« Les gens crient à l'aide », déclare un médecin libanais en larmes

Les professionnels de santé réunis dans une salle d'infirmières de l'unité de soins intensifs de l'hôpital universitaire Rafic Hariri de la capitale libanaise Beyrouth (Photo, AFP).
Les professionnels de santé réunis dans une salle d'infirmières de l'unité de soins intensifs de l'hôpital universitaire Rafic Hariri de la capitale libanaise Beyrouth (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Lundi 11 janvier 2021

« Les gens crient à l'aide », déclare un médecin libanais en larmes

  • L'appel ému du chef médical au moment où les cas de la Covid-19 submergent les hôpitaux
  • L'augmentation des cas dépasse les prévisions les plus pessimistes, avec plus de 5400 nouvelles infections signalées jeudi et vendredi

BEYROUTH: Un haut responsable de la santé libanaise a fondu en larmes en décrivant comment des patients atteints du coronavirus l'avaient supplié pour avoir un lit d'hôpital vacant pour ne pas mourir chez eux devant leurs familles.

Le Dr Joseph Al-Helou, directeur de l‘autorité des soins médicaux du Ministère de la santé publique, affirme que les hôpitaux libanais sont en passe d’être débordés mais qu’ils continuent de recevoir des centaines d’appels de personnes gravement malades demandant à être admis.

« Les hôpitaux subissent une forte pression car il ne reste que quelques lits vacants », a révélé Al-Helou dans une vidéo largement partagée sur les médias sociaux.

Son appel intervient alors que l'augmentation des cas du coronavirus dépasse les prévisions les plus pessimistes, avec plus de 5400 nouvelles infections signalées jeudi et vendredi, et des avertissements selon lesquels le nombre de cas pourrait atteindre les 9000 dès dimanche.

Révélant la souffrance du personnel médical incapable d'offrir des lits aux patients, Al-Helou en larmes souligne que « Nous recevons des centaines d'appels de personnes qui souhaitent être admises, ne serait-ce qu'aux urgences. Si nous leur disons qu'ils doivent attendre un lit vacant pendant 5, 10 ou même 24 heures, ils acceptent volontiers. Aujourd'hui, 41 personnes attendent dans les services d'urgence.

« Nous travaillons jusqu'à minuit passé afin d’assurer le transport des patients. Malgré la situation catastrophique, certaines personnes ont quand même décidé de célébrer le réveillon du Nouvel An dans les restaurants, cela est, d’après moi, un crime grave! Pire encore, c'est de la haute trahison! ».

Al-Helou raconte comment une infirmière est venue vers lui en larmes, lui disant qu'un prêtre était mort devant elle.

« De ma vie, je n'ai jamais pleuré, mais cela est vraiment insupportable », signale-il. « Un homme m’a supplié, une femme m’a imploré de la laisser mourir dans la rue et non devant ses enfants. Comment est-ce possible ? Le personnel médical est absolument épuisé. Certaines personnes meurent dans leurs maisons et d'autres manquent d'oxygène à leurs foyers ».

Aida Al-Noori, infirmière en chef à l'hôpital de la société caritative islamique Al-Makassed à Beyrouth, déclare à Arab News que « la situation dans les services d’urgence ressemble à une scène d'horreur. Les médecins prescrivent aux patients des traitements à domicile et nous montrons à ceux qui ont besoin d'oxygène comment l'utiliser à domicile. Les patients dans un état critique restent à l’hôpital ».

Elle ajoute également que « dans le service du coronavirus, nous avons 21 lits de soins intensifs et nous libéront un autre étage afin de consacrer 16 lits supplémentaires aux patients atteints du coronavirus ».

Le Dr Andre Kozaily, directeur de l'hôpital public de Bouar à Keserwan, au Mont Liban, explique que le personnel médical traite certains patients atteints du coronavirus dans des voitures car l'établissement a atteint sa capacité maximale.

Selon les données quotidiennes de la Covid-19 du ministère de la Santé, les cas d’infections ont atteint leur pic à Achrafieh (Beyrouth), Haret Hreik (dans la banlieue sud de Beyrouth), Dekwaneh (Metn), Aley et Zouk Mosbeh (Keserwan), Jbeil, Saïda, Zgharta, Riyaq (Bekaa), Hermel (Baalbek) et Abbasiyeh (au sud).

Le Dr Sharaf Abu Sharaf, chef de l'Ordre libanais des médecins, critique de son côté le ministère de la santé, affirmant qu'il n'a pas réussi à équiper de manière adaptée les hôpitaux publics au cours de l'année passée.

« Les médecins et le personnel médical du secteur privé s'acquittent pleinement de leur devoir. Les hôpitaux privés ne peuvent être blâmés. J'étais à l'hôpital public de Zahlé aujourd'hui où seulement six des 120 lits sont occupés. Pourquoi les gens n’ont-ils pas été invités à y aller ? Où est l'argent qui a été versé au ministère dans le but d’équiper les hôpitaux ? Rien de cela n’a été fait ».

Le Liban compte 30 hôpitaux publics et 130 hôpitaux privés.

Abu Sharaf souligne aussi la pénurie de médecins disponibles pour traiter le nombre croissant de patients.

Hamad Hassan, le ministre intérimaire de la Santé, demande quant à lui aux gens de « rester chez eux, sauf en cas de nécessité absolue, pendant le confinement ».

Le Liban n'a toujours pas reçu de vaccin alors que le pays est dans l'attente d'une loi protégeant les personnes vaccinées qui pourraient souffrir de complications.

Lamia Yammine, la ministre du Travail par intérim, a révélé samedi qu'elle a été infectée par le virus, tandis que la ministre de l'Information Manal Abdel-Samad a exhorté les entreprises médiatiques à « intensifier les campagnes de sensibilisation en vue de réduire le nombre d'infections ».

Petra Khoury, conseillère du Premier ministre par intérim en matière de santé, avertit qu'avec le pic des cas au Liban, chaque personne a obligatoirement le devoir moral d'éviter d'infecter une autre personne.

« Portez des masques », implore-t-elle.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Centre de coordination militaro-civile pour Gaza: beaucoup de discussions, peu de résultats

Short Url
  • "Il y a des moments où on se dit qu'on a touché le fond mais qu'on creuse encore" ironise un humanitaire qui s'y est rendu plusieurs fois pour parler des abris fournis aux centaines de milliers de Palestiniens de Gaza déplacés
  • "Au départ, personne ne savait ce que c'était, mais tout le monde voulait en être", raconte un diplomate européen à l'AFP, "maintenant les gens déchantent un peu, ils trouvent que rien n'avance, mais on n'a pas le choix"

JERUSALEM: Lancé par les Etats-Unis dans le sillage du cessez-le-feu entre Israël et le Hamas pour surveiller la trêve et favoriser l'afflux d'aide humanitaire, le Centre de coordination militaro-civile (CMCC) pour Gaza peine à tenir ses promesses.

"Au départ, personne ne savait ce que c'était, mais tout le monde voulait en être", raconte un diplomate européen à l'AFP, "maintenant les gens déchantent un peu, ils trouvent que rien n'avance, mais on n'a pas le choix, il n'y a aucune autre initiative, c'est ça ou continuer à discuter dans le vent avec des Israéliens".

"Il y a des moments où on se dit qu'on a touché le fond mais qu'on creuse encore", ironise un humanitaire qui s'y est rendu plusieurs fois pour parler des abris fournis aux centaines de milliers de Palestiniens de Gaza déplacés par la campagne militaire israélienne.

Le CMCC doit permettre d'amorcer la suite des étapes du plan de paix pour Gaza après plus de deux ans d'une guerre dévastatrice déclenchée le 7 octobre 2023 par l'attaque sans précédent du mouvement palestinien Hamas sur Israël.

"Lorsque nous l'avons ouvert, nous avons clairement indiqué qu'il se concentrait sur deux choses: faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire, logistique et sécuritaire vers Gaza et aider à surveiller en temps réel la mise en oeuvre de l'accord", insiste le capitaine Tim Hawkins, porte-parole du Commandement militaire central américain (Centcom), couvrant notamment le Moyen-Orient.

L'initiative a été présentée aux acteurs (ONG, agences des Nations unies, diplomates...) comme un générateur d'idées totalement inédites.

Frustrés par leurs difficultés avec les autorités israéliennes, de nombreux pays et acteurs humanitaires disent s'être jetés dans le projet, impatients d'avoir un nouvel interlocuteur se disant enclin à trouver des solutions: les Etats-Unis.

"Rien n'a changé" 

"Au début, les Américains nous ont dit qu'ils découvraient qu'Israël interdisaient l'entrée de tout un tas de choses dans Gaza, la fameuse liste des biens à double usage, ils avaient l'air choqués et on se disait qu'enfin on allait franchir cet obstacle", raconte un ingénieur humanitaire, "mais force est de constater que strictement rien n'a changé".

Deux mois après l'ouverture, nombre d'humanitaires et diplomates contactés par l'AFP jugent, sous couvert de l'anonymat, que la capacité ou la volonté américaines à contraindre Israël est limitée.

Les visiteurs réguliers ou occasionnels des lieux ont décrit à l'AFP le grand hangar occupé par le CMCC à Kiryat Gat (sud d'Israël), comme un entrepôt où de nombreux militaires, israéliens et américains principalement, rencontrent des humanitaires, diplomates, et consultants.

Le premier des trois étages du bâtiment est réservé aux Israéliens, et le dernier aux troupes américaines. Tous deux sont interdits d'accès aux visiteurs.

Le deuxième, recouvert de gazon artificiel, sert d'espace de rencontres avec le monde extérieur.

"On dirait un espace de coworking, mais avec des gens en uniforme", s'amuse une diplomate qui raconte y croiser des "GIs qui boivent de la bière" au milieu d'une sorte d'open-space, avec des panneaux récapitulant les principaux points du plan Trump.

Plusieurs personnes ont dit à l'AFP avoir vu un tableau blanc barré de l'inscription "What is Hamas?" ("Qu'est-ce que le Hamas?") en lettres capitales, sans éléments de réponse.

"Il y a des tables rondes sur des sujets qui vont de la distribution d'eau ou de nourriture à la sécurité", raconte un humanitaire, "en gros on nous écoute décrire ce qu'on veut faire, et quels problèmes on a rencontrés depuis deux ans".

"Boussole du droit" 

Mais "ce n'est pas là que les décisions sont prises", tranche un diplomate qui cite des canaux de discussions parallèles, notamment une équipe supervisée par Arieh Lighstone, un collaborateur de l'émissaire américain Steve Witkoff, à Tel-Aviv.

Plusieurs diplomates regrettent l'absence d'officiels palestiniens dans les murs.

Un autre problème réside dans l'émergence de concepts largement rejetés par la communauté internationale, notamment celui des "Alternative Safe Communities" (ASC), visant à regrouper des civils "vérifiés", non affiliés au Hamas, dans des communautés créées ex nihilo dans une zone de la bande de Gaza sous contrôle militaire israélien, et où les services de base seraient dispensés.

"On a perdu la boussole du droit", commente une diplomate.

Mais le reproche qui revient le plus souvent est le fait que les questions politiques (gouvernance, maintien de l'ordre...) sont évacuées au profit de questions techniques.

"Ils discutent d'où mettre les stations d'épuration, pas de qui les exploitera ni de qui paiera les employés", résume un autre.

Concédant "certaines frictions", sans plus de détail, le capitaine Hawkins, du Centcom, met en avant certaines avancées comme l'ouverture de nouveaux points de passage pour l'aide à destination de Gaza. "Nous progressons, assure-t-il, tout en reconnaissant pleinement qu'il reste encore beaucoup à faire."


Le Congrès américain approuve la levée définitive des sanctions contre la Syrie

La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars. (AFP)
La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars. (AFP)
Short Url
  • Le gouvernement américain a indiqué être favorable à l'abrogation de cette loi Caesar
  • Son application avait déjà été suspendue par deux fois pour six mois après l'annonce du président Trump en mai levant les sanctions contre la Syrie dans le cadre de la normalisation des relations entre ce pays et les Etats-Unis

WASIHNGTON: Le Congrès américain a approuvé mercredi la levée définitive des sanctions imposées par les Etats-Unis contre la Syrie du temps de Bachar al-Assad, devant permettre le retour d'investissements dans ce pays ravagé par des années de guerre civile.

L'abrogation d'une loi dite "Caesar", adoptée en 2019 lors du premier mandat de Donald Trump et qui imposait ces sanctions, figure en effet dans le texte sur la stratégie de défense (NDAA), que le Sénat américain a approuvé mercredi par 77 voix pour et 20 contre.

La Chambre des représentants s'était déjà prononcée la semaine dernière et le texte attend désormais d'être promulgué par le président américain.

Le gouvernement américain a indiqué être favorable à l'abrogation de cette loi Caesar. Son application avait déjà été suspendue par deux fois pour six mois après l'annonce du président Trump en mai levant les sanctions contre la Syrie dans le cadre de la normalisation des relations entre ce pays et les Etats-Unis.

Le chef de la diplomatie syrienne, Assaad al-Chaibani, a salué sur Telegram le vote du Sénat comme "ouvrant de nouveaux horizons pour la coopération et le partenariat entre notre pays et le reste du monde".

La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars.

Bien que son application soit suspendue, de nombreux responsables américains jugeaient qu'elle pouvait nuire à la confiance des investisseurs tant qu'elle n'était pas abrogée.

Le dirigeant syrien Ahmad al-Chareh a été reçu le 10 novembre à la Maison Blanche par le président Trump, une première pour un chef d'Etat syrien depuis l'indépendance du pays en 1946 et une consécration pour l'ancien jihadiste qui, en moins d'un an au pouvoir, a sorti son pays de l'isolement.

Donald Trump l'avait déjà rencontré lors d'un voyage dans le Golfe en mai, annonçant alors la levée des sanctions américaines.

Après 13 ans de guerre civile, la Syrie cherche à garantir des fonds pour sa reconstruction, dont le coût pourrait dépasser 216 milliards de dollars, selon la Banque mondiale.

"L'abrogation aujourd'hui de la loi Caesar est une étape décisive pour donner au peuple syrien une véritable chance de se reconstruire après des décennies de souffrances inimaginables", s'est félicité la sénatrice démocrate Jeanne Shaheen.


Les principales villes du Soudan privées de courant après des frappes de drones sur une centrale

Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts. (AFP)
Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts. (AFP)
Short Url
  • Les frappes ont ciblé les transformateurs de la station électrique d’Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, a précisé la compagnie d'électricité nationale
  • Deux secouristes ont été tués par une deuxième frappe de drone survenue alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, a déclaré un responsable de la centrale en attribuant cette frappe aux paramilitaires des FSR

PORT-SOUDAN: Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts, ont indiqué plusieurs témoins à l'AFP.

Les frappes ont ciblé les transformateurs de la station électrique d’Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, a précisé la compagnie d'électricité nationale.

Deux secouristes ont été tués par une deuxième frappe de drone survenue alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, a déclaré un responsable de la centrale en attribuant cette frappe aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).

Le gouvernement de l’État du Nil a confirmé la mort des deux secouristes dans un communiqué officiel.

Cette station est un nœud stratégique du réseau électrique soudanais, recevant l’électricité produite par le barrage de Merowe — la plus grande source d'énergie hydroélectrique du pays — avant sa redistribution vers plusieurs régions.

Des témoins ont également indiqué qu’aux alentours de 02H00 (minuit GMT), les forces de l’armée régulière avaient activé leurs systèmes de défense antiaérienne, rapportant avoir vu des flammes et de la fumée s'élever au-dessus de la ville contrôlée par l'armée en guerre depuis avril 2023 contre les FSR.

Les coupures d’électricité se sont étendues à plusieurs États, notamment ceux du Nil, de la mer Rouge — où se trouve Port-Soudan, siège provisoire du gouvernement pro-armée — ainsi qu’à la capitale Khartoum, selon des témoins, l'incendie n'étant toujours pas maitrisé.

Les FSR n’ont jusqu'à présent pas commenté l'attaque.

Ces derniers mois, les FSR ont été accusées de lancer des attaques de drones sur de vastes zones contrôlées par l’armée, visant des infrastructures civiles et provoquant des coupures de courant affectant des millions de personnes.

La guerre, qui a éclaté en avril 2023, a fait plusieurs dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué "la pire crise humanitaire au monde", selon l'ONU.