Jacqueline Veyrac témoigne face à ses ravisseurs présumés

Jacqueline Veyrac, l’héritière du Grand Hôtel de Cannes et de La Réserve, à Nice, quittant, avec son avocat Luc Febbraro (C), le palais de justice de Nice, dans le sud de la France, après une audience matinale le 8 janvier 2021, au cours de laquelle 13 personnes ont été jugées il y a quatre jours pour son enlèvement. (Valery Hache / AFP
Jacqueline Veyrac, l’héritière du Grand Hôtel de Cannes et de La Réserve, à Nice, quittant, avec son avocat Luc Febbraro (C), le palais de justice de Nice, dans le sud de la France, après une audience matinale le 8 janvier 2021, au cours de laquelle 13 personnes ont été jugées il y a quatre jours pour son enlèvement. (Valery Hache / AFP
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Publié le Vendredi 08 janvier 2021

Jacqueline Veyrac témoigne face à ses ravisseurs présumés

  • "Jetée" à l'arrière d'un Renault Kangoo blanc, bâillonnée et ligotée, la vieille dame réussira au bout de deux jours à échapper à ses ravisseurs, étant parvenue à déscotcher la couverture masquant l'arrière et à faire des signes sans crier
  • Après les événements, Jacqueline Veyrac a fait des contrôles médicaux, pris des calmants pour dormir et repris le cours de sa vie

NICE, France : "Je revenais de la pharmacie, ça a été très rapide": d'une voix posée, Jacqueline Veyrac, une riche hôtelière de la Côte d'Azur de 80 ans, a raconté vendredi son enlèvement en 2016, pour lequel 13 hommes sont jugés devant les assises à Nice.

"Jetée" à l'arrière d'un Renault Kangoo blanc, bâillonnée et ligotée, la vieille dame réussira au bout de deux jours à échapper à ses ravisseurs en appelant à l'aide dans la rue peu fréquentée où le véhicule avait été stationné, parvenant à déscotcher la couverture masquant l'arrière et à faire des signes sans crier.

Le pas assuré malgré une légère claudication, en pantalon écossais et veste de laine marron, elle témoigne assise, décrivant avec un calme impressionnant ses 48 heures de séquestration.

Dans le box, l'ancien restaurateur italien Giuseppe Serena, accusé n°1 motivé selon l'accusation par l'appât du gain et la volonté de se venger après avoir perdu La Réserve, un restaurant que Mme Veyrac lui avait confié en location-gérance, regarde ailleurs.

Il encourt la perpétuité tout comme Philip Dutton, un Britannique, le seul à reconnaître sa participation au rapt et à une première tentative d'enlèvement commise en 2013. Comme M. Serena, lui aussi poursuivi pour les faits de 2013, les présumés hommes de main qui comparaissent avec eux nient toute implication.

"Je revenais de la pharmacie, j'avais fait des courses, il était midi, midi et demi, ça a été très rapide. Ils m'ont prise dans le Kangoo. Tout de suite, ils m'ont poussé et jetée, même un peu fort", narre devant la cour la très discrète propriétaire du Grand Hôtel de Cannes -sa grande fierté.

En 2013, elle avait tendu ses jambes pour empêcher ses ravisseurs de fermer le coffre de leur véhicule et s'enfuir. Mais avec un Kangoo, un véhicule utilitaire, impossible de faire la même chose.

Les ravisseurs, masqués et gantés, lui prennent son sac, son téléphone: "Ils ne parlaient pas très bien, +Tais toi+, +Ta gueule ou je te bute+".

 

"Le baron Empain, c'est pire"

Mme Veyrac obtient toutefois qu'on lui lie les mains devant et non dans le dos, mais pour sortir et aller aux toilettes, c'est "non", et elle refuse de boire ou de s'alimenter. Les heures passent, à plusieurs reprises, elle crie, tente d'alerter de promeneurs, se fait rabrouer, se détache, est rattachée, entend le son d'un clocher, le bruit des pommes de pin qui chutent sur le toit de la voiture.

"Le baron Empain, c'était pire, j'ai de la chance, j'ai une bonne aura", parvient-elle à relativiser, évoquant l'enlèvement en 1978 à Paris d'un chef d'entreprise séquestré plus de deux mois et à qui ses ravisseurs avaient notamment coupé une phalange.

Son fils Gérard apparaît, lui, plus secoué : "Elle a été traitée comme un meuble", témoigne-t-il, la gorge nouée.

Après les événements, Jacqueline Veyrac a fait des contrôles médicaux, pris des calmants pour dormir et repris le cours de sa vie: "Je ne suis pas quelqu'un de mou, plutôt quelqu'un de vif", dit-elle avant de tempérer: "Ma vie a changé (...) Je ne sors presque plus le soir et j'évite les endroits trop déserts. J'ai toujours de l'appréhension".

Sa déposition touche à sa fin. Giuseppe Serena demande alors la parole, et s'exprime dans un français teinté d'accent italien.

Il salue Mme Veyrac: "J'ai pensé à vous durant ces quatre années de prison, en pensant que ma mère aurait pu être à votre place, je suis désolé. Je vous prie de pardonner moi et toutes ces personnes qui pourraient vous avoir fait du mal (...) Je m'excuse et vous embrasse, merci tante Jacqueline, c'est comme ça que je vous appelais".

Surprise dans la salle d'audience. L'avocate générale Annie Brunet-Fuster se lève et lui demande si c'est un aveu.

"Le coupable n'est pas ici!", tonne M. Serena. "J'ai trop parlé, ça a toujours été mon défaut, je ne reconnais pas ma culpabilité": à nouveau, sans le nommer, c'est son vieil ami italien Enrico Fontanella, 67 ans, au courant de ses déboires à La Réserve, qu'il accuse de tout. Ce dernier est absent au procès. Son cas a été disjoint pour raisons de santé.

 


Grève nationale : les syndicats unis contre le budget du futur gouvernement

Des policiers attendent l'arrivée du ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau à la Porte d'Orléans à Paris, le 18 septembre 2025, avant une journée de grèves et de protestations à l'échelle nationale à l'appel des syndicats sur le budget national de la France. (AFP)
Des policiers attendent l'arrivée du ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau à la Porte d'Orléans à Paris, le 18 septembre 2025, avant une journée de grèves et de protestations à l'échelle nationale à l'appel des syndicats sur le budget national de la France. (AFP)
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  • Journée de grève nationale ce jeudi à l’appel des 8 principaux syndicats français, unis contre les mesures budgétaires jugées « brutales »
  • Les autorités redoutent des débordements à Paris, avec jusqu’à 100 000 manifestants attendus et la présence annoncée de casseurs. 900 000 personnes pourraient se mobiliser dans toute la France

Les syndicats français ont promis une "journée noire" de manifestations et de grèves jeudi pour peser sur les choix budgétaires du prochain gouvernement, en pleine crise politique dans la deuxième économie de l'UE.

A Paris, le préfet de police s'est dit "très inquiet" de la présence de nombreux casseurs venant pour "en découdre" dans la manifestation prévue dans la capitale, qui pourrait selon lui rassembler 50.000 à 100.000 personnes.

Les autorités s'attendent à une mobilisation massive, avec plus de 250 cortèges annoncés qui pourraient réunir jusqu'à 900.000 personnes à travers le pays, soit cinq fois plus que lors du mouvement "Bloquons tout" du 10 septembre lancé sur les réseaux sociaux, hors de tout cadre syndical.

Cette mobilisation lancée par les huit syndicats français, unis pour la première fois depuis le 6 juin 2023, vise les mesures budgétaires "brutales" préconisées cet été par le Premier ministre François Bayrou pour réduire le déficit de la France (coupes dans le service public, réforme de l'assurance chômage, gel des prestations sociales notamment).

Son gouvernement alliant le centre droit et la droite, minoritaire à l'Assemblée nationale, a été renversé par les députés le 8 septembre.

Nommé le lendemain, son successeur Sébastien Lecornu - troisième Premier ministre d'Emmanuel Macron depuis juin 2024, le cinquième depuis sa réélection en 2022 - s'est lui aussi engagé à réduire le déficit qui plombe les comptes de la nation (114% du PIB), tout en promettant des "ruptures sur le fond" en matière budgétaire.

Ce fidèle du président a entamé une série de consultations avec les partis politiques avant de composer un gouvernement et présenter son programme, en vue de boucler dès que possible un projet de budget pour 2026.

Il a également reçu quasiment tous les syndicats, qui n'en ont pas moins maintenu leur mot d'ordre, espérant une mobilisation similaire à celles de 2023 contre la réforme des retraites qui avaient régulièrement réuni un million de manifestants, dont un pic à 1,4 million.

- "Démonstration de force" -

"Aucune des mesures catastrophiques du musée des horreurs de M. Bayrou n'est enterrée !", s'est indignée lundi la leader de la CGT, Sophie Binet, après avoir rencontré le nouveau Premier ministre.

L'abandon par Sébastien Lecornu de la très controversée suppression de deux jours fériés voulue par François Bayrou est "une première victoire", qui "confirme que nous sommes en position de force", a-t-elle estimé.

Même la CFDT, syndicat réputé plus apte au compromis, est "plus que jamais motivée pour aller dans la rue", a fait savoir sa responsable Marylise Léon qui attend "des faits et des preuves" du nouveau chef de gouvernement, et notamment un "besoin d’efforts partagés".

Elle a apprécié à cet égard que le successeur de François Bayrou se dise selon elle conscient de la nécessité de "faire quelque chose" au sujet de la taxation des hauts patrimoines, revenue au cœur du débat.

"Le budget va se décider dans la rue", estime Mme Binet, qui évoque une "démonstration de force" et laisse entrevoir une mobilisation dans la durée.

Côté transports, le trafic sera "perturbé" voire "très perturbé" dans la capitale, ainsi que pour les trains interurbains.

Ce sera moins le cas pour les trains régionaux et les TGV. Un service proche de la normale est attendu dans les aéroports, le principal syndicat de contrôleurs aériens ayant reporté sa grève.

A l'école, un tiers des enseignants du premier degré (écoles maternelles et élémentaires) seront grévistes. L'ampleur du mouvement dans la fonction publique en générale reste encore à préciser.


Le PDG de CMA CGM assure «ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale» des médias qu'il possède

Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC. (AFP)
Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC. (AFP)
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  • "Tout ce qu'on fait c'est leur donner cette bouffée d'oxygène (...) On ne leur demande pas de dire blanc ou de dire noir, ça c'est eux qui gèrent", a poursuivi le milliardaire, président de l'armateur CMA CGM, dont la branche médias est CMA Media
  • Selon lui, les médias ne "représentent qu'une part modeste" des investissements de son groupe, "moins de 5%", mais "répondent à un enjeu majeur, la vitalité démocratique"

PARIS: Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC.

"Les journaux ou chaînes de télévision qu'on a rachetés ont une indépendance, ce sont des journaux qui sont nuancés, qui offrent le pluralisme. Je ne m'immisce pas dans la ligne éditoriale de ces journaux", a-t-il déclaré lors d'une audition devant la commission des affaires économiques de l'Assemblée.

Il répondait au député France insoumise René Pilato qui suggérait une "grande loi de séparation des entreprises et des médias".

"Si des investisseurs comme le groupe CMA CGM ne viennent pas, ces médias malheureusement tombent", a ajouté M. Saadé, rappelant que le secteur des médias est "très sinistré".

"Tout ce qu'on fait c'est leur donner cette bouffée d'oxygène (...) On ne leur demande pas de dire blanc ou de dire noir, ça c'est eux qui gèrent", a poursuivi le milliardaire, président de l'armateur CMA CGM, dont la branche médias est CMA Media.

Selon lui, les médias ne "représentent qu'une part modeste" des investissements de son groupe, "moins de 5%", mais "répondent à un enjeu majeur, la vitalité démocratique".

"Dans un monde traversé par les +fake news+, je crois que les industriels ont un rôle à jouer pour défendre le pluralisme, l'indépendance et la qualité de l'information. Si nous voulons continuer à produire de l'information en France et résister à la domination des grandes plateformes, nous devons garantir des groupes de médias solides capables de créer des contenus de qualité et de les diffuser sur tous les supports", a-t-il défendu.

Outre BFMTV, RMC, et désormais Brut, CMA Media possède les journaux La Tribune et La Tribune Dimanche, La Provence et Corse Matin. Le groupe vient également de racheter la chaîne télé Chérie 25 (NRJ Group).

Vendredi, les Sociétés des journalistes (SDJ) de BFMTV, RMC et La Tribune avaient déploré qu'"une prise de position de Rodolphe Saadé sur l'actualité politique et sociale du pays (ait) été diffusée à l'antenne de BFMTV" jeudi.

Il s'agissait d'extraits écrits tirés d'une tribune publiée dans La Provence après le mouvement "Bloquons tout" du 10 septembre. "Les entreprises ne sont pas des adversaires, elles sont des partenaires de la Nation", y écrivait notamment M. Saadé.

 


Faure «sur sa faim» après son entretien avec Lecornu, resté «très flou» sur ses intentions

Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions". (AFP)
Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions". (AFP)
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  • Si M. Lecornu était "là pour refaire François Bayrou, les mêmes causes produiraient les mêmes effets et nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", que prononce chaque nouveau Premier ministre, a-t-il prévenu
  • Il était accompagné par le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, celui des sénateurs Patrick Kanner, et la maire de Nantes Johanna Rolland

PARIS: Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions".

"Pour l'instant, nous sommes restés sur notre faim et nous verrons bien ce qu'il a à nous dire dans les prochains jours", a déclaré le premier secrétaire du PS, à l'issue de sa première rencontre à Matignon, qui a duré près de deux heures.

Si M. Lecornu était "là pour refaire François Bayrou, les mêmes causes produiraient les mêmes effets et nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", que prononce chaque nouveau Premier ministre, a-t-il prévenu à la veille d'une importante journée de mobilisation syndicale.

Il était accompagné par le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, celui des sénateurs Patrick Kanner, et la maire de Nantes Johanna Rolland.

A propos de la journée d'actions de jeudi, il a expliqué que ces manifestations seraient "aussi un élément du rapport de force que nous devons installer avec un exécutif qui, jusqu'ici, n'a pas fait la démonstration de sa capacité à comprendre la colère et même l'exaspération des Français".

Olivier Faure a également dit qu'il ne souhaitait pas "voir revenir sur la table une loi immigration", estimant que le Premier ministre macroniste était "tiraillé par une droite qui lorgne de plus en plus vers l'extrême droite" et avait  "beaucoup de problèmes dans son propre socle commun".

"Nous ne cherchons pas la censure, nous ne cherchons pas la dissolution, nous ne cherchons pas la destitution. Nous cherchons à ce que les Français soient entendus", a-t-il plaidé, en citant un sondage Ifop commandé par le parti montrant que les Français, quelles que soient leurs sensibilités, plébiscitent les mesures poussées par le PS.

"Il y a des mesures qui sont très majoritaires dans le pays, pour la taxe Zucman" sur les hauts patrimoines, "pour en finir" avec la réforme des retraites, pour "rendre du pouvoir d'achat", notamment à travers "un taux différentiel de CSG", a-t-il détaillé.