Libye: jadis fertile, une zone montagneuse en proie au dérèglement climatique

M'hamed Maakaf verse un bidon d'eau sur un figuier qu'il s'échine à maintenir en vie sur un plateau du Djebel Nefoussa, en Libye, où le dérèglement climatique pousse des villageois à abandonner leurs terres et élevages. (AFP).
M'hamed Maakaf verse un bidon d'eau sur un figuier qu'il s'échine à maintenir en vie sur un plateau du Djebel Nefoussa, en Libye, où le dérèglement climatique pousse des villageois à abandonner leurs terres et élevages. (AFP).
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Publié le Lundi 17 juin 2024

Libye: jadis fertile, une zone montagneuse en proie au dérèglement climatique

  • Les champs autour du village de Kabao étaient encore "verdoyants et prospères jusqu'au début du millénaire et les gens aimaient venir s'y promener"
  • Située à 200 kilomètres au sud-ouest de Tripoli, cette zone "très pluvieuse jusqu'à la décennie 1986-1996", était connue pour ses plantations d'oliviers, figuiers et amandiers

KABAO: M'hamed Maakaf verse un bidon d'eau sur un figuier qu'il s'échine à maintenir en vie sur un plateau du Djebel Nefoussa, en Libye, où le dérèglement climatique pousse des villageois à abandonner leurs terres et élevages.

Les champs autour du village de Kabao étaient encore "verdoyants et prospères jusqu'au début du millénaire et les gens aimaient venir s'y promener", explique à l'AFP cet agriculteur de 65 ans, en tunique et sarouel traditionnels blancs.

Située à 200 kilomètres au sud-ouest de Tripoli, cette zone "très pluvieuse jusqu'à la décennie 1986-1996", selon lui, était connue pour ses plantations d'oliviers, figuiers et amandiers.

Aujourd'hui, le spectacle est désolant: au milieu d'un désert rocailleux battu par le vent, les arbustes, souffrant du manque de pluies et de températures dépassant les normales saisonnières, peinent à produire des fruits ou sont complètement asséchés.

La Libye, dont plus de 90% de la superficie est désertique, est l'un des six pays les plus secs au monde, selon l'ONU, avec des précipitations annuelles tombées de 400 mm en 2019, à 200 mm sur le littoral et une demande en eau bien supérieure à la disponibilité.

Le Djebel Nefoussa, région montagneuse de l'ouest de la Libye, qui culmine à 968 mètres d'altitude abrite environ un demi-million de personnes sur une population de 7 millions.

Mélange de villages arabes et berbères, le massif et les plaines se vident progressivement de leurs agriculteurs, chassés par le stress hydrique qui s'est accentué ces dernières années.

« Exode »

"Il ne s'agit pas seulement d'une pénurie d'eau ou de cultures qui se meurent à cause de la sécheresse. Il y a une dimension démographique et humaine avec l'exode de centaines de familles vers la capitale et les villes côtières", déplore Mourad Makhlouf, maire de Kabao.

"La vie en montagne est désormais très exigeante et coûteuse", ajoute-t-il.

La plupart des éleveurs ont vendu leurs moutons ou chèvres pour éviter de les voir mourir.

"Comment peut-on supporter cette situation qui pousse les éleveurs à vendre leurs bêtes parce qu'elles leur coûtent (en eau et nourriture) le double de leur valeur?", explique Suleiman Mohamad, un fermier de Kabao, pour qui "vivre sans eau, c'est une mort certaine".

Sans pluie, les nappes phréatiques ne sont plus alimentées et la sécheresse détruit les oliveraies.

"Des milliers d'oliviers sont morts, certains hérités de nos aïeux et vieux de 200 ans", se désole M. Maakaf, devant un amas de troncs secs.

"Avec d'autres villageois, nous venons arroser nos parcelles deux à trois fois par semaine mais l'eau coûte cher", souligne le sexagénaire.

Un ballet incessant de camions-citernes, entre la station de pompage située dans la vallée et les villages des hauteurs, leur permet de tenir.

Grâce à des fonds publics, la municipalité vend de l'eau aux habitants à un prix subventionné de 25 dinars (environ 5 euros) par cargaison de 12.000 litres, c'est "l'une des solutions proposées avec les puits et les réservoirs", explique le maire.

Par contre, lorsque les convoyeurs sont des entrepreneurs privés, "le camion qui achemine l'eau sur 40 ou 50 km de distance, demande 150 à 160 dinars" (environ 30 euros) pour une cargaison, selon M'hamed Maakaf.

« Menaces émergentes »

Faute de pluies suffisantes, la manne précieuse provient de la Grande Rivière Artificielle, un projet pharaonique réalisé dans les années 80 sous le régime de Kadhafi, qui constitue aujourd'hui la principale source d'approvisionnement en eau en Libye.

Puisant l'eau fossile non renouvelable des nappes aquifères au coeur du désert dans le sud du pays, des tuyaux géants la transportent vers les villes et régions du nord, fournissant environ 60% des besoins du pays.

"Le manque d'eau est l'une des plus grandes menaces émergentes à laquelle fait face la Libye" qui doit "prendre des mesures pro-actives" contre la sécheresse, le risque de désertification et l'élévation du niveau de la mer, estime le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD).

Si le pays nord-africain a signé la Convention de l'ONU sur les changements climatiques en 2015 et ratifié l'Accord de Paris sur le climat en 2021, il n'a présenté ni stratégie de réduction des risques, ni plan d'adaptation au changement climatique.

"La sécheresse ne concerne pas uniquement le Djebel Nefoussa mais tout le pays. La Libye a besoin d'un plan de secours (...) qui ne sera pas la solution à tout mais permettra de s'adapter", estime le maire de Kabao.


Israël: le ministre de la Défense avertit qu'il n'y aura "pas de calme" au Liban sans sécurité pour son pays

Un an après le cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne maintient toujours cinq positions dans le sud du Liban, avec des fortifications et des voies d'accès élargies, selon des images satellites analysées par l'AFP. (AFP)
Un an après le cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne maintient toujours cinq positions dans le sud du Liban, avec des fortifications et des voies d'accès élargies, selon des images satellites analysées par l'AFP. (AFP)
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  • Israël avertit qu’aucun calme ne reviendra au Liban tant que sa propre sécurité ne sera pas garantie, intensifiant ses frappes malgré la trêve et affirmant vouloir désarmer le Hezbollah
  • L’Égypte tente de désamorcer les tensions, tandis que l’application du cessez-le-feu reste bloquée : l’armée libanaise dit vouloir démanteler les positions du Hezbollah, mais Israël et les États-Unis accusent Beyrouth de traîner

JERUSALEM: Le ministre de la Défense israélien a averti mercredi qu'il n'y aura "pas de calme" au Liban sans sécurité pour son pays, alors qu'Israël a intensifié ses opérations militaires au Liban ces dernières semaines, en dépit d'un accord de cessez-le-feu.

"Nous ne permettrons aucune menace contre les habitants du nord, et une pression maximale continuera à être exercée et même s'intensifiera", a déclaré Israël Katz lors d'une intervention devant le parlement israélien, avançant pour preuve "l'élimination" dimanche à Beyrouth du chef militaire du Hezbollah.

"Il n'y aura pas de calme à Beyrouth ni d'ordre et de stabilité au Liban tant que la sécurité de l'Etat d'Israël ne sera pas garantie", a ajouté M. Katz en affirmant que son pays allait désarmer le Hezbollah.

Le ministre égyptien des Affaires étrangères a déclaré mercredi que son pays oeuvrait à la désescalade des tensions entre Israël et le mouvement armé libanais soutenu par l'Iran.

"Nous craignons toute escalade et nous sommes inquiets pour la sécurité et la stabilité du Liban", a déclaré ce ministre, Badr Abdel Ati, après sa rencontre avec le président libanais Joseph Aoun à Beyrouth mercredi.

"Nous engageons des efforts considérables pour épargner au Liban tout risque, ou toute atteinte, concernant sa sécurité", a-t-il ajouté.

Israël a frappé le Liban à plusieurs reprises malgré la trêve, affirmant régulièrement cibler les membres et les infrastructures du Hezbollah pour empêcher le groupe de se réarmer, ce qu'il nie être en train de faire.

En vertu de l'accord de cessez-le-feu, l'armée libanaise doit démanteler la présence militaire du Hezbollah sur une bande d'une trentaine de kilomètres entre la frontière avec Israël et le fleuve Litani, plus au nord.

L'armée a soumis un plan au gouvernement, dans lequel elle s'engage à accomplir cette tâche titanesque, avant de procéder par étapes sur le reste du territoire libanais. Mais les Etats-Unis et Israël accusent les autorités libanaises de tarder, face à la ferme opposition du Hezbollah.

Ce dernier invoque notamment le maintien par Israël de cinq postes dans le sud du Liban, dont l'accord de cessez-le-feu stipule pourtant que l'armée israélienne doit se retirer.


Soudan: le chef de l'armée exhorte Trump à mettre fin à la guerre

Des filles soudanaises qui ont fui El-Fasher reçoivent une aide humanitaire au camp de déplacés d'Al-Afad, à Al-Dabba, dans le nord du Soudan, mardi. (AFP)
Des filles soudanaises qui ont fui El-Fasher reçoivent une aide humanitaire au camp de déplacés d'Al-Afad, à Al-Dabba, dans le nord du Soudan, mardi. (AFP)
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  • Abdel Fattah al-Burhane appelle Donald Trump à intervenir pour imposer la paix au Soudan
  • Alors que les violences s’intensifient, les initiatives internationales peinent à avancer

PORT-SOUDAN : Le chef de l’armée soudanaise, Abdel Fattah al-Burhane, en guerre depuis avril 2023 contre un groupe paramilitaire rival, a appelé mercredi le président américain Donald Trump à instaurer la paix.

« Le peuple soudanais se tourne désormais vers Washington pour la prochaine étape : s’appuyer sur l’honnêteté du président américain et travailler avec nous — ainsi qu’avec ceux dans la région qui recherchent sincèrement la paix — pour mettre fin à cette guerre », écrit le dirigeant de facto du Soudan dans une tribune publiée dans The Wall Street Journal.

Les tentatives de paix entre Burhane et son ancien adjoint, le chef des Forces de soutien rapide (FSR), Mohamed Hamdan Dagalo, ont échoué à maintes reprises au fil d’un conflit ayant fait des dizaines de milliers de morts, déplacé 12 millions de personnes et provoqué les pires crises de faim et de déplacement au monde.

Trump s’est intéressé pour la première fois à cette guerre la semaine dernière, promettant d’y mettre fin après avoir été exhorté à s’impliquer par le prince héritier saoudien, Mohammed ben Salmane.

« Le consensus parmi les Soudanais est que M. Trump est un dirigeant qui parle directement et agit avec détermination. Beaucoup estiment qu’il a la capacité de s’opposer aux acteurs étrangers qui prolongent notre souffrance », écrit Burhane.

Les États-Unis et les Émirats arabes unis, aux côtés de l’Arabie saoudite et de l’Égypte, tentent actuellement de négocier une trêve.

Dans son texte de 1 200 mots publié mercredi, Burhane affirme qu’il s’agit de choisir « entre un État souverain qui tente de protéger ses citoyens et une milice génocidaire déterminée à détruire des communautés ».

Le gouvernement de Burhan est reconnu au niveau international, et en janvier, les États-Unis ont déterminé que la RSF avait commis un génocide dans la région occidentale du Darfour.

Mais ses propres forces ont également été accusées d’exactions depuis le début de la guerre, notamment d’avoir visé des civils et bombardé sans discrimination des zones résidentielles.

Le militaire de carrière, qui avait collaboré avec Dagalo en 2021 pour écarter les civils d’un gouvernement de transition, écrit mercredi : « J’ai longtemps reconnu que les FSR étaient une poudrière. »

Le chef des FSR, Dagalo, dont les combattants avaient été initialement recrutés par Khartoum pour mener ses guerres dans les périphéries du Soudan, était devenu le bras droit de Burhane après le soulèvement de 2018-2019.

Un long conflit de pouvoir, resté latent, a finalement explosé en guerre ouverte le 15 avril 2023.


Tunisie: l'ambassadeur UE convoqué par le président Saied pour «non respect des règles du travail diplomatique» 

Le président tunisien Kais Saied a convoqué mardi Giuseppe Perrone, ambassadeur de l'Union européenne, pour "lui exprimer une protestation ferme concernant le non-respect des règles diplomatiques", selon un bref communiqué officiel diffusé mercredi à l'aube qui ne précise pas les faits reprochés. (AFP)
Le président tunisien Kais Saied a convoqué mardi Giuseppe Perrone, ambassadeur de l'Union européenne, pour "lui exprimer une protestation ferme concernant le non-respect des règles diplomatiques", selon un bref communiqué officiel diffusé mercredi à l'aube qui ne précise pas les faits reprochés. (AFP)
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  • Le président Saied a exprimé à son interlocuteur son rejet du "recours à des pratiques en dehors des cadres officiels reconnus par les usages diplomatiques"
  • L'UGTT, ancienne co-lauréate du Prix Nobel de la Paix en 2015 pour sa contribution à la phase de démocratisation de la Tunisie, après la révolution de 2011 et la chute du président Zine El Abidine Ben Ali, revendique plus de 700.000 adhérents

TUNISIE: Le président tunisien Kais Saied a convoqué mardi Giuseppe Perrone, ambassadeur de l'Union européenne, pour "lui exprimer une protestation ferme concernant le non-respect des règles diplomatiques", selon un bref communiqué officiel diffusé mercredi à l'aube qui ne précise pas les faits reprochés.

Le président Saied a également exprimé à son interlocuteur son rejet du "recours à des pratiques en dehors des cadres officiels reconnus par les usages diplomatiques".

Lundi, M. Perrone avait reçu Noureddine Taboubi, chef du principal syndicat tunisien UGTT -- qui a récemment menacé de déclencher une grève générale pour obtenir des hausses salariales -- et avait salué "le rôle important" de l'organisation "en faveur du dialogue social et du développement économique" en Tunisie, selon un communiqué de la délégation européenne à Tunis.

L'UGTT, ancienne co-lauréate du Prix Nobel de la Paix en 2015 pour sa contribution à la phase de démocratisation de la Tunisie, après la révolution de 2011 et la chute du président Zine El Abidine Ben Ali, revendique plus de 700.000 adhérents.

Le diplomate européen avait "réaffirmé sa volonté de poursuivre le dialogue avec l'UGTT et de continuer à soutenir la Tunisie sur les plans social et économique, dans divers secteurs", selon la même source. De son côté, le secrétaire général de l'UGTT avait appelé à renforcer et développer la coopération entre la Tunisie et l'Union européenne.

La semaine passée, M. Taboubi a présidé une réunion de l'UGTT où il a apporté son soutien à différents mouvements de grève en cours dans le secteur privé pour réclamer des augmentations de salaires. Il a salué le succès d'une grève générale ayant eu lieu dans la grande ville de Sfax (centre-est) et menacé d'organiser prochainement une grande grève au niveau national.

"L'organisation se dirige vers une grève générale pour défendre les acquis matériels et sociaux des travailleurs face aux difficultés quotidiennes".

M. Taboubi a dénoncé "une baisse du pouvoir d'achat" des Tunisiens face à "des conditions de vie précaires sur le plan des transports, de la santé et de la maladie", défendant "leur droit syndical à se défendre" afin d'obtenir "un salaire décent qui leur fait défaut actuellement".

Le salaire minimum en Tunisie est d'environ 520 dinars (150 euros) pour 48 heures par semaine. Le taux d'inflation reste très élevé notamment pour les produits alimentaires. Il est récemment revenu à environ 5% après avoir atteint un pic de 10% en 2023.