et dévoilé comment l'eau municipale était détournée pour arroser des plantations de marijuana.

Lundi matin à l'ouverture de l'audience, un entrepreneur victime de la mafia est venu, comme chaque semaine depuis le début du procès, pour exprimer son soutien "à ceux qui nous aident à nous libérer, les juges et les procureurs".

Interrogé par une journaliste de l'AFP, Rocco Mangiardi, 67 ans, a cependant dit regretter "le silence assourdissant" des médias italiens sur cette affaire, et l'absence de citoyens ordinaires comme lui sur les bancs du public.

Multinationale du crime

Ceux qui s'opposent à la mafia sont menacés, voire éliminés. Ils découvrent sur le seuil de leur porte des chiots morts ou des têtes de chèvre ou même de dauphin. Sans parler des voitures incendiées ou des devantures de magasins saccagées. Certains sont aussi passés à tabac ou visés par des tirs, d'autres disparaissent à jamais.

Illustrant l'infiltration de la 'Ndrangheta dans l'économie légale, des gérants de société, des maires et des fonctionnaires, y compris un policier de haut rang, figurent sur le banc des accusés.

Longtemps sous-estimée, la 'Ndrangheta s'est développée discrètement durant des décennies alors que les autorités concentraient leurs efforts sur Cosa Nostra, la mafia sicilienne décrite dans des films comme "Le Parrain".

Le premier maxi-procès fut d'ailleurs organisé contre ses membres à Palerme en 1986, aboutissant à la condamnation de 338 mafieux.

Aujourd'hui, les experts estiment que la 'Ndrangheta, composée d'environ 150 familles calabraises, réalise un chiffre d'affaires annuel d'une cinquantaine de milliards d'euros à travers le monde.

Avec l'aide d'Interpol, l'Italie est parvenue ces dernières années à resserrer son étau sur le réseau criminel, entraînant les polices du monde entier à identifier les activités de la 'Ndrangheta sur leur territoire et à s'y attaquer.

Mais en dépit de son envergure, ce procès ne devrait pas bouleverser les activités de la 'Ndrangheta, selon les experts.

"Je ne crois pas qu'une opération de police suffise à détruire la 'Ndrangheta", estime ainsi Antonio Nicaso, qui met en avant d'autres priorités: emploi, éducation et changement des mentalités. "C'est de cela dont on a besoin pour attaquer une organisation criminelle".


Mobilisation en soutien à Gaza: affrontements et intervention de la police sur le campus de la UCLA à Los Angeles

Des agents de la CHP marchent près d'un campement de partisans des Palestiniens de Gaza, sur le campus de l'UCLA, à Los Angeles, Californie, États-Unis, le 1er mai 2024. (Reuters)
Des agents de la CHP marchent près d'un campement de partisans des Palestiniens de Gaza, sur le campus de l'UCLA, à Los Angeles, Californie, États-Unis, le 1er mai 2024. (Reuters)
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  • Manifestants et contre-manifestants se sont opposés à coups de bâton et se sont lancé des projectiles
  • Quelques heures plus tôt, la police de New York avait délogé des manifestants pro-palestiniens barricadés dans un bâtiment de l'université Columbia, campus américain d'où est partie la mobilisation estudiantine pro-palestinienne

LOS ANGELES : Des affrontements ont éclaté dans la nuit de mardi à mercredi en marge d'un rassemblement étudiant dénonçant la guerre menée par Israël à Gaza à l'Université UCLA, à Los Angeles, dernier épisode d'un mouvement étudiant qui secoue les Etats-Unis.

Les heurts ont éclaté quand un important groupe de contre-manifestants, pour beaucoup masqués, a attaqué un campement pro-palestinien installé sur une pelouse de l'UCLA, selon un photographe de l'AFP sur place.

Les assaillants ont tenté d'enfoncer une barricade improvisée autour du campement, composée de barrières métalliques et de panneaux de contreplaqué. Manifestants et contre-manifestants se sont ensuite opposés à coups de bâton et se sont lancé des projectiles.

«La violence en cours à l'UCLA est absolument abjecte et inexcusable», a fustigé la maire de Los Angeles, Karen Bass, ajoutant que la police de la ville était déployée sur le campus.

Cette dernière a indiqué avoir été appelée en renfort par la direction après «de nombreux actes de violence commis dans le campement à l'intérieur du campus».

Tôt mercredi, les policiers étaient toujours présents en grand nombre sur le site universitaire.

Quelques heures plus tôt, la police de New York avait délogé des manifestants pro-palestiniens barricadés dans un bâtiment de l'université Columbia, intervenant manu militari sur le campus américain d'où est partie la mobilisation estudiantine pro-palestinienne.

Le campement de tentes installé sur la pelouse du site a été démantelé, a pu constater une journaliste de l'AFP dans la nuit de mardi à mercredi.

Environ 300 personnes ont été interpellées, a indiqué la police new-yorkaise.

Dans le sud-ouest du pays, la police de l'Université de l'Arizona a annoncé mercredi matin avoir utilisé du gaz lacrymogène pour disperser «un rassemblement illégal».

En Caroline du Nord, sur la côte est, la police est intervenue mardi pour évacuer un campement sur un campus de Chapel Hill, arrêtant plusieurs manifestants dans un face-à-face tendu.

- Accord -

Depuis deux semaines, les mobilisations de soutien à Gaza se multiplient à travers les campus américains, de la Californie aux grandes universités du nord-est, en passant par le sud et le centre du pays -- rappelant les manifestations contre la guerre du Vietnam.

Les étudiants appellent les établissements à couper les ponts avec des mécènes ou entreprises liés à Israël, et dénoncent le soutien de Washington à son allié israélien.

Se distinguant ainsi des autres institutions, l'université Brown dans l'Etat de Rhode Island a annoncé mardi avoir trouvé un accord avec les manifestants, prévoyant le démantèlement de leur campement en échange d'un vote de l'université en octobre sur d'éventuels «désinvestissements dans des +sociétés qui rendent possible et profitent du génocide à Gaza+».

A Columbia, les négociations entre direction et groupes étudiants n'avaient pas abouti. «Les événements de la nuit dernière sur le campus ne nous ont pas donné le choix», avait écrit la présidente de l'université, Minouche Shafik, dans une lettre rendue publique demandant à la police de New York d'intervenir sur le campus.

A Los Angeles, le président de l'UCLA Gene Block avait mis en garde avant les heurts de la nuit contre la présence de personnes extérieures à l'université.

Dimanche, des militants pro-palestiniens et pro-israéliens, soutenus par de nombreux manifestants extérieurs au campus, en étaient venus aux mains, avec des bousculades et des insultes.

«Beaucoup de manifestants et de contre-manifestants pratiquent leur militantisme de manière pacifique. Mais d'autres emploient des méthodes franchement choquantes et honteuses», avait écrit M. Block dans un message posté mardi sur le site de l'université.

«Ces incidents ont provoqué, tout particulièrement chez nos étudiants juifs, une profonde anxiété et de la peur», a-t-il ajouté.

- A 6 mois de la présidentielle -

Depuis le début du mouvement, des centaines de personnes - étudiants, enseignants et militants - ont été interpellées, parfois arrêtées et poursuivies en justice dans plusieurs universités du pays.

Les images de policiers anti-émeutes intervenant sur les campus, à la demande des universités, ont fait le tour du monde et on fait vivement réagir le monde politique, à six mois de la présidentielle dans un pays polarisé.

Joe Biden «doit faire quelque chose» contre ces «agitateurs payés», a déclaré mardi soir sur Fox News le candidat républicain Donald Trump. «Il nous faut mettre fin à l'antisémitisme qui gangrène notre pays aujourd'hui», a-t-il ajouté.

«Occuper par la force un bâtiment universitaire est la mauvaise approche» et ne représente «pas un exemple de manifestation pacifique», avait tonné avant l'intervention de la police John Kirby, porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche.


Royaume-Uni: Premiers migrants arrêtés avant leur expulsion vers le Rwanda, d'autres campent à Dublin

Des demandeurs d'asile dormant dans des tentes à Dublin affirment que la vie sous les bâches est meilleure et plus sûre que le risque d'être envoyé par le Royaume-Uni au Rwanda  (Photo, AFP).
Des demandeurs d'asile dormant dans des tentes à Dublin affirment que la vie sous les bâches est meilleure et plus sûre que le risque d'être envoyé par le Royaume-Uni au Rwanda (Photo, AFP).
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  • L'adoption d'une loi permettant l'expulsion des migrants vers le Rwanda a déclenché leur départ du Royaume-Uni
  • Une centaine de tentes ont poussé devant l'Office, depuis que le gouvernement irlandais a cessé il y a quelques mois de fournir un hébergement aux demandeurs d'asile

LONDRES: Les premiers migrants susceptibles d'être expulsés par le Royaume-Uni vers le Rwanda ont été arrêtés et placés en détention, a annoncé mercredi le ministère britannique de l'Intérieur, sans préciser le nombre de personnes concernées.

"Les premiers migrants en situation irrégulière devant être expulsés vers le Rwanda ont été placés en détention à la suite d'une série d'opérations menées cette semaine à l'échelle nationale", écrit le Home Office dans un communiqué.

Davantage d'arrestations "devraient être menées dans les semaines à venir", a-t-il ajouté.

"Cette action est un élément clé du plan visant à assurer des vols vers le Rwanda dans les neuf à onze semaines à venir", a poursuivi le ministère.

Le gouvernement conservateur de Rishi Sunak a promis de mettre un terme aux traversées de la Manche par les migrants clandestins.

Le Parlement a adopté la semaine dernière une loi très controversée permettant d'expulser vers le Rwanda des migrants arrivés illégalement au Royaume-Uni.

Leur demande d'asile sera examinée dans ce pays d'Afrique de l'Est et ils ne pourront pas revenir au Royaume-Uni, quelle que soit l'issue de leur démarche.

Le gouvernement compte commencer les expulsions au début de l'été et espère qu'elles dissuaderont d'autres migrants de venir au Royaume-Uni.

Cette politique "montrera clairement que si vous venez ici illégalement, vous ne pouvez pas rester", redit le ministère de l'Intérieur dans son communiqué.

"Nos équipes (...) travaillent à un rythme soutenu pour arrêter rapidement les personnes qui n'ont pas le droit d'être ici, afin que nous puissions faire décoller les vols", a déclaré le ministre de l'Intérieur James Cleverly, cité dans le communiqué.


L'ONG HRW critique l'application mobile pour demander l'asile à la frontière mexicano-américaine

Des migrants de différentes nationalités demandant l'asile aux États-Unis voyagent à bord des wagons de marchandises du train mexicain connu sous le nom de « La Bête » alors qu'ils arrivent à la ville frontalière de Ciudad Juarez, dans l'État de Chihuahua, au Mexique, le 24 avril 2024 (Photo, AFP).
Des migrants de différentes nationalités demandant l'asile aux États-Unis voyagent à bord des wagons de marchandises du train mexicain connu sous le nom de « La Bête » alors qu'ils arrivent à la ville frontalière de Ciudad Juarez, dans l'État de Chihuahua, au Mexique, le 24 avril 2024 (Photo, AFP).
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  • Depuis mai 2023, avant de se présenter à la frontière, les demandeurs d'asile, sauf les mineurs isolés, sont censés obtenir un rendez-vous sur l'application téléphonique de la police américaine des frontières
  • Beaucoup des personnes interrogées ont fait état de nombreux problèmes pour utiliser l'application

WASHINGTON: L'obligation pour les demandeurs d'asile aux Etats-Unis d'obtenir un rendez-vous sur une application mobile avant de se présenter à la frontière avec le Mexique livre les migrants à la violence des cartels, déplore mercredi Human Rights Watch (HRW).

Depuis mai 2023, avant de se présenter à la frontière, les demandeurs d'asile, sauf les mineurs isolés, sont censés obtenir un rendez-vous sur l'application téléphonique de la police américaine des frontières ou s'être vu refuser l'asile dans un des pays traversés. Autrement, leur demande est présumée illégitime et ils risquent une procédure d'expulsion accélérée, leur interdisant pendant cinq ans l'entrée aux Etats-Unis.

Cette réglementation fait suite à la levée par l'administration du président démocrate Joe Biden d'une mesure de son prédécesseur républicain Donald Trump qui verrouillait depuis trois ans l'accès au territoire américain.

"Mais un résultat pratique reste le même pour les demandeurs d'asile", affirme HRW dans un rapport publié mercredi : pendant de longues semaines, voire des mois, "ils sont forcés d'attendre dans le nord du Mexique, ainsi que dans beaucoup d'autres villes ailleurs au Mexique par lesquelles transitent les migrants".

Systématiquement visés 

Ils y sont "systématiquement visés par les cartels qui, parfois avec l'aide de responsables des autorités mexicaines, les enlèvent, les rackettent, les agressent sexuellement et les dévalisent", énumère l'ONG.

L'exigence de prise de rendez-vous sur l'application crée un "filtrage numérique", qui livre "aux cartels une population vulnérable", selon le rapport, établi à partir d'interviews avec 128 demandeurs d'asile, des employés de centres d'accueil, des responsables mexicains et des employés d'organisations humanitaires.

Bien que l'inscription pour un rendez-vous sur l'application ne soit en principe pas obligatoire, dans les faits, les demandeurs qui se présentent à la frontière sans l'avoir préalablement obtenue sont éconduits par les autorités frontalières mexicaines et américaines, indique HRW.

Beaucoup des personnes interrogées ont fait état de nombreux problèmes pour utiliser l'application, notamment matérielles, techniques, ou linguistiques. L'application n'est ainsi disponible qu'en anglais, en espagnol et en créole haïtien.

Ces pratiques "violent le principe juridique fondamental de non-refoulement" des demandeurs d'asile vers des pays où leur vie ou leur liberté serait en danger, souligne l'ONG.

Elle exhorte donc l'administration Biden à donner instruction à la police des frontières de traiter toutes les demandes d'asile, indépendamment de la façon ou du lieu de dépôt, ainsi que de l'obtention d'un rendez-vous via l'application "CBP One" de la police des frontières.

Human Rights Watch lui suggère en outre d'en améliorer l'accessibilité et la facilité d'utilisation, y compris par l'ajout d'autres langues, comme l'arabe, le français, le russe, le chinois, le portugais, et de langages amérindiens.