Cessez-le-feu entre le Liban et Israël: les 60 jours de tous les dangers

Même renforcées de 1 500 éléments supplémentaires, les forces armées libanaises au Liban-Sud, fortes de quatre mille hommes seront-elles en mesure de repousser les éléments armés du Hezbollah au nord du fleuve Litani et d’empêcher tout acte hostile de leur part en direction d’Israël? (AFP)
Même renforcées de 1 500 éléments supplémentaires, les forces armées libanaises au Liban-Sud, fortes de quatre mille hommes seront-elles en mesure de repousser les éléments armés du Hezbollah au nord du fleuve Litani et d’empêcher tout acte hostile de leur part en direction d’Israël? (AFP)
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Publié le Jeudi 28 novembre 2024

Cessez-le-feu entre le Liban et Israël: les 60 jours de tous les dangers

  • Israël et le Hezbollah conservent leur droit à se défendre
  • Il faudra donc se fier à leur bonne volonté respective pour qu’ils n'aient pas besoin de l'exercer

PARIS: Bienvenu certes, mais surtout compliqué. C’est ce que laisse penser l’accord de cessez-le-feu qui est entré en vigueur ce matin entre le Liban et Israël.

Bienvenu, parce qu’il survient à la suite d’un peu plus de deux mois d’affrontements meurtriers qui ont provoqué, du côté libanais, des pertes humaines estimées à plus de 3 400 morts et 14 000 blessés, et plus d’un million deux cent mille déplacés.

Des villes et des villages anéantis, tout comme certains quartiers de Beyrouth et de sa banlieue sud, alors que les besoins de la reconstruction sont estimés par la Banque mondiale à 5 milliards de dollars.

L’accord vient donc limiter les pertes humaines et les dégâts matériels, dans un pays qui souffre déjà d’une profonde crise économique et financière.

Cependant, il s’agit d’un accord bien compliqué, à commencer par sa dénomination.

Présenté comme un accord de cessez-le-feu, il s’agit en fait d’une trêve de soixante jours, ouverte à tous les dangers, puisque sa mise en application par le Liban repose essentiellement sur les forces armées libanaises sous-équipées et l’État libanais décrépit.

En résumé, l’accord, dont le texte est tenu secret, vise à une cessation complète des hostilités de part et d'autre de la Ligne bleue, entre Israël et le Liban et doit permettre, dans un délai de 60 jours, d'obtenir un retrait des forces israéliennes et un déploiement parallèle et coordonné des forces armées libanaises

Arraché de justesse à la suite d’âpres négociations menées entre Israël et le Liban par l’émissaire américain Amos Hochstein, l’accord a été immédiatement soutenu par une déclaration conjointe des présidents américain Joe Biden et français Emmanuel Macron.

Biden et Macron s’engagent dans leur déclaration à travailler avec «Israël et le Liban pour veiller à ce que cet arrangement soit mis en œuvre dans son intégralité et appliqué».

Ils appellent toutes les parties prenantes, y compris les partenaires régionaux et les partenaires internationaux, à le soutenir et se disent déterminés «à faire en sorte que ce conflit ne provoque pas de nouveau cycle de violence».

Malgré ce volontarisme affiché et cette détermination à aller de l’avant, la mise en œuvre de l’accord ne va pas sans un certain nombre de complications. 

En résumé, l’accord, dont le texte est tenu secret, vise à une cessation complète des hostilités de part et d'autre de la Ligne bleue, entre Israël et le Liban et doit permettre, dans un délai de 60 jours, d'obtenir un retrait des forces israéliennes et un déploiement parallèle et coordonné des forces armées libanaises qui sont au cœur de la résolution 1701 du conseil de sécurité.

Le volet politique n’est pas en reste, puisqu’aussitôt l’accord annoncé, Macron a indiqué, dans une vidéo publiée sur X, que la restauration de la souveraineté du Liban passe par l’élection d’un «président capable de rassembler les Libanais par la formation d’un gouvernement fort et représentatif et l’adoption des réformes nécessaires au redressement économique et financier du pays».

Il s'agit donc de restaurer la souveraineté du Liban sur le sud du fleuve Litani à travers le redéploiement des forces armées libanaises, sachant que ce redéploiement pose toute une série de questions. 

Même renforcées de 1 500 éléments supplémentaires, les forces armées libanaises au Liban-Sud, fortes de quatre mille hommes seront-elles en mesure de repousser les éléments armés du Hezbollah au nord du fleuve Litani et d’empêcher tout acte hostile de leur part en direction d’Israël?

Ce parti proche de l’Iran a été certainement affaibli tout au long des deux mois précédents et son commandement a donné le feu vert à l’accord, mais il n’est pas dit qu’il ait renoncé à son combat contre l’État hébreu.

D’ailleurs, selon le cadre défini avec les partis, Israël et le Hezbollah conservent leur droit à se défendre. Il faudra donc se fier à leur bonne volonté respective pour qu’ils n'aient pas besoin de l'exercer.

Il est vrai que la Force intérimaire des nations unies (Finul) sera aux côtés des forces armées libanaises dans l’accomplissement de cette tâche et que la communauté internationale est déterminée à les renforcer matériellement, mais tout cela reste bien fragile.

Les aléas de la politique iranienne dont le Hezbollah est l’exécutant dans la région cache bien des mystères, tout comme les intentions des extrémistes israéliens, qui n’ont pas renoncé à éradiquer ce parti.

Il faut donc s’accrocher à l’espoir que dans les 60 jours interviendront un retrait coordonné des troupes israéliennes et des combattants du Hezbollah et le redéploiement de l’armée libanaise, afin d'établir une solution permanente et durable de cessation des hostilités sur la frontière.

Le volet politique n’est pas en reste, puisqu’aussitôt l’accord annoncé, Macron a indiqué, dans une vidéo publiée sur X, que la restauration de la souveraineté du Liban passe par l’élection d’un «président capable de rassembler les Libanais par la formation d’un gouvernement fort et représentatif et l’adoption des réformes nécessaires au redressement économique et financier du pays».

En somme, une feuille de route bien connue depuis des années et jamais mise en application par les forces politiques libanaises plus attachées à leurs intérêts communautaires qu’au renforcement des institutions étatiques et la construction d’un socle solide de cohésion nationale.


Centre de coordination militaro-civile pour Gaza: beaucoup de discussions, peu de résultats

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  • "Il y a des moments où on se dit qu'on a touché le fond mais qu'on creuse encore" ironise un humanitaire qui s'y est rendu plusieurs fois pour parler des abris fournis aux centaines de milliers de Palestiniens de Gaza déplacés
  • "Au départ, personne ne savait ce que c'était, mais tout le monde voulait en être", raconte un diplomate européen à l'AFP, "maintenant les gens déchantent un peu, ils trouvent que rien n'avance, mais on n'a pas le choix"

JERUSALEM: Lancé par les Etats-Unis dans le sillage du cessez-le-feu entre Israël et le Hamas pour surveiller la trêve et favoriser l'afflux d'aide humanitaire, le Centre de coordination militaro-civile (CMCC) pour Gaza peine à tenir ses promesses.

"Au départ, personne ne savait ce que c'était, mais tout le monde voulait en être", raconte un diplomate européen à l'AFP, "maintenant les gens déchantent un peu, ils trouvent que rien n'avance, mais on n'a pas le choix, il n'y a aucune autre initiative, c'est ça ou continuer à discuter dans le vent avec des Israéliens".

"Il y a des moments où on se dit qu'on a touché le fond mais qu'on creuse encore", ironise un humanitaire qui s'y est rendu plusieurs fois pour parler des abris fournis aux centaines de milliers de Palestiniens de Gaza déplacés par la campagne militaire israélienne.

Le CMCC doit permettre d'amorcer la suite des étapes du plan de paix pour Gaza après plus de deux ans d'une guerre dévastatrice déclenchée le 7 octobre 2023 par l'attaque sans précédent du mouvement palestinien Hamas sur Israël.

"Lorsque nous l'avons ouvert, nous avons clairement indiqué qu'il se concentrait sur deux choses: faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire, logistique et sécuritaire vers Gaza et aider à surveiller en temps réel la mise en oeuvre de l'accord", insiste le capitaine Tim Hawkins, porte-parole du Commandement militaire central américain (Centcom), couvrant notamment le Moyen-Orient.

L'initiative a été présentée aux acteurs (ONG, agences des Nations unies, diplomates...) comme un générateur d'idées totalement inédites.

Frustrés par leurs difficultés avec les autorités israéliennes, de nombreux pays et acteurs humanitaires disent s'être jetés dans le projet, impatients d'avoir un nouvel interlocuteur se disant enclin à trouver des solutions: les Etats-Unis.

"Rien n'a changé" 

"Au début, les Américains nous ont dit qu'ils découvraient qu'Israël interdisaient l'entrée de tout un tas de choses dans Gaza, la fameuse liste des biens à double usage, ils avaient l'air choqués et on se disait qu'enfin on allait franchir cet obstacle", raconte un ingénieur humanitaire, "mais force est de constater que strictement rien n'a changé".

Deux mois après l'ouverture, nombre d'humanitaires et diplomates contactés par l'AFP jugent, sous couvert de l'anonymat, que la capacité ou la volonté américaines à contraindre Israël est limitée.

Les visiteurs réguliers ou occasionnels des lieux ont décrit à l'AFP le grand hangar occupé par le CMCC à Kiryat Gat (sud d'Israël), comme un entrepôt où de nombreux militaires, israéliens et américains principalement, rencontrent des humanitaires, diplomates, et consultants.

Le premier des trois étages du bâtiment est réservé aux Israéliens, et le dernier aux troupes américaines. Tous deux sont interdits d'accès aux visiteurs.

Le deuxième, recouvert de gazon artificiel, sert d'espace de rencontres avec le monde extérieur.

"On dirait un espace de coworking, mais avec des gens en uniforme", s'amuse une diplomate qui raconte y croiser des "GIs qui boivent de la bière" au milieu d'une sorte d'open-space, avec des panneaux récapitulant les principaux points du plan Trump.

Plusieurs personnes ont dit à l'AFP avoir vu un tableau blanc barré de l'inscription "What is Hamas?" ("Qu'est-ce que le Hamas?") en lettres capitales, sans éléments de réponse.

"Il y a des tables rondes sur des sujets qui vont de la distribution d'eau ou de nourriture à la sécurité", raconte un humanitaire, "en gros on nous écoute décrire ce qu'on veut faire, et quels problèmes on a rencontrés depuis deux ans".

"Boussole du droit" 

Mais "ce n'est pas là que les décisions sont prises", tranche un diplomate qui cite des canaux de discussions parallèles, notamment une équipe supervisée par Arieh Lighstone, un collaborateur de l'émissaire américain Steve Witkoff, à Tel-Aviv.

Plusieurs diplomates regrettent l'absence d'officiels palestiniens dans les murs.

Un autre problème réside dans l'émergence de concepts largement rejetés par la communauté internationale, notamment celui des "Alternative Safe Communities" (ASC), visant à regrouper des civils "vérifiés", non affiliés au Hamas, dans des communautés créées ex nihilo dans une zone de la bande de Gaza sous contrôle militaire israélien, et où les services de base seraient dispensés.

"On a perdu la boussole du droit", commente une diplomate.

Mais le reproche qui revient le plus souvent est le fait que les questions politiques (gouvernance, maintien de l'ordre...) sont évacuées au profit de questions techniques.

"Ils discutent d'où mettre les stations d'épuration, pas de qui les exploitera ni de qui paiera les employés", résume un autre.

Concédant "certaines frictions", sans plus de détail, le capitaine Hawkins, du Centcom, met en avant certaines avancées comme l'ouverture de nouveaux points de passage pour l'aide à destination de Gaza. "Nous progressons, assure-t-il, tout en reconnaissant pleinement qu'il reste encore beaucoup à faire."


Le Congrès américain approuve la levée définitive des sanctions contre la Syrie

La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars. (AFP)
La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars. (AFP)
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  • Le gouvernement américain a indiqué être favorable à l'abrogation de cette loi Caesar
  • Son application avait déjà été suspendue par deux fois pour six mois après l'annonce du président Trump en mai levant les sanctions contre la Syrie dans le cadre de la normalisation des relations entre ce pays et les Etats-Unis

WASIHNGTON: Le Congrès américain a approuvé mercredi la levée définitive des sanctions imposées par les Etats-Unis contre la Syrie du temps de Bachar al-Assad, devant permettre le retour d'investissements dans ce pays ravagé par des années de guerre civile.

L'abrogation d'une loi dite "Caesar", adoptée en 2019 lors du premier mandat de Donald Trump et qui imposait ces sanctions, figure en effet dans le texte sur la stratégie de défense (NDAA), que le Sénat américain a approuvé mercredi par 77 voix pour et 20 contre.

La Chambre des représentants s'était déjà prononcée la semaine dernière et le texte attend désormais d'être promulgué par le président américain.

Le gouvernement américain a indiqué être favorable à l'abrogation de cette loi Caesar. Son application avait déjà été suspendue par deux fois pour six mois après l'annonce du président Trump en mai levant les sanctions contre la Syrie dans le cadre de la normalisation des relations entre ce pays et les Etats-Unis.

Le chef de la diplomatie syrienne, Assaad al-Chaibani, a salué sur Telegram le vote du Sénat comme "ouvrant de nouveaux horizons pour la coopération et le partenariat entre notre pays et le reste du monde".

La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars.

Bien que son application soit suspendue, de nombreux responsables américains jugeaient qu'elle pouvait nuire à la confiance des investisseurs tant qu'elle n'était pas abrogée.

Le dirigeant syrien Ahmad al-Chareh a été reçu le 10 novembre à la Maison Blanche par le président Trump, une première pour un chef d'Etat syrien depuis l'indépendance du pays en 1946 et une consécration pour l'ancien jihadiste qui, en moins d'un an au pouvoir, a sorti son pays de l'isolement.

Donald Trump l'avait déjà rencontré lors d'un voyage dans le Golfe en mai, annonçant alors la levée des sanctions américaines.

Après 13 ans de guerre civile, la Syrie cherche à garantir des fonds pour sa reconstruction, dont le coût pourrait dépasser 216 milliards de dollars, selon la Banque mondiale.

"L'abrogation aujourd'hui de la loi Caesar est une étape décisive pour donner au peuple syrien une véritable chance de se reconstruire après des décennies de souffrances inimaginables", s'est félicité la sénatrice démocrate Jeanne Shaheen.


Les principales villes du Soudan privées de courant après des frappes de drones sur une centrale

Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts. (AFP)
Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts. (AFP)
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  • Les frappes ont ciblé les transformateurs de la station électrique d’Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, a précisé la compagnie d'électricité nationale
  • Deux secouristes ont été tués par une deuxième frappe de drone survenue alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, a déclaré un responsable de la centrale en attribuant cette frappe aux paramilitaires des FSR

PORT-SOUDAN: Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts, ont indiqué plusieurs témoins à l'AFP.

Les frappes ont ciblé les transformateurs de la station électrique d’Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, a précisé la compagnie d'électricité nationale.

Deux secouristes ont été tués par une deuxième frappe de drone survenue alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, a déclaré un responsable de la centrale en attribuant cette frappe aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).

Le gouvernement de l’État du Nil a confirmé la mort des deux secouristes dans un communiqué officiel.

Cette station est un nœud stratégique du réseau électrique soudanais, recevant l’électricité produite par le barrage de Merowe — la plus grande source d'énergie hydroélectrique du pays — avant sa redistribution vers plusieurs régions.

Des témoins ont également indiqué qu’aux alentours de 02H00 (minuit GMT), les forces de l’armée régulière avaient activé leurs systèmes de défense antiaérienne, rapportant avoir vu des flammes et de la fumée s'élever au-dessus de la ville contrôlée par l'armée en guerre depuis avril 2023 contre les FSR.

Les coupures d’électricité se sont étendues à plusieurs États, notamment ceux du Nil, de la mer Rouge — où se trouve Port-Soudan, siège provisoire du gouvernement pro-armée — ainsi qu’à la capitale Khartoum, selon des témoins, l'incendie n'étant toujours pas maitrisé.

Les FSR n’ont jusqu'à présent pas commenté l'attaque.

Ces derniers mois, les FSR ont été accusées de lancer des attaques de drones sur de vastes zones contrôlées par l’armée, visant des infrastructures civiles et provoquant des coupures de courant affectant des millions de personnes.

La guerre, qui a éclaté en avril 2023, a fait plusieurs dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué "la pire crise humanitaire au monde", selon l'ONU.