L'épargne du Livret A utilisée pour financer l'industrie de la défense jette le trouble

L'argent du Livret A peut-il financer les PME de l'industrie de la défense? (Photo, AFP).
L'argent du Livret A peut-il financer les PME de l'industrie de la défense? (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 20 décembre 2023

L'épargne du Livret A utilisée pour financer l'industrie de la défense jette le trouble

  • La CGT s'est opposée à ce nouveau fléchage dans un communiqué du 17 novembre et pointe du doigt «le choix de la guerre» effectué au détriment du «progrès social»
  • Près de 60% des fonds du Livret A et du Livret de développement durable et solidaire aux entreprises (LDSS) sont dédiés au logement social

PARIS: L'argent du Livret A peut-il financer les PME de l'industrie de la défense? Approuvée par le gouvernement, cette affectation iconoclaste est envisagée par un amendement glissé dans le projet de loi de finances 2024.

Cet amendement présenté en octobre par trois députés Horizons, Renaissance et Les Républicains (LR), propose "d'assigner l'épargne des Livret A et de développement durable et solidaire aux entreprises, notamment petites et moyennes, de notre Base industrielle et technologique de défense (BITD)".

Le texte avait d'abord été jugé irrecevable par le Conseil constitutionnel lors de l'examen de la loi de programmation militaire (LPM) à l'été 2023. Il est réapparu dans la discussion du budget 2024, a été rejeté en commission, et est revenu dans le texte final juste avant que la Première ministre Elisabeth Borne ne brandisse un 49.3.

Thomas Gassilloud, l'un des rapporteurs du texte, s'est réjoui "de cette volonté politique claire" de "soutenir notre industrie de défense".

Il s'agit d'une "solution d'équilibre, trouvée par les parlementaires et fondée sur un effet signal", a réagi Bercy auprès de l'AFP.

"Ce n'est pas mon choix, c'est une proposition débattue par les députés. (...) Le Livret A, pour moi, c'est le logement social, ça doit le rester", avait pourtant déclaré le ministre de l'Economie Bruno Le Maire sur France Info, le 23 novembre.

«Choix de la guerre»

La CGT s'est opposée à ce nouveau fléchage dans un communiqué du 17 novembre et pointe du doigt "le choix de la guerre" effectué au détriment du "progrès social".

Plusieurs organisations et partis politiques de gauche, dont la Confédération nationale du logement (CNL), Génération.s ou La France Insoumise (LFI), ont dénoncé un "amendement qui n'a rien à voir avec le projet loi finances 2024, passé en force à l'Assemblée nationale par un nouveau 49.3 gouvernemental". Ils refusent que "l'épargne populaire soit utilisée pour financer des activités d'armement, dont certaines sont interdites par le droit international".

"Nous ne retirons rien au logement social, et comptons puiser dans l'épargne centralisée du Livret A", assure auprès de l'AFP Jean-Louis Thieriot, député LR et rapporteur du texte.

Près de 60% des fonds du Livret A et du Livret de développement durable et solidaire aux entreprises (LDSS) sont dédiés au logement social, le reste étant consacré aux PME, à la transition énergétique ou encore à l'économie sociale et solidaire.

"L'idée serait donc de piocher environ 2 ou 3% de l'argent déjà épargné dans (ces) 40% restants, gérés par les banques, et de le rediriger vers les PME de la défense", détaille François Mattens, co-fondateur de Défense Angels, un réseau d'investissement privé dans le secteur de la défense.

Les PME de la Défense pourraient donc compter autour de 5 à 6 milliards d'euros, si l'on suit ses calculs.

L'amendement s'appuie notamment sur un rapport d'information sur l'économie de guerre publié en mars par Christophe Plassard, député Horizons, pour qui "les entreprises de la BITD sont de plus en plus confrontées à des difficultés d'accès aux financements privés".

"Ces difficultés sont multifactorielles", affirme François Mattens. "On assiste à une frilosité bancaire, car les banques subissent la pression des critères de RSE (responsabilité sociale des entreprises, ndlr), et sont soumises à un risque réputationnel croissant", détaille-t-il.

Par ailleurs, "la temporalité de la défense est plus longue que celle des autres secteurs et demeure très impactée par le contexte géopolitique", ajoute l'expert.

Les petites entreprises du secteur ont "peu de visibilité", et le marché est "très dépendant de la commande publique, donc aléatoire par rapport à d'autres marchés qui peuvent rebondir plus facilement", analyse Renaud Bellais, co-directeur de l'Observatoire de la défense de l'Institut Jean-Jaurès.

"Ces problèmes structurels sont amplifiés par le fait que l'armement est mal perçu dans l'opinion publique", précise-t-il.

"Cette mesure vise à être efficace, mais demeure d'abord symbolique", explique Jean-Louis Thieriot. "C'est un signalement fait au monde de la banque face aux difficultés rencontrées par les PME de l'industrie de la défense."


Automobile: les équipementiers français pressent Bruxelles d'imposer un contenu local

 Trois des plus gros équipementiers automobiles français ont demandé à Bruxelles d'imposer l'obligation d'un contenu local dans les véhicules, lors des annonces attendues mardi sur la révision de l'interdiction de vendre des voitures neuves autres que tout électriques, selon une lettre consultée lundi. (AFP)
Trois des plus gros équipementiers automobiles français ont demandé à Bruxelles d'imposer l'obligation d'un contenu local dans les véhicules, lors des annonces attendues mardi sur la révision de l'interdiction de vendre des voitures neuves autres que tout électriques, selon une lettre consultée lundi. (AFP)
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  • Les équipementiers européens "contribuent pour 75% à la valeur d'un véhicule et représentent 1,7 million d'emplois" en Europe
  • Mais "les surcapacités mondiales, les importations subventionnées (par le pays exportateur, NDLR) et un déséquilibre commercial accru érodent les fondations de notre industrie"

PARIS: Trois des plus gros équipementiers automobiles français ont demandé à Bruxelles d'imposer l'obligation d'un contenu local dans les véhicules, lors des annonces attendues mardi sur la révision de l'interdiction de vendre des voitures neuves autres que tout électriques, selon une lettre consultée lundi.

Dans cette missive adressée à la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et datée du 12 décembre, les dirigeants des équipementiers Valeo, Forvia et OPmobility demandent à la Commission "des mesures claires sur le contenu local lors des annonces du 16 décembre".

Les équipementiers européens "contribuent pour 75% à la valeur d'un véhicule et représentent 1,7 million d'emplois" en Europe, mais "les surcapacités mondiales, les importations subventionnées (par le pays exportateur, NDLR) et un déséquilibre commercial accru érodent les fondations de notre industrie", écrivent Christophe Périllat (Valeo), Martin Fisher (Forvia) et Félicie Burelle (OPmobility).

"Les perspectives actuelles indiquent que 350.000 emplois et 23% de la valeur ajoutée des automobiles dans l'UE sont en danger d'ici 2030 si des mesures fortes ne sont pas prises de manière urgente", ajoutent-ils.

Ces équipementiers soutiennent "la position des ministres français en faveur de +flexibilités ciblées+ dans la réglementation sur (les émissions de) CO2 si elle est assortie de conditions de critères de contenu local, dans l'intérêt des emplois, du savoir-faire dans l'automobile" et de "l'empreinte carbone" en Europe.

Les constructeurs automobiles européens et l'Allemagne notamment réclament depuis des semaines de nets assouplissements dans l'interdiction de vendre des voitures neuves thermiques ou hybrides prévue à partir de 2035.

Les annonces de la Commission sont attendues mardi après-midi.

La semaine dernière, plusieurs ministres français avaient envoyé une lettre aux commissaires européens pour dire qu'ils acceptaient des "flexibilités ciblées", à condition qu'elles s'accompagnent d'une règlementation incitative à la production en Europe.

"On est prêt à faire preuve de flexibilité", avait ensuite expliqué Roland Lescure, ministre français de l'Economie. "Si vous voulez vendre encore un peu de moteurs thermiques en 2035 très bien, mais il faut qu’ils soient faits en Europe", avec "au moins 75% de la valeur ajoutée faite en Europe", avait-il ajouté.


Espagne: amende de 64 millions d'euros contre Airbnb pour avoir publié des annonces de logements interdits

Le gouvernement espagnol a annoncé lundi avoir infligé une amende de 64 millions d'euros à la plateforme Airbnb pour avoir notamment publié des annonces de logements interdits, une infraction qualifiée de "grave", en pleine crise du logement dans le pays. (AFP)
Le gouvernement espagnol a annoncé lundi avoir infligé une amende de 64 millions d'euros à la plateforme Airbnb pour avoir notamment publié des annonces de logements interdits, une infraction qualifiée de "grave", en pleine crise du logement dans le pays. (AFP)
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  • L'amende qui vise Airbnb et atteint précisément 64.055.311 euros est "définitive", a précisé dans un communiqué le ministère de la Consommation
  • "Des milliers de familles vivent dans la précarité à cause de la crise du logement, tandis que quelques-uns s'enrichissent grâce à des modèles économiques qui expulsent les gens de chez eux"

MADRID: Le gouvernement espagnol a annoncé lundi avoir infligé une amende de 64 millions d'euros à la plateforme Airbnb pour avoir notamment publié des annonces de logements interdits, une infraction qualifiée de "grave", en pleine crise du logement dans le pays.

En Espagne, les plateformes de location de courte durée suscitent un vif débat, surtout dans les grandes villes touristiques, où de nombreux habitants leur reprochent de contribuer à la flambée des loyers.

L'amende qui vise Airbnb et atteint précisément 64.055.311 euros est "définitive", a précisé dans un communiqué le ministère de la Consommation, ajoutant que la plateforme basée aux Etats-Unis devait désormais "corriger les manquements constatés en supprimant les contenus illégaux".

"Des milliers de familles vivent dans la précarité à cause de la crise du logement, tandis que quelques-uns s'enrichissent grâce à des modèles économiques qui expulsent les gens de chez eux", a critiqué le ministre de la Consommation, Pablo Bustinduy, cité dans le communiqué.

"Aucune entreprise en Espagne, aussi grande ou puissante soit-elle, n'est au-dessus des lois", a-t-il poursuivi.

L'Espagne a accueilli en 2024 un nombre record de 94 millions de visiteurs, ce qui en fait la deuxième destination touristique dans le monde derrière la France. Ce chiffre pourrait être battu cette année.

Mais si le tourisme est un moteur de l'économie, de nombreux Espagnols dénoncent la congestion des infrastructures, la disparition des commerces traditionnels, remplacés par des boutiques touristiques, et surtout la flambée des loyers, les propriétaires de logements se tournant vers la location touristique, y compris sur Airbnb, nettement plus rentable.

Face à cette poussée de colère, plusieurs régions et municipalités ont annoncé des mesures ces derniers mois, à l'image de la mairie de Barcelone (nord-est), qui a promis de ne pas renouveler les licences de quelque 10.000 appartements touristiques, qui expireront en novembre 2028.

 


La RATP se cherche un ou une présidente

Cette photographie montre le logo de la société française de transports publics RATP, sur un bâtiment à Paris, le 3 mars 2025. (AFP)
Cette photographie montre le logo de la société française de transports publics RATP, sur un bâtiment à Paris, le 3 mars 2025. (AFP)
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  • Après le départ de Jean Castex à la SNCF, l’Élysée s’apprête à nommer rapidement le nouveau président ou la nouvelle présidente de la RATP
  • Plusieurs profils circulent, tandis que la régie fait face à d’importants défis

PARIS: Après le départ de Jean Castex à la SNCF, la RATP se cherche un ou une présidente, dont la nomination pourrait intervenir "rapidement", selon des sources concordantes.

L'annonce se fera par communiqué de l'Elysée en vertu de l'article 13 de la Constitution qui prévoit que le président de la République nomme aux emplois civils et militaires de l'Etat.

Suivront, deux semaines plus tard, deux auditions de l'impétrant devant les sénateurs, puis devant les députés. Les parlementaires ont la possibilité de s'opposer au candidat d'Emmanuel Macron s'ils réunissent trois cinquième de leurs votes cumulés contre le nom choisi par l'Elysée.

En revanche, si le candidat est adoubé par le Parlement, son nom est proposé en conseil d'administration comme nouvel administrateur, puis confirmé dans la foulée par un décret suivant le conseil des ministres.

Depuis l'arrivée de l'ancien Premier ministre Jean Castex à la tête de la SNCF début novembre, les rumeurs se multiplient sur le nom de celui ou celle qui sera chargé de lui succéder aux commandes de la Régie autonome des transports parisiens, vieille dame créée le 21 mars 1948 et désormais plongée dans le grand bain de l'ouverture à la concurrence.

Les articles de presse pèsent les différents "profils" pressentis, politiques ou techniques qui pourraient "faire le job".

Les noms qui reviennent le plus souvent sont ceux de Xavier Piechaczyk, président du directoire du distributeur d'électricité RTE et ex-conseiller énergie-transport de Jean-Marc Ayrault et François Hollande, Alain Krakovitch, actuel directeur des TGV et Intercités à SNCF Voyageurs, Jean-François Monteils, président du directoire de la Société des grands projets (SGP) et selon la Tribune, Valérie Vesque-Jeancard, présidente de Vinci Airways et directrice déléguée de Vinci Airports.

"Si le nom sort de l'Elysée avant la fin de l'année, cela permettrait au PDG de prendre ses fonctions fin janvier-début février" souligne un fin connaisseur des milieux ferroviaires qui requiert l'anonymat.

- "Aller vite" -

"Une entreprise industrielle comme la RATP ne peut pas rester sans pilote très longtemps" souligne une autre source, proche du dossier, qui requiert aussi l'anonymat, avant d'ajouter "il faut aller vite, car c'est aussi une boite politique, la RATP".

Une entreprise aux enjeux d'autant plus complexes, que malgré son ancrage initial parisien, la RATP dépend du financement de la région Ile-de-France pour ses matériels, s'étend de plus en plus loin dans la banlieue, voire en métropole, et gère des réseaux de transports dans 16 pays sur les cinq continents.

En France, elle est notamment pressentie pour gérer les transports ferroviaires régionaux autour de Caen en Normandie à partir de 2027 après avoir répondu - via sa filiale RATP Dev - à des appels d'offre d'ouverture à la concurrence.

A Paris, la RATP est en train d'introduire progressivement de nouveaux matériels sur son réseau. Le nouveau métro MF19 construit par Alstom, ira d'abord sur la ligne 10 puis sept autres lignes (7 bis, 3 bis, 13 d'ici 2027, puis 12, 8, 3 et 7 d'ici 2034).

L'ensemble du processus prendra une dizaine d'années environ de travaux de modernisation sur les lignes concernées: beaucoup d'ingénierie fine à organiser pour réaliser les travaux pendant la nuit sans interrompre le trafic diurne et de désagréments pour les voyageurs.

A échéance plus lointaine, le ou la future patronne devra déterminer la stratégie du groupe dans les nouvelles ouvertures à la concurrence qui se dessinent: les tramway en 2030 puis le métro en 2040.

Sur le réseau de bus francilien, où la RATP a d'ores et déjà perdu son monopole, elle est parvenue à conserver l'exploitation de 70% des lignes d'autobus qu'elle gérait à l'issue des dernières vagues d'appels d'offre de mise en concurrence qui se sont achevées cet automne.

En particulier, elle continue d'exploiter via RATP Dev tous les bus de Paris intra-muros et a engagé un processus de verdissement de sa flotte de bus, financé par Ile-de-France Mobilités (IDFM), l'autorité organisatrice des transports.

Ses concurrents Keolis (filiale de la SNCF), Transdev et l'italien ATM ont pris les rênes le 1er novembre des lignes remportées.