Premier feu vert à l'Assemblée pour une surveillance algorithmique contre les ingérences étrangères

Le président de la commission des Lois Sacha Houlié  (Photo, AFP).
Le président de la commission des Lois Sacha Houlié (Photo, AFP).
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Publié le Jeudi 14 mars 2024

Premier feu vert à l'Assemblée pour une surveillance algorithmique contre les ingérences étrangères

  • Un texte Renaissance pour renforcer l'arsenal contre les ingérences étrangères a passé un premier cap à l'Assemblée
  • Moins hostiles, les élus socialistes et écologistes ont plaidé en vain pour davantage de garde-fous inscrits dans la loi

PARIS: Un registre national des représentants, des gels d'avoirs et une surveillance dopée aux algorithmes... Un texte Renaissance pour renforcer l'arsenal contre les ingérences étrangères a passé un premier cap à l'Assemblée, en dépit d'inquiétudes à gauche concernant les libertés publiques.

"Les ingérences étrangères sont une menace actuelle, réelle, et immédiate", a lancé en ouverture des débats le président de la commission des Lois Sacha Houlié (Renaissance), rapporteur de la proposition de loi, issue des travaux de la délégation parlementaire au renseignement.

Il a cité en exemple les attaques informatiques qui ont ciblé récemment plusieurs ministères, revendiquée par différents groupes de hackers réputés prorusses, mais aussi la reproduction d'étoiles de David bleues sur des immeubles franciliens fin octobre, en plein conflit entre Israël et le Hamas. Une opération pilotée par le FSB russe selon la Direction générale de la sécurité intérieure.

Le texte de M. Houlié, co-présenté avec Constance Le Grip et Thomas Gassilloud (tous deux Renaissance) entend d'abord instaurer une obligation pour des représentants d'intérêts étrangers de s'inscrire sur un registre, une idée inspirée notamment du Foreign Agents Registration Act américain, avec un régime de sanctions pénales pour les contrevenants.

Ce registre serait géré par la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). "Je plaide, avec la DGSI, pour une HATVP des ingérences", avait également déclaré au Sénat le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin fin février.

Mercredi en commission, Sacha Houlié a fait adopter un amendement pour exclure du dispositif "le personnel diplomatique et consulaire", les avocats dans le cadre de leur exercice, les associations à objet cultuel ou les entreprises éditrices de presse, dans le but affiché d'exempter des journalistes, même si plusieurs députés estiment que la formulation est trop restreinte.

"Pour nous prémunir d'ingérence étrangère visant à mettre en cause l'Etat de droit, nous nous apprêtons à remettre en cause nous-mêmes l'État de droit", a critiqué Antoine Léaument (LFI).

«Spirale classique»

Car outre ce registre c'est surtout l'extension d'un dispositif initié en 2015 de surveillance algorithmique, destinée à repérer des connexions sur internet, et aujourd'hui réservé à la prévention du terrorisme, qui inquiète à gauche.

Avec cette loi, et pour quatre ans d'expérimentation, les services de renseignement pourraient y recourir au titre de "l'indépendance nationale", "l'intégrité du territoire et la défense nationale", des "intérêts majeurs de la politique étrangère", "l'exécution des engagements européens et internationaux de la France" et de la lutte contre les ingérences ou tentatives d'ingérence étrangères.

"Un cadre d'utilisation beaucoup trop large", susceptible de porter atteinte "à nos libertés fondamentales", a critiqué Elsa Faucillon (PCF).

Moins hostiles, les élus socialistes et écologistes ont plaidé en vain pour davantage de garde-fous inscrits dans la loi.

Sur X, le professeur de droit public Nicolas Hervieu a lui prédit une "spirale classique des atteintes aux libertés", qui aboutira à la généralisation du dispositif après son expérimentation pour quatre ans.

"On ne créé pas un filet dérivant. Nous ne sommes pas les Américains nous ne sommes pas la NSA", a rétorqué Sacha Houlié, assurant que sa proposition a pour "seules fins de lutter contre les ingérences".

Notant des résultats contrastés dans la lutte contre le terrorisme en raison du trop grand nombre de modes d'actions, il estime que cette surveillance par algorithme peut donner de meilleurs résultats pour repérer des "protocoles" d'ingérence.

Elle pourrait permettre par exemple selon lui de repérer "un agent chinois qui arrive en France, réserve plusieurs hôtels, les annulent, puis re-réserve plusieurs et les annulent à leur tour".

Le texte, qui sera étudié la semaine du 25 mars dans l'hémicycle, prévoit également de geler les avoirs financiers de personnes ou entreprises étrangères portant "atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation", sa "sécurité économique" ou encore "à la sincérité des processus électoraux".

"Les réponses proposées semblent timides", a jugé pour sa part le député LR Ian Boucard, estimant que le texte permettait à "la majorité présidentielle (de) régler ses comptes politiques avec le Rassemblement national", à quelques mois des européennes. Le RN Jean-Philippe Tanguy a lui critiqué "une loi lilliputienne".


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».


Selon ManPowerGroup, l'IA pourrait réduire l'importance des « compétences » dans le recrutement

Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
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  • L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences ».
  • « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

PARIS : L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences », selon un dirigeant de ManPowerGroup.

En effet, « les compétences pourraient s'avérer obsolètes dans six mois », explique Tomas Chamorro-Premuzic, directeur de l'innovation du géant américain du travail temporaire, rencontré par l'AFP au salon Vivatech, à Paris, qui ferme ses portes samedi.  Selon lui, « il vaut mieux savoir que vous travaillez dur, que vous êtes curieux, que vous avez de bonnes aptitudes relationnelles et ça, l'IA peut vous aider à l'évaluer ».

Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

Cependant, les tâches informatiques (utilisation d'Internet, messagerie, etc.) pouvant être accomplies de manière autonome par des agents d'IA connaissent une « rapide expansion ». 

Dans ce contexte, les employeurs pourraient rechercher de plus en plus de salariés dotés de compétences hors de portée de l'IA, telles que le jugement éthique, le service client, le management ou la stratégie, comme l'indique une enquête de ManpowerGroup menée auprès de plus de 40 000 employeurs dans 42 pays et publiée cette semaine.

M. Chamorro-Premuzic déplore toutefois que ces compétences ne soient pas encore davantage mises en avant dans la formation. « Pour chaque dollar que vous investissez dans la technologie, vous devez investir huit ou neuf dollars dans les ressources humaines, la transformation culturelle, la gestion du changement », dit-il.

Les craintes d'un chômage de masse provoqué par l'IA restent par ailleurs exagérées à ce stade, estime le dirigeant, malgré certaines prédictions alarmistes.

D'après Dario Amodei, patron de la société d'intelligence artificielle Anthropic, cette technologie pourrait faire disparaître la moitié des emplois de bureau les moins qualifiés d'ici cinq ans. 

« Si l'histoire nous enseigne une chose, c'est que la plupart des prévisions sont fausses », répond M. Chamorro-Premuzic.

Concernant le recrutement, activité principale de ManPowerGroup, le dirigeant ajoute que « les agents d'intelligence artificielle ne deviendront certainement pas le cœur de notre métier dans un futur proche ». Il constate également que l'IA est utilisée par les demandeurs d'emploi.

« Des candidats sont capables d'envoyer 500 candidatures parfaites en une journée, de passer des entretiens avec leurs bots et de déjouer certains éléments des évaluations », énumère-t-il.