Maroc: la sécheresse aggrave le chômage dans les zones rurales

Un agriculteur se repose sur la roue de son tracteur dans la ville marocaine de Sidi Slimane, à quelque 120 km de Rabat, le 24 juin 2024, alors que la sécheresse sévit depuis six années consécutives. (Photo: AFP)
Un agriculteur se repose sur la roue de son tracteur dans la ville marocaine de Sidi Slimane, à quelque 120 km de Rabat, le 24 juin 2024, alors que la sécheresse sévit depuis six années consécutives. (Photo: AFP)
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Publié le Samedi 13 juillet 2024

Maroc: la sécheresse aggrave le chômage dans les zones rurales

  • Des ouvriers agricoles rassemblés dans le centre d'un village au nord de Rabat attendent une opportunité de travail, de plus en plus rare dans les campagnes en raison d'une sécheresse persistante qui a fait bondir le chômage au Maroc à un niveau record
  • Le taux de chômage au Maroc est passé de 12,9% à 13,7% au premier trimestre 2024 par rapport à la même période en 2023

SIDI SLIMANE, MAROC: Des ouvriers agricoles rassemblés dans le centre d'un village au nord de Rabat attendent une opportunité de travail, de plus en plus rare dans les campagnes en raison d'une sécheresse persistante qui a fait bondir le chômage au Maroc à un niveau record.

Parmi eux, Mustapha Loubaoui a parcouru 280 km jusqu'au douar agricole de Dar Bel Amri, dans la province de Sidi Slimane, pour offrir les services de sa moissonneuse-batteuse, sans succès.

"Le travail s'est raréfié à cause de la sécheresse", confie  à l'AFP ce quadragénaire.

Les possibilités d'emploi, en particulier pour les petits agriculteurs, ont chuté avec la diminution de la superficie cultivée à 2,5 millions d'hectares contre quatre millions d'hectares pour une saison normale.

Le taux de chômage au Maroc est passé de 12,9% à 13,7% au premier trimestre 2024 par rapport à la même période en 2023, a indiqué en mai le Haut commissariat au plan (HCP), notant que "la situation du marché de travail continue de subir l'effet de la sécheresse".

Quelque 159.000 postes dans le secteur agricole ont disparu sur cette période, portant le nombre total des personnes sans emploi à plus de 1,6 million dans le pays, qui compte 37 millions d'habitants, d'après la même source.

Ces chiffres confirment la tendance haussière du chômage enregistrée en 2023: le taux de 13% était alors le plus élevé depuis 2000, selon le HCP.

Le marché du travail au Maroc reste lourdement tributaire de l'agriculture qui "emploie encore près d'un tiers de la population active bien que ce secteur ne contribue qu'à entre 11 à 14% au PIB les années pluvieuses", explique Abderrahim Handouf, ingénieur agronome.

- "Changements climatiques" -

Pas loin du centre de Dar Bel Amri, l'agriculteur Chlih El Baghdadi dit passer tout son temps chez lui, la perte due à la sécheresse de sa récolte de céréales l'ayant réduit au chômage.

Sa famille, qui compte cinq enfants, dépend dorénavant de son épouse, ouvrière agricole dans un grand domaine près de Meknès, à 70 km de leur village.

Malgré une sixième année consécutive de sécheresse, de nombreuses grandes exploitations de la région, dont la production est principalement destinée à l'export, sont  verdoyantes grâce à l'irrigation.

Le pays mise sur ce modèle agricole, gourmand en eau, depuis l'adoption du "Plan Maroc vert" (PMV) en 2008.

Les revenus agricoles sont depuis passés de 63 à 125 milliards de dirhams en dix ans (environ six à 11,6 milliards d'euros), selon les données officielles.

Dans la continuité du PMV, le pays a adopté "Generation green" (2020-2030) avec l'ambition de doubler les exportations agricoles pour atteindre les 60 milliards de dirhams (environ 5,6 milliard d'euros) en dix ans.

Paradoxalement, cette croissance ne s'est pas répercutée sur l'emploi, qui reste tributaire des changements climatiques.

"Nous disposons d'une agriculture moderne et sophistiquée, mais elle n'occupe qu'environ 15% de la surface cultivable. La majorité écrasante des agriculteurs restent à la merci des changements climatiques", note l'expert Abderrahim Handouf.

"Si l'économie marocaine était capable de les absorber, ils auraient changé de vocation", ajoute-t-il.

- "Pas de vie sans pluie" -

C'est le cas de Benaissa Kaaouan qui aurait "abandonné l'agriculture" s'il avait appris un autre métier.

"Il n'y a plus de vie sans pluie", regrette ce sexagénaire au milieu de son lopin de terre parsemé de courgettes endommagées par la chaleur.

La montée du chômage s'explique aussi par le fait que l'industrie recrute peu alors qu'elle est le coeur battant de l'économie, avec par exemple des exportations record d'environ 13 milliards d'euros en 2023 dans l'automobile.

Le secteur créé 90.000 emplois annuellement, alors que 330.000 nouveaux demandeurs d'emploi arrivent sur le marché chaque année, a souligné le ministre de l'Industrie Ryad Mezzour, lors d'un entretien à la radio début mai.

"L'emploi est le point faible du système économique", a-t-il concédé.

Face aux critiques, le chef du gouvernement Aziz Akhannouch a souligné mi-juin au parlement que "la sécheresse est une réalité".

Il a annoncé la création de 140.000 emplois après la signature d'accords d'investissement d'un montant de plus de 20 Mds EUR dans différents secteurs - industrie, énergies renouvelables, télécoms, tourisme et santé -, sans toutefois en préciser l'échéance.

Un chiffre loin de sa promesse électorale de créer un million d'emplois en cinq ans (2021-2026).


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".


La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, alerte le Secours populaire

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
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  • "La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire
  • "La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg

PARIS: La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, touchant tous les aspects de la vie des plus fragiles, alerte jeudi le Secours Populaire, qui publie un baromètre témoignant de cette situation jugée préoccupante.

"La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire.

L'association publie un baromètre qui indique qu'un tiers des Français (31%) rencontrent des difficultés financières pour se procurer une alimentation saine permettant de faire trois repas par jour. De même 39% ont du mal à payer leurs dépenses d'électricité et 49% à partir en vacances au moins une fois par an, selon ce sondage réalisé par l'Institut Ipsos, auprès d'un échantillon de 1.000 personnes, représentatif de la population nationale âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

"La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg.

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier.

Malgré un "léger mieux" constaté sur certains indicateurs lié au "ralentissement de l'inflation", ce baromètre révèle "une situation sociale toujours très préoccupante", selon le Secours populaire.

En début de semaine, la déléguée interministérielle à la prévention et la lutte contre la pauvreté, Anne Rubinstein, a évoqué des "difficultés" rencontrées par l'Etat pour résorber un taux de pauvreté qui a atteint un niveau record en 2023 en France métropolitaine.

Face à cette situation, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) a appelé mardi à une "mobilisation collective" pour "débloquer la lutte contre la précarité".

Au niveau européen, 28% de la population déclare se trouver en situation précaire, également selon ce baromètre du Secours Populaire, qui s'appuie aussi sur des échantillons de 1.000 personnes représentatifs de neuf autres pays (Allemagne, Grèce, Italie, Pologne, Royaume-Uni, Moldavie, Portugal, Roumanie, Serbie).

La part des personnes se considérant comme précaires demeure à un niveau "très alarmant" en Grèce (46%) et en Moldavie (45%), pointe le baromètre.

En 2024, le Secours populaire a soutenu 3,7 millions de personnes en France. L'association fournit notamment de l'aide alimentaire et organise des activités pour différents publics pour rompre l'isolement.


Face à l'explosion des dépenses militaires, l'ONU appelle à «repenser les priorités»

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté. (AFP)
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté. (AFP)
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  • "Aujourd'hui, nous publions un rapport qui révèle une réalité saisissante: le monde dépense bien plus à faire la guerre qu'à construire la paix", a-t-il déclaré Antonio Guterres
  • Selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), les dépenses militaires mondiales ont atteint en 2024 près de 2.700 milliards de dollars, en hausse de plus de 9% sur un an

NATIONS-UNIES: Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté.

"Aujourd'hui, nous publions un rapport qui révèle une réalité saisissante: le monde dépense bien plus à faire la guerre qu'à construire la paix", a-t-il déclaré Antonio Guterres.

Selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), les dépenses militaires mondiales ont atteint en 2024 près de 2.700 milliards de dollars, en hausse de plus de 9% sur un an.

C'est "l'équivalent de 334 dollars par habitant de la planète", "près de 13 fois le montant de l'aide publique au développement des pays les plus riches et 750 fois le budget ordinaire de l'ONU", a noté Antonio Guterres.

Et en parallèle, la majorité des Objectifs de développement durables (ODD) visant à améliorer le sort de l'humanité d'ici 2030 (éradication de l'extrême pauvreté, égalité hommes-femmes, éducation...) ne sont pas sur la bonne voie.

Pourtant, mettre un terme à la faim dans le monde d'ici 2030 nécessiterait seulement 93 milliards de dollars par an, soit 4% des dépenses militaires de 2024, et faire en sorte que chaque enfant soit totalement vacciné coûterait entre 100 et 285 milliards par an, note le rapport demandé par les Etats membres.

Au total, l'ONU estime aujourd'hui à 4.000 milliards de dollars les investissements supplémentaires nécessaires chaque année pour atteindre l'ensemble des ODD, un montant qui pourrait grimper à 6.400 milliards dans les prochaines années.

Alors le secrétaire général de l'ONU a lancé un "appel à l'action, un appel à repenser les priorités, un appel à rééquilibrer les investissements mondiaux vers la sécurité dont le monde a vraiment besoin".

"Des dépenses militaires excessives ne garantissent pas la paix, souvent elles la sapent, encourageant la course aux armements, renforçant la méfiance et détournant des ressources de ce qui représentent les bases de la stabilité", a-t-il ajouté. "Un monde plus sûr commence par investir au moins autant pour lutter contre la pauvreté que nous le faisons pour faire la guerre".

"Rediriger même une fraction des dépenses militaires actuelles pourraient combler des écarts vitaux, envoyer des enfants à l'école, renforcer les soins de santé de base, développer les énergies propres et des infrastructures résistantes, et protéger les plus vulnérables", a-t-il plaidé.