Le GSIM, lié à Al-Qaïda, épouvantail du Sahel

La clé résiderait-elle dans une volonté de viser militairement les têtes du groupe, tout en essayant de le diviser entre combattants soucieux de répondre aux revendications locales et chefs idéologiquement liés à Al-Qaïda ?  (Photo, AFP)
La clé résiderait-elle dans une volonté de viser militairement les têtes du groupe, tout en essayant de le diviser entre combattants soucieux de répondre aux revendications locales et chefs idéologiquement liés à Al-Qaïda ?  (Photo, AFP)
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Publié le Dimanche 10 janvier 2021

Le GSIM, lié à Al-Qaïda, épouvantail du Sahel

  • Le groupe «a gagné en influence et en maîtrise territoriale ces derniers mois. Il est beaucoup plus combattant, plus structuré»
  • Le groupe, dont le nombre de combattants est estimé autour du millier voire au delà, soit bien plus que l'EIGS, est par ailleurs extrêmement résilient

PARIS: Il sait conquérir le soutien des populations, est efficace au combat et la paix au Mali ne se fera pas sans son accord, ou son éradication. Le GSIM, groupe jihadiste affilié à Al-Qaïda, est un acteur incontournable du conflit au Sahel. 

En janvier 2020, le sommet de Pau (sud de la France) réunissant Paris et le G5 Sahel (Mauritanie, Mali, Niger, Tchad, Burkina Faso) désignait l'Etat islamique au grand Sahara (EIGS) comme l'ennemi numéro un. Un an plus tard, notamment sous l'effet du harcèlement des armées françaises et locales, les attaques revendiquées par l'EIGS se sont réduites.  

Et le danger le plus prégnant vient de son ennemi fratricide, le Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (GSIM, Jnim en arabe), qui a récemment revendiqué deux attaques ayant coûté la vie à cinq soldats de la force française Barkhane, en moins d'une semaine. 

Le groupe « a gagné en influence et en maîtrise territoriale ces derniers mois. Il est beaucoup plus combattant, plus structuré », affirme un haut gradé français sous couvert de l'anonymat.  

« C'est à ce jour l'ennemi le plus dangereux pour la Force Barkhane, pour les forces internationales et pour le Mali », convenait en novembre devant l'Assemblée nationale le général Marc Conruyt, commandant de la force Barkhane. 

Né en 2017 de l'aggrégation de plusieurs groupes jihadistes sous l'autorité de Iyad Ag Ghali, un charismatique chef touareg omniprésent au Mali depuis le début des années 90, le GSIM a prêté allégeance à Al-Qaïda. Jusqu'à en devenir une des filiales les plus actives. 

« Structurée, organisée » 

« Sur la base de ce qu'il a accompli, en continuant de s'étendre et d'exister malgré les agressives opérations de contre-terrorisme, Ag Ghaly fait partie des chefs d'Al-Qaïda les plus respectés » dans le monde, assure Rida Lyammouri, chercheur à l'institut néerlandais Clingendael.   

Un respect qui lui a même permis de facto de placer le GSIM au dessus d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).  

Car lorsque la France a revendiqué en juin dernier l'exécution du chef d'Aqmi, Abdelmalek Droukdal, figure emblématique du jihad algérien depuis 20 ans, l'évènement « a confirmé l'ascendance définitive du GSIM sur Al-Qaïda dans la région. C'est l'épilogue d'un processus qui avait commencé il y a plusieurs années », explique Djallil Lounnas, chercheur à l'université marocaine d'Al Akhawayn. 

Aujourd'hui, « c'est une organisation extrêmement puissante, structurée, organisée. Il n'y pas une région du Sahel qui soit épargnée » par son emprise, ajoute-t-il. Ses leaders sont en grande majorité sahéliens, et non plus arabes, forts de réseaux d'informateurs fiables et de cellules aussi loyales qu'entraînées. 

Dans une étude qui lui est consacrée, l'Africa center for strategic studies évoque, citant des experts, des revenus annuels évalués à « entre 18 et 25 millions de dollars, principalement via l'extortion sur les routes qu'ils contrôlent » et  « dans une moindre mesure les kidnappings pour des rançons ». 

Le groupe, dont le nombre de combattants est estimé autour du millier voire au delà, soit bien plus que l'EIGS, est par ailleurs extrêmement résilient. Il a perdu en novembre son « chef militaire », Bah Ag Moussa, abattu par la France. Un vrai coup dur, mais qui a permis de constater que le groupe savait anticiper le remplacement de ses cadres.  

« Coup de maître » 

Deux mois plus tôt, le GSIM avait fait libérer quelque 200 prisonniers contre deux otages italiens, le principal opposant malien Soumaïla Cissé (décédé depuis du Covid-19) et la Française Sophie Pétronin. 

Une opération à laquelle Paris affirme n'avoir pas été associée et qui a fait grincer certains soldats français, furieux de voir élargis des combattants arrêtés par leurs soins quelques mois plus tôt. 

Un « coup de maître » signé Ag Ghaly, assure Djallil Lounnas. Avec en filigrane une loyauté des combattants renforcée et le message que si d'autres sont arrêtés, « le groupe fera tout pour les libérer », confirme Rida Lyammouri.   

La capacité d'action du groupe semble donc aussi solide que pérenne. Depuis des mois, des combats violents l'ont opposé à l'EIGS dont il est sorti vainqueur, selon les experts et militaires consultés par l'AFP. 

Les deux opérations meurtrières récemment menées contre Barkhane avec des « engins explosifs improvisés » interviennent alors que Paris songe à réduire ses effectifs (plus de 5 000). Elle compte notamment sur la montée en puissance des armées locales et des partenaires européens, priés de partager le fardeau de la lutte anti-terroriste au sud de l'espace communautaire. 

Et si Paris admet ne plus s'opposer à des négociations entre les États sahéliens et certains éléments jihadistes aux agendas purement locaux, elle en exclut évidemment les cadres supérieurs, dont Ag Ghaly.  

La clé résiderait-elle dans une volonté de viser militairement les têtes du groupe, tout en essayant de le diviser entre combattants soucieux de répondre aux revendications locales et chefs idéologiquement liés à Al-Qaïda ?  

« Le groupe est très uni », assure Rida Lyammouri. « Ce serait quasiment mission impossible » d'espérer une division en son sein.   


Rubio promet un soutien "indéfectible" à Israël, avant une visite à Doha

Le secrétaire d'État américain Marco Rubio et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu visitent le Mur occidental, le lieu de prière le plus sacré du judaïsme, dans la vieille ville de Jérusalem. (AP)
Le secrétaire d'État américain Marco Rubio et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu visitent le Mur occidental, le lieu de prière le plus sacré du judaïsme, dans la vieille ville de Jérusalem. (AP)
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  • En visite à Jérusalem, le secrétaire d’État Marco Rubio a réaffirmé le soutien « indéfectible » des États-Unis à Israël dans sa guerre contre le Hamas à Gaza
  • Alors que les offensives israéliennes se poursuivent, causant de lourdes pertes civiles à Gaza, les critiques internationales s’intensifient

Jérusalem: Le secrétaire d'Etat Marco Rubio a promis lundi à Jérusalem le "soutien indéfectible" des Etats-Unis à Israël pour éliminer le mouvement islamiste palestinien Hamas à Gaza, à la veille d'un déplacement à Doha.

Durant la visite de M. Rubio, l'armée israélienne a poursuivi son offensive dans la bande de Gaza assiégée et affamée, la Défense civile locale faisant état d'au moins 49 morts, dont des enfants.

Lancée en riposte à une attaque sans précédent du Hamas en Israël le 7 octobre 2023, cette offensive a fait des dizaines de milliers de morts et détruit une grande partie du territoire palestinien, où le mouvement islamiste a pris le pouvoir en 2007.

Le déplacement de M. Rubio a coïncidé avec un sommet arabo-islamique à Doha, quelques jours après une attaque israélienne inédite le 9 septembre au Qatar contre des chefs du Hamas.

"Les habitants de Gaza méritent un avenir meilleur, mais cet avenir meilleur ne pourra commencer que lorsque le Hamas sera éliminé", a déclaré M. Rubio après une rencontre à Jérusalem avec le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu.

"Vous pouvez compter sur notre soutien indéfectible et notre engagement à voir cela se concrétiser", a-t-il ajouté.

M. Rubio se rend mardi au Qatar, en route pour Londres, afin de "réaffirmer le soutien total des Etats-Unis à la sécurité et la souveraineté du Qatar après l'attaque israélienne", selon le département d'Etat.

La frappe aérienne au Qatar, un médiateur entre Israël et le Hamas, a contrarié le président Donald Trump.

"Le Qatar a été un très grand allié. Israël et tous les autres, nous devons faire attention. Quand nous attaquons des gens, nous devons être prudents", a-t-il dit dimanche.

Malgré cette critique, M. Netanyahu a estimé que M. Trump était "le plus grand ami" qu'Israël ait jamais eu à la Maison Blanche.

- "Animaux barbares" -

Au sommet de Doha, l'émir du Qatar, cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani, s'en est prix à Israël, l'accusant de "vouloir faire échouer les négociations" en vue d'un cessez-le-feu à Gaza et d'une libération des otages enlevés durant l'attaque du 7-Octobre.

Un communiqué final du sommet a appelé "tous les Etats à revoir les relations diplomatiques et économiques avec Israël", alors que les six monarchies du Golfe ont appelé les Etats-Unis à "user de leur influence" pour contenir Israël.

A Jérusalem, M. Rubio s'est montré pessimiste quant à la possibilité d'une solution "diplomatique" à Gaza, qualifiant le Hamas d'"animaux barbares".

"Même si nous souhaitons vivement qu'il existe un moyen pacifique et diplomatique pour mettre fin (à la guerre) -et nous continuerons à explorer cette voie-, nous devons également nous préparer à la possibilité que cela ne se produise pas", a-t-il dit.

M. Rubio a aussi affiché la solidarité des Etats-Unis avec Israël avant un sommet coprésidé par la France et l'Arabie saoudite le 22 septembre à l'ONU, destiné à promouvoir la reconnaissance d'un Etat de Palestine, au côté d'Israël.

Une initiative largement symbolique dans la mesure où Israël s'oppose fermement à la création d'un tel Etat auquel aspirent les Palestiniens.

Les Etats-Unis sont également hostiles à cette démarche, qui selon M. Rubio, a "enhardi" le Hamas.

En soirée, le secrétaire d'Etat a rencontré à Jérusalem des familles d'otages, selon un responsable du département d'Etat. Sur les 251 personnes enlevées durant l'attaque du 7-Octobre, 47 sont encore retenues à Gaza, dont 25 décédées selon l'armée israélienne.

- "Un corps sans âme" -

Dans le territoire palestinien, la Défense civile a indiqué que plus de la moitié des 49 Palestiniens tués l'avaient été à Gaza-ville, où l'armée a intensifié ses attaques avec l'objectif de s'en emparer.

Compte-tenu des restrictions imposées aux médias à Gaza et des difficultés d'accès sur le terrain, l'AFP n'est pas en mesure de vérifier de manière indépendante les informations des différentes parties.

L'armée israélienne, qui présente Gaza-ville comme l'un des derniers bastions du Hamas dans le territoire palestinien, y a détruit plusieurs tours d'habitation en accusant le Hamas de s'y cacher.

Les Palestiniens continuent de fuir, en grand nombre, la ville et ses environs, qui comptaient un million d'habitants selon l'ONU.

"Je me sens comme un corps sans âme", dit Susan Annan, une Palestinienne qui habitait dans l'une de tours détruites. "Nous avons quitté notre maison avec seulement nos vêtements. Nous n'avons rien pu emporter."

L'attaque du 7-Octobre a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.

Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts à Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire. L'ONU y a déclaré la famine, ce que Israël dément.


La flottille pour Gaza quitte la Tunisie, direction le territoire palestinien

Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
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  • Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place
  • Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser"

BIZERTE: Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire.

"Nous essayons d'envoyer un message à la population de Gaza, (de lui dire) que le monde ne l'a pas oubliée", a dit à l'AFP la militante écologiste suédoise Greta Thunberg avant d'embarquer dans le port de Bizerte, dans le nord de la Tunisie.

"Lorsque nos gouvernements ne prennent pas leurs responsabilités, nous n'avons pas d'autre choix que de prendre les choses en main", a-t-elle ajouté.

Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place.

Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser", "nous partons par solidarité, dignité et pour la justice".

Les embarcations arrivées d'Espagne s'étaient transférées à Bizerte après un séjour mouvementé à Sidi Bou Saïd, près de Tunis.

La "Global Sumud Flotilla", accueillie par des rassemblements de soutien, a indiqué que deux de ses bateaux avaient été visés par des attaques de drones deux nuits de suite la semaine passée, publiant des vidéos à l'appui. Après la deuxième annonce, les autorités tunisiennes ont dénoncé "une agression préméditée" et dit mener une enquête.

L'eurodéputée franco-palestinienne Rima Hassan qui, comme Greta Thunberg, avait été détenue à bord du "Madleen" lors d'une précédente traversée vers Gaza, a dit à l'AFP redouter "bien entendu" de nouvelles attaques, ajoutant: "on se prépare aux différents scénarios".

Selon elle, les personnalités les plus en vue - dont l'actrice française Adèle Haenel - ont été réparties entre les deux plus gros bateaux de coordination "de manière à équilibrer et (ne) pas concentrer toutes les personnalités visibles dans un seul et même bateau".

Le départ de Tunisie a été repoussé à plusieurs reprises en raison de motifs de sécurité, de retard dans les préparatifs pour certains bateaux et de la météo.

La Global Sumud Flotilla ("sumud" signifie "résilience" en arabe), qui comprend aussi des embarcations parties ces derniers jours de Corse (France), Sicile (Italie) et Grèce, avait initialement prévu d'atteindre le territoire palestinien à la mi-septembre, après deux tentatives bloquées par Israël en juin et juillet.

 


Les ministres du Groupe E3 condamnent les frappes israéliennes à Doha

Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
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  • Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza
  • Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas

PARIS: Les ministres des Affaires étrangères de l’Allemagne, de la France et du Royaume-Uni ont condamné, dans une déclaration conjointe, les frappes israéliennes ayant visé Doha le 9 septembre. Ils estiment que ces attaques constituent une violation de la souveraineté du Qatar et représentent un risque d’escalade supplémentaire dans la région.

Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza. « Nous appelons toutes les parties à intensifier leurs efforts pour parvenir à un cessez-le-feu immédiat », ont-ils insisté.

Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas. Ils appellent les parties à « faire preuve de retenue » et à saisir l’opportunité de rétablir la paix.

Les ministres ont réaffirmé que la priorité devait rester la mise en place d’un cessez-le-feu permanent, la libération des otages et l’acheminement massif d’aide humanitaire à Gaza pour enrayer la famine. Ils demandent l’arrêt immédiat des opérations militaires israéliennes dans la ville de Gaza, dénonçant les déplacements massifs de civils, les pertes humaines et la destruction d’infrastructures vitales.

Ils exhortent par ailleurs à garantir aux Nations unies et aux ONG humanitaires un accès sûr et sans entrave à l’ensemble de la bande de Gaza, y compris dans le Nord.

Enfin, le Groupe E3 a rappelé sa condamnation « sans équivoque » des crimes commis par le Hamas, qualifié de mouvement terroriste, qui doit, selon eux, « libérer immédiatement et sans condition les otages, être désarmé et écarté définitivement de la gouvernance de la bande de Gaza ».