Trump en Arabie saoudite: un partenariat renforcé

La visite régionale de Trump l'a conduit en Arabie saoudite, au Qatar et aux Émirats arabes unis. (AFP)
La visite régionale de Trump l'a conduit en Arabie saoudite, au Qatar et aux Émirats arabes unis. (AFP)
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Publié le Lundi 19 mai 2025

Trump en Arabie saoudite: un partenariat renforcé

Trump en Arabie saoudite: un partenariat renforcé
  •  Les relations américano-saoudiennes s’appuient sur des décennies d’alignement stratégique – autour de la sécurité énergétique, de la stabilité régionale et de la lutte contre le terrorisme
  • La visite du président Trump a permis de réajuster ce partenariat à l’aune d’un monde devenu multipolaire

La décision du président américain Donald Trump de faire de Riyad sa première destination étrangère de son second mandat n’était pas un simple geste diplomatique : c’était une déclaration géopolitique. Pour l’Arabie saoudite, la visite de la semaine dernière constituait une affirmation forte de sa centralité grandissante dans le système international, et un signal clair que Washington continue de la considérer comme un pilier essentiel de stabilité et d’influence dans la région. Cette visite a également produit des résultats concrets, réaffirmant des liens anciens tout en posant les bases d’un cadre pragmatique de coopération bilatérale, fondé sur des intérêts communs et un alignement stratégique.

Contrairement à une idée souvent véhiculée dans les médias occidentaux, les relations entre l’Arabie saoudite et les États-Unis ne sont pas purement transactionnelles. Elles s’appuient sur des décennies d’alignement stratégique – autour de la sécurité énergétique, de la stabilité régionale et de la lutte contre le terrorisme. La visite du président Trump a permis de réajuster ce partenariat à l’aune d’un monde devenu multipolaire. En choisissant Riyad comme point de départ de ses voyages internationaux, M. Trump a reconnu la capacité unique du Royaume à influencer la dynamique régionale comme les marchés mondiaux.

C’est la reconnaissance d’un Royaume en pleine transformation. L’État rentier et passif d’autrefois a laissé place à une Arabie saoudite proactive, réformatrice, affirmant avec force la définition de ses intérêts. La Vision 2030, portée par le prince héritier Mohammed ben Salmane, a profondément infléchi la trajectoire du pays, l’éloignant de la dépendance pétrolière pour l’orienter vers une économie plus diversifiée et compétitive. La visite de Trump, entouré de délégations de haut niveau venues des milieux d’affaires, de la défense et de la technologie, a confirmé que les États-Unis voient désormais en l’Arabie saoudite un partenaire à part entière — et non plus un simple client.

L'un des résultats les plus transformateurs et prospectifs de la visite a été la mise en lumière de l'intelligence artificielle. L'une des annonces les plus importantes a été la création d'une coentreprise entre AMD et l'Arabie saoudite pour fournir des puces d'intelligence artificielle haut de gamme afin de soutenir l'infrastructure de données en pleine expansion du Royaume. Ce partenariat place l'Arabie saoudite à l'avant-garde de la course mondiale à l'intelligence artificielle et signale son intention de développer non seulement ses capacités, mais aussi son leadership dans les technologies qui définiront le siècle prochain.

Cet accord reflète également l'évolution de l'Arabie saoudite, qui est passée du statut de consommateur d'innovation à celui de producteur et de facilitateur. Le partenariat avec AMD ne se limite pas aux puces; il s'agit de créer des écosystèmes: centres de données, pépinières de talents, institutions de recherche et centres d'innovation régionaux. Ce faisant, l'Arabie saoudite s'affirme à la fois comme un fournisseur de capitaux et comme une destination pour les investissements dans les technologies de pointe.

Cette initiative s'est accompagnée d'une intégration économique plus large. Des accords d'investissement majeurs ont été annoncés dans différents secteurs: semi-conducteurs, hydrogène vert, fintech et infrastructures touristiques. Ces accords témoignent d'une relation économique qui arrive à maturité, où les capitaux circulent dans les deux sens et où l'Arabie saoudite est de plus en plus considérée non seulement comme un investisseur mondial, mais aussi comme l'une des destinations d'investissement émergentes les plus dynamiques au monde.

La validation de Trump a confirmé que, pour Washington, l’Arabie saoudite reste le partenaire privilégié lorsque la région a besoin d’un leadership fort.

-Ali Shihabi

La coopération en matière de sécurité, qui a toujours été la pierre angulaire des relations bilatérales, a reçu une attention renouvelée. Si les ventes d'armes ont fait couler beaucoup d'encre, la véritable histoire est celle du passage à l'autosuffisance en matière de défense. Les accords annoncés au cours de la visite comprennent des transferts de technologie, des initiatives de production conjointe et un cadre d'approvisionnement plus souple. L'Arabie saoudite ne se contente pas d'acheter des armes, elle se dote de capacités, d'infrastructures et d'une expertise nationale.

Cela fait partie d'une stratégie saoudienne plus large: maintenir une force de dissuasion crédible dans une région de plus en plus instable tout en réduisant la dépendance à l'égard d'un seul partenaire extérieur. L'administration Trump semble comprendre cette nuance et aligne la politique de défense américaine en conséquence. La coopération se poursuivra, mais dans des conditions qui respectent la souveraineté saoudienne et ses aspirations à l'autonomie stratégique.

Le moment choisi pour la visite, au milieu d'une dynamique régionale en pleine évolution, a renforcé l'influence diplomatique de l'Arabie saoudite. La présence du président Trump a renforcé le rôle de Riyad en tant que puissance centrale au Moyen-Orient. Alors que les émissaires saoudiens s'engagent de manière constructive avec les voisins de la région, gèrent les conflits et facilitent le dialogue, la validation de M. Trump – en particulier sa réponse positive à la demande du prince héritier de lever les sanctions contre la Syrie – confirme que, pour Washington, l’Arabie saoudite reste le partenaire privilégié lorsque la région a besoin d’un leadership fort.

Cette visite a permis de renforcer la coordination entre Riyad et Washington sur les menaces régionales, notamment les questions liées à l'Iran, à la sécurité maritime et aux acteurs non étatiques. L'Arabie saoudite continue de rechercher des solutions pacifiques aux tensions régionales, mais reste ferme sur son besoin de garanties de sécurité. La visite de M. Trump a apporté ces garanties tout en soutenant les efforts plus larges de l'Arabie saoudite en matière d'ouverture sur la région.

Au-delà des accords formels, la visite a eu une immense valeur symbolique.

L'aspect visuel est important, surtout à l'heure où l'Arabie saoudite s'efforce de redéfinir son image à l'échelle internationale. Le Royaume n'est plus seulement un exportateur de matières premières, mais un centre d'ambition, d'innovation et de revitalisation culturelle. En accueillant le président américain à Riyad, l'Arabie saoudite a montré qu'elle n'est pas seulement un acteur de la région, mais aussi un architecte clé du futur Moyen-Orient.

En résumé, la visite du président Trump en 2025 a donné à l'Arabie saoudite ce qu'elle souhaitait le plus: une réaffirmation de sa valeur stratégique, une validation économique et une plateforme pour projeter sa nouvelle identité au monde. Il ne s'agissait pas d'une visite ancrée dans la nostalgie ou la dépendance. Elle reflétait un partenariat recalibré entre deux nations souveraines dont les intérêts se chevauchent, mais ne sont pas identiques. Et dans cette nouvelle ère de concurrence entre grandes puissances et de réalignement régional, l'Arabie saoudite a quitté la visite non pas en tant que partenaire junior, mais en tant qu'allié confiant et indispensable.

Ali Shihabi est un auteur et un commentateur de la politique et de l'économie de l'Arabie saoudite. 

X: @aliShihabi

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com