Turquie: Les causes de la recrudescence des attaques contre les touristes arabes et les réfugiés syriens

Des partisans du Parti de la justice et du développement (AK), au pouvoir en Turquie, brandissent des drapeaux nationaux turcs avec le signe du “loup gris” lors d'un meeting de campagne dans le quartier de Sultangazi à Istanbul, le 12 mai 2023. (AFP)
Des partisans du Parti de la justice et du développement (AK), au pouvoir en Turquie, brandissent des drapeaux nationaux turcs avec le signe du “loup gris” lors d'un meeting de campagne dans le quartier de Sultangazi à Istanbul, le 12 mai 2023. (AFP)
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Publié le Vendredi 19 juillet 2024

Turquie: Les causes de la recrudescence des attaques contre les touristes arabes et les réfugiés syriens

  • Un homme turc a été arrêté à Istanbul au début du mois après avoir menacé un groupe de touristes saoudiens avec un couteau
  • L'incident s'est produit dans le contexte d'une nouvelle vague de violence à l'encontre des syriens vivant en Turquie

LONDRES : La multiplication des agressions violentes contre des arabes en Turquie ces derniers temps a suscité des inquiétudes quant à la sécurité des étrangers dans un pays visité par des dizaines de milliers de touristes du Moyen-Orient et qui accueille des millions de réfugiés syriens.

Au début du mois, un turc a été arrêté à Istanbul après avoir menacé un groupe de touristes saoudiens avec un couteau tout en leur lançant des épithètes désobligeantes, a rapporté Al-Arabiya.

Une vidéo de l'attaque a rapidement circulé sur les réseaux sociaux, montrant l'homme faisant un geste de la main associé aux Loups gris, un groupe ultranationaliste et pan-turc créé à la fin des années 1960 en tant qu'aile jeunesse du Parti du mouvement nationaliste.

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Un turc menace d'attaquer des saoudiens dans un café en Turquie (photo Twitter/File)

Les Loups gris ont longtemps été associés à des actes violents, notamment des attaques contre des gauchistes, des Kurdes et d'autres groupes minoritaires. Malgré leur réputation controversée, ils restent influents dans la société turque.

La Turquie est une destination populaire pour les touristes saoudiens, qui ont été 650 000 à s'y rendre entre janvier et août de l'année dernière, selon les responsables turcs du tourisme. Une flambée d'hostilité à l'égard des arabes pourrait faire chuter le nombre de visiteurs saoudiens.

Ce n'est sûrement pas la première fois que des clips montrant des attaques contre des touristes arabes en Turquie sont diffusés sur Internet. Des incidents impliquant des bagarres et des insultes xénophobes ont été téléchargés sur les plateformes de réseaux sociaux l'année dernière par des utilisateurs des États du Golfe et d'Égypte.

QUI SONT LES LOUPS GRIS ?

•    Groupe ultranationaliste et pan-turc.
•    Branche paramilitaire du Parti du mouvement nationaliste.
•    Croient en la suprématie de la race et de la nation turques.
•    S'est fait connaître à la fin des années 1970.
•    Interdit en France en 2020 pour incitation à la haine.

Cet incident s'inscrit dans le contexte d'une nouvelle vague de violence à l'encontre des syriens en Turquie, suite à l'arrestation d'un syrien de 26 ans accusé d'agression sexuelle contre un mineur à Kayseri, en Anatolie centrale.

Des émeutes ont éclaté dans la nuit du 30 juin à Kayseri après la diffusion sur les réseaux sociaux d'informations concernant un syrien qui aurait été surpris en train d'abuser d'une parente âgée de 7 ans dans des toilettes publiques du quartier de Melikgazi, selon un rapport de Reuters.

Les émeutiers ont attaqué et vandalisé des dizaines d'entreprises, de maisons et de véhicules appartenant à des syriens, après quoi la violence s'est propagée à d'autres régions de la Turquie, notamment Gaziantep, Bursa et Hatay, où une épicerie syrienne a été incendiée.

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Des turcs ont brûlé des maisons, des voitures et des magasins de réfugiés syriens à Kayseri. (Photo : Twitter)

Ali Yerlikaya, le ministre turc de l'intérieur, a déclaré que l'agression faisait l'objet d'une enquête et a condamné les actions des émeutiers comme étant “illégales” et contraires aux valeurs de la nation.

Il a indiqué dans un message sur X que les autorités locales avaient arrêté 67 des manifestants, soulignant qu'il était “inacceptable que notre peuple porte atteinte à l'environnement sans tenir compte de l'ordre public, de la sécurité et des droits de l'homme”.

Dans un autre message, Yerlikaya a souligné que les autorités enquêtaient sur plusieurs comptes X qui avaient contribué à attiser la violence, et que dix d'entre eux avaient été transmis au bureau du procureur.

Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a également condamné les violences, déclarant : “Rien ne peut être accompli en alimentant la xénophobie et la haine des réfugiés dans la société”.

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Le président turc Recep Tayyip Erdogan montre une photo d'un camp de réfugiés syriens dans son pays alors qu'il s'adresse à la 77e session de l'Assemblée générale de l'ONU à New York, le 20 septembre 2022. (AFP)

Quelques jours après l'incident de Kayseri, les données personnelles de quelque 3 millions de réfugiés syriens en Turquie ont fait l'objet d'une fuite sur Internet, faisant craindre une éruption de violence xénophobe.

Le ministère turc de l'intérieur a confirmé que les données personnelles des syriens bénéficiant d'une protection temporaire avaient été diffusées à partir du compte de réseaux sociaux « Uprising#Turkey », géré par un adolescent de 14 ans.

“Les mesures nécessaires ont été prises à l'encontre de E.P. (l'administrateur du compte) par la Direction de l'enfance d'Istanbul”, a déclaré le ministère dans un communiqué.

Lana, une militante syrienne basée au Royaume-Uni, dont le nom a été modifié pour protéger son anonymat, a déclaré à Arab News que sa famille à Gaziantep “a vécu un enfer pendant au moins deux semaines après l'incident de Kayseri”.

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Cette photo prise le 11 août 2022 montre un bazar dans le quartier historique de Gaziantep, dans le sud-est de la Turquie, où résident de nombreux réfugiés syriens. (AFP/File)

Elle a déclaré : “Dans les quelques jours qui ont suivi les émeutes, ils ne pouvaient même pas sortir de chez eux pour acheter du pain. Ils étaient saisis par la peur et paralysés par l'incertitude créée par les développements récents, y compris les discussions depuis juin (concernant) la fin de la normalisation des liens entre la Turquie et le président Bashar Assad”.

Marwah, une syrienne qui vit à Bursa et travaille dans les ressources humaines, pense que les réseaux sociaux sont responsables de la démesure de la situation.

“En suivant les informations, j'ai eu l'impression qu'on me tuerait pour mon identité si je sortais de chez moi, mais cela n'a pas été le cas”, a-t-elle déclaré à Arab News.

Pourtant, les nouvelles et les images des émeutes ont semé la panique parmi les syriens. “Certains ont frénétiquement vendu leurs biens ou emprunté environ 8 000 dollars pour fuir la Turquie, tandis que d'autres ont envisagé de retourner en Syrie”, explique Marwah.

“Même mon collègue, qui a la nationalité turque, s'est renseigné sur la possibilité de s'installer en Égypte, bien qu'il n'ait pas été témoin des violences”.

FAITS

3,6 millions de réfugiés syriens sont enregistrés en Turquie (HCR)

Les agences des Nations unies et plusieurs organismes de défense des droits de l'homme, dont Amnesty International, ont conclu que la Syrie restait un pays dangereux pour le rapatriement des réfugiés.

Marwah a expliqué que bien que la violence contre les syriens ne soit pas inhabituelle en Turquie depuis le déclenchement de la guerre civile en 2011, qui a fait fuir des millions de personnes à l'étranger, “Kayseri est un endroit où les syriens et les turcs ont coexisté pacifiquement, 48 pour cent des travailleurs étant syriens”.

“Apparemment, il n'était pas facile d'inciter à la discorde entre syriens et turcs à Kayseri, il fallait donc le faire par le biais d'un sujet lié à des valeurs communes, les habitants de Kayseri étant généralement conservateurs”, a déclaré Marwah.

Elle dit avoir entendu dire par des habitants que “des groupes de voyous ont été amenés à Kayseri dans des bus pour attiser la violence”.

“Les turcs de Kayseri, qui est une ville industrielle, prennent généralement leur retraite tôt, il est donc peu probable que ce soient les habitants qui aient participé aux violences contre les syriens”, a-t-elle ajouté, soulignant que “toute personne vivant en Turquie depuis des années sait que ces émeutes - et leur couverture par les réseaux sociaux - n'ont pas pu éclater spontanément, sans avoir été planifiées à l'avance”.

Les sentiments anti-arabes ont peut-être déjà mis un frein aux ambitions de l'industrie touristique turque.

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Des touristes débarquent d'un bateau après une excursion sur le Bosphore à Istanbul. La Turquie a enregistré une hausse des visites touristiques après l'ère COVID, et les visiteurs saoudiens devraient atteindre un million cette année. (AFP/File)

Selon le site d'information Hurriyet Daily, le nombre de touristes provenants de Bahreïn, des Émirats arabes unis, du Qatar, du Koweït et de Jordanie a chuté en 2023 de 34 pour cent, 17 pour cent, 24,2 pour cent, 24,4 pour cent et 22,2 pour cent respectivement.

Lana, une activiste syrienne basée au Royaume-Uni, a déclaré que “si l'intensification du racisme anti-arabe au cours des dernières années a entraîné une baisse du tourisme arabe en Turquie, l'impact le plus important est ressenti par les ressortissants syriens qui, au cours des trois dernières années, ont cherché à poursuivre leur migration vers l'Europe”.

Elle estime que l'hostilité a été encouragée en partie parce que les réfugiés syriens ont été utilisés comme un “pion politique” dans les élections locales et “ne sont pas inclus dans les discussions relatives à leur statut et à leur avenir”.

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Sur cette photo de 2017, des réfugiés syriens sont autorisés à retourner en Syrie au point de passage d'Oncupinar, près de la ville de Kilis, dans le centre-sud de la Turquie, pour assister aux festivités d'al-Adha. (AFP/File)

Enass, une journaliste syrienne basée en France qui a également requis l'anonymat, estime que “la Turquie, comme d'autres pays voisins, a profité de l'accueil des réfugiés syriens”.

“Il y avait un accord clair pour augmenter le soutien de l'UE à la Turquie en échange d'une réduction de l'afflux de réfugiés vers les pays européens en 2015”, a-t-elle déclaré à Arab News, soulignant que la plupart des voisins de la Syrie “ont abordé la crise des réfugiés comme une affaire urgente plutôt que comme une situation permanente”.

En 2016, un accord a été conclu entre la Commission européenne et Ankara pour contrôler le flux de bateaux de migrants irréguliers vers la Grèce. La Turquie a accepté de renforcer la sécurité de ses frontières en échange de 6 milliards d'euros (6,6 milliards de dollars).

“La gestion de la question des réfugiés par le gouvernement a été à la fois politique et économique, visant à servir l'intérêt national, tandis que le public a souvent été induit en erreur sur la façon dont leur pays a bénéficié de l'accueil des réfugiés syriens”, a déclaré Enass.

Elle a ajouté que de nombreux politiciens turcs, en particulier pendant les campagnes électorales, “ont utilisé une rhétorique anti-réfugiés” qui “a contribué à inciter à la violence contre les communautés syriennes vulnérables à travers le pays”.

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Des femmes montrent leur travail dans un centre de soutien à l'entreprenariat pour les réfugiés syriens à Sanliurfa, dans le sud-est de la Turquie, le 18 octobre 2023. (AFP)

“Pendant des années, des partis politiques concurrents en Turquie ont diffusé des informations trompeuses sur l'aide apportée aux réfugiés syriens. Cela a mené les citoyens turcs à croire que les réfugiés avaient droit à des services et à un soutien, ce qui a contribué à l'inflation économique. Ce n'est pas vrai”, a déclaré Enass.

“Les partis d'opposition ont capitalisé sur cette désinformation pour attiser la colère de la population turque”.

Selon une étude de l’Economic Research Foundation en Turquie, les entrepreneurs syriens en Turquie détenaient, en tout ou en partie, au moins 10 000 entreprises en 2019. Ces entreprises emploient environ 44 000 syriens ainsi que des milliers de ressortissants turcs.

Enass a déclaré que l'évolution du paysage politique et économique “incite le gouvernement turc à prendre de nouvelles mesures qui encouragent les syriens à rentrer ‘volontairement’, mais il s'agit d'une forme d'expulsion injustifiée d'individus détenant des permis valides”.

Elle a ajouté : “Le retard dans le traitement des incidents de sécurité contre les syriens en Turquie sape les intérêts des syriens et contribue à la montée des discours de haine”.

Erdogan a déclaré qu'il ne voyait aucune raison de ne pas rétablir les relations diplomatiques avec Damas, mais les dirigeants syriens ont conditionné la normalisation au retrait des forces turques du territoire syrien.

Un rapprochement se traduirait par l'ouverture d'un point de passage entre les zones tenues par le gouvernement et celles contrôlées par les forces d'opposition soutenues par la Turquie dans la province d'Alep.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L'armée israélienne annonce avoir mené une « frappe ciblée» sur Beyrouth

L'immeuble est situé dans une région fortement peuplée, traditionnellement connue pour être le fief du Hezbollah. (AFP)
L'immeuble est situé dans une région fortement peuplée, traditionnellement connue pour être le fief du Hezbollah. (AFP)
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  • L'armée israélienne a annoncé avoir mené une "frappe ciblée" sur Beyrouth
  • Quatre roquettes israéliennes ont été tirées sur un immeuble d'habitation dans la banlieue sud de la capitale libanaise

BEYROUTH:  L'armée israélienne a annoncé avoir mené une "frappe ciblée" sur Beyrouth.

Quatre roquettes israéliennes ont été tirées sur un immeuble d'habitation dans la banlieue sud de la capitale libanaise. Tel-Aviv a immédiatement revendiqué l'attaque sans toutefois préciser quelle est la personnalité visée par le raid. 

L'immeuble est situé dans une région fortement peuplée, traditionnellement connue pour être le fief du Hezbollah. 

L'armée israélienne a annoncé vendredi avoir mené une "frappe ciblée" sur Beyrouth, où une source de sécurité a fait état d'une frappe israélienne sur la banlieue sud de la capitale libanaise, bastion du Hezbollah.

"L'armée israélienne a mené un frappe ciblée à Beyrouth", indique un communiqué militaire, sans préciser la nature de cette frappe ni les moyens employés. "Il n'y a pour l'heure aucun changement dans les directives (...) du Commandement du front intérieur" (la défense passive israélienne), ajoute l'armée.

 


Pour l'ambassadeur saoudien au Royaume-Uni, la région est «  plus que jamais proche de la guerre  »

Le conflit israélo-palestinien est au cœur des tensions et les deux parties ont la responsabilité d'éviter l'escalade. (AFP)
Le conflit israélo-palestinien est au cœur des tensions et les deux parties ont la responsabilité d'éviter l'escalade. (AFP)
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  • Le prince Khalid ben Bandar appelle à "redoubler d'efforts" pour mettre fin à l'escalade
  • La situation sur le terrain ne cesse de se dégrader", a-t-il déclaré à Sky News

LONDRES : Le Moyen-Orient est confronté à la plus grande menace de guerre régionale depuis 1973, a averti l'ambassadeur saoudien au Royaume-Uni.

Lors de l'émission "The World with Yalda Hakim" diffusée sur Sky News, le prince Khalid ben Bandar a déclaré qu'il fallait "redoubler d'efforts" pour mettre fin à l'effusion de sang.

"J'aimerais dire que je suis optimiste, mais il est difficile de voir d'où vient cet optimisme", a-t-il ajouté.

"La situation sur le terrain ne cesse de s'aggraver [...]. Je pense que nous n'avons jamais été aussi proches d'une guerre régionale depuis 1973".

Le conflit israélo-palestinien est au cœur des tensions, et les deux parties ont la responsabilité d'éviter l'escalade, a ajouté le prince Khalid.

"Le problème israélo-palestinien affecte les gens du monde entier comme très peu de conflits le font", a-t-il déclaré.

"On voit dans les manifestations (dans le monde entier) que tout le monde est touché et motivé par ce qui se passe sur le terrain.

"Les Israéliens et les Palestiniens ont donc une responsabilité - qu'ils le veuillent ou non - à l'égard du monde.

Le conflit pourrait avoir des conséquences mondiales, ce qui obligerait la communauté internationale à "pousser plus fort" pour tenter de mettre fin aux combats, a-t-il ajouté.

"Un conflit qui s'étend au-delà de l'endroit où il se trouve s'étend à la région. S'il s'étend à la région, il s'étend au monde, et ce n'est pas un scénario que l'on souhaite", a-t-il ajouté.

"Il est temps de redoubler d'efforts pour faire cesser les combats... La communauté internationale devrait insister davantage ."

Ces commentaires interviennent alors que le ministre israélien de la défense, Yoav Gallant, a annoncé une "nouvelle phase" dans la lutte contre le Hezbollah à la suite de l'explosion des dispositifs de communication du groupe libanais cette semaine.

Des personnalités internationales de premier plan, dont le secrétaire général des Nations unies, ont averti que les attaques israéliennes pourraient précéder une opération de plus grande envergure au Liban.

Le Hezbollah a promis de répondre à ces attaques, qui ont fait plus de 30 morts et des milliers de blessés.

Mercredi, le secrétaire d'État américain Antony Blinken a déclaré que Washington évaluait la manière dont les attaques au Liban pourraient affecter les négociations de cessez-le-feu dans la guerre de Gaza.


Le Hezbollah promet une riposte «terrible» après avoir reçu un coup « sans précédent »

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  • Le chef du Hezbollah a reconnu jeudi que la formation pro-iranienne avait reçu un coup "sans précédent", après les explosions meurtrières de ses appareils de transmission au Liban
  • Dans un discours télévisé, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a annoncé jeudi l'ouverture d'une enquête interne sur les explosions de bipeurs et de talkies-walkies qui ont fait mardi et mercredi 37 morts et près de 3.000 blessés dans ses rangs

BEYROUTH: Le chef du Hezbollah a reconnu jeudi que la formation pro-iranienne avait reçu un coup "sans précédent", après les explosions meurtrières de ses appareils de transmission au Liban, promettant une "terrible" riposte à cette attaque spectaculaire attribuée à Israël.

L'armée israélienne a de son côté poursuivi ses raids aériens dans le sud du Liban, disant avoir visé notamment des systèmes lance-roquettes du Hezbollah "prêts à être utilisés immédiatement pour tirer sur le territoire israélien".

Au total, elle a affirmé avoir frappé jeudi "environ 100 lanceurs" et d'autres infrastructures "représentant environ 1.000 canons".

Dans un discours télévisé, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a annoncé jeudi l'ouverture d'une enquête interne sur les explosions de bipeurs et de talkies-walkies qui ont fait mardi et mercredi 37 morts et près de 3.000 blessés dans ses rangs, exacerbant les craintes d'une guerre à grande échelle au Proche-Orient.

Israël va recevoir "un terrible châtiment", a-t-il prévenu.

Israël n'a pas commenté cette attaque survenue juste après qu'il a annoncé étendre ses objectifs de guerre à Gaza contre le Hamas palestinien jusqu'à la frontière avec le Liban pour permettre le retour chez eux des habitants du nord du pays. Ces derniers ont été déplacés par les affrontements transfrontaliers, quasi-quotidiens depuis octobre entre le Hezbollah et l'armée israélienne.

"Vous ne pourrez pas ramener les habitants du nord" chez eux, a rétorqué Hassan Nasrallah aux dirigeants israéliens.

"Le front du Liban avec Israël restera ouvert jusqu'à la fin de l'agression à Gaza", a-t-il martelé. Le Hamas s'est dit "très reconnaissant" de ce soutien.

Le Hezbollah a revendiqué depuis jeudi matin au moins 17 attaques contre 14 positions militaires israéliennes.

Bipeurs interdits

Les opérations militaires contre le mouvement islamiste libanais "vont continuer", a affirmé jeudi soir le ministre de la Défense, Yoav Gallant, alors que l'armée a annoncé la mort de deux soldats israéliens "tombés au combat" dans le nord du pays.

Selon l'agence de presse officielle libanaise Ani, un  "drone hostile" a survolé jeudi soit plusieurs zones du sud du Liban, diffusant par hauts-parleurs des "discours incitatifs" contre le chef du Hezbollah et l'accusant de "causer une destruction totale".

Mardi, des explosions simultanées de bipeurs, un système de radiomessagerie utilisé par le Hezbollah, se sont produites dans ses bastions en banlieue sud de Beyrouth ainsi que dans le sud et l'est du Liban, faisant douze morts et des centaines de blessés, selon le ministère libanais de la Santé.

Le lendemain, une deuxième vague d'explosions visant cette fois des talkies-walkies a fait 25 morts, selon le ministère, portant à 37 morts et 2.931 blessés le nombre de victimes sur deux jours.

Dans ce contexte extrêmement tendu, la compagnie aérienne américaine Delta Air Lines a annoncé jeudi prolonger jusqu'à la fin de l'année la suspension de sa desserte entre New York et Tel-Aviv. American Airlines avait déjà indiqué qu'il ne l'assurerait plus jusqu'à fin mars 2025 et United Airlines l'a suspendue sine die.

Les compagnies Lufthansa et Air France ont elles aussi annoncé jeudi prolonger la suspension de leurs vols pour Tel-Aviv et Beyrouth.

Qatar Airways a de son côté annoncé, avec effet immédiat, interdire jusqu'à nouvel ordre aux passagers au départ de l'aéroport de Beyrouth de transporter des bipeurs et talkies-walkies, conformément aux directives de l'Aviation civile au Liban.

Plainte à l'ONU

Le ministre israélien de la Défense a annoncé mercredi que le "centre de gravité" de la guerre se déplaçait "vers le nord". Les principaux objectifs affichés jusqu'à présent étaient la destruction du Hamas, au pouvoir à Gaza depuis 2007, et le retour des otages retenus dans le territoire palestinien.

"Nous menons nos tâches simultanément", a souligné M. Gallant.

Selon un responsable libanais de la sécurité, "les appareils (de transmission du Hezbollah) étaient préprogrammés pour exploser".

Une enquête préliminaire des autorités libanaises montre que les appareils ont été piégés avant d'entrer dans le pays, selon une lettre de la mission libanaise à l'ONU vue jeudi par l'AFP.

Le chef de la diplomatie libanaise, Abdallah Bou Habib, a annoncé le dépôt d'une plainte auprès du Conseil de sécurité de l'ONU suite à "l'agression cyberterroriste israélienne qui constitue un crime de guerre".

La Turquie a accusé "Israël d'étendre la guerre au Liban", l'ONU et Washington ont mis en garde contre une "escalade" tandis que Londres a exprimé sa "profonde préoccupation".

Les Gardiens de la Révolution, l'armée idéologique de l'Iran, ont promis "une réponse écrasante du front de la résistance", qui regroupe des formations armées de la région hostiles à Israël.

Le président américain Joe Biden pense néanmoins "faisable" une résolution diplomatique du conflit entre Israël et le Hezbollah: c'est "la meilleure option", a déclaré jeudi la porte-parole de la Maison Blanche.

Dans la soirée, le président français Emmanuel Macron a adressé un message vidéo aux Libanais, leur assurant qu'un "chemin diplomatique existe".

Pendant ce temps, les frappes se poursuivent à Gaza, assiégée et plongée dans une crise humanitaire majeure.

Le conflit a éclaté le 7 octobre 2023, quand des commandos du Hamas ont mené une attaque sans précédent sur le sol israélien, qui a entraîné la mort de 1.205 personnes, majoritairement des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur les chiffres officiels israéliens qui inclut les otages morts ou tués en captivité dans la bande de Gaza.

Sur les 251 personnes enlevées pendant l'attaque, 97 sont toujours retenues à Gaza, dont 33 ont été déclarées mortes par l'armée.

Plus de 41.272 Palestiniens ont été tués dans la campagne militaire israélienne de représailles sur la bande de Gaza, essentiellement des civils, selon les données du ministère de la Santé du gouvernement du Hamas pour Gaza, jugées fiables par l'ONU.