La relation Israël - ONU en chute libre

Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, s'adresse à la presse lors de l'ouverture de la 55e session du Conseil des droits de l'homme à Genève, le 26 février 2024. (AFP)
Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, s'adresse à la presse lors de l'ouverture de la 55e session du Conseil des droits de l'homme à Genève, le 26 février 2024. (AFP)
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Publié le Mercredi 30 octobre 2024

La relation Israël - ONU en chute libre

  • Les critiques soulignent que depuis le vote de l'Assemblée générale en 1948 qui a ouvert la voie à la reconnaissance d'Israël, le pays a ignoré de nombreuses résolutions de l'ONU et décisions de tribunaux internationaux, sans aucune conséquence
  • Israël a toujours ignoré la résolution 194 garantissant aux Palestiniens expulsés en 1948 du territoire conquis par Israël le droit au retour ou à une indemnisation

GENEVE: Les relations entre Israël et les Nations unies étaient exécrables mais l'interdiction par le parlement israélien de l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens est perçue comme une déclaration de guerre à l'ensemble de l'organisation internationale.

Israël a été soumis à un feu roulant de critiques -y compris d'alliés fidèles- depuis le vote lundi soir interdisant à l'Unrwa, qui coordonne la quasi-totalité de l'aide à la bande de Gaza ravagée par la guerre, de travailler "sur le territoire israélien", y compris Jérusalem-Est, secteur annexé.

Cette décision a plongé une relation déjà toxique dans un nouvel abîme, après une année d'accusations voire d'insultes et même de remise en question de l’adhésion d'Israël à l'ONU.

"C'est le point culminant d'une déclaration de guerre", résume mardi un éditorial du quotidien suisse Le Temps.

- Complice -

Depuis le 7-Octobre, de nombreuses agences de l'ONU ont sévèrement critiqué la façon dont Israël mène la guerre à Gaza, en représailles à l'attaque sur son territoire par le mouvement islamique Hamas.

Action disproportionnée pour l'ONU qui dénonce la catastrophe humanitaire et le lourd bilan humain -plus de 43.000 morts- dans un territoire totalement bouclé par Israël. Des experts du Conseil des droits de l'Homme accusent Israël de "génocide".

Côté israélien, on juge que l'ONU est partiale et son chef Antonio Guterres a été déclaré "persona non grata". "C'est un Secrétaire général anti-israélien qui apporte son soutien aux terroristes, aux violeurs et aux meurtriers", a lancé le ministre des Affaires étrangères Israël Katz.

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu n'avait pas hésité à qualifier l'ONU de "marais antisémite" à la tribune même de l'Assemblée générale de l'organisation.

Un mépris reflété dans la manière cinglante dont M. Netanyahu a renvoyé à la collaboration de la France avec les nazis quand le président français Emmanuel Macron avait suggéré qu'Israël devait son existence aux Nations unies.

Au-delà des mots, l'armée israélienne a aussi été accusée d'avoir "délibérément" attaqué des positions de la Finul, la force de l'ONU positionnée le long de la ligne de démarcation entre Israël et le Liban, et d'avoir blessé plusieurs casques bleus.

- "Trahison" de l'ONU -

"Nous avons le sentiment que l'ONU a trahi Israël", a récemment déclaré à l'AFP son ambassadeur à Genève, Daniel Meron.

Cela fait longtemps qu'Israël se plaint d'être la cible de l'ONU, soulignant par exemple le nombre croissant de résolutions à son égard. Depuis la création du Conseil des droits de l'Homme de l'ONU en 2006, plus d'un tiers des plus de 300 résolutions de condamnation ont visé Israël, un nombre "hallucinant", selon l'ambassadeur.

Les appels à la démission du Secrétaire général ont vite suivi une déclaration d'Antonio Guterres, qui a affirmé que l'attaque du 7-Octobre "ne s'était pas produite dans le vide. Le peuple palestinien a été soumis à 56 ans d'occupation étouffante".

Mais c'est l'Unrwa qui a subi les attaques les plus violentes. Plus de 220 de ses employés ont été tués à Gaza - alors qu'elle a dû faire face à des coupes budgétaires dramatiques et à des appels à son démantèlement suite aux accusations israéliennes selon lesquelles certains de ses employés ont participé à l'attaque du 7-Octobre.

- "Impunité prolongée" -

Les critiques soulignent que depuis le vote de l'Assemblée générale en 1948 qui a ouvert la voie à la reconnaissance d'Israël, le pays a ignoré de nombreuses résolutions de l'ONU et décisions de tribunaux internationaux, sans aucune conséquence.

Israël a toujours ignoré la résolution 194 garantissant aux Palestiniens expulsés en 1948 du territoire conquis par Israël le droit au retour ou à une indemnisation, ainsi que les condamnations des annexions après la guerre israélo-arabe de 1967 et de sa politique de colonisation en Cisjordanie.

En permettant à Israël de rester "en situation de non-respect du droit international, l'Occident fait croire aux Israéliens qu'ils sont au-dessus du droit international", a récemment déclaré à l'AFP Riccardo Bocco, professeur de sociologie politique à l'Institut universitaire de hautes études internationales de Genève.

Francesca Albanese, experte indépendante de l'ONU sur la situation des droits de l'Homme dans les territoires palestiniens, abonde dans le même sens.

Le "génocide en cours" à Gaza, a-t-elle déclaré dans un rapport publié mardi, "est sans aucun doute la conséquence du statut exceptionnel et de l'impunité prolongée dont jouit Israël". La juriste italienne -dont Israël a demandé le limogeage- s'était récemment interrogée sur le statut de membre d'une "organisation pour laquelle Israël semble n'avoir aucun respect".


La BBC doit «se battre» pour défendre son journalisme, dit le DG sortant

Au moment où le groupe est très critiqué et accusé de partialité, en particulier par la droite conservatrice, le DG sortant a reconnu que "les temps sont durs pour la BBC". (AFP)
Au moment où le groupe est très critiqué et accusé de partialité, en particulier par la droite conservatrice, le DG sortant a reconnu que "les temps sont durs pour la BBC". (AFP)
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  • Tim Davie, qui a démissionné dimanche, a reconnu qu'une "erreur" avait été commise dans un documentaire sur le président américain diffusé en octobre 2024, selon ses propos tenus lors d'une visioconférence avec les employés du groupe audiovisuel public
  • Le groupe audiovisuel public britannique est dans la tourmente après avoir réalisé, pour ce documentaire diffusé dans son magazine d'information phare "Panorama", un montage trompeur d'un discours de Donald Trump

LONDRES: La BBC doit "se battre" pour défendre son journalisme, a déclaré mardi le directeur général sortant de la BBC, Tim Davie, alors que le groupe public britannique est menacé de plainte en diffamation par Donald Trump.

Tim Davie, qui a démissionné dimanche, a reconnu qu'une "erreur" avait été commise dans un documentaire sur le président américain diffusé en octobre 2024, selon ses propos tenus lors d'une visioconférence avec les employés du groupe audiovisuel public, rapportés par la chaîne BBC News.

Le groupe audiovisuel public britannique est dans la tourmente après avoir réalisé, pour ce documentaire diffusé dans son magazine d'information phare "Panorama", un montage trompeur d'un discours de Donald Trump, le 6 janvier 2021, qui donnait l'impression que le président sortant incitait explicitement ses partisans à une action violente contre le Congrès.

"Nous avons fait une erreur, et il y a eu un manquement à nos règles éditoriales", a reconnu Tim Davie, expliquant qu'il avait assumé sa "part de responsabilité" en démissionnant.

Il n'a toutefois pas mentionné directement la menace d'action en justice lancée par Donald Trump, ni la date de son départ effectif, lors de cette visioconférence avec le président de la BBC, Samir Shah.

Au moment où le groupe est très critiqué et accusé de partialité, en particulier par la droite conservatrice, le DG sortant a reconnu que "les temps sont durs pour la BBC".

"Mais nous nous en sortirons", et "nous devons nous battre pour défendre notre journalisme", a-t-il insisté.

"Nous sommes une organisation unique et précieuse, et je vois la liberté de la presse mise à rude épreuve, je vois son instrumentalisation", a-t-il encore ajouté.


Le président allemand demande à son homologue algérien de gracier l'écrivain Boualem Sansal

La présidence algérienne a confirmé dans son propre communiqué que M. Steinmeier avait demandé à Abdelmadjid Tebboune "d'accomplir un geste humanitaire en graciant l'écrivain Boualem Sansal", une information reprise par la télévision algérienne par ailleurs. (AFP)
La présidence algérienne a confirmé dans son propre communiqué que M. Steinmeier avait demandé à Abdelmadjid Tebboune "d'accomplir un geste humanitaire en graciant l'écrivain Boualem Sansal", une information reprise par la télévision algérienne par ailleurs. (AFP)
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  • "Un tel geste serait l'expression d'une attitude humanitaire et d'une vision politique à long terme. Il refléterait ma relation personnelle de longue date avec le président Tebboune et les bonnes relations entre nos deux pays"
  • Appelant son homologue Abdelmadjid Tebboune à un "geste humanitaire", Frank-Walter Steinmeier propose aussi que Boualem Sansal soit transféré en Allemagne pour "y bénéficier de soins médicaux (...) compte tenu de son âge avancé (...)"

BERLIN: Le président allemand a exhorté lundi son homologue algérien à gracier l'écrivain franco-algérien Boualem Sansal, emprisonné depuis un an en Algérie et au coeur d'une grave crise diplomatique entre Alger et Paris.

Appelant son homologue Abdelmadjid Tebboune à un "geste humanitaire", Frank-Walter Steinmeier propose aussi que Boualem Sansal soit transféré en Allemagne pour "y bénéficier de soins médicaux (...) compte tenu de son âge avancé (...) et de son état de santé fragile".

"Un tel geste serait l'expression d'une attitude humanitaire et d'une vision politique à long terme. Il refléterait ma relation personnelle de longue date avec le président Tebboune et les bonnes relations entre nos deux pays", a estimé le président allemand, dans un communiqué.

La présidence algérienne a confirmé dans son propre communiqué que M. Steinmeier avait demandé à Abdelmadjid Tebboune "d'accomplir un geste humanitaire en graciant l'écrivain Boualem Sansal", une information reprise par la télévision algérienne par ailleurs.

Selon des spécialistes à Alger, le fait que la présidence et la télévision publique reprennent les éléments de langage du président allemand peut être perçu comme un signe positif.

Mais aucune indication n'a été donnée quant au calendrier de la prise de décision par le président algérien.

Dans une longue interview accordée en septembre dernier, le président Abdelmadjid Tebboune avait par ailleurs évoqué la possibilité de se rendre en Allemagne fin 2025 ou début 2026.

Arrêté à Alger le 16 novembre 2024, le romancier et essayiste franco-algérien Boualem Sansal a été condamné en appel en juillet à cinq ans de réclusion pour avoir notamment déclaré que l'Algérie avait hérité sous la colonisation française de territoires appartenant jusque-là au Maroc.

Jeudi, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, avait souligné que la France menait un "dialogue exigeant" avec Alger pour obtenir la libération de Boualem Sansal.

L'affaire s'inscrit dans un contexte d'hostilité entre Paris et Alger, qui sont empêtrés depuis plus d'un an dans une crise diplomatique sans précédent qui s'est traduite par des expulsions de fonctionnaires de part et d'autre, le rappel des ambassadeurs des deux pays et des restrictions sur les porteurs de visas diplomatiques.


La BBC, dans l'oeil du cyclone, sommée de s'expliquer

Le président de la BBC, Samir Shah, doit s'expliquer lundi au lendemain de la démission retentissante du directeur général du groupe audiovisuel public britannique et de la patronne de sa chaîne d'information BBC News, après le montage trompeur d'un discours de Donald Trump. (AFP)
Le président de la BBC, Samir Shah, doit s'expliquer lundi au lendemain de la démission retentissante du directeur général du groupe audiovisuel public britannique et de la patronne de sa chaîne d'information BBC News, après le montage trompeur d'un discours de Donald Trump. (AFP)
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  • La BBC, institution longtemps chérie des Britanniques mais cible régulière des médias et responsables politiques conservateurs, est dans la tourmente, accusée ces derniers jours d'avoir déformé des propos du président américain dans un documentaire
  • La BBC est mise en cause pour avoir monté des passages différents d'un discours de Donald Trump datant du 6 janvier 2021, jour de l'assaut du Capitole à Washington, de telle façon qu'il semble inciter ses partisans à marcher vers le siège du Congrès

LONDRES: Le président de la BBC, Samir Shah, doit s'expliquer lundi au lendemain de la démission retentissante du directeur général du groupe audiovisuel public britannique et de la patronne de sa chaîne d'information BBC News, après le montage trompeur d'un discours de Donald Trump.

La BBC, institution longtemps chérie des Britanniques mais cible régulière des médias et responsables politiques conservateurs, est dans la tourmente, accusée ces derniers jours d'avoir déformé des propos du président américain dans un documentaire de son magazine d'information phare, "Panorama", diffusé en octobre 2024, une semaine avant la présidentielle américaine.

La BBC est mise en cause pour avoir monté des passages différents d'un discours de Donald Trump datant du 6 janvier 2021, jour de l'assaut du Capitole à Washington, de telle façon qu'il semble inciter ses partisans à marcher vers le siège du Congrès pour se "battre comme des diables".

Or, dans la phrase originale, M. Trump disait: "Nous allons marcher vers le Capitole et nous allons encourager nos courageux sénateurs et représentants et représentantes au Congrès". L'expression "se battre comme des diables" correspondait à un autre passage du discours.

Face à la polémique grandissante, son directeur général, Tim Davie, et la patronne de la chaîne d'information du groupe BBC News, Deborah Turness, ont annoncé dimanche leur démission, qui fait la Une des journaux lundi.

Le président américain a dénoncé les "journalistes corrompus" et "malhonnêtes" de la BBC, sur son réseau Truth Social.

Le président du conseil d'administration du groupe, Samir Shah, doit s'excuser et s'expliquer dans une réponse écrite aux questions de la commission parlementaire sur la culture sur cette affaire, et sur d'autres accusations de partialité sur la couverture de la guerre à Gaza.

"La BBC doit répondre à de graves questions concernant ses normes éditoriales et la manière dont la direction gère les problèmes", a jugé la présidente de la commission, Caroline Dinenage, estimant que le groupe public "se devait d'être exemplaire" face à la montée de la désinformation.

Lundi, la patronne démissionnaire de BBC News a de nouveau assuré qu'il n'y avait "pas de partialité institutionnelle" sur la chaîne, qui a produit le programme mis en accusation.

 

- "Violation des règles" -

 

La classe politique a quasi unanimement critiqué la BBC pour sa gestion de l'affaire, qui tombe d'autant plus mal que le groupe audiovisuel doit renégocier d'ici fin 2027 son nouveau contrat de mission avec le gouvernement.

La cheffe de l'opposition, Kemi Badenoch, a déploré "un catalogue de graves défaillances". Le chef du parti d'extrême droite Reform UK, Nigel Farage, a appelé à "un changement de fond en comble" du groupe public.

La BBC tire une grande part de ses ressources de la redevance annuelle (174,50 livres, soit 198 euros), payée par 22,8 millions de foyers, soit 3,8 milliards de livres.

Samir Shah a dit espérer que le futur directeur général du groupe, dont la nomination pourrait prendre plusieurs mois, "façonnerait positivement" le prochain contrat de mission. la ministre de la Culture, Lisa Nandy, qui a qualifié la situation d'"extrêmement grave", a affirmé que le futur contrat aiderait la BBC à "garantir son rôle" auprès du public.

Le chef du parti libéral démocrate (centriste), Ed Davey, a appelé le Premier ministre Keir Starmer, et la classe politique en général, à défendre la BBC face à Donald Trump et la sphère Maga. "Il est facile de voir pourquoi Trump veut détruire la première source d'information dans le monde. Nous ne pouvons pas le laisser faire", a-t-il prévenu sur la plateforme X.

Le Telegraph a eu connaissance d'une note interne rédigée par l'ancien conseiller indépendant du comité des normes éditoriales de la BBC, Michael Prescott, dans laquelle il suggérait que des erreurs avaient été commises dans le montage. Il affirme que les responsables chargés des normes éditoriales du groupe auprès de qui il a soulevé le problème ont nié toute violation des règles.

En octobre, le régulateur des médias avait épinglé la BBC pour avoir "enfreint les règles de diffusion" à propos d'un reportage à Gaza dans lequel le narrateur principal, un enfant, était le fils d'un haut responsable du mouvement islamiste palestinien Hamas.