KABOUL: Une nouvelle série de négociations entre les talibans et le gouvernement afghan reprend mardi au Qatar, dans un contexte cependant plombé par les violences qui s'aggravent en Afghanistan, et en particulier une vague d'assassinats.
Les discussions de paix interafghanes, qui avaient débuté le 12 septembre, avaient été suspendues jusqu'au 5 janvier. Elles n'ont à ce stade permis aucune percée notoire, même si les deux parties sont parvenues à une avancée relative, en se mettant finalement d'accord sur l'objet des prochains échanges.
Les négociateurs du gouvernement afghan plaident pour un cessez-le-feu permanent et pour le maintien du système de gouvernance actuel, qui avait été mis en place quand les talibans avaient été évincés du pouvoir par l'invasion emmenée par les Etats-Unis en 2001.
« Les discussions vont être très compliquées et prendront du temps », a prévenu l'un des négociateurs du gouvernement, Ghulam Farooq Majroh. « Mais nous espérons parvenir aussi vite que possible à un résultat car les gens sont fatigués de cette guerre sanglante ».
Les talibans n'ont fait aucun commentaire avant la reprise des discussions.
Début décembre, les négociateurs des deux parties avaient décidé de faire une pause après des mois de rencontres qui s'embourbaient dans des désaccords sur l'organisation des discussions et sur des interprétations religieuses.
« Aucune sécurité à Kaboul »
Ces discussions interafghanes prennent la suite de l'accord entre les talibans et les Etats-Unis signé en février 2020, dans lequel les Américains s'engagent à retirer leurs troupes du pays d'ici mai.
Malgré les négociations, l'Afghanistan est en proie à une recrudescence des violences, les talibans ayant mené ces dernières semaines des attaques quasi-quotidiennes contre les forces gouvernementales.
L'Afghanistan a été le théâtre d'une série d'assassinats ciblés de personnalités, notamment de journalistes, hommes politiques ou religieux, défenseurs des droits de l'homme.
Un vice-gouverneur de la province de Kaboul et cinq reporters ont notamment été tués depuis novembre.
Les autorités ont imputé ces attaques aux talibans, mais l'organisation Etat islamique en a revendiqué certaines.
« Avec ces assassinats, les talibans cherchent à diviser la population et générer des critiques et du ressentiment contre les services de sécurité du gouvernement », a déclaré Javid Faisal, le porte-parole du Conseil de sécurité nationale. « Mais ces meurtres ne font que souder les gens ».
Nishank Motwani, vice-directeur de l'Afghanistan Research and Evaluation Unit, un cercle de réflexion indépendant basé à Kaboul, a estimé que les talibans ne revendiqueraient jamais ces assassinats politiques, mais qu'ils entendaient néanmoins démontrer à leurs cadres qu'ils « sont toujours les mêmes et qu'ils n'ont pas changé ».
En 2020, les talibans ont perpétré plus de 18 000 attaques, a affirmé cette semaine aux parlementaires le chef des renseignements afghans, Ahmad Zia Siraj.
Au cours des neuf premiers mois de l'année, 2 177 civils ont été tués et 3 822 blessés, selon la Mision d'aide des Nations unies en Afghanistan.
Dans le pays, rares sont ceux qui semblent croire en une amélioration de la situation, malgré la reprise des pourparlers.
« Il n'y a aucune sécurité à Kaboul », peste Jamshid Mohammad, un habitant de la capitale. « Pendant combien de temps encore allons-nous devoir enterrer nos proches? »