En Egypte, plus de dollars pour payer une dette qui explose

Une photo prise le 25 août 2022 montre des billets de livres égyptiennes, de livres sterling britanniques et de dollars américains (Photo de Khaled DESOUKI / AFP).
Une photo prise le 25 août 2022 montre des billets de livres égyptiennes, de livres sterling britanniques et de dollars américains (Photo de Khaled DESOUKI / AFP).
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Publié le Jeudi 01 février 2024

En Egypte, plus de dollars pour payer une dette qui explose

  • Les billets verts sont désormais quasiment introuvables
  • Si deux tiers des 106 millions d'habitants sont pauvres ou au seuil de la pauvreté, l'inflation à 35% et la dévaluation touchent aussi jusqu'au plus haut niveau de l'Etat

LE CAIRE: Cafés Starbucks fermés, magasins The Body Shop pliant boutique: les Egyptiens voient concrètement les effets de la crise et des experts se demandent comment le plus peuplé des pays arabes remboursera sa dette alors que les dollars manquent.

Les billets verts sont désormais quasiment introuvables. Ceux qui parviennent à s'en procurer les trouvent sur le marché noir à un taux inédit: plus de 70 livres égyptiennes pour un dollar contre près de 31 au taux officiel affiché par les banques qui, la plupart du temps, refusent de céder des dollars à leurs clients.

Les investisseurs "qui dépendent d'approvisionnement en dollars (...) ne pourront pas continuer", prévient l'économiste Mohammed Fouad.

Le groupe koweïtien Alshaya a été le premier: il a annoncé réduire le nombre de ses enseignes en Egypte, où il tient notamment Starbucks, The Body Shop ou Debenhams.

Les particuliers, eux aussi, sont bloqués. Les limites de paiement en dollars n'ont cessé de se réduire: moins de 100 dollars, c'est aujourd'hui le maximum d'espèce qu'un Egyptien peut tirer à l'étranger. Ou le maximum qu'il peut payer en ligne vers l'étranger avec un compte dans une banque égyptienne.

Donc l'unique moyen de voyager est d'acheter son billet en ligne en monnaie locale via la compagnie aérienne nationale ou en espèces dans une agence de voyage.

Pour ceux qui n'ont pas de carte de crédit --mais uniquement de débit-- tout paiement en ligne vers l'étranger est interdit, même un abonnement Netflix pourtant à prix réduit en Egypte: moins de trois dollars.

Dévaluation, flottement 

Dans un pays où quasiment tout est importé, acheter une voiture, par exemple, est hors de portée pour la classe moyenne. En 2022, au début de la dévaluation, les Egyptiens achetaient déjà dix fois moins de voitures que les Français --dont la population n'équivaut pourtant qu'à deux tiers de celle de l'Egypte.

Si deux tiers des 106 millions d'habitants sont pauvres ou au seuil de la pauvreté, l'inflation à 35% et la dévaluation touchent aussi jusqu'au plus haut niveau de l'Etat.

La dette extérieure a explosé à 164,7 milliards de dollars. Son seul service en 2024 s'élève à 42 milliards de dollars et l'Egypte est désormais le deuxième pays le plus à risque de faire défaut de sa dette, juste derrière l'Ukraine en guerre.

JP Morgan sortira le 31 janvier l'Egypte de son index des obligations d'Etat des marchés émergents, notamment pour "des difficultés en termes de liquidités en devises rapportées par des investisseurs".

L'agence Moody's juge désormais "négatives" les perspectives de l'économie égyptienne entre "pénuries de devises", "confiance des consommateurs fragilisée" et "emprunteurs de moins en moins capables de rembourser leurs crédits".

Le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, a récemment expliqué dans un discours que l'Etat dépensait trois milliards de dollars par mois pour des produits de base tels que la nourriture et l'énergie.

"Nous fournissons des services au peuple égyptien en livres égyptiennes et (nous) devons les payer en dollars", a-t-il dit.

Pour l'analyste James Swanston, de Capital Economics, la situation empirera si l'Egypte n'adopte pas "un taux de change complètement flottant couplé à un contrôle strict de la politique financière". Sans cela, le pays sera "encore plus à risque de faire défaut de sa dette".

«Rassurer les investisseurs»

Lui imagine deux étapes. D'abord, ce que tous les Egyptiens redoutent, une nouvelle dévaluation à 40 livres pour un dollar. Puis, "l'adoption d'un taux de change flottant" --ce que Le Caire promet au Fonds monétaire international (FMI) depuis des années.

Mais, nuance M. Fouad, "dans l'immédiat, l'Etat a intérêt à la stabilité car il est le plus gros débiteur en dollars et serait donc le plus affecté par une hausse du prix" du billet vert.

"A court terme, je suis certain que l'Egypte remboursera ses créances mais si la situation actuelle persiste, avec une dette qui augmente et une croissance économique incapable de compenser, alors il faudra s'inquiéter", poursuit cet ancien député.

Pour les experts, les raisons de s'inquiéter s'accumulent: les rentrées en devises du tourisme sont en baisse depuis des années et les attaques des milices Houthis du Yémen en mer Rouge et dans le golfe d'Aden font désormais baisser les revenus en dollars du canal de Suez.

Pire encore, les envois d'argent des travailleurs égyptiens à l'étranger --le double de ces deux secteurs combinés-- ont baissé d'environ 30% au premier trimestre 2023/2024.

Pour M. Swanston, il faut un nouveau prêt du FMI pour "rassurer les investisseurs, relancer le marché obligataire égyptien et contribuer à réduire les taux d'intérêt sur la dette".

Et cela "semble de plus en plus probable" maintenant que le FMI a finalement envoyé une délégation pour les premières évaluations du prêt de trois milliards de dollars accordé fin 2022, selon les médias égyptiens.


Engie confirme ses perspectives 2025 malgré un contexte "incertain et mouvant"

Cette photographie montre le parc éolien offshore de Yeu-Noirmoutier au large de l'Ile-d'Yeu, dans l'ouest de la France, le 23 juin 2025. (AFP)
Cette photographie montre le parc éolien offshore de Yeu-Noirmoutier au large de l'Ile-d'Yeu, dans l'ouest de la France, le 23 juin 2025. (AFP)
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  • Engie a confirmé vendredi ses perspectives pour 2025 malgré un contexte "incertain" et une baisse des prix qui a pesé sur ses résultats au premier semestre
  • L'énergéticien se dit confiant sur la suite et maintient ses prévisions pour 2025

PARIS: Engie a confirmé vendredi ses perspectives pour 2025 malgré un contexte "incertain" et une baisse des prix qui a pesé sur ses résultats au premier semestre, et se dit désormais plus confiant pour ses projets renouvelables aux Etats-Unis après une période d'incertitude.

Son résultat net récurrent a reculé de 19% à 3,1 milliards d’euros au cours des six premiers mois de l'année. Le résultat opérationnel (Ebit) hors nucléaire est ressorti à 5,1 milliards d'euros, en baisse de 9,4% en raison d'une base de comparaison élevée par rapport au premier semestre 2024 et "dans un contexte de baisse des prix".

Mais l'énergéticien se dit confiant sur la suite et maintient ses prévisions pour 2025.

"Nous abordons les prochains mois avec confiance et nous confirmons notre +guidance+ annuelle", a commenté Catherine MacGregor, sa directrice générale, citée dans le communiqué de résultats.

Elle a néanmoins insisté sur le contexte économique et géopolitique "assez incertain et mouvant", lors d'une conférence téléphonique.

A la Bourse de Paris, Engie cédait 2,45% à 10H53 (8H53 GMT) à 19,15 euros vendredi, après avoir lâché 5% à l'ouverture.

Interrogée sur les Etats-Unis, Catherine MacGregor s'est montrée plus confiante après une période d'incertitude qui a suivi l'entrée en fonction du gouvernement Trump.

"Avec la promulgation du +Big beautifull bill+ (la loi budgétaire de Donald Trump, ndlr) et une première clarification du cadre réglementaire et fiscal qui était attendue, nous nous apprêtons à lancer trois projets pour plus de 1,1 GW de capacité totale, éolien, solaire et batteries qui vont conforter notre croissance jusqu'en 2028", a-t-elle déclaré.

Engie a pour l'heure "juste en dessous de 9 GW en opération aux États-Unis", a-t-elle rappelé.

"Il y avait beaucoup, beaucoup d'incertitudes sur le traitement qui serait donné à ces projets", a-t-elle souligné, mais avec cette nouvelle loi, "on a beaucoup plus de clarté".

"Le marché aux États-Unis reste évidemment très, très porteur", a-t-elle poursuivi. "Les projections de demande d'électricité sont absolument massives et aujourd'hui, il n'y a pas de scénarios (...) sans une grande partie de projets renouvelables", notamment en raison du fort développement des centres de données dans le pays.

Le groupe table sur un résultat net récurrent - qui exclut des coûts de restructuration et la variation de la valeur de ses contrats de couverture - "entre 4,4 et 5,0 milliards d'euros" en 2025.

Engie vise par ailleurs un Ebit hors nucléaire "dans une fourchette indicative de 8,0 à 9,0 milliards d'euros" en 2025.

"Comme prévu, l'Ebit hors nucléaire va atteindre son point bas cette année et le second semestre 2025 sera en hausse par rapport à 2024", a indiqué Catherine MacGregor.

Le bénéfice net en données publiées s'établit à 2,9 milliards d'euros au premier semestre, en hausse de 50%, en raison d'un impact moindre de la variation de la valeur de ses contrats de couverture.

Le chiffre d'affaires a atteint 38,1 milliards d'euros au premier semestre, en croissance de 1,4%.

Engie disposait d'une capacité totale renouvelables et de stockage de 52,7 gigawatts (GW) à fin juin 2025, en hausse de 1,9 GW par rapport à fin 2024. A cela s'ajoutent 95 projets en cours de construction qui représentent une capacité totale de près de 8 GW.

Le groupe dispose d'un portefeuille de projets renouvelables et de batteries en croissance qui atteint 118 GW à fin juin 2025, soit 3 GW de plus qu'à fin décembre 2024.


ArcelorMittal: les taxes douanières américaines érodent la rentabilité au premier semestre

La cokerie d'ArcelorMittal Bremen sur le site de Bottrop est photographiée depuis la plate-forme d'observation Tetraeder à Bottrop, dans l'ouest de l'Allemagne, le 21 juillet 2025. (AFP)
La cokerie d'ArcelorMittal Bremen sur le site de Bottrop est photographiée depuis la plate-forme d'observation Tetraeder à Bottrop, dans l'ouest de l'Allemagne, le 21 juillet 2025. (AFP)
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  • ArcelorMittal a vu sa rentabilité érodée au premier semestre par les taxes douanières de Donald Trump sur les importations d'acier depuis le Canada ou le Mexiqu
  • ArcelorMittal espère la mise en place effective de mesures de soutien à l'acier en Europe d'ici à la fin de l'année

PARIS: ArcelorMittal, qui a vu sa rentabilité érodée au premier semestre par les taxes douanières de Donald Trump sur les importations d'acier depuis le Canada ou le Mexique, espère la mise en place effective de mesures de soutien à l'acier en Europe d'ici à la fin de l'année.

Malgré un résultat net en hausse de 39% au premier semestre 2025, à 2,6 milliards de dollars, le bénéfice avant intérêt, impôt, dépréciation et amortissement (Ebitda) du deuxième fabricant d'acier mondial a reculé de 10%, à 3,4 milliards de dollars, notamment après l'application de droits de douane de 50% sur l'acier importé aux Etats-Unis depuis le Canada et le Mexique à partir du 4 juin, a expliqué le groupe dans un communiqué jeudi.

Le chiffre d'affaires a aussi pâti du recul de 7,5% des prix moyens de l'acier dans le monde: les ventes se sont amoindries de 5,5%, à 30,72 milliards de dollars au premier semestre.

Jeudi à la Bourse de Paris, après ces annonces, le titre ArcelorMittal a terminé la séance en recul de 2,58%, à 27,52 euros.

Le directeur général du groupe, Aditya Mittal, s'est félicité de la reprise à 100% du site de Calvert aux Etats-Unis, qui devient un site d'acier bas carbone grâce à la construction d'un nouveau four à arc électrique.

En Europe, les tendances à l'accroissement des dépenses publiques sur la défense et les infrastructures "sont un encouragement pour l'industrie de l'acier", a jugé M. Mittal.

Néanmoins, alors que le plan d'action annoncé en mars par la Commission européenne a lancé des "signaux clairs" pour défendre la production européenne d'acier, "nous attendons toujours la concrétisation des mesures de sauvegarde (ou quotas sur les importations d'acier en Europe, NDLR) du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières et sur les prix de l'énergie", a-t-il souligné.

A condition que ces mesures soient mises en place, le groupe prévoit d'investir 1,2 milliard d'euros pour un four à arc électrique sur son site français de Dunkerque (Nord), a-t-il rappelé.

Au total, ArcelorMittal en exploite 29 dans le monde, pour une capacité de production de 21,5 millions de tonnes d'acier recyclé par an, qui augmentera à 23,4 millions de tonnes en 2026 après la mise en service des deux sites espagnols de Gijon et Sestao.


Les bénéfices du CAC 40 en baisse sur fond de guerre commerciale

Cette photographie montre les informations financières de l'indice CAC40 (en bas à gauche), l'indice français qui suit les 40 plus grandes valeurs françaises, affichées sur un immeuble de bureaux dans le quartier financier de La Défense à Paris, le 7 avril 2025. (AFP)
Cette photographie montre les informations financières de l'indice CAC40 (en bas à gauche), l'indice français qui suit les 40 plus grandes valeurs françaises, affichées sur un immeuble de bureaux dans le quartier financier de La Défense à Paris, le 7 avril 2025. (AFP)
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  • Les disparités sont fortes au premier semestre pour les entreprises du CAC 40, qui ont globalement vu leurs bénéfices nets reculer sur fond de guerre commerciale
  • Pour les 37 entreprises sur 40 qui ont publié leurs résultats semestriels jusqu'à jeudi soir inclus, le bénéfice net cumulé tombe à 45 milliards d'euros

PARIS: Automobile et luxe à la peine, aérien, défense et industrie en progression: les disparités sont fortes au premier semestre pour les entreprises du CAC 40, qui ont globalement vu leurs bénéfices nets reculer sur fond de guerre commerciale, d'après un décompte réalisé jeudi par l'AFP.

Pour les 37 entreprises sur 40 qui ont publié leurs résultats semestriels jusqu'à jeudi soir inclus, le bénéfice net cumulé tombe à 45 milliards d'euros, en baisse de 32% par rapport au premier semestre 2024 pour ces mêmes entreprises.

Cette somme des bénéfices nets part du groupe ne prend pas en compte d'éventuels résultats ajustés publiés par les entreprises et exclut Pernod Ricard, dont l'exercice comptable est décalé et donc pas comparable.

Le chiffre d'affaires cumulé est de 725 milliards d'euros, en légère baisse de près de 2%.

La première moitié de 2025 a été marquée par l'incertitude sur les droits de douane imposés par Donald Trump sur les produits européens, et a vu l'euro s'apprécier fortement par rapport à plusieurs devises, notamment face au dollar.

"C'est plutôt l'incertitude qui a pesé" avec le risque "qu'il y ait une guerre commerciale", souligne auprès de l'AFP Lionel Melka, gérant à Swann Capital.

Mais "globalement, (...) les résultats sont plutôt solides", avec, d'un côté, "les secteurs où les attentes étaient basses" comme le luxe ou la consommation, et, de l'autre, "les secteurs qui vont bien — défense, banque — là c'est bon comme prévu".

- Les banques résilientes -

Ce semestre "reste décevant", notamment en comparaison avec la situation américaine, juge pour sa part Christopher Dembik, conseiller en investissement pour Pictet AM: "il y a ce décrochage français et européen qui est perceptible".

D'autre part, "en début d'année, vous aviez un enthousiasme qui était indéniablement exagéré sur les actions européennes. (...) La réalité c'est qu'on n'est pas sur une période de résultats qui est mirobolante", ajoute-t-il.

Les entreprises de l'aérien et de la défense tirent leur épingle du jeu, portées par les tensions géopolitiques: Airbus a vu ses bénéfices bondir de 85%, Safran de 11%.

Les banques s'en sortent bien également et "sont sur des bonnes dynamiques depuis déjà deux, trois ans", relève Christopher Dembik.

Ensemble, BNP Paribas, Crédit Agricole et Société Générale réalisent au total 13,5 milliards d'euros de bénéfices, une hausse de 12%.

En face, le secteur automobile se casse la figure. Renault, notamment, enregistre une lourde perte de plus de 11,2 milliards d'euros, due à l'évolution comptable du traitement de son partenaire japonais Nissan et ses mauvais résultats.

Son concurrent Stellantis a lui publié une lourde perte nette de 2,3 milliards d'euros au premier semestre et son nouveau directeur général, l'Italien Antonio Filosa, a prévenu qu'il faudrait prendre des "décisions difficiles" pour "accélérer" fin 2025.

Le luxe a également souffert, avec un bénéfice net en chute de 46% pour Kering (Gucci, Yves Saint Laurent, Balenciaga, ...) et de 22% pour LVMH (Louis Vuitton, Dior, Celine...).

Le plus gros bénéfice revient d'ailleurs à BNP Paribas, qui vole la vedette à TotalEnergies et LVMH, duo en tête au premier semestre 2024.

- Risque de taux de change -

L'incertitude reste forte pour les troisième et quatrième trimestres, en raison notamment de la force de l'euro qui devrait peser sur les entreprises françaises.

Christopher Dembik table plutôt sur "un risque de taux de change, qu'un risque de droits de douane", et cela "va beaucoup plus se matérialiser dans les résultats à venir", dans les investissements, les importations, etc.

Concernant les droits de douane, malgré les questions en suspens, les entreprises avaient anticipé, "on savait que ce serait un tarif douanier important, donc elles avaient quand même prévu les choses", ajoute l'analyste.

Le président américain Donald Trump et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen ont mis fin à l'attente dimanche, en annonçant un accord prévoyant que les produits européens exportés aux États-Unis soient taxés à 15%.