Avec son «arc républicain», Macron entretient le flou autour de la place du RN

Le président français Emmanuel Macron (Photo, AFP).
Le président français Emmanuel Macron (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 19 février 2024

Avec son «arc républicain», Macron entretient le flou autour de la place du RN

  • L'image du RN s'est considérablement améliorée depuis plusieurs années
  • A moins de quatre mois des élections européennes, la liste RN domine largement les sondages

PARIS: En refusant de placer le Rassemblement national dans "l'arc républicain", Emmanuel Macron contredit son Premier ministre et enferre l'exécutif dans une notion historiquement vague, signe de ses difficultés persistantes à endiguer le parti d'extrême droite, favori des élections européennes.

"Je n'ai jamais considéré que le RN ou Reconquête s'inscrivaient dans l'+arc républicain+", a assuré lundi le chef de l'Etat dans l'Humanité. Quelques jours plus tôt pourtant, Gabriel Attal affirmait que "l'arc républicain, c'est l'hémicycle" de l'Assemblée, où siègent 88 députés du RN.

"Ils sont dans le champ républicain au sens où ils sont élus par le peuple", argumente lundi l'entourage du président mais "pas dans l'arc républicain" au sens où ils feraient des valeurs républicaines "un combat".

"Arc républicain", "champ républicain"... Le champ lexical de l'exécutif "devient de plus en plus incompréhensible", relève Pascal Perrineau, professeur à Sciences-Po. "Est ce que c'est le substantif +champ+ ou +arc+ qui est important ou est ce que c'est l'adjectif +républicain+?", interroge-t-il.

"Comme ils pensent que c'est à l'Élysée qu'on décide qui est dans un prétendu arc républicain (...) leurs règles changent tout le temps", a dénoncé la députée LFI Raquel Garrido lundi sur Public Sénat.

"Ce qui protège les valeurs républicaines, c'est l'État de droit et le RN rejette le Conseil constitutionnel", rétorque l'Élysée, en allusion notamment aux attaques du parti de Marine Le Pen après la censure partielle de la loi immigration.

Flou 

La notion d'"arc républicain" apparaît à la fin du XIXe siècle, lorsque Bonapartistes ou Royalistes contestaient l'idée même de République, explique M. Perrineau.

Sous la IVe République, l'expression évolue en "front républicain", une alliance de tous les partis contre les extrêmes. Elle réapparaît dans les 1980, avec la montée en puissance du Front national de Jean-Marie Le Pen, et particulièrement au printemps 2002 lorsque celui-ci se qualifie pour le deuxième tour de la présidentielle.

Depuis 2022, les macronistes lui préfèrent "arc républicain", mais "c'est peu ou prou la même chose", pointe Pascal Perrineau.

Le spécialiste rappelle toutefois "le flou" entretenu par Emmanuel Macron, qui assurait encore la semaine dernière qu'il était "tout à fait normal" d'avoir des discussions avec le RN à l'Assemblée nationale ou recevait en août et novembre Jordan Bardella au même titre que les autres chefs de partis dans le cadre des Rencontres de Saint-Denis.

Le RN "n'est pas un partenaire pour nous. Ça ne veut pas dire qu'on fait des leçons de morale. Mais on ne travaille pas, on ne s'assoit pas avec le RN", a pourtant affirmé lundi matin le député Renaissance Benjamin Haddad.

«Panique à bord»

L'an dernier, Elisabeth Borne avait estimé que le parti de Marine Le Pen était un "héritier de Pétain" porteur d'une "idéologie dangereuse" et dont il ne fallait pas "banaliser" les idées. Ce à quoi Emmanuel Macron avait rétorqué qu'il ne souhaitait pas combattre l'extrême droite "par des arguments moraux" mais par "le fond" et "le concret".

Or, c'est bien sur la base d'"arguments moraux" que le chef de l'État a estimé auprès de l'Humanité que le RN "serait inspiré de ne pas être présent" à la panthéonisation de Missak Manouchian.

"Il y a un peu panique à bord, parce qu'au fond la stratégie de dédiabolisation (du Rassemblement national, ndlr) a marché", souligne Pascal Perrineau face à ce revirement.

Une étude de la fondation Jean-Jaurès, publiée début février, démontre en effet que l'image du RN s'est considérablement améliorée depuis plusieurs années. Aujourd'hui, seuls 66% des Français considèrent le RN comme étant d'extrême droite contre 78% en 2015. Il est également jugé moins dangereux (52% contre 60%) et moins xénophobe (50% contre 61%).

Et à moins de quatre mois des élections européennes, la liste RN domine largement les sondages, loin devant la majorité macroniste, et une récente enquête a placé Marine Le Pen en tête des intentions de vote pour la présidentielle de 2027.

"Le Rassemblement national est devenu le premier parti français", résume Pascal Perrineau. De quoi faire craindre à Emmanuel Macron d'être "considéré, à tort ou à raison, comme le président ayant installé le RN à l'Élysée", conclut le chercheur.


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».


Selon ManPowerGroup, l'IA pourrait réduire l'importance des « compétences » dans le recrutement

Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
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  • L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences ».
  • « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

PARIS : L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences », selon un dirigeant de ManPowerGroup.

En effet, « les compétences pourraient s'avérer obsolètes dans six mois », explique Tomas Chamorro-Premuzic, directeur de l'innovation du géant américain du travail temporaire, rencontré par l'AFP au salon Vivatech, à Paris, qui ferme ses portes samedi.  Selon lui, « il vaut mieux savoir que vous travaillez dur, que vous êtes curieux, que vous avez de bonnes aptitudes relationnelles et ça, l'IA peut vous aider à l'évaluer ».

Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

Cependant, les tâches informatiques (utilisation d'Internet, messagerie, etc.) pouvant être accomplies de manière autonome par des agents d'IA connaissent une « rapide expansion ». 

Dans ce contexte, les employeurs pourraient rechercher de plus en plus de salariés dotés de compétences hors de portée de l'IA, telles que le jugement éthique, le service client, le management ou la stratégie, comme l'indique une enquête de ManpowerGroup menée auprès de plus de 40 000 employeurs dans 42 pays et publiée cette semaine.

M. Chamorro-Premuzic déplore toutefois que ces compétences ne soient pas encore davantage mises en avant dans la formation. « Pour chaque dollar que vous investissez dans la technologie, vous devez investir huit ou neuf dollars dans les ressources humaines, la transformation culturelle, la gestion du changement », dit-il.

Les craintes d'un chômage de masse provoqué par l'IA restent par ailleurs exagérées à ce stade, estime le dirigeant, malgré certaines prédictions alarmistes.

D'après Dario Amodei, patron de la société d'intelligence artificielle Anthropic, cette technologie pourrait faire disparaître la moitié des emplois de bureau les moins qualifiés d'ici cinq ans. 

« Si l'histoire nous enseigne une chose, c'est que la plupart des prévisions sont fausses », répond M. Chamorro-Premuzic.

Concernant le recrutement, activité principale de ManPowerGroup, le dirigeant ajoute que « les agents d'intelligence artificielle ne deviendront certainement pas le cœur de notre métier dans un futur proche ». Il constate également que l'IA est utilisée par les demandeurs d'emploi.

« Des candidats sont capables d'envoyer 500 candidatures parfaites en une journée, de passer des entretiens avec leurs bots et de déjouer certains éléments des évaluations », énumère-t-il.