COP: des documents montrent que McKinsey a poussé pour des crédits carbone avant un sommet africain

Deux jeunes Kényans passent devant un logo décoratif du Sommet africain du climat en attendant le début de la session d'ouverture lors du Sommet africain du climat 2023 au Kenyatta International Convention Centre (KICC) à Nairobi, le 5 septembre 2023. (Photo Luis Tato AFP)
Deux jeunes Kényans passent devant un logo décoratif du Sommet africain du climat en attendant le début de la session d'ouverture lors du Sommet africain du climat 2023 au Kenyatta International Convention Centre (KICC) à Nairobi, le 5 septembre 2023. (Photo Luis Tato AFP)
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Publié le Samedi 23 décembre 2023

COP: des documents montrent que McKinsey a poussé pour des crédits carbone avant un sommet africain

  • Les crédits carbone sont présentés comme un moyen pour les entreprises de compenser leurs émissions de CO2 en soutenant des projets visant par exemple à éviter la déforestation, pour atteindre leurs objectifs de «neutralité carbone»
  • Des documents montrent que McKinsey & Company, qui travaille pour plusieurs grandes compagnies pétrolières et gazières, a oeuvré en sous-main pour façonner l'ordre du jour du Sommet africain sur le climat

PARIS : Le géant du conseil McKinsey & Company a cherché à promouvoir dans l'un des sommets préparatoires de la COP28 des projets de crédits carbone, outils critiqués mais très convoités par ses clients des énergies fossiles pour compenser leurs émissions de CO2, selon des documents internes et des sources qui se sont confiées à l'AFP.

Ces documents montrent notamment que la société, qui travaille pour plusieurs grandes compagnies pétrolières et gazières, allant de l'américain ExxonMobil à l'entreprise publique saoudienne Aramco, a oeuvré en sous-main pour façonner l'ordre du jour du Sommet africain sur le climat, en septembre dernier à Nairobi.

Un «position paper» (document destiné à faire valoir la position d'une organisation sur un dossier) confidentiel de neuf pages, auquel l'AFP a eu accès, vante notamment l'Initiative pour les Marchés Carbone en Afrique (Africa Carbon Markets Initiative, ACMI) que McKinsey a déclaré publiquement avoir contribué à développer, appelant à la création d'un marché de 6 milliards de dollars pour les crédits carbone sur le continent africain.

Rio Tinto

- Accords commerciaux -

Les crédits carbone sont présentés comme un moyen pour les entreprises de compenser leurs émissions de CO2 en soutenant des projets visant par exemple à éviter la déforestation, pour atteindre leurs objectifs de «neutralité carbone».

Un crédit équivaut normalement à une tonne de CO2 absorbée ou stockée grâce à ces projets mais de nombreuses études et enquêtes journalistiques ont montré que leurs bénéfices environnementaux étaient largement surestimés.

«Lorsque McKinsey s'est impliqué dans la planification du sommet, il cherchait à bénéficier des accords commerciaux qui en résulteraient», affirme Mohamed Adow, directeur du groupe de recherche Power Shift Africa.

M. Adow faisait partie d'une trentaine de conseillers africains et internationaux issus de groupes de recherche, de fondations et d'organisations internationales à qui les organisateurs avaient demandé d'examiner le «position paper» destiné à établir l'ordre du jour des discussions.

Selon lui, McKinsey a joué un rôle de premier plan dans la rédaction de ce document, vivement critiqué par plusieurs conseillers, qui estiment que le rôle des marchés du carbone y est exagéré, ont-il expliqué dans des commentaires échangés entre eux, et consultés par l'AFP.

Les crédits carbone sont souvent mis en avant comme une des solutions pour lutter contre le réchauffement climatique mais les experts arguent qu'ils ne doivent pas prendre le pas sur les autres dispositifs visant à financer la transition des pays en développement et ne doivent pas être utilisés par les entreprises pour leur éviter de réduire leurs propres émissions.

Plus de 500 groupes de la société civile ont signé une lettre de protestation adressée au président kenyan William Ruto à l'approche de la réunion, déclarant que McKinsey avait «indûment influencé» le sommet par le biais de documents clés rédigés au nom du pays hôte.

- «Partenaire technique» -

McKinsey a nié toute faute et le ministre kenyan de l'environnement, Soipan Tuya, a déclaré qu'il serait «extrêmement éloigné de la vérité» de dire que la société a eu une influence excessive lors du sommet.

Le cabinet a affirmé à l'AFP n'avoir été qu'un «partenaire technique» et que tous les documents avaient été «approuvés par le Sommet africain sur le climat et le gouvernement du Kenya».

Des pages web archivées indiquent que la mention de l'entreprise en tant que partenaire a été retirée du site de l'événement. McKinsey déclare y avoir été inclus par erreur.

Deux membres du groupe consultatif formé à la demande du président kenyan, qui ont requis l'anonymat, ont déclaré qu'ils n'étaient pas au courant du rôle de McKinsey.

Mais, selon ces deux experts, le «position paper» s'écarte des positions adoptées de longue date par le groupe africain, constitué de 54 pays, et ne tient pas compte des principales priorités du continent, telles que l'argent nécessaire pour aider les économies africaines à faire face aux conséquences du changement climatique.

McKinsey affirme de son côté que les documents «étaient destinés au président du Kenya et qu'ils reflétaient ses ambitions, pas celles de McKinsey».

«Compte tenu de sa liste de clients, McKinsey avait un conflit d'intérêts indéniable» en intervenant sur ce sommet, affirme pour sa part M. Adow auprès de l'AFP.

Dans un document confidentiel vantant son expertise en matière de marchés carbone, le cabinet énumère ainsi les entreprises qu'il avait conseillées, parmi lesquelles Chevron, BP, Tata Steel.

Il met également en avant son travail dans les domaines de l'énergie solaire, éolienne et au gaz, ainsi que dans l'électrification et la «transformation de la performance» des entreprises exploitant des centrales au charbon ou au pétrole.

- Efficacité contestée –

Le sommet africain pour le climat a permis d'obtenir des centaines de millions de dollars en promesses destinées à des projets de compensation carbone, dont 450 millions de dollars de la part des Émirats arabes unis, puissance pétrogazière hôte de la COP28.

De nombreuses majors pétrolières sont aussi déjà acheteuses de crédits carbone générés sur le continent.

Les bénéfices environnementaux mais aussi en matière de développement pour les communautés indigènes locales font l'objet de critiques grandissantes de la société civile.

La COP28 à Dubaï a échoué à réguler ce marché qui grandit sans cadre depuis plusieurs années.

Dernier scandale en date, en octobre, South Pole, plus grand vendeur de crédits carbone, s'est retiré d'un vaste programme contesté de protection des forêts au Zimbabwe. McKinsey faisait partie des entreprises qui avaient acheté des crédits issus de ce dernier.

Un rapport des Nations unies avait déjà conclu l'année dernière que «trop d'acteurs non étatiques» s'engageaient sur ce marché marqué par «des prix bas», moins d'un dollar la tonne contre 16 fin janvier 2022, et «un manque de lignes directrices claires», ce qui augmente les risques de greenwashing.


Airbus: commande de 30 avions A320neo et 10 cargo A350F du loueur saoudien AviLease

Le constructeur aéronautique européen Airbus a annoncé lundi une commande de 30 avions A320neo et de dix appareils cargos A350, d'une valeur théorique de près de 7 milliards de dollars, conclue avec le loueur saoudien AviLease. (Photo fournie).
Le constructeur aéronautique européen Airbus a annoncé lundi une commande de 30 avions A320neo et de dix appareils cargos A350, d'une valeur théorique de près de 7 milliards de dollars, conclue avec le loueur saoudien AviLease. (Photo fournie).
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  • L'accord, qui prévoit la possibilité de porter le contrat à 22 avions cargo A350F et 55 appareils de la famille A320neo, a été signé devant la presse dès l'ouverture du salon aérospatial international du Bourget, au nord de Paris
  • Le montant est calculé d'après les prix catalogue de 2018, concept qu'Airbus a abandonné depuis en arguant que les prix de vente réels dépendent des spécificités de chaque contrat

LE BOURGET: Le constructeur aéronautique européen Airbus a annoncé lundi une commande de 30 avions A320neo et de dix appareils cargos A350, d'une valeur théorique de près de 7 milliards de dollars, conclue avec le loueur saoudien AviLease.

L'accord, qui prévoit la possibilité de porter le contrat à 22 avions cargo A350F et 55 appareils de la famille A320neo, a été signé devant la presse dès l'ouverture du salon aérospatial international du Bourget, au nord de Paris. Le montant est calculé d'après les prix catalogue de 2018, concept qu'Airbus a abandonné depuis en arguant que les prix de vente réels dépendent des spécificités de chaque contrat, de la version et de la configuration de l'appareil et qu'ils demeurent confidentiels.

 

 


Vision Golfe 2025 : Paris accueille une nouvelle étape dans le partenariat stratégique entre la France et le Golfe

Le quartier d'affaires de La Défense à Paris le 1er juin 2025. (AFP)
Le quartier d'affaires de La Défense à Paris le 1er juin 2025. (AFP)
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  • Vision Golfe réunira à Paris des dirigeants gouvernementaux, des chefs d’entreprise et des décideurs économiques de premier plan venus de France et des pays du
  • Chaque thématique sera abordée à travers des panels, des ateliers B2B et des rencontres stratégiques

PARIS: Les 17 et 18 juin prochains, la troisième édition de Vision Golfe réunira à Paris des dirigeants gouvernementaux, des chefs d’entreprise et des décideurs économiques de premier plan venus de France et des six pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG).

Ce forum de haut niveau, désormais incontournable, vise à transformer les visions stratégiques partagées en partenariats concrets, autour du thème : « Des visions audacieuses à l’impact concret : une nouvelle ère de coopération ».

Un programme structuré autour de dix axes stratégiques

Pendant deux jours, Vision Golfe 2025 mettra en lumière dix domaines clés de collaboration : transition énergétique, intelligence artificielle, santé, éducation, agroalimentaire, infrastructures intelligentes, luxe, sport, mobilité et environnement d’investissement.

Chaque thématique sera abordée à travers des panels, des ateliers B2B et des rencontres stratégiques.

Des figures majeures au programme

L’événement accueillera des ministres de haut rang de France et du Golfe, apportant une perspective politique de premier plan sur les grandes orientations bilatérales. Parmi les institutions représentées figurent notamment l’Université d’intelligence artificielle Mohammed ben Zayed  (MBZUAI) à Abou Dhabi et le Abu Dhabi Investment Office (ADIO), tous deux engagés dans la construction de ponts technologiques et économiques entre les deux régions.

Une ambition européenne portée par la France

En tant que première destination des investissements étrangers en Europe en 2024, la France joue un rôle de passerelle vers le marché européen pour les fonds souverains, les investisseurs privés et les start-ups innovantes du Golfe.

Vision Golfe 2025 s’inscrit dans cette dynamique en offrant une plateforme stratégique pour explorer de nouvelles synergies économiques.

Bilan positif et continuité

La précédente édition avait permis la signature d’accords marquants, notamment entre la Saudi Ports Authority (MAWANI) et le Grand Port Maritime de Marseille Fos, ainsi que la création du France Lab au sein de la MBZUAI — véritable symbole de coopération en matière d’intelligence artificielle.

Vers un partenariat durable et multidimensionnel

Dans un contexte de croissance continue des échanges — estimés à 20,9 milliards d’euros entre la France et le CCG en 2024, dont 8,5 milliards avec les Émirats arabes unis et 7,6 milliards avec l’Arabie saoudite — Vision Golfe 2025 ambitionne de consolider un partenariat structuré autour de trois piliers :

  • l’innovation industrielle,
  • les échanges académiques et culturels,
  • les projets d’investissement stratégique.

La session ministérielle « Blueprints for 2030 » et le panel « Innover pour la durabilité » promettent d’ouvrir la voie à des coopérations concrètes et orientées vers des résultats mesurables.

Vision Golfe 2025 s’impose comme un carrefour stratégique, où ambitions partagées et réalisations concrètes convergent pour dessiner l’avenir des relations entre la France et les pays du Golfe.


l'Arabie saoudite fait progresser ses objectifs en matière d'émissions nettes zéro

L'accord à long terme a été signé entre ENOWA - la filiale de NEOM spécialisée dans l'énergie et l'eau - et la Voluntary Carbon Market Co, une unité du Fonds d'investissement public. (Dossier)
L'accord à long terme a été signé entre ENOWA - la filiale de NEOM spécialisée dans l'énergie et l'eau - et la Voluntary Carbon Market Co, une unité du Fonds d'investissement public. (Dossier)
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  • L'accord à long terme a été signé entre ENOWA - la filiale de NEOM spécialisée dans l'énergie et l'eau - et la Voluntary Carbon Market Co, une unité du Fonds d'investissement public.
  • L'accord contribue également à l'objectif plus large de l'Arabie saoudite de parvenir à des émissions nettes nulles d'ici 2060.

RIYAD : Plus de 30 millions de tonnes de crédits carbone à haute intégrité devraient être délivrés d'ici 2030 dans le cadre d'un accord visant à soutenir les ambitions de l'Arabie saoudite en matière d'émissions nettes zéro.

L'accord à long terme a été signé entre ENOWA - la filiale de NEOM spécialisée dans l'énergie et l'eau - et la Voluntary Carbon Market Co, une unité du Fonds d'investissement public.

Selon l'agence de presse saoudienne, les crédits proviendront de projets d'action climatique mondiaux, principalement dans les pays du Sud, et le premier lot devrait être livré par l'intermédiaire de la plateforme de marché en décembre.

Cet accord est une étape clé dans les efforts du Royaume pour construire un marché volontaire du carbone évolutif, et permettra à ENOWA de compenser ses émissions actuelles tout en développant une infrastructure renouvelable pour alimenter les futurs secteurs et projets de NEOM.

L'accord contribue également à l'objectif plus large de l'Arabie saoudite de parvenir à des émissions nettes nulles d'ici 2060 grâce au développement d'une infrastructure robuste d'échange de carbone axée sur des crédits de haute qualité et un impact significatif sur le climat.

"L'accord à long terme avec ENOWA vise à faciliter la fourniture de plus de 30 millions de tonnes de crédits carbone d'ici à 2030. Il représente une étape clé dans le parcours du Royaume pour stimuler la croissance des marchés volontaires mondiaux du carbone", a déclaré Riham El-Gizy, PDG de la Voluntary Carbon Market Co.

"Alors qu'ENOWA développe un système avancé d'énergie renouvelable et propre pour alimenter les secteurs et les projets de NEOM, cet accord l'aidera à compenser ses émissions actuelles et à jeter les bases d'une infrastructure d'énergie propre à long terme", a-t-elle ajouté.

VCM, qui a été créé en octobre 2022 par le PIF et le Saudi Tadawul Group, est détenu à 80 % par le fonds souverain. Il exploite un écosystème complet qui comprend un fonds d'investissement pour les projets d'atténuation du changement climatique, une plateforme d'échange de crédits carbone et des services de conseil pour soutenir les réductions d'émissions.

Le marché mondial du carbone volontaire devrait connaître une forte expansion, passant d'un montant estimé à 2 milliards de dollars en 2020 à environ 250 milliards de dollars d'ici à 2050.

M. El-Gizy a souligné que l'accord soutenait également les projets climatiques dans les pays du Sud en fournissant des garanties de financement essentielles, aidant ainsi les développeurs à planifier avec plus de certitude.

"Pour parvenir à des émissions nettes nulles au niveau mondial, les projets respectueux du climat qui réduisent ou éliminent le carbone de l'atmosphère ont non seulement besoin de financement, mais aussi d'une crédibilité accrue", a-t-elle déclaré.

Jens Madrian, directeur général par intérim d'ENOWA, a souligné l'importance du partenariat pour les objectifs de durabilité de NEOM.

"ENOWA s'efforce de répondre aux besoins énergétiques de NEOM de manière durable. Au cours des deux dernières années, nous avons acquis des crédits carbone à haute intégrité lors des ventes aux enchères du marché volontaire du carbone, et nous sommes heureux d'être la première entreprise du Royaume à signer un accord à long terme et à grande échelle avec le marché", a-t-il déclaré.

Le VCM a lancé la première plateforme d'échange volontaire de crédits carbone d'Arabie saoudite le 12 novembre 2024. Le système offre des transactions sécurisées, des outils de découverte des prix et un accès aux données des projets de crédits carbone, constituant ainsi l'épine dorsale de l'entrée du Royaume sur le marché mondial.

Intégrée aux registres internationaux, la plateforme prend également en charge l'infrastructure conforme à la charia et comprend des fonctions telles que les enchères, les demandes de cotation et les échanges de gré à gré. Un marché au comptant devrait être lancé en 2025.

ENOWA a déjà participé à des ventes aux enchères de crédits carbone organisées en Arabie saoudite en 2022 et au Kenya en 2023. Ces efforts s'inscrivent dans les objectifs plus larges de NEOM, à savoir la construction d'un modèle urbain durable, la promotion de la diversification économique et l'amélioration de la qualité de vie. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com