Syrie: six mois après sa prise du pouvoir, les défis d'Ahmad al-Chareh

Cette photo diffusée par l'agence de presse officielle arabe syrienne (SANA) montre le président intérimaire de la Syrie, Ahmed al-Sharaa, recevant le ministre des Affaires étrangères de l'Arabie saoudite à Damas, le 31 mai 2025. (AFP)
Cette photo diffusée par l'agence de presse officielle arabe syrienne (SANA) montre le président intérimaire de la Syrie, Ahmed al-Sharaa, recevant le ministre des Affaires étrangères de l'Arabie saoudite à Damas, le 31 mai 2025. (AFP)
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Publié le Mardi 03 juin 2025

Syrie: six mois après sa prise du pouvoir, les défis d'Ahmad al-Chareh

  • En six mois, le nouvel homme fort de Syrie Ahmad al-Chareh a réussi à se positionner sur la scène internationale et obtenir la levée des sanctions
  • M. Chareh a dissous les anciens services de sécurité et l'armée et instauré une stabilité relative

DAMAS: En six mois, le nouvel homme fort de Syrie Ahmad al-Chareh a réussi à se positionner sur la scène internationale et obtenir la levée des sanctions, mais il doit encore instaurer un système de gouvernance fiable et redresser l'économie, en maintenant l'unité du pays.

Quels sont les principaux défis du président intérimaire qui a renversé, à la tête d'une coalition islamiste, Bachar al-Assad le 8 décembre?

- L'édification de l'Etat -

Lorsqu'il a pris le pouvoir, Ahmad al-Chareh s'est retrouvé avec un gouvernement central à Damas, un autre en charge du bastion rebelle d'Idleb qu'il contrôlait, et un troisième supervisant les zones des groupes proturcs et l'administration autonome kurde.

Pour Radwan Ziadeh, directeur exécutif du Centre syrien d'études politiques et stratégiques à Washington, "instaurer la stabilité dans un pays aussi fragile politiquement et dans une période aussi difficile est une réalisation importante". Mais il doit encore "réussir la transition".

Les violences début mars contre la communauté alaouite, qui ont fait plus de 1.700 morts, puis contre les druzes en avril, ont ébranlé la confiance dans la capacité des autorités à protéger les minorités.

"Le traitement réservé aux minorités est l'un des défis internes les plus importants, et bâtir la confiance entre les différentes composantes nécessite un effort politique plus grand (...)", explique le chercheur.

La volonté de M. Chareh d'étendre son autorité sur le territoire national se heurte à l'exigence par les Kurdes d'un Etat décentralisé, ce que Damas rejette.

Les autorités "doivent s'éloigner des solutions sécuritaires et militaires (...) et impliquer les composantes syriennes dans le processus politique", affirme à l'AFP Badran Ciya Kurd, un responsable de l'administration autonome.

Le 20 mai, le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio avait averti que la Syrie pourrait être au bord d'une nouvelle "guerre civile à grande échelle" qui provoquerait "l'éclatement du pays".

"Le plus grand défi de Chareh est de tracer une voie vers l'avenir dans laquelle tous les Syriens voudront s'engager, et de le faire assez vite, mais sans agir de manière irréfléchie", estime Neil Quilliam, expert de Chatham House.

Les autorités sont appelées à promulguer une Constitution garantissant les droits des minorités, sur la base de laquelle se tiendraient des élections.

Or la déclaration constitutionnelle proclamée par Damas en mars ne prévoit pas d'élections et concentre les pouvoirs aux mains de Chareh pour cinq ans.

- Sécurité -

M. Chareh a dissous les anciens services de sécurité et l'armée et instauré une stabilité relative. Mais des ONG et des témoins rapportant enlèvements, arrestations et assassinats fréquents.

Les violences confessionnelles, notamment contre les alaouites, ont mis en question la capacité d'Ahmad al-Chareh à contrôler les différentes factions, y compris des groupes jihadistes radicaux qui inquiètent la communauté internationale.

La promotion de six jihadistes étrangers au ministère de la Défense a suscité de vives critiques. Une source syrienne a confié à l'AFP que les autorités avaient assuré à Washington qu'elles allaient "geler ces promotions".

Mais le dossier des combattants étrangers reste délicat: M. Chareh ne peut pas les abandonner alors qu'ils ont combattu à ses côtés pendant des années, et leurs pays respectifs refusent leur retour.

S'ajoute le problème des milliers de jihadistes du groupe Etat islamique, détenus avec leurs familles par les forces kurdes, que l'autorité actuelle n'a pas les moyens de transférer sous son contrôle.

- Economie et diplomatie -

Le nouveau dirigeant a hérité d'un pays épuisé par près de 14 ans de guerre civile, à l'économie exsangue, aux infrastructures détruites, où la majorité des citoyens vivent sous le seuil de pauvreté, selon l'ONU.

Sa priorité, après la levée des sanctions, notamment américaines, est de combattre la pauvreté, affirme une source proche de M. Chareh.

Les produits importés sont désormais en vente libre et les devises échangées au grand jour.

Parmi les autres obstacles à la relance de l'économie figurent "les lois nécessaires pour l'investissement, qui restent floues", souligne l'expert économique Karam Chaar.

La réhabilitation des infrastructures est aussi essentielle au retour des millions de réfugiés, une demande des voisins de la Syrie qui les abritent --Turquie, Jordanie ou Liban-- et des Européens.

Et le soutien à la Syrie ne passe pas sans des exigences: Washington a notamment appelé la Syrie à rejoindre les accords de normalisation avec Israël, qui a mené des centaines de frappes aériennes contre son voisin depuis la chute d'Assad.

Si Damas a reconnu des négociations indirectes avec Israël, l'ennemi de toujours, Neil Quilliam estime que "le nouveau gouvernement est à des années-lumière de considérer une normalisation, même s'il subit une pression significative des Etats-Unis ou de la communauté internationale".


Syrie: frappes israéliennes sur le QG de l'armée syrienne à Damas

La télévision officielle syrienne a fait état de nouvelles frappes israéliennes mercredi après-midi à Damas sur le secteur du quartier général de l'armée, dans le centre de la capitale, peu après une première frappe contre ce bâtiment. (AFP)
La télévision officielle syrienne a fait état de nouvelles frappes israéliennes mercredi après-midi à Damas sur le secteur du quartier général de l'armée, dans le centre de la capitale, peu après une première frappe contre ce bâtiment. (AFP)
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  • Des images de la télévision ont montré des militaires quitter précipitamment le bâtiment, contigu au ministère de la Défense sur la place de Omeyyades
  • Mercredi matin, l'armée israélienne a annoncé une frappe sur l'entrée du quartier général de l'armée et le renforcement de ses troupes à la frontière avec la Syrie, après une menace du gouvernement israélien d'intensifier ses frappes

DAMAS: La télévision officielle syrienne a fait état de nouvelles frappes israéliennes mercredi après-midi à Damas sur le secteur du quartier général de l'armée, dans le centre de la capitale, peu après une première frappe contre ce bâtiment.

Des journalistes de l'AFP ont entendu de fortes explosions qui ont secoué la capitale et de la fumée s'élevait au-dessus du secteur visé, selon des images de l'AFPTV.

L'agence officielle Sana a affirmé que "plusieurs personnes ont été atteintes par les frappes israéliennes sur Damas", sans préciser de nombre ou s'il s'agissait de tués ou de blessés.

Des images de la télévision ont montré des militaires quitter précipitamment le bâtiment, contigu au ministère de la Défense sur la place de Omeyyades, et au moins un blessé a été évacué dans une voiture.

Mercredi matin, l'armée israélienne a annoncé une frappe sur l'entrée du quartier général de l'armée et le renforcement de ses troupes à la frontière avec la Syrie, après une menace du gouvernement israélien d'intensifier ses frappes pour protéger les druzes.

La télévision d'Etat syrienne a de son côté rapporté que deux personnes avaient été blessées dans le centre de Damas dans la première frappe, sans préciser l'emplacement exact des faits.


Syrie: les violences ont fait 248 morts à Soueida, des dizaines de druzes traversent la frontière entre Israël et la Syrie

Des dizaines de druzes ont traversé mercredi la frontière entre la Syrie et Israël dans les deux sens, peu après des mises en garde et frappes d'Israël qui exige de Damas qu'il retire ses troupes du sud de la Syrie. (AFP)
Des dizaines de druzes ont traversé mercredi la frontière entre la Syrie et Israël dans les deux sens, peu après des mises en garde et frappes d'Israël qui exige de Damas qu'il retire ses troupes du sud de la Syrie. (AFP)
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  • Les forces gouvernementales syriennes et leurs alliés se sont déployés mardi dans la ville jusque là tenue par des combattants druzes locaux
  • L'ONG, des témoins et des groupes druzes les ont accusés de nombreuses exactions

DAMAS: Le bilan des violences à Soueida, dans le sud de la Syrie, s'élève à 248 morts depuis dimanche, a annoncé une ONG selon laquelle les affrontements se poursuivent dans la ville à majorité druze, où deux correspondants de l'AFP ont entendu des tirs mercredi matin.

Les forces gouvernementales syriennes et leurs alliés se sont déployés mardi dans la ville jusque là tenue par des combattants druzes locaux. L'ONG, des témoins et des groupes druzes les ont accusés de nombreuses exactions.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), 248 personnes ont été tuées depuis le début des combats dimanche entre combattants druzes et tribus bédouines, qui ont provoqué l'intervention des forces gouvernementales aux côtés de ces dernières.

Un bilan précédent de cette ONG faisait état de 203 morts mardi. L'OSDH a comptabilisé mercredi 64 combattants druzes et 28 civils druzes tués, dont "21 civils exécutés sommairement" par des membres des forces gouvernementales.

En outre, 138 membres des forces de sécurité et 18 combattants bédouins ont été tués, a indiqué l'ONG selon laquelle des bombardements intermittents sont signalés mercredi matin.

Deux correspondants de l'AFP dans la ville ont entendu des tirs alors que de la fumée s'élevait de certains quartiers.

L'un des correspondants a vu une trentaine de corps gisant par terre, certains de membres des forces gouvernementales et d'autres de combattants en civil, sans pouvoir identifier leur appartenance.

Un autre a vu des forces gouvernementales tirer des obus depuis l'une de leurs positions.

Le site local Suwayda 24 a rapporté "un violent bombardement à l'artillerie et au mortier" sur la ville et ses environs depuis l'aube.

Les forces gouvernementales avaient annoncé mardi un cessez-le-feu qui n'a pas été respecté.

Le ministère syrien de la Défense a affirmé que "des groupes hors-la-loi ont recommencé à attaquer les forces de l'armée et de la sécurité intérieure dans la ville", après la proclamation du cessez-le-feu.

"L'armée continue de répondre aux sources de tirs dans la ville", a ajouté le ministère, cité par l'agence officielle Sana, appelant les habitants à rester chez eux.


Israël demande à la Syrie de «laisser tranquilles» les druzes à Soueida

L'armée israélienne "augmentera l'intensité de ses réponses contre le régime si le message n'est pas compris". (AFP)
L'armée israélienne "augmentera l'intensité de ses réponses contre le régime si le message n'est pas compris". (AFP)
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  • Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a exigé mercredi du pouvoir syrien qu'il "laisse tranquilles" les druzes de Soueida
  • "Comme nous l'avons clairement indiqué et averti, Israël n'abandonnera pas les druzes en Syrie et imposera la politique de démilitarisation"

JERUSALEM: Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a exigé mercredi du pouvoir syrien qu'il "laisse tranquilles" les druzes de Soueida, où cette communauté est majoritaire, et qu'il retire ses forces de cette ville du sud de la Syrie.

"Comme nous l'avons clairement indiqué et averti, Israël n'abandonnera pas les druzes en Syrie et imposera la politique de démilitarisation" dans le sud du pays annoncée après la chute de Bachar al-Assad, a déclaré le ministre, cité par ses services. L'armée israélienne "augmentera l'intensité de ses réponses contre le régime si le message n'est pas compris", a-t-il ajouté.