Au Caire, l'exil déchirant des Palestiniens fuyant la guerre à Gaza

Une jeune fille palestinienne regarde d'autres personnes vérifier un logement scolaire de l'ONU déplaçant des personnes qui ont été touchées lors des bombardements israéliens à Nuseirat, dans le centre de la bande de Gaza, le 6 juin 2024, dans le contexte du conflit en cours entre Israël et le groupe militant palestinien du Hamas. (AFP)
Une jeune fille palestinienne regarde d'autres personnes vérifier un logement scolaire de l'ONU déplaçant des personnes qui ont été touchées lors des bombardements israéliens à Nuseirat, dans le centre de la bande de Gaza, le 6 juin 2024, dans le contexte du conflit en cours entre Israël et le groupe militant palestinien du Hamas. (AFP)
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Publié le Jeudi 06 juin 2024

Au Caire, l'exil déchirant des Palestiniens fuyant la guerre à Gaza

  • Principal obstacle des déplacés: «notre statut légal en Egypte: on ne bénéficie que de 45 jours de résidence après notre arrivée, après cela on entre dans l'illégalité»
  • Chaque jour au Caire, ils sont des dizaines massés devant l'ambassade pour suivre leur demande d'assistance

LE CAIRE: "On a tout perdu": après les traumatismes de la guerre à Gaza, Raghad Shbeir doit s'acclimater à son exil au Caire, comme des dizaines de milliers de Palestiniens désorientés, ne sachant pas qui solliciter pour trouver de l'aide.

"Nous avons contacté des organisations, mais en vain. Certaines n'ont jamais répondu, d'autres nous ont dit d'attendre", explique à l'AFP la jeune femme de 22 ans.

Principal obstacle, poursuit-elle, "notre statut légal en Egypte: on ne bénéficie que de 45 jours de résidence après notre arrivée, après cela on entre dans l'illégalité".

Certains, comme Mme Shbeir, peuvent compter sur de la famille déjà installée au Caire pour les héberger.

Privés d'emplois et de revenus réguliers, d'autres se tournent vers des ONG locales --rapidement dépassées-- et des réseaux d'entraide constitués pour répondre aux besoins de Palestiniens qui "manquent de tout", affirme Nassim Touil, Américain de 26 ans mobilisé au Caire sur son temps libre.

"Différents groupes et individus ont prêté des appartements, collecté de l'argent, des médicaments, de la nourriture et des vêtements", dit-il, précisant que les nouveaux venus "ont besoin d'argent pour leurs dépenses quotidiennes".

Beaucoup "ont vécu dans des tentes avec pour seule subsistance des conserves périmées ou de la nourriture grouillante d'asticots," rappelle-t-il. "Il leur faut au minimum un suivi médical".

Tous sont marqués par les affres de la guerre à Gaza, à cinq heures de route. Elle a été déclenchée par une attaque du mouvement islamiste palestinien Hamas contre Israël le 7 octobre, qui a entraîné la mort de 1.194 personnes, majoritairement des civils, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de chiffres officiels israéliens.

En riposte, l'armée israélienne a lancé une offensive meurtrière dans la bande de Gaza qui a fait jusqu'à présent 36.586 morts, essentiellement des civils, selon les dernières données du ministère de la Santé du gouvernement de Gaza.

Originaire du sud du territoire palestinien, Mohanad al-Sindawy vit près d'un aéroport au Caire. "Dès qu'on entend un avion on est terrorisé, même le bruit des voitures nous rappelle celui des missiles", confie le jeune homme de 23 ans.

Ici les gestes les plus simples prennent une autre dimension: "l'eau sort chaude et propre du pommeau de douche, c'est étrange. A Gaza, prendre une douche relevait du parcours du combattant".

«Aides en espèces»

Depuis le début de la guerre, l'Egypte a accueilli quelque 100.000 Palestiniens fuyant un territoire dévasté par le pilonnage de l'armée israélienne, indique Diab Allouh, l'ambassadeur palestinien au Caire.

Parmi eux, 44.065 blessés, dont 10.730 enfants, arrivés entre novembre et février, selon les derniers chiffres gouvernementaux.

La plupart, déplacés plusieurs fois avant d'avoir pu traverser la frontière, débarquent avec leurs seules affaires sur le dos. Alors, au Caire, le petit consulat palestinien tente, tant bien que mal, de soutenir ses administrés les plus vulnérables.

A l'image des parents de M. Sindawy. En raison de leur âge avancé, ils sont "les seuls à avoir reçu une aide, bien que toute la famille soit enregistrée auprès du consulat".

Chaque jour au Caire, ils sont des dizaines massés devant l'ambassade pour suivre leur demande d'assistance.

Leur précarité est d'autant plus grande que beaucoup de Palestiniens ont vu leurs économies fondre sur fond de guerre.

Hors évacuations organisées pour raisons médicales ou via des listes officielles, il faut recourir à Ya Hala --l'unique société privée qui délivre, au compte-gouttes et contre plusieurs milliers de dollars, le précieux sésame pour l'Egypte.

"Je suis sortie avec 13 de mes proches, en tout on a payé 75.000 dollars", confirme Mme Shbeir.

«Prochaine étape»? 

Liée à Israël depuis 1979 par des accords de paix, l'Egypte se doit de composer avec une population largement acquise à la cause palestinienne.

Le Caire est vent debout contre l'exil des Palestiniens, qui selon le président Abdel Fattah al-Sissi sonnerait le glas "de la cause palestinienne". D'autant que les réfugiés palestiniens déplacés en 1948 à la création d'Israël, n'ont toujours pas obtenu leur "droit au retour".

Se targuant de ne jamais monter des camps de tentes, l'Egypte met en avant l'accueil réservé à plusieurs millions d'étrangers, dont des réfugiés Syriens ou Soudanais, autorisés à travailler et étudier comme les citoyens égyptiens.

Mais les Palestiniens eux sont exclus du mandat du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Quant à l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa), elle ne dispose en Egypte que d'un simple bureau de liaison, sans commune mesure avec ses opérations dans des pays comme le Liban ou la Jordanie.

"Rester en Egypte n'est pas une option", affirme Mme Shbeir, pour qui "rien n'est clair", si ce n'est qu'il faudra partir "à l'étranger".

M. Sindawy pourrait travailler à distance. A Gaza il dirigeait une start-up de marketing digital. Mais il s'estime "trop instable psychologiquement" et "n'arrive pas à se concentrer".

Penser au futur? "On n'a pas encore l'énergie, on consacre notre temps à suivre l'actualité et à prendre des nouvelles de nos familles" sous les bombes.

"Pour le moment on vit dans l'attente d'un cessez-le-feu", explique-t-il. "Après peut-être, on pourra penser à la prochaine étape de nos vies".


La diplomatie française estime qu'Israël doit faire preuve de « la plus grande retenue » au Liban

Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
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  • l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, Hezbollah.
  • Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

PARIS : La France a exhorté mercredi Israël « à faire preuve de la plus grande retenue » au Liban après la frappe israélienne qui a touché Beyrouth dimanche dernier, et a souligné que le démantèlement des sites militaires du Hezbollah revenait « exclusivement aux forces armées libanaises ».

Malgré un cessez-le-feu entré en vigueur le 27 novembre après plus d'un an de guerre entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, très affaibli, qui affirme de son côté respecter l'accord.

Le week-end dernier, Israël a assuré avoir visé un entrepôt de missiles.

Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

« La France rappelle que le respect du cessez-le-feu s'impose à toutes les parties sans exception afin de garantir la sécurité des populations civiles des deux côtés de la Ligne bleue », la frontière de facto délimitée par les Nations unies, a souligné mercredi Christophe Lemoine, porte-parole du ministère français des Affaires étrangères.

« La France appelle donc Israël à faire preuve de la plus grande retenue et à se retirer au plus vite des cinq points toujours occupés sur le territoire libanais », a-t-il ajouté lors d'un point presse.

Une commission regroupant le Liban, Israël, les États-Unis, la France et l'ONU est chargée de superviser l'application du cessez-le-feu.

Beyrouth presse la communauté internationale de faire pression sur Israël pour qu'il mette fin à ses attaques et se retire des cinq positions frontalières où il s'est maintenu dans le sud du pays, malgré l'accord.


Les services de sécurité des Émirats déjouent un transfert illégal d'armes vers le Soudan

Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
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  • Les services de sécurité ont réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises 
  • Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays

ABU DHABI: Les services de sécurité des Émirats arabes unis ont déjoué une tentative de transfert illégal d'armes et d'équipements militaires aux forces armées soudanaises, a déclaré mercredi le procureur général des Émirats arabes unis, Hamad Saif al-Chamsi.

M. Al-Chamsi a déclaré que les services de sécurité avaient réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises après l'arrestation de membres d'une cellule impliquée dans la médiation non autorisée, le courtage et le trafic illicite d'équipements militaires, sans avoir obtenu les licences nécessaires auprès des autorités compétentes.

Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays.

L'avion transportait environ cinq millions de munitions de type Goryunov (54,7 x 62 mm).

Les autorités ont également saisi une partie du produit financier de la transaction en possession de deux suspects dans leurs chambres d'hôtel.

M. Al-Chamsi a déclaré que l'enquête avait révélé l'implication de membres de la cellule des chefs militaires soudanais, notamment l'ancien chef des services de renseignement Salah Gosh, un ancien officier de l'agence de renseignement, un ancien conseiller du ministre des Finances et une personnalité politique proche du général Abdel Fattah al-Burhan et de son adjoint Yasser al-Atta. Plusieurs hommes d'affaires soudanais ont également été impliqués.

Selon les enquêteurs, les membres de la cellule ont conclu un marché d'équipement militaire portant sur des fusils Kalachnikov, des munitions, des mitrailleuses et des grenades d'une valeur de plusieurs millions de dollars.

Les armes ont été transférées de l'armée soudanaise à une société d'importation des Émirats arabes unis en utilisant la méthode de transfert des HAWALADARS.

La transaction a été facilitée par l'intermédiaire d'une société appartenant à un membre fugitif de la cellule travaillant pour les forces armées soudanaises, en coordination avec le colonel Othman al-Zubair, responsable des opérations financières au sein de l'armée soudanaise.

De faux contrats et de fausses factures commerciales ont été utilisés pour prétendre que les paiements concernaient un contrat d'importation de sucre.

L'enquête a conclu que ces transactions avaient été effectuées à la demande du comité d'armement des forces armées soudanaises, présidé par Al-Burhan et son adjoint Al-Atta, en toute connaissance de cause et avec leur approbation. Les membres de la cellule ont été directement chargés de négocier et de finaliser les transactions par Ahmed Rabie Ahmed al-Sayed, une personnalité politique proche du commandant en chef soudanais et responsable de la délivrance des certificats et des approbations des utilisateurs finaux.

Les enquêteurs ont confirmé que Salah Gosh jouait un rôle central dans la gestion du trafic illégal d'équipements militaires aux Émirats arabes unis, en coordination avec d'autres membres de la cellule.

Le groupe a réalisé une marge bénéficiaire de 2,6 millions de dollars (1 dollar = 0,88 euro) par rapport à la valeur réelle des deux transactions, qu'il s'est répartie entre lui et plusieurs complices. La part de Gosh a été retrouvée en possession du suspect Khalid Youssef Mukhtar Youssef, ancien officier de renseignement et ex-chef de cabinet de Gosh.

La cargaison saisie était arrivée à l'aéroport des Émirats arabes unis à bord d'un avion privé en provenance d'un pays étranger.

L'avion s'était posé pour faire le plein et avait officiellement déclaré qu'il transportait un lot de fournitures médicales.

Cependant, la cargaison militaire a été découverte sous la supervision du ministère public, sur la base de mandats judiciaires émis par le procureur général.

Les autorités ont également saisi des copies des contrats relatifs aux deux transactions, de faux documents d'expédition, ainsi que des enregistrements audio et des messages échangés entre les membres de la cellule.

L'enquête a permis de découvrir plusieurs sociétés appartenant à un homme d'affaires soudano-ukrainien, dont une opérant aux Émirats arabes unis.

Ces sociétés ont fourni à l'armée soudanaise des armes, des munitions, des grenades et des drones, en collaboration avec les membres de la cellule et le responsable financier de l'armée.

L'une des sociétés figure sur la liste des sanctions américaines.

Les enquêtes en cours ont révélé que les intérêts financiers et les profits du groupe sont étroitement liés à la poursuite du conflit interne au Soudan.

Le procureur général a souligné que cet incident représentait une grave atteinte à la sécurité nationale des Émirats arabes unis, en faisant de leur territoire une plateforme pour le trafic illégal d'armes à destination d'un pays en proie à des troubles civils, en plus de constituer des infractions pénales punissables par la loi.

Il a conclu en déclarant que le ministère public poursuivait ses procédures d'enquête en vue de déférer les suspects à une procédure judiciaire d'urgence.

Les résultats définitifs seront annoncés à la fin de l'enquête.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Retailleau engage la procédure de dissolution d'Urgence Palestine

Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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  • A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine.
  • Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

PARIS : A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine, ainsi que de Lyon Populaire, qui appartient à l'ultra droite, après avoir lancé mardi celle du groupe antifasciste La Jeune Garde.

Invité de CNews/Europe 1, le ministre de l'Intérieur a justifié la dissolution d'Urgence Palestine en affirmant qu'il fallait « taper sur les islamistes ». « L'islamisme est une idéologie qui essaie d'instrumentaliser une religion. Il y a une défiguration de la foi », a-t-il dit.

« Il ne faut pas défigurer la juste cause des Palestiniens », a poursuivi M. Retailleau, qui a insisté sur le fait que « beaucoup de nos compatriotes musulmans professent une foi parfaitement compatible avec les valeurs de la République ».

Créé au lendemain de l'attaque sans précédent du Hamas dans le sud d'Israël le 7 octobre 2023, qui a déclenché la guerre à Gaza, le collectif Urgence Palestine dit rassembler « des citoyens, des organisations et mouvements associatifs, syndicaux et politiques mobilisés pour l'auto-détermination du peuple palestinien ». 

Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

« À l'heure où le peuple palestinien est confronté au génocide, à la famine, où les Israéliens cherchent à détruire et à anéantir le peuple palestinien, que fait le gouvernement français ? Il veut dissoudre notre collectif, c'est insupportable », a réagi Omar Al Soumi, l'un des militants d'Urgence Palestine.

« C'est la réalité d'une France complice du génocide », a-t-il accusé dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux.

Urgence Palestine a reçu de nombreux messages de soutien de la part d'organisations de l'extrême gauche et de la gauche radicale. 

« Non à la dissolution d'Urgence Palestine », a écrit sur Instagram le Nouveau Parti Anticapitaliste, dénonçant « des prétextes pour faire taire les voix solidaires avec la Palestine ! ».

L'eurodéputée insoumise Rima Hassan a également critiqué les dissolutions engagées contre la Jeune Garde et Urgence Palestine.

« La dérive autoritaire et fasciste de Macron est aussi réelle, tangible et concrète », a-t-elle réagi sur X.

Tsedek!, qui se présente comme un « collectif juif décolonial », a aussi apporté son soutien à ces deux organisations.

« Le gouvernement qui appelle à la dissolution d’Urgence Palestine, c’est la République qui reprend ses droits et réaffirme que l’antisémitisme ne passera pas en France », s'est au contraire félicitée Sarah Aizenman, présidente du collectif « Nous vivrons », auprès de l'AFP. 

« Cette organisation ne défend pas les droits des Palestiniens, elle soutient une organisation terroriste », a accusé Mme Aizenman.

Les annonces de procédures de dissolution contre La Jeune Garde et Urgence Palestine interviennent à la veille des rassemblements du 1er-Mai et pourraient tendre le climat des manifestations, notamment à Paris, selon un haut responsable de la police.

Le ministre de l'Intérieur et le préfet de police de Paris, Laurent Nuñez, ont par avance prévenu qu'aucun débordement ne serait toléré.

Environ 15 000 personnes sont attendues jeudi pour la manifestation parisienne.