Vaccins: face à une distribution lente, les scientifiques évaluent de nouvelles tactiques

Les vaccins de Pfizer/BioNTech et Moderna sont efficaces à environ 95% après la seconde dose (Photo, AFP)
Les vaccins de Pfizer/BioNTech et Moderna sont efficaces à environ 95% après la seconde dose (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 06 janvier 2021

Vaccins: face à une distribution lente, les scientifiques évaluent de nouvelles tactiques

  • Les autorités britanniques ont donné le ton, annonçant qu'elles allaient retarder l'administration de la seconde dose des vaccins, jusqu'à trois mois après la première
  • Le vaccin de Moderna, en particulier, a montré un haut niveau de protection après la première dose - autour de 90%

WASHINGTON: La seconde dose des vaccins contre le Covid-19 peut-elle être prise plus tard qu'initialement recommandé? Pourrait-on administrer des demi-doses? Et utiliser un vaccin différent entre la première et la seconde dose est-il aussi efficace? 

Les gouvernements du monde entier sont aujourd'hui confrontés à ces questions face à une épidémie qui fait rage, et l'apparition de variants a priori plus contagieux. 

Les autorités britanniques ont donné le ton, annonçant qu'elles allaient retarder l'administration de la seconde dose des vaccins, jusqu'à trois mois après la première, soit bien au-delà des trois à quatre semaines recommandées.  

Le but: faire en sorte que davantage de gens reçoivent une injection plus rapidement, même si le niveau de protection est inférieur à celui acquis une fois reçues les deux doses.  

L'Organisation mondiale de la santé a soutenu la position britannique mardi, en estimant que la deuxième injection pouvait être retardée de quelques semaines « dans des circonstances exceptionnelles de contextes épidémiologiques et de contraintes d'approvisionnement ». 

Et si le vaccin utilisé pour une première injection n'est plus disponible, les autorités britanniques ont également autorisé l'administration d'un vaccin différent pour la deuxième. 

Les Etats-Unis, au contraire, ont adopté une ligne bien plus prudente.  

Lundi soir, le chef de l'Agence des médicaments (FDA), Stephen Hahn, a estimé qu'il s'agissait de « questions raisonnables à considérer et évaluer », mais que ces changements étaient « prématurés » et n'étaient « pas ancrés solidement dans des preuves disponibles ». 

« Légers changements » 

Le débat a mis en lumière les divisions parmi les experts, avec d'éminents scientifiques soutenant des positions opposées.  

Idéalement, les politiques publiques devraient suivre ce qui a été testé lors des essais cliniques. Mais avec une épidémie menaçant d'échapper à tout contrôle, pour certains, la situation est loin d'être idéale. 

« Nous n'avons pas choisi trois semaines pour (le vaccin de) Pfizer et quatre pour Moderna parce que nous savons que c'est parfait », argumente Howard Forman, un expert en santé publique à l'université de Yale. 

« Il s'agissait de la meilleure hypothèse pour un délai optimal avant la seconde dose, afin d'augmenter l'immunité », a-t-il expliqué. « De légers changements aux recommandations peuvent faire toute la différence pour donner une bien plus grande portée aux vaccins que nous avons. » 

Selon lui, retarder la seconde dose - considérée comme cruciale pour une protection à long terme - ne devrait être fait que pour des gens de moins de 65 ans et sans risques spécifiques.  

Les Etats-Unis avaient fixé à 20 millions le nombre de personnes vaccinées à la fin décembre, mais au 4 janvier, seules 4,8 millions de personnes avaient reçu une première injection. Le pays, comme le Royaume-Uni, a couvert environ 1,4% de sa population. L'Europe est loin derrière, tandis qu'Israël en est à 13,5%.  

Dernier recours 

Les vaccins de Pfizer/BioNTech et Moderna sont efficaces à environ 95% après la seconde dose.  

Le vaccin de Moderna, en particulier, a montré un haut niveau de protection après la première dose - autour de 90% -, une donnée qui doit cependant être traitée avec prudence car fondée sur un échantillon restreint. 

Selon Saad Omer, directeur de l'Institut de santé de Yale, un changement de stratégie ne se justifie que pour les pays où l'approvisionnement est restreint.  

Aux Etats-Unis, où 17 millions de doses ont déjà été distribuées aux Etats, administrer ces doses déjà disponibles est la priorité, a-t-il dit. 

Concernant l'injection d'un vaccin différent d'une dose à l'autre, pour l'immunologue Akiko Iwasaki, cela pourrait fonctionner en théorie, mais les experts s'accordent pour dire que cela nécessite des recherches supplémentaires et ne devrait être fait qu'en dernier recours actuellement.  

Une manière d'avancer pourrait être de combiner les résultats de plusieurs études déjà réalisées afin de déterminer quel seuil d'anticorps résulte en une protection contre le Covid-19, selon Saad Omer et Natalie Dean, biostatisticienne à l'Université de Floride. Et d'ensuite mener des essais plus petits pour déterminer quelle dose de vaccin amène à ce niveau.  

Une étude de ce type est en cours pour déterminer si l'injection de demi-doses du vaccin de Moderna confère la même protection que des doses complètes, selon les propos rapportés par le New York Times de John Mascola, des Instituts nationaux de santé américains (NIH).  

Mais une inquiétude taraude la scientifique Natalie Dean: que ces changements contribuent à alimenter la défiance du public envers les vaccins. Selon elle, toute modification devrait ainsi suivre le même processus d'autorisation que celui utilisé pour autoriser en urgence les vaccins. 


Taxe Zucman : «truc absurde», «jalousie à la française», selon le patron de Bpifrance

Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française". (AFP)
Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française". (AFP)
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  • M. Dufourcq, qui était interrogé sur RMC, a estimé que la taxe, dont le principe est d'imposer chaque année les contribuables dont la fortune dépasse 100 millions d'euros à hauteur de 2% de celle-ci, était "un truc complètement absurde"
  • Notant qu'avec la taxe Zucman, ils "paieraient tous en papier (en actions, NDLR) leurs 2%", M. Dufourcq a observé : "C'est moi, c'est la Bpifrance qui va gérer ce papier"

PARIS: Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française".

M. Dufourcq, qui était interrogé sur RMC, a estimé que la taxe, dont le principe est d'imposer chaque année les contribuables dont la fortune dépasse 100 millions d'euros à hauteur de 2% de celle-ci, était "un truc complètement absurde", mais qui selon lui "n'arrivera pas".

Mais "ça panique les entrepreneurs : ils ont construit leur boîte et on vient leur expliquer qu'on va leur en prendre 2% tous les ans. Pourquoi pas 3? Pourquoi pas 4? C'est invraisemblable!", a-t-il déclaré.

Notant qu'avec la taxe Zucman, ils "paieraient tous en papier (en actions, NDLR) leurs 2%", M. Dufourcq a observé : "C'est moi, c'est la Bpifrance qui va gérer ce papier" : "Donc demain j'aurai 2% du capital de LVMH, dans 20 ans 20%, 20% du capital de Pinault-Printemps-Redoute (Kering, NDLR), 20% du capital de Free. C'est délirant, c'est communiste en réalité, comment est-ce qu'on peut encore sortir des énormités comme ça en France!?"

"Ces gens-là tirent la France. Il faut les aider (...) au lieu de leur dire qu'on va leur piquer 2% de leur fortune".

Il a observé que "si on pique la totalité de celle de Bernard Arnault, ça finance 10 mois d'assurance-maladie", mais qu'après "il n'y a plus d'Arnault".

"Il n'y a pas de trésor caché", a estimé M. Dufourcq, qui pense que cette taxe "n'arrivera jamais", et n'est évoquée que "pour hystériser le débat" politique.

Pour lui, il s'agit "d'une pure histoire de jalousie à la française, une haine du riche, qui est soi-disant le nouveau noble", rappelant les origines modestes de François Pinault ou Xavier Niel: "c'est la société française qui a réussi, on devrait leur dresser des statues".

"Il y a effectivement des fortunes qui passent dans leur holding des dépenses personnelles", a-t-il remarqué, "c'est ça qu'il faut traquer, et c'est ce sur quoi le ministère des Finances, je pense, travaille aujourd'hui".

Mais il y a aussi "beaucoup de Français qui passent en note de frais leurs dépenses personnelles", a-t-il observé. "Regardez le nombre qui demandent les tickets dans les restaus", pour se les faire rembourser.


IA: Google investit 5 milliards de livres au Royaume-Uni avant la visite de Trump

Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
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  • Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat
  • Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres

LONDRES: Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays.

Cette somme financera "les dépenses d'investissement, de recherche et développement" de l'entreprise dans le pays, ce qui englobe Google DeepMind (le laboratoire d'IA du géant californien), a indiqué le groupe dans un communiqué.

Google ouvre mardi un centre de données à Waltham Cross, au nord de Londres, dans lequel il avait déjà annoncé l'an dernier injecter un milliard de dollars (850 millions d'euros). La somme annoncée mardi viendra aussi compléter ce financement, a précisé un porte-parole de l'entreprise à l'AFP.

Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat.

Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres.

Selon un responsable américain, qui s'exprimait auprès de journalistes, dont l'AFP, en amont de la visite, les annonces se porteront à "plus de dix milliards, peut-être des dizaines de milliards" de dollars.

Le gouvernement britannique avait déjà dévoilé dimanche plus d'un milliard de livres d'investissements de banques américaines dans le pays, là aussi en amont de la visite d'Etat du président Trump.

Et l'exécutif britannique a annoncé lundi que Londres et Washington allaient signer un accord pour accélérer les délais d'autorisation et de validation des projets nucléaires entre les deux pays.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Londres redouble d'efforts pour se dégager des hydrocarbures et a fait du nucléaire l'une de ses priorités.

Le partenariat avec Washington, baptisé "Atlantic Partnership for Advanced Nuclear Energy", doit lui aussi être formellement signé lors de la visite d'État de Donald Trump.

 


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".