Le corps de la militante Aysenur Eygi en Turquie pour une seconde autopsie avant les obsèques

La Turquie, fervent soutien proclamé de la cause palestinienne, a ouvert une enquête confiée au procureur d'Ankara. (AFP)
La Turquie, fervent soutien proclamé de la cause palestinienne, a ouvert une enquête confiée au procureur d'Ankara. (AFP)
Le père d'Aysenur Ezgi Eygi, Mehmet Suat Eygi, 60 ans, arrivé jeudi des Etats-Unis où il réside, a confirmé  qu'elle serait inhumée samedi à Didim, à 160 km au sud d'Izmir. (AFP)
Le père d'Aysenur Ezgi Eygi, Mehmet Suat Eygi, 60 ans, arrivé jeudi des Etats-Unis où il réside, a confirmé  qu'elle serait inhumée samedi à Didim, à 160 km au sud d'Izmir. (AFP)
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Publié le Vendredi 13 septembre 2024

Le corps de la militante Aysenur Eygi en Turquie pour une seconde autopsie avant les obsèques

  • La dépouille de la jeune femme, convoyée depuis Tel Aviv via Bakou, a été saluée sur l'aéroport d'Istanbul par une garde d'honneur de l'armée
  • Elle a ensuite été acheminée à Izmir (ouest), la troisième ville du pays, où une nouvelle autopsie a été pratiquée avant de rejoindre la petite station balnéaire de Didim, sur la côte égéenne

ISTANBUL: Le corps de la militante américano-turque Aysenur Ezgi Eygi, tuée lors d'une manifestation en Cisjordanie occupée, a été accueilli vendredi avec les honneurs en Turquie, où une seconde autopsie a été pratiquée, avant son transfert vers le berceau familial de Didim (sud-ouest), où il sera inhumé samedi.

La dépouille de la jeune femme, convoyée depuis Tel Aviv via Bakou, a été saluée sur l'aéroport d'Istanbul par une garde d'honneur de l'armée, réservée aux martyrs, lors d'une brève cérémonie présidée par le gouverneur de la métropole et des représentants du parti AKP (islamo-conservateur) au pouvoir, selon le compte X du gouvernorat.

Elle a ensuite été acheminée à Izmir (ouest), la troisième ville du pays, où une nouvelle autopsie a été pratiquée avant de rejoindre la petite station balnéaire de Didim, sur la côte égéenne.

Les résultats de ce nouvel examen, après celui pratiqué par trois médecins palestiniens, "constitueront une preuve que nous utiliserons", a indiqué le ministre de la Justice Yilmaz Tunç.

Le ministre envisage de lancer des mandats d'arrêt internationaux selon les résultats de l'enquête, a-t-il indiqué.

La Turquie, fervent soutien proclamé de la cause palestinienne, a ouvert une enquête confiée au procureur d'Ankara.

Le père d'Aysenur Ezgi Eygi, Mehmet Suat Eygi, 60 ans, arrivé jeudi des Etats-Unis où il réside, a confirmé  qu'elle serait inhumée samedi à Didim, à 160 km au sud d'Izmir.

"Aysenur était une personne très spéciale. Elle était sensible aux droits humains, à la nature, à tout", a-t-il souligné.

M. Eygi a salué la décision des autorités turques d'ouvrir une enquête sur "cet assassinat arbitraire".

"J'attends la même chose du gouvernement américain, car Aysenur n'avait que 10 mois lorsqu'elle est arrivée aux Etats-Unis", a-t-il fait valoir.

« La cause de toute la Turquie »

"La cause palestinienne est la cause de toute la Turquie. L'État d'Israël sera tenu pour responsable devant l'histoire", a promis devant le cercueil à Izmir le président du CHP, premier parti de l'opposition turque, Özgür Özel.

La jeune femme a été touchée par un tir à la tête alors qu'elle participait à une manifestation le 6 septembre dans le nord de la Cisjordanie occupée. L'armée israélienne a estimé mardi "très probable" que des tirs provenant de ses hommes l'aient tuée "indirectement et involontairement".

Outre les parents de la victime, son compagnon est également présent à Didim où résident toujours son grand-père et au moins un oncle.

La rue qui abrite la maison de la famille a été tendue de drapeaux turcs et préventivement barrée depuis jeudi par la police. Une tente a été dressée pour recevoir les condoléances et, au cimetière, la tombe a été creusée.

Les obsèques de la jeune femme seront célébrées samedi en début d'après-midi, après la prière de la mi-journée.

Une assistance nombreuse est attendue, dont des représentants "de haut niveau" du gouvernement a assuré le porte-parole de l'AKP, Ömer Çelik, et des membres de la principale ONG islamique turque IHH.

Cette dernière a organisé vendredi une prière funéraire à Istanbul, devant la grande mosquée du quartier conservateur de Fatih.

La Turquie a dénoncé avec force la mort de sa ressortissante: son président, Recep Tayyip Erdogan, a affirmé que son pays fera tout "pour que la mort de notre fille, Aysenur Ezgi, ne reste pas impunie".

Le ministre de la Justice a appelé le rapporteur spécial de l'ONU sur les exécutions extrajudiciaires et arbitraires à créer une commission d'enquête indépendante et à rédiger un rapport à ce sujet.

De son côté, le procureur d'Ankara adressera son rapport au Conseil des droits de l'homme de l'ONU, "afin de l'inclure dans la procédure pour génocide contre Israël en cours devant la Cour internationale de justice et dans l'enquête en cours devant la Cour pénale internationale", a insisté M. Tunç.


Nouveaux bombardements israéliens au Liban malgré des discussions «positives»

Israël a de nouveau bombardé jeudi le sud du Liban, disant viser des sites du Hezbollah pro-iranien qu'elle accuse de se réarmer, au lendemain des premières discussions directes depuis plusieurs décennies entre des représentants des deux pays. (AFP)
Israël a de nouveau bombardé jeudi le sud du Liban, disant viser des sites du Hezbollah pro-iranien qu'elle accuse de se réarmer, au lendemain des premières discussions directes depuis plusieurs décennies entre des représentants des deux pays. (AFP)
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  • Le président libanais Joseph Aoun, saluant les réactions "positives" à la réunion de mercredi, a annoncé que les discussions reprendraient le 19 décembre afin d'éloigner "le spectre d'une deuxième guerre" au Liban
  • "Il n'y a pas d'autre option que la négociation", a-t-il ajouté

JBAA: Israël a de nouveau bombardé jeudi le sud du Liban, disant viser des sites du Hezbollah pro-iranien qu'elle accuse de se réarmer, au lendemain des premières discussions directes depuis plusieurs décennies entre des représentants des deux pays.

L'armée israélienne, qui a multiplié ses frappes ces dernières semaines, a encore frappé jeudi le sud du Liban après avoir appelé des habitants de plusieurs villages à évacuer.

Les bombardements ont touché quatre localités, où des photographes de l'AFP ont vu de la fumée et des maisons en ruines.

Dans le village de Jbaa, Yassir Madir, responsable local, a assuré qu'il n'y avait "que des civils" dans la zone. "Quant aux dégâts, il n'y a plus une fenêtre à 300 mètres à la ronde. Tout le monde est sous le choc", a-t-il ajouté. 


« La Syrie n’est pas condamnée » : les leçons d’un an de transition, selon Hakim Khaldi

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  • Parmi les scènes les plus marquantes, Khaldi se souvient d’une vieille dame de Homs qui, voyant les portraits d’Assad retirés des bâtiments officiels, murmure : « On peut respirer ? Est-ce que c’est vrai ? »
  • Mais ce soulagement intense laisse rapidement place à une inquiétude plus sourde : celle du vide

PARIS: La Syrie post-Assad, carnets de bord, de Hakim Khaldi, humanitaire chez Médecins sans frontières, publié chez L’Harmattan, n’est pas seulement un récit de témoins, mais une immersion dans la réalité d’un pays brisé mais pas vaincu, où la chute d’un pouvoir omnipotent n’a pas suffi à étouffer l’exigence de dignité.
Ce qu’il raconte, c’est l’envers des discours diplomatiques, la géographie vécue d’une société projetée brutalement hors d’un demi-siècle d’autoritarisme dans un vide politique, économique et moral.

Les premiers jours après la chute du régime de Bachar Al-Assad ressemblent, selon Khaldi, à un moment de bascule irréel.

Dans ses carnets, comme dans ses réponses à Arab News en français, revient une même conviction : la chute d’un régime ne signifie pas la naissance immédiate d’un pays. La Syrie, aujourd’hui, est entre les deux, « en état de transformation ».

Les premiers jours après la chute du régime de Bachar Al-Assad ressemblent, selon Khaldi, à un moment de bascule irréel : « On ne savait pas si c’était la fin d’une époque ou le début d’une autre tragédie », confie-t-il.
Dans les villes « libérées », les scènes oscillent entre euphorie et sidération ; la population découvre, sans y croire encore, la possibilité de parler librement, de respirer autrement.

Il raconte ces familles qui, pendant quarante ans, n’avaient jamais osé prononcer le mot « moukhabarat » (services secrets en arabe), ne serait-ce qu’à voix basse chez elles.
Et brusquement, les voilà qui se mettent à raconter : les disparitions, les tortures, les humiliations, et la peur devenue routine.
Des parents ressortent des photos d’adolescents morts sous la torture, des certificats de décès maquillés, des lettres écrites depuis la prison mais jamais envoyées.

Parmi les scènes les plus marquantes, Khaldi se souvient d’une vieille dame de Homs qui, voyant les portraits d’Assad retirés des bâtiments officiels, murmure : « On peut respirer ? Est-ce que c’est vrai ? »
Ce qui l’a le plus frappé, c’est « ce sentiment presque physique d’un poids qui tombe. C’est ce que j’ai le plus entendu », affirme-t-il.

Mais ce soulagement intense laisse rapidement place à une inquiétude plus sourde : celle du vide. En quelques jours, l’État s’est évaporé : plus de police, plus d’électricité, plus d’école, plus de justice.
Les anciens bourreaux disparaissent dans la nature, mais les réseaux de corruption se reconstituent, et les premières milices locales émergent, prêtes à occuper le terrain déserté par les institutions.

Pourtant, au fil de ses déplacements, Khaldi est frappé par la force de résilience et d’auto-organisation de la population : « Les Syriens n’ont jamais cessé d’exister comme société, même quand l’État les avait réduits au silence », assure-t-il.
Dans les villages, des comités improvisés se forment et organisent la distribution alimentaire, la remise en marche d’une station d’eau, la sécurité ou la scolarisation d’urgence.

Un an après la chute du régime (le 8 décembre 2024), la Syrie tente de se relever lentement, mais elle demeure une mosaïque de composants hybrides.

Cette responsabilité populaire est, pour Khaldi, l’un des rares points lumineux du paysage syrien, la preuve qu’une société peut exister en dehors de l’appareil répressif qui prétendait être l’État.

Un an après la chute du régime (le 8 décembre 2024), la Syrie tente de se relever lentement, mais elle demeure une mosaïque de composants hybrides, de milices rivales, de zones d’influence et d’ingérences étrangères. « Une mosaïque qui ne ressemble plus au pays d’avant », estime Khaldi.
Le territoire est éclaté entre forces locales, groupes armés (notamment les milices druzes à Soueida, au nord-est du pays), gouvernances provisoires ou structures étrangères. Les routes sont coupées, les administrations doublées ou contradictoires.

Avec des infrastructures détruites, une monnaie en chute libre et un secteur productif quasi paralysé, la survie quotidienne est devenue un exercice d’équilibriste.
Les Syriens ne nourrissent plus d’illusions sur l’arrivée immédiate d’un modèle démocratique idéal : il s’agit d’abord de survivre, de reconstruire, de retrouver un minimum de continuité.

Le traumatisme est profond, à cause des disparitions massives, de l’exil et des destructions psychologiques. Pourtant, affirme Khaldi, « jamais je n’ai entendu un Syrien regretter que la dictature soit tombée ».

De ses observations et des témoignages qu’il a collectés en arpentant le pays, Khaldi tire les priorités pour éviter que la Syrie ne devienne ni un conflit gelé ni un espace livré aux milices.
De son point de vue, la reconstruction politique ne peut se réduire à remplacer un gouvernement par un autre : il faut rebâtir les fondations, à savoir une justice indépendante, une police professionnelle et des administrations locales.

Des dizaines de groupes armés contrôlent aujourd’hui une partie du territoire, et une transition politique sérieuse est impensable sans un processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration, soutenu par une autorité légitime et par un cadre international solide.
Au-delà des aides internationales, la Syrie a besoin d’un cadre empêchant la capture des fonds par les anciens réseaux de corruption ou les factions armées.
Elle doit donner la priorité à la relance de l’agriculture, au rétablissement de l’électricité, des réseaux routiers et des petites industries, les seules capables à court terme de soutenir la vie quotidienne.

Le pays porte une blessure immense : celle des prisons secrètes, des fosses communes, des disparitions et des exactions documentées. « Sans justice, il n’y aura pas de paix durable », affirme Khaldi.
Il ne s’agit ni de vengeance ni de tribunaux-spectacle, mais de vérité et de reconnaissance, conditions indispensables à une réconciliation nationale.

De cet entretien se dégage une idée forte : malgré la faim, la peur, les ruines, malgré la fragmentation politique et l’ingérence étrangère, les Syriens n’ont pas renoncé à eux-mêmes.
Ils ouvrent des écoles improvisées, réparent des routes avec des moyens dérisoires, organisent l’entraide, résistent au chaos. « La Syrie n’est plus la Syrie d’avant, mais elle n’est pas condamnée pour autant », affirme Khaldi.
Son témoignage rappelle qu’un pays ne meurt pas quand un régime tombe ; il meurt lorsque plus personne ne croit possible de le reconstruire. Et les Syriens, eux, y croient encore.


Liban: Israël annonce des frappes dans le sud, appelle à des évacuations

L'armée israélienne a annoncé jeudi après-midi des frappes imminentes dans le sud du Liban contre ce qu'elle présente comme des infrastructures du mouvement islamiste Hezbollah, et a appelé à des évacuations dans deux villages de cette région. (AFP)
L'armée israélienne a annoncé jeudi après-midi des frappes imminentes dans le sud du Liban contre ce qu'elle présente comme des infrastructures du mouvement islamiste Hezbollah, et a appelé à des évacuations dans deux villages de cette région. (AFP)
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  • Les forces israéliennes vont "bientôt attaquer des infrastructures terroristes du Hezbollah à travers le sud du Liban afin de contrer ses tentatives illégales de rétablir ses activités dans la région"
  • Dans un "message urgent" en arabe, le colonel Adraee signale, cartes à l'appui, deux bâtiments dans les villages de Jbaa et Mahrouna, dont il appelle les riverains dans un rayon d'au moins 300 mètres à s'écarter

JERUSALEM: L'armée israélienne a annoncé jeudi après-midi des frappes imminentes dans le sud du Liban contre ce qu'elle présente comme des infrastructures du mouvement islamiste Hezbollah, et a appelé à des évacuations dans deux villages de cette région.

Cette annonce survient au lendemain d'une rencontre entre responsables civils libanais et israélien, lors d'une réunion de l'organisme de surveillance du cessez-le-feu entré en vigueur il y a un an, présentée comme de premières discussions directes depuis plus de 40 ans entre les deux pays toujours techniquement en état de guerre.

Les forces israéliennes vont "bientôt attaquer des infrastructures terroristes du Hezbollah à travers le sud du Liban afin de contrer ses tentatives illégales de rétablir ses activités dans la région", a annoncé le colonel Avichay Adraee, porte-parole de l'armée israélienne pour le public arabophone.

Dans un "message urgent" en arabe, le colonel Adraee signale, cartes à l'appui, deux bâtiments dans les villages de Jbaa et Mahrouna, dont il appelle les riverains dans un rayon d'au moins 300 mètres à s'écarter.

Accusant le Hezbollah de se réarmer dans le sud du pays et de violer ainsi les termes de la trêve entrée en vigueur fin novembre 2024, l'armée israélienne a multiplié depuis plusieurs semaines les frappes aériennes dans le sud du Liban mais a marqué une pause dans ses attaques pendant la visite du pape Léon XIV cette semaine.

Israël a même frappé jusque dans la banlieue de Beyrouth le 23 novembre pour y éliminer le chef militaire du Hezbollah, Haitham Ali Tabatabai.

Le Liban dénonce ces attaques comme des violations patentes du cessez-le-feu.

Mais Israël, qui peut compter sur l'aval tacite des Etats-Unis pour ces frappes, affirme qu'il ne fait qu'appliquer la trêve en empêchant le Hezbollah, allié de la République islamique d'Iran, ennemie d'Israël, "de se reconstruire et de se réarmer".

Tout en déclarant que les discussions directes de mercredi avec le Liban s'étaient déroulées dans "une atmosphère positive", le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a rappelé mercredi soir que le désarmement du Hezbollah restait une exigence "incontournable" pour son pays.