Ouverture de la COP29 à Bakou: les dirigeants mondiaux se mobilisent pour une action climatique urgente

La COP29 se tient à Bakou, en Azerbaïdjan. (Conférence des Nations unies sur les changements climatiques)
La COP29 se tient à Bakou, en Azerbaïdjan. (Conférence des Nations unies sur les changements climatiques)
Short Url
Publié le Mardi 12 novembre 2024

Ouverture de la COP29 à Bakou: les dirigeants mondiaux se mobilisent pour une action climatique urgente

  •  Le ministre azerbaïdjanais de l'Écologie et des Ressources naturelles, Mukhtar Babayev, a succédé à Sultan Ahmed al-Jaber, qui avait présidé le précédent sommet à Dubaï l'année dernière
  • M. Babayev a déclaré que le monde subissait déjà les effets négatifs du changement climatique et a souligné l'importance de la collaboration internationale pour relever ces défis

RIYAD: Les dirigeants mondiaux ont appelé à l'augmentation des financements, au développement des marchés du carbone et au renforcement de la coopération internationale pour faire face à l'escalade de la crise environnementale, alors que le 29e sommet des Nations unies sur le climat s'est officiellement ouvert en Azerbaïdjan.

Au cours de la journée d'ouverture de la COP29, le ministre azerbaïdjanais de l'Écologie et des Ressources naturelles, Mukhtar Babayev, a succédé à Sultan Ahmed al-Jaber, qui avait présidé le précédent sommet à Dubaï l'année dernière.

Dans son discours à Bakou, M. Babayev a déclaré que le monde subissait déjà les effets négatifs du changement climatique et a souligné l'importance de la collaboration internationale pour relever ces défis.

Il a souligné que l'objectif principal de la présidence de la COP29 est de convenir d'un objectif de financement climatique équitable, ambitieux et collectif qui soit à la fois efficace et suffisant pour répondre à l'ampleur et à l'urgence de la crise.

«Nous comprenons les contraintes politiques et financières. Ces chiffres peuvent paraître élevés, mais ils ne sont rien comparés au coût de l'inaction. Ces investissements sont rentables», a-t-il déclaré.

Le ministre azerbaïdjanais de l'Écologie et des Ressources naturelles, Mukhtar Babayev. (Conférence des Nations unies sur les changements climatiques)

M. Babayev a également insisté sur l'importance de finaliser l'article 6 de l'Accord de Paris de 2015, qui se concentre sur le développement de marchés du carbone où les pays, les entreprises et les particuliers peuvent échanger des crédits d'émissions de gaz à effet de serre.

Cet accord prévoyait de limiter l'augmentation de la température mondiale à 1,5 degré Celsius par rapport aux niveaux préindustriels.

«Nous sommes déterminés à faire passer l'article 6 sur les marchés du carbone. L'article 6 est attendu depuis longtemps et il contribuera à protéger la planète en rapprochant efficacement les acheteurs et les vendeurs. Nous devons faire les choses correctement et dans les temps, y compris en ce qui concerne la transition vers un avenir sans combustibles fossiles d'une manière juste et ordonnée», a ajouté le président de la COP29.

M. Babayev a également souligné le besoin critique d'un financement accru pour les efforts climatiques, exhortant les gouvernements, le secteur privé et les institutions financières multilatérales à collaborer pour atteindre les objectifs de l'Accord de Paris.

«La COP29 est un moment de vérité pour l'Accord de Paris. Elle mettra à l'épreuve notre engagement envers le système climatique multilatéral. Nous devons maintenant démontrer que nous sommes prêts à atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés», a déclaré M. Babayev.

Il a ajouté que le monde devrait accélérer les investissements dans le secteur de l'énergie aujourd'hui pour sauver l'avenir.

«Nous courons à notre perte. Mais il ne s'agit pas de problèmes futurs. Le changement climatique est déjà là. Que vous le voyiez ou non, les gens souffrent dans l'ombre. Ils meurent dans l'obscurité, et ils ont besoin de plus que de compassion, de plus que de prières et la paperasse ne suffit pas. Ils réclament à grands cris des dirigeants et des actions», a déclaré M. Babayev.

Il a ajouté: «Aucun pays ni aucune initiative ne peut à lui seul résoudre cette crise. Cette conférence est l'affaire de tous. Le succès ou l'échec sera collectif. L'Azerbaïdjan peut construire un pont, mais vous devez tous l'emprunter. En fait, nous devons commencer à courir. Allons de l'avant en toute solidarité pour un monde vert.»

M. Babayev a succédé à Sultan Ahmed al-Jaber des Émirats arabes unis à la présidence. (Conférence des Nations unies sur les changements climatiques)

Impacts du changement climatique

Lors de la cérémonie d'ouverture, Simon Stiell, secrétaire de direction de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, a souligné que le réchauffement de la planète affectait tous les aspects de la vie humaine et a appelé à une action immédiate pour limiter les dégâts.

«Voulez-vous que vos factures d'alimentation et d'énergie augmentent encore plus? Voulez-vous que votre pays devienne économiquement non compétitif? Voulez-vous vraiment que l'instabilité mondiale s'aggrave et coûte des vies précieuses? Cette crise affecte chaque individu dans le monde d'une manière ou d'une autre», a déclaré M. Stiell.

Il a ajouté: «Nous devons nous mettre d'accord sur un nouvel objectif mondial de financement de la lutte contre le changement climatique. Si au moins deux tiers des nations du monde n'ont pas les moyens de réduire rapidement leurs émissions, chaque nation en paiera le prix fort.»

M. Stiell a souligné que le financement de la lutte contre le changement climatique n'est pas une question de charité, mais une question d'intérêt personnel pour tous les pays, y compris les plus riches.

«Nous devons redoubler d'efforts pour réformer le système financier mondial et donner aux pays la marge de manœuvre budgétaire dont ils ont désespérément besoin», a-t-il déclaré.

M. Stiell a également souligné l'importance de finaliser l'article 6 et a déclaré que les marchés internationaux du carbone joueront un rôle crucial dans l'accélération de la transition énergétique.

«Nous devons aller de l'avant en matière d'atténuation, afin que les objectifs fixés à Dubaï soient atteints. Nous devons nous tenir à l'accord visant à limiter réchauffement climatique à 1,5°C au-dessus des niveaux préindustriels. Et même si les températures augmentent, la mise en œuvre de nos accords doit les faire reculer», a déclaré M. Stiell.

Il a indiqué que les investissements dans les infrastructures d'énergie propre devraient atteindre 2 000 milliards de dollars en 2024 (1 dollar = 0,94 euro), soit près du double des investissements dans les combustibles fossiles.

M. Stiell a également insisté sur la responsabilité mondiale d'accélérer la transition vers les énergies renouvelables et de veiller à ce que les bénéfices soient partagés par tous les pays et toutes les populations.

«Nous devons nous mettre d'accord sur des indicateurs d'adaptation. On ne peut pas gérer ce que l'on ne mesure pas. Nous devons savoir si nous sommes sur la voie du renforcement de la résilience. Nous devons continuer à améliorer les nouveaux mécanismes de soutien financier et technique pour les pertes et dommages», a-t-il déclaré.

Simon Stiell, secrétaire de direction de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques. (Conférence des Nations unies sur les changements climatiques)

M. Stiell a également souligné l'importance de la transparence pour atteindre les objectifs climatiques. Les rapports biennaux sur la transparence, attendus cette année, devraient fournir une image plus claire des progrès réalisés dans le cadre de l'action climatique.

M. Stiell a ajouté: «Le moment est venu de montrer que la coopération mondiale n'est pas au point mort. Elle est à la hauteur de la situation. Alors, relevons le défi ensemble.»

Chemin parcouru depuis la COP28

Dans une brève allocution prononcée lors de la cérémonie d'ouverture, Sultan al-Jaber, président de la COP28, est revenu sur les succès du sommet de l'année dernière, soulignant l'élan donné par les initiatives climatiques lancées à Dubaï.

«En présentant le consensus historique, complet, équilibré et novateur des Émirats arabes unis, nous avons accompli ce que beaucoup pensaient impossible. Dans les mois qui ont suivi la COP28, les initiatives que nous avons lancées ont connu un véritable essor», a déclaré M. Al-Jaber.

Il a ajouté que le monde devrait battre un nouveau record de croissance des énergies renouvelables cette année, en ajoutant plus de 500 gigawatts à la capacité mondiale.

«Cinquante-cinq entreprises ont rejoint la charte de décarbonisation du pétrole et du gaz, s'engageant à réduire à zéro les émissions de méthane d'ici à 2030 et à atteindre l'objectif zéro émission nette d'ici à 2050», a affirmé M. Al-Jaber.

Lors de la COP28, près de 200 pays ont accepté de travailler à la réalisation d'un ensemble ambitieux d'objectifs énergétiques mondiaux dans le cadre du résultat connu sous le nom de Consensus des Émirats arabes unis, s'engageant à atteindre l'objectif zéro émission nette dans le secteur mondial de l'énergie d'ici à 2050.

L'engagement consiste également à abandonner les combustibles fossiles, à tripler la capacité des énergies renouvelables et à doubler le taux d'amélioration de l'efficacité énergétique d'ici à la fin de la décennie.

M. Al-Jaber, qui est également ministre de l'Industrie et des Technologies de pointe des Émirats arabes unis, a souligné l'importance de la coopération intersectorielle pour atteindre les objectifs climatiques.

«Au début du mois, à Abu Dhabi, nous avons réuni des experts du climat, de l'énergie, de l'intelligence artificielle, de la finance et de l'investissement dans le cadre d'un effort intégré visant à stimuler une croissance à faible émission de carbone. Lorsque les secteurs travaillent ensemble, nous pouvons stimuler les économies et réduire les émissions. Nous pouvons réaliser des progrès climatiques et socio-économiques en même temps», a-t-il déclaré.

M. Al-Jaber a également souligné les progrès d'Alterra, le plus grand fonds catalytique mondial pour le climat, qui a déjà alloué 6,5 milliards de dollars sur ses 30 milliards de dollars.

«Nous avons également progressé en ce qui concerne le fonds pour les pertes et dommages. À ce jour, 853 millions de dollars ont été promis. Le consensus auquel nous sommes parvenus à Dubaï est véritablement historique. L'histoire nous jugera sur nos actes et non sur nos paroles», a ajouté M. Al-Jaber.

«Laissons la positivité prévaloir et alimenter le processus. Que les actions soient plus éloquentes que les mots. Que les résultats l'emportent sur les discours. Nous sommes ce que nous faisons, pas ce que nous disons», a-t-il conclu.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com
 


Meurtre d'un patron américain, le suspect était en possession d'un manifeste contre le système d'assurance santé

Cette photo de réservation du 9 décembre 2024, obtenue auprès de l'administration pénitentiaire de Pennsylvanie, montre Luigi Mangione. Mangione, 26 ans, a été arrêté le 9 décembre pour le meurtre ciblé d'un cadre de l'assurance maladie dans les rues de New York,  (Photo by Handout / Pennsylvania Department of Corrections / AFP)
Cette photo de réservation du 9 décembre 2024, obtenue auprès de l'administration pénitentiaire de Pennsylvanie, montre Luigi Mangione. Mangione, 26 ans, a été arrêté le 9 décembre pour le meurtre ciblé d'un cadre de l'assurance maladie dans les rues de New York, (Photo by Handout / Pennsylvania Department of Corrections / AFP)
Short Url
  • Le suspect numéro un de l'assassinat du patron d'un géant de l'assurance santé à New York avait sur lui un texte manuscrit exprimant sa colère contre ce secteur, a révélé mardi un responsable de la police.
  • « J'ai pu lire ce manifeste (...) C'est un manuscrit. Il laisse entendre qu'il est frustré par le système de santé des États-Unis », a expliqué Joseph Kenny, le chef des enquêteurs de la police de New York.

NEW-YORK : Le suspect numéro un de l'assassinat du patron d'un géant de l'assurance santé à New York avait sur lui un texte manuscrit exprimant sa colère contre ce secteur, a révélé mardi un responsable de la police.

« J'ai pu lire ce manifeste (...) C'est un manuscrit. Il laisse entendre qu'il est frustré par le système de santé des États-Unis », a expliqué Joseph Kenny, le chef des enquêteurs de la police de New York, dans l'émission Good Morning America sur la chaîne ABC.

« Plus précisément, Luigi Mangione, 26 ans, explique que notre système de santé est le plus coûteux du monde, alors que l'espérance de vie d'un Américain se classe au 42ᵉ rang mondial. Il a écrit beaucoup sur son mépris pour les entreprises américaines et en particulier pour l'industrie de la santé », a-t-il ajouté.

Au lendemain de son arrestation et de son inculpation pour l'assassinat de Brian Thompson, le patron de UnitedHealthCare, premier assureur santé privé du pays, beaucoup de questions se posent sur le parcours et les motivations du suspect. Ce dernier est un fils de bonne famille diplômé en ingénierie d'une université privée de l'État de Pennsylvanie.

Luigi Mangione a été arrêté dans un McDonald's d'Altoona, à environ 500 km à l'ouest de New York. Un juge d'un tribunal local de Pennsylvanie l'a placé en détention dans l'attente de son transfert devant la justice new-yorkaise.

Les policiers s'interrogent notamment sur une photo de radio médicale affichée sur le profil du suspect sur le réseau social X.

Mercredi dernier à l'aube, le tueur s'est approché de Brian Thompson, âgé de 50 ans, et l'a froidement abattu en pleine rue devant un hôtel à Manhattan, une scène capturée par une caméra de vidéosurveillance et visionnée par des millions de personnes.

La mort de Brian Thompson, dans cet assassinat visiblement prémédité en pleine rue, a provoqué un fort émoi, mais elle a aussi donné lieu à des commentaires haineux sur les réseaux sociaux à l'encontre des programmes d'assurance santé américains, illustrant une colère profonde à l'égard d'un système lucratif accusé de s'enrichir sur le dos des patients.

« On ne tue pas quelqu'un de sang-froid pour des questions politiques ou pour exprimer un point de vue », a condamné lundi Josh Shapiro, le gouverneur démocrate de Pennsylvanie.


Immigration irrégulière : Londres et Berlin signent un plan d'action

Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) et la ministre allemande de l'Intérieur Nancy Faeser (3R) assistent à une réunion des ministres et agences européens, à Carlton Gardens à Londres, le 10 décembre 2024.  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) et la ministre allemande de l'Intérieur Nancy Faeser (3R) assistent à une réunion des ministres et agences européens, à Carlton Gardens à Londres, le 10 décembre 2024. (Photo AFP)
Short Url
  • Le Royaume-Uni et l'Allemagne ont signé un plan d'action conjoint pour lutter contre les réseaux de passeurs de migrants, alors que plusieurs ministres de l'Intérieur européens se réunissent mardi à Londres.
  • Près de 34 000 personnes sont arrivées au Royaume-Uni depuis janvier en traversant la Manche sur des canots de fortune, et au moins 70 personnes y ont trouvé la mort en 2023, année la plus meurtrière.

LONDRES : Le Royaume-Uni et l'Allemagne ont signé un plan d'action conjoint pour lutter contre les réseaux de passeurs de migrants, alors que plusieurs ministres de l'Intérieur européens se réunissent mardi à Londres.

Ce plan doit permettre de « renforcer les capacités opérationnelles des forces de l'ordre britanniques et allemandes » face à ces réseaux criminels, a indiqué lundi soir le ministère britannique dans un communiqué.

Le Home Office a affirmé que l'Allemagne avait « l'intention de clarifier sa loi » pour permettre de poursuivre en justice les personnes qui aident à l'organisation des traversées de migrants vers le Royaume-Uni, notamment celles qui sont impliquées dans la fourniture et le stockage de canots pneumatiques et de moteurs.

Berlin « a accepté d'examiner si les dispositions pénales contre les délits liés au trafic de migrants doivent être davantage précisées, en particulier en ce qui concerne les activités de soutien logistique menées en Allemagne » pour les traversées de la Manche, a simplement indiqué de son côté le ministère allemand de l'Intérieur.

Près de 34 000 personnes sont arrivées au Royaume-Uni depuis janvier en traversant la Manche sur des canots de fortune, et au moins 70 personnes y ont trouvé la mort en 2023, année la plus meurtrière.

L'ambassadeur allemand à Londres, Miguel Berger, a souligné que le Brexit avait compliqué la coopération entre les pays de l'UE et le Royaume-Uni dans la lutte contre l'immigration irrégulière.

« Nous essayons maintenant de voir comment nous pouvons à nouveau renforcer notre coopération », a-t-il déclaré sur la BBC.

Pour Angela Eagle, secrétaire d'État à la sécurité des frontières et à l'asile, cet « accord rend les choses beaucoup plus claires ».

« Il augmentera notre capacité à coopérer, tant sur le plan opérationnel que dans le cadre des poursuites judiciaires, et nous serons en mesure de démanteler davantage de réseaux criminels organisés », a-t-elle affirmé sur Sky News.

La ministre allemande de l'Intérieur, Nancy Faeser, a salué un accord qui aidera à mettre fin aux activités inhumaines des organisations criminelles de trafic de migrants, reconnaissant que beaucoup de ces crimes sont planifiés en Allemagne.

Cet accord intervient alors que les ministres de l'Intérieur du Royaume-Uni, d'Allemagne, de France, des Pays-Bas et de Belgique (le « groupe de Calais ») sont réunis à Londres pour discuter de la lutte contre les réseaux de passeurs de migrants, avec des représentants de la Commission européenne et des agences Frontex et Europol.

Au programme : le « rôle des flux de financement illicites » et le partage de renseignements pour mieux poursuivre les passeurs en Europe.

Le Premier ministre travailliste Keir Starmer, arrivé au pouvoir en juillet, s'est engagé à réduire l'immigration, régulière comme irrégulière, et a fustigé « l'échec » de ses prédécesseurs conservateurs sur ce sujet.


Le prix Nobel de la paix 2024 met en garde Poutine contre la menace nucléaire

Short Url
  • Lundi, lauréate du prix Nobel de la paix 2024, l'association japonaise des survivants de la bombe atomique, Nihon Hidankyo, a exhorté la Russie à cesser d'agiter la menace nucléaire pour remporter la guerre en Ukraine.
  • Le président russe, qui agite régulièrement, de façon plus ou moins explicite, la menace de recourir à l'arme nucléaire, a récemment modifié par décret les possibilités d'y recourir.

OSLO : Lundi, lauréate du prix Nobel de la paix 2024, l'association japonaise des survivants de la bombe atomique, Nihon Hidankyo, a exhorté la Russie à cesser d'agiter la menace nucléaire pour remporter la guerre en Ukraine.

« Je pense que le président Poutine ne comprend pas vraiment ce que les armes nucléaires représentent pour les êtres humains, de quel type d'arme il s'agit », a déclaré Terumi Tanaka, coprésidente de l'association.

« Je pense qu'il n'y a même pas réfléchi », a ajouté le nonagénaire lors d'une conférence de presse à Oslo, à la veille de la cérémonie de remise du prix.

Le président russe, qui agite régulièrement, de façon plus ou moins explicite, la menace de recourir à l'arme nucléaire, a récemment modifié par décret les possibilités d'y recourir.

Jeudi, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a répété que la Russie était prête à utiliser « tous les moyens » possibles pour se défendre.

Le 21 novembre, Moscou avait démontré qu'elle était prête à recourir à la force en tirant un missile balistique de portée intermédiaire sur une ville ukrainienne, un engin conçu pour porter l'arme nucléaire dont il avait simplement été démuni pour ce tir.

« Monsieur Poutine, nous voulons vous dire que les armes nucléaires ne doivent jamais être utilisées. C'est un acte qui irait à l'encontre de l'humanité », a insisté Terumi Tanaka.

Nihon Hidankyo milite inlassablement contre ces armes de destruction massive, près de 80 ans après les bombardements atomiques de Hiroshima et Nagasaki, s'appuyant notamment sur les témoignages des survivants, les « hibakusha ».

Les bombardements nucléaires américains sur ces deux villes japonaises, les 6 et 9 août 1945, firent environ 214 000 morts et précipitèrent la capitulation du Japon ainsi que la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Terumi Tanaka avait 13 ans quand Nagasaki, où il vivait, a été pulvérisée par « la » bombe.

Notant que « l'Amérique a créé et utilisé cette arme contre l'humanité », il a souligné, lundi, ne pas rechercher « une compensation monétaire » de la part des autorités américaines.

« Ce que nous aimerions voir de la part des États-Unis, a-t-il dit, c'est qu'ils abolissent leurs armes nucléaires. »

Avec le temps, les membres de Nihon Hidankyo se font de plus en plus rares. Le gouvernement nippon recense environ 106 800 « hibakusha » toujours en vie aujourd'hui, dont l'âge moyen est de 85 ans.

- Le tabou nucléaire -

Mardi, les trois coprésidents de Nihon Hidankyo recevront officiellement le prix Nobel de la paix, décerné à l'association en octobre, à l'hôtel de ville d'Oslo.

« Notre message à Poutine, ainsi qu'aux autres États dotés de l'arme nucléaire, est le suivant : écoutez les témoignages des hibakusha », a souligné Jørgen Watne Frydnes, le président du comité Nobel.

« Il est crucial pour l'humanité de préserver le tabou nucléaire et de stigmatiser ces armes comme étant moralement inacceptables. Menacer de les utiliser est une manière de réduire le sens de ce tabou, et cela ne devrait pas être fait », a-t-il ajouté.

« Et bien sûr, leur utilisation ne devrait jamais, sous aucun prétexte, être répétée par quiconque sur Terre », a-t-il conclu.

Neuf pays détiennent aujourd'hui l'arme atomique : les États-Unis, la Russie, la France, la Grande-Bretagne, la Chine, l'Inde, le Pakistan, la Corée du Nord et, selon certaines sources, Israël.

Avec l'intensification des tensions géopolitiques dans le monde, ces puissances nucléaires modernisent leurs arsenaux, soulignait en juin l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri).

En janvier, sur les quelque 12 121 ogives nucléaires existant dans le monde, environ 9 585 étaient disponibles pour une utilisation potentielle, comme l'ont relevé les chercheurs du Sipri.

En 2017, 122 gouvernements avaient négocié et adopté le traité historique sur l'interdiction des armes nucléaires (TIAN) à l'ONU, mais la portée de ce texte est essentiellement symbolique puisqu'aucune puissance nucléaire ne l'a signé.

« Bien sûr, les États possédant des armes nucléaires s'y opposeront », a noté Terumi Tanaka, appelant les citoyens de chacun de ces pays à « leur montrer que leur résistance est déplacée ».

« Nous voulons créer un monde débarrassé à la fois des armes nucléaires et des guerres. »