Génocide des Tutsi: Un ancien médecin rwandais condamné à 24 ans de réclusion criminelle

Sosthène Munyemana est jugé devant la cour d'assises de Paris pour son éventuelle implication dans le génocide au Rwanda en 1994 (Photo, AFP).
Sosthène Munyemana est jugé devant la cour d'assises de Paris pour son éventuelle implication dans le génocide au Rwanda en 1994 (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 20 décembre 2023

Génocide des Tutsi: Un ancien médecin rwandais condamné à 24 ans de réclusion criminelle

  • L'ancien médecin rwandais Sosthène Munyemana a été condamné mercredi à 24 ans de réclusion criminelle, avec une période de sûreté de huit ans, pour son implication dans le génocide des Tutsi en 1994
  • Impassible à l'énoncé du verdict, l'accusé, âgé de 68 ans, devait être incarcéré dans la foulée

PARIS: Au terme de six semaines de procès devant la cour d'assises de Paris, l'ancien médecin rwandais Sosthène Munyemana a été condamné mercredi à 24 ans de réclusion criminelle, avec une période de sûreté de huit ans, pour son implication dans le génocide des Tutsi en 1994.

A l'issue de près de 15 heures de délibéré, il a été reconnu coupable de génocide, crimes contre l'humanité, participation à une entente en vue de la préparation de ces crimes, ainsi que pour complicité de crimes contre l'humanité.

Impassible à l'énoncé du verdict, l'accusé, âgé de 68 ans, devait être incarcéré dans la foulée. Ses avocats ont immédiatement annoncé leur intention de faire appel du verdict.

"C'est pour nous une décision inacceptable", ont déclaré Me Florence Bourg et Me Jean-Yves Dupeux. "Aucun élément de la défense n'a été retenu alors qu'il y avait des témoignages massivement contradictoires qui laissaient toute la place au doute".

Ils ont regretté que Sosthène Munyemana ait été présenté "comme un planificateur". "Tout ce qu'il a fait pour sauver des Tutsi s'est retourné contre lui".

Il comparaissait depuis le 14 novembre, en vertu de la compétence universelle de la justice française.

Le ministère public avait requis une peine de trente ans de réclusion criminelle à son encontre, estimant que la "somme" de ses choix dessinait "les traits d'un génocidaire".

Sosthène Munyemana se voit reprocher d'avoir signé une motion de soutien au gouvernement intérimaire institué après l'attentat contre l'avion du président hutu Juvénal Habyarimana, qui a encouragé les tueries commises entre avril et juillet 1994.

Le génocide rwandais a fait plus de 800.000 morts, pour la plupart d'ethnie tutsi, selon l'ONU.

On l'accuse aussi d'avoir mis en place des barrières et des rondes à Tumba, dans la préfecture de Butare (sud du Rwanda), au cours desquelles des personnes ont été interpellées avant d'être tuées, et d'avoir détenu la clé d'un bureau de secteur où étaient enfermés des Tutsi avant leur exécution. Un "couloir de la mort", selon l'avocate générale Sophie Havard.

L'accusé était un proche de Jean Kambanda, Premier ministre du gouvernement intérimaire, condamné définitivement en 2000 par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) à la réclusion criminelle à perpétuité pour sa participation au génocide.

Pilotage du génocide

Sosthène Munyemana a fait partie d'un groupe "qui a préparé, organisé, piloté au quotidien le génocide des Tutsi à Tumba", a déclaré le président de la cour à l'énoncé du verdict, qui a souligné qu'en participant au génocide à l'échelle de Tumba, il avait "participé au génocide sur tout le Rwanda".

Pendant les débats, plusieurs dizaines de témoins, rescapés ou proches de victimes, ont été entendus.

Sosthène Munyemana, lui, n'a eu de cesse de contester ces accusations, affirmant avoir été un Hutu modéré qui avait au contraire tenté de "sauver" des Tutsi en leur offrant "refuge" dans le bureau de secteur.

"L'important est fait, c'est la condamnation", a commenté Alain Gauthier, co-fondateur du Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR). "C'est un peu en dessous de ce qui avait été demandé mais il est quand même reconnu coupable de crimes contre l'humanité et de génocide. Toutes les cases sont cochées", a-t-il ajouté.

Arrivé en septembre 1994 en France où résidait déjà sa femme, père de trois enfants, Sosthène Munyemana a refait sa vie dans le Sud-Ouest, exerçant comme médecin urgentiste puis comme gériatre. Il avait récemment pris sa retraite.

Son dossier était le plus ancien instruit en France sur des faits liés à ce génocide: ouverte en 1995 après une plainte déposée à Bordeaux, l'information judiciaire a été transférée en 2001 à Paris. L'ordonnance de mise en accusation n'a été rendue qu'en 2018.

Avant lui, six hommes ont déjà été condamnés en France pour leur participation au génocide des Tutsi, à des peines allant de 14 ans de réclusion criminelle à la perpétuité.

Deux d'entre eux doivent encore être jugés en appel, et un autre, l'ancien préfet rwandais Laurent Bucyibaruta, condamné en première instance à vingt ans de réclusion criminelle pour complicité de génocide, est mort le 6 décembre.


France: un Ukrainien inculpé pour le meurtre d'une Franco-Russe dans un conflit de voisinage

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  • Selon le parquet, il y avait de la part de cette femme "une attitude régulièrement agressive avec des menaces de mort envers" ses voisins ukrainiens arrivés en France en mars 2022 pour fuir l'invasion de leur pays par la Russie
  • Née au Kazakhstan en 1967, alors en URSS, elle était arrivée en France en 2004, d'après la même source

EVREUX: Un Ukrainien de 69 ans a été inculpé pour meurtre et placé sous contrôle judiciaire après le décès mardi de sa voisine franco-russe à Evreux, dans le nord de la France, lors d'un différend de voisinage, a-t-on appris vendredi auprès du parquet local.

Un couple de retraités ukrainiens ainsi que leur amie avaient été agressés avec un couteau d'environ 20 cm par leur voisine franco-russe, vers 5H00 locales (7H00 GMT) dans la nuit de lundi à mardi, a expliqué le procureur de la République d'Evreux Rémi Coutin lors d'une conférence de presse.

Le mari du couple ukrainien aurait alors retourné l'arme blanche contre sa voisine la blessant à trois reprises, dont une mortelle à la cuisse, toujours selon le procureur.

"Pour nous c'est la victime, celle qui a reçu les coups de couteau et est décédée mardi matin, qui était venue agresser au moins à deux reprises cette nuit-là les personnes ukrainiennes qui se trouvaient dans l'appartement au-dessus d'elle", a déclaré Rémi Coutin, justifiant ainsi le non placement en détention de l'auteur présumé des faits.

Selon le parquet, il y avait de la part de cette femme "une attitude régulièrement agressive avec des menaces de mort envers" ses voisins ukrainiens arrivés en France en mars 2022 pour fuir l'invasion de leur pays par la Russie.

Née au Kazakhstan en 1967, alors en URSS, elle était arrivée en France en 2004, d'après la même source.

Un voisin a déclaré avoir passé la soirée à boire des bières chez la quinquagénaire avant que celle-ci ne décide "de monter le son de la musique, de donner des coups de balai dans le plafond afin d'embêter ses voisins du dessus", puis de se rendre chez eux pour une première altercation.

Déjà condamné à cinq reprises pour violences, ce voisin est mis en examen pour violences aggravées pour avoir frappé l'homme ukrainien lors cette première rencontre nocturne, a relevé le parquet.

Un habitant de l'immeuble a indiqué lors de son audition qu'il avait déjà demandé l'intervention à la police les 22 et 30 juin, parce que la victime était en train de donner des coups de poing dans la porte de l'appartement de ses voisins ukrainiens.

Entendu par la police, l'ex-mari de la femme franco-russe a relaté que s'agissant de la guerre entre la Russie et l'Ukraine, elle considérait que la Russie devait "se défendre, chasser les nazis d'Ukraine et lutter contre l'OTAN".

 


Audiovisuel public: Dati dégaine le «vote bloqué» pour accélérer les débats

Brigitte Macron et Rachida Dati. (AFP)
Brigitte Macron et Rachida Dati. (AFP)
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  • Vendredi matin, à la reprise, rien n'a laissé présager que les discussions puissent s'accélérer. Un peu plus d'une demi heure après le début des débats, Mme Dati a annoncé que le gouvernement demandait au Sénat "de se prononcer par un vote unique
  • Cette procédure très rarement utilisée permet d'accélérer les débats en n'organisant qu'un seul vote, sur le texte et les amendements que le gouvernement choisit de conserver

PARIS: Fin de session chaotique au Sénat: face à l'"obstruction" de la gauche, la ministre de la Culture Rachida Dati a dégainé vendredi matin l'arme constitutionnelle du "vote bloqué" sur la réforme de l'audiovisuel public, pour tenter d'aboutir avant les congés parlementaires.

C'est une nouvelle vicissitude pour ce texte au parcours chaotique, porté à bout de bras par la ministre face à l'hostilité des syndicats, et qui pour l'essentiel prévoit de créer le 1er janvier 2026 une holding, France Médias, qui chapeauterait France Télévisions, Radio France et l'Ina (Institut national de l'audiovisuel), sous l'autorité d'un président-directeur général.

L'examen du texte a avancé à très faible allure jeudi: suspensions de séance à répétition, rappels au règlement, motions de rejet préalable, invectives en pagaille... En plus de huit heures de débats, les sénateurs ont à peine démarré l'examen de l'article premier de la proposition de loi du sénateur Laurent Lafon.

A la manoeuvre, la gauche, bien décidée à jouer la montre, alors que la session extraordinaire doit théoriquement s'achever vendredi à minuit.

Vendredi matin, à la reprise, rien n'a laissé présager que les discussions puissent s'accélérer. Un peu plus d'une demi heure après le début des débats, Mme Dati a annoncé que le gouvernement demandait au Sénat "de se prononcer par un vote unique sur l'ensemble du texte", "en application de l'article 44 alinéa 3 de la Constitution".

Cette procédure très rarement utilisée permet d'accélérer les débats en n'organisant qu'un seul vote, sur le texte et les amendements que le gouvernement choisit de conserver.

"Après plus de sept heures de débat, nous n'avons pu débattre que de 31 amendements sur ce texte. On a vu encore ce matin (...) de l'obstruction, toujours de l'obstruction et encore de l'obstruction", a-t-elle justifié. Il restait alors environ 300 amendements à débattre.

Les débats, suspendus vers 10H15, ont repris près de deux heures plus tard, et le président de séance Didier Mandelli (LR) a pris acte de la demande du gouvernement.

Débats "escamotés" 

Les orateurs de la gauche ont successivement protesté contre ce "coup de force", selon le mot de l'ancienne ministre socialiste Laurence Rossignol. "On parle de liberté de la presse. Mais commençons déjà par respecter les droits du Parlement", a-t-elle tonné, rappelant que le Sénat avait d'autres outils à sa disposition pour discipliner les discussions.

Et ce alors que les débats ont déjà été "escamotés" en première lecture à l'Assemblée le 30 juin, après le vote surprise d'un motion de rejet déposée par les écologistes, face aux bancs désertés de la coalition gouvernementale.

"C'est vous qui êtes responsables du fait que le débat ne peut pas avoir lieu. Ce n'est pas nous", leur a rétorqué le rapporteur du texte, Cédric Vial (LR).

Le président de la commission de la culture Laurent Lafon (UDI) a lui aussi défendu la décision du gouvernement, pointant une obstruction "caractérisée" destinée à "empêcher que le Sénat confirme son soutien" au texte.

Selon des sources parlementaires, la décision de déclencher le "vote bloqué" était sur la table depuis jeudi.

Mais, alors que le président du Sénat et le ministre des Relations avec le Parlement étaient enclins à laisser le débat se dérouler, "c'est bien Rachida Dati", en première ligne face à la gauche, qui "à un moment donné (...) a tranché pour tout le monde", selon un poids lourd.

Désormais, l'examen du texte devrait pouvoir "aller au bout" avant la fin de la session, selon cette source. Et revenir sans doute à l'automne à l'Assemblée, à une date indéterminée.


Trois députés contraints de démissionner après avoir été déclarés inéligibles par le Conseil constitutionnel

La ministre française de la Culture Rachida Dati et le Premier ministre français Gabriel Attal  s'adressent à la presse lors d'une visite de campagne pour soutenir la candidate du MoDem Maud Gatel  et le candidat de la Renaissance Jean Laussucq pour les élections législatives, sur un marché, à Paris, le 5 juillet 2024. (Photo d'archives AFP)
La ministre française de la Culture Rachida Dati et le Premier ministre français Gabriel Attal s'adressent à la presse lors d'une visite de campagne pour soutenir la candidate du MoDem Maud Gatel et le candidat de la Renaissance Jean Laussucq pour les élections législatives, sur un marché, à Paris, le 5 juillet 2024. (Photo d'archives AFP)
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  • Les dépenses irrégulières "représentent 21% du montant des dépenses du compte et 10,2% du plafond des dépenses autorisées dans la circonscription" et s'élèvent à 7.030 euros, a précisé le Conseil constitutionnel
  • Brigitte Barèges a été épinglée pour avoir facturé la participation à sa campagne de deux collaborateurs de son cabinet à la mairie de Montauban, alors qu'elle en était la maire

PARIS: Trois députés, les élus Ensemble pour la République (EPR) Jean Laussucq et Stéphane Vojetta ainsi que celle de l'Union des droites (UDR) Brigitte Barèges, ont été déclarés inéligibles par le Conseil constitutionnel vendredi, en raison d'irrégularités dans leurs comptes de campagne.

Jean Laussucq, député de Paris, Brigitte Barèges, députée du Tarn-et-Garonne, et Stéphane Vojetta, député pour les Français établis hors de France, ont été déclarés inéligibles "pour une durée d'un an" et "démissionnaires d'office" de leurs mandats, a annoncé le Conseil constitutionnel.

Il est reproché à Jean Laussucq d'avoir réglé "des dépenses de campagne au moyen de son compte bancaire personnel" et d'avoir laissé des tiers régler "directement une part significative des dépenses exposées pour sa campagne électorale" de 2024.

Les dépenses irrégulières "représentent 21% du montant des dépenses du compte et 10,2% du plafond des dépenses autorisées dans la circonscription" et s'élèvent à 7.030 euros, a précisé le Conseil constitutionnel.

Brigitte Barèges a été épinglée pour avoir facturé la participation à sa campagne de deux collaborateurs de son cabinet à la mairie de Montauban, alors qu'elle en était la maire.

Enfin, le Conseil constitutionnel a reproché à Stéphane Vojetta, élu dans une circonscription comprenant notamment l'Espagne et le Portugal, d'avoir réglé "irrégulièrement" une "part substantielle des dépenses engagées", durant sa campagne, notamment des "frais de transport".

Des élections législatives partielles devront être organisées prochainement pour désigner des nouveaux députés.

Deux autres députés élus lors des législatives de juillet 2024 avaient dû remettre leurs sièges en jeu après des décisions du Conseil constitutionnel, dans le Jura et en Saône-et-Loire.