L'accord franco-britannique sur l'immigration à l'épreuve du réel

Un navire de la Border Force arrive à la marina de Douvres, dans le sud-est de l'Angleterre, le 19 septembre 2025. Il transporte des migrants recueillis en mer qui tentent de traverser la Manche depuis la France. (AFP)
Un navire de la Border Force arrive à la marina de Douvres, dans le sud-est de l'Angleterre, le 19 septembre 2025. Il transporte des migrants recueillis en mer qui tentent de traverser la Manche depuis la France. (AFP)
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Publié le Mercredi 24 septembre 2025

L'accord franco-britannique sur l'immigration à l'épreuve du réel

  • L’accord franco-britannique sur l’échange de migrants, pourtant présenté comme innovant, rencontre de sérieux obstacles juridiques et logistiques
  • Plusieurs spécialistes, dont des juristes, alertent sur les risques de violations du droit d’asile et sur l’inefficacité d’un système qui vise 2.500 échanges alors que plus de 31.000 personnes ont traversé la Manche en 2025

PARIS: Vue de France, l'application du nouvel accord franco-britannique pour tenter de contrôler l'immigration s'avère plus compliquée que prévu, observent plusieurs spécialistes, plutôt sceptiques sur l'efficacité de ce dispositif présenté comme novateur.

"C'est le bazar. On est surpris de la difficulté de sa mise en oeuvre", confie à Paris, sous couvert d'anonymat, un technicien chargé de cet accord conclu en juillet lors d'une visite du président français Emmanuel Macron au Royaume-Uni.

Annoncé comme "révolutionnaire" par le Premier ministre travailliste britannique Keir Starmer, le texte prévoit le retour en France de migrants arrivés à bord de petits bateaux au Royaume-Uni, en échange de l'envoi dans le sens inverse de migrants pouvant prétendre à une régularisation sur le principe du "un pour un".

Après plusieurs annulations, "au dernier moment en raison du risque de recours juridique", relate le technicien interrogé par l'AFP, un Indien, un Erythréen ainsi qu'un Iranien ont pu finalement être expulsés en France en fin de semaine dernière. Une quatrième personne a été renvoyée en France, a indiqué mardi le Home office.

Ces migrants, accueillis en France après examen de leur profil, doivent être placés dans un centre d'hébergement "où ils seront incités à accepter l'aide au retour volontaire" proposée par l'Ofii (Office français de l'immigration et de l'intégration), avait indiqué le 13 septembre à l'AFP Didier Leschi, le directeur général de cet organisme.

Rien ne les empêche de déposer une demande d'asile et, en cas de refus, de disparaître des radars des autorités françaises, observent plusieurs sources.

- "Accord de dupe" -

Dans le sens France-Grande Bretagne, "visiblement ça coince", confie également à l'AFP un proche du dossier. L'envoi samedi du premier migrant a été annulé et devait être reporté à mardi.

Muet sur la mise en oeuvre de l'accord, le ministère de l'Intérieur français - démissionnaire dans l'attente de l'annonce d'un nouveau gouvernement - souligne que le dispositif, prévu jusqu'en juin 2026, est encore "très expérimental".

Le gouvernement britannique, sous pression de l'extrême droite et d'importantes manifestations anti-migrants, reconnait qu'il faut "intensifier le processus", mais assure de son côté qu'avec les premiers renvois ils ont "pu prouver" que le programme "fonctionne".

"C'est un  accord de dupe. Des textes internationaux protègent les droits humains fondamentaux et les recours vont être nombreux", contredit Serge Slama, professeur de droit public, pour qui séparer "les bons des mauvais migrants n'a aucun sens".

Selon la Convention de Genève ratifiée par les deux Etats, il est illégal d'empêcher le dépôt d'une demande de protection internationale d'un demandeur d'asile qui aurait fui son pays en raison de persécutions.

Une demande, une fois déposée, a de vraies chances d'aboutir: les dix principales nationalités ayant demandé l'asile au Royaume-Uni ont obtenu le statut de réfugié à 72 % en 2024 et 56% en 2025, partage son confrère Yves Pascouau, doctorant en droit public.

- Objectif: 2.500 échanges -

"Quand vous avez réussi à franchir le désert, survécu à l'enfer libyen, traversé la Méditerranée et que vous apercevez les côtes britanniques, ce n'est pas l'inscription sur une plateforme informatique", démarche demandée aux prétendants à l'envoi au Royaume uni, "avec une réponse incertaine, qui va vous retenir en France", ajoute ce conseiller du think tank European Policy Centre.

"Le tuyau ouvert est extrêmement étroit et les demandes vont être nombreuses, les passages illégaux vont donc continuer", abonde une source au fait de cet accord, confirmant le chiffre de 2.500 échanges visés quand ils sont plus de 31.000, un record, à avoir traversé La Manche depuis le début de l'année sur des embarcations de fortune.

Au moins 23 migrants sont décédés dans ces traversées en 2025.

Depuis 2018, le Royaume-Uni a versé plus de 767 millions d'euros à la France pour empêcher les traversées. "Un coût extrêmement élevé avec des résultats sans proportion", relève M. Pascouau, prédisant le même destin que celui noué entre l'Union européenne et la Turquie pour retenir les réfugiés syriens en 2016.

S'il a fait d'abord considérablement baissé les arrivées en Grèce, de nouvelles voies migratoires sont apparues, et les renvois de migrants accostant en Grèce vers le voisin turc sont restés très faibles: 2.140 entre 2016 et 2020, selon un rapport de la commission européenne de 2021.


Colère agricole en France: Macron reçoit les syndicats, des blocages persistent

Des tracteurs lors d'une manifestation organisée par le syndicat agricole Coordination Rurale près du Mont-Saint-Michel, dans le nord-ouest de la France, le 18 décembre 2025. (AFP)
Des tracteurs lors d'une manifestation organisée par le syndicat agricole Coordination Rurale près du Mont-Saint-Michel, dans le nord-ouest de la France, le 18 décembre 2025. (AFP)
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  • Emmanuel Macron a reçu les syndicats agricoles, opposés à l’accord UE-Mercosur, dans un contexte de forte colère liée aux crises sanitaires, notamment la dermatose bovine
  • Les blocages routiers se poursuivent dans le Sud-Ouest, alors que de nouveaux cas de la maladie sont confirmés et que la mobilisation agricole se prolonge

PARIS: Le président français Emmanuel Macron a reçu mardi les syndicats agricoles pour parler de l'accord UE-Mercosur, auquel ils sont opposés, tandis que des axes routiers sont toujours bloqués pour protester contre le traitement par les autorités de l'épizootie de dermatose bovine.

"L'objet du rendez-vous, c'était d'essayer d'éteindre un peu le feu qui est partout dans les campagnes", a souligné Stéphane Galais, porte-parole national de la Confédération paysanne - un syndicat classé à gauche -, à la sortie de la rencontre, ajoutant qu'il fallait pour cela "des mesures structurelles fortes".

Les syndicats disent avoir par ailleurs rappelé au chef de l'Etat "l'extrême tension" et la "colère" du monde agricole et que des réponses étaient attendues "dès les premiers jours de janvier" sur le Mercosur mais aussi sur les crises sanitaires, au premier rang desquelles la dermatose bovine et la grippe aviaire.

C'était la première rencontre entre le chef de l'Etat et les syndicats agricoles depuis début décembre et l'amorce de la crise qui secoue l'élevage français, face à la dermatose nodulaire contagieuse (DNC).

C'était aussi la première depuis l'annonce, jeudi dernier, du report a priori au 12 janvier de la signature du traité décrié entre l'UE et des pays du Mercosur.

Cet accord faciliterait l'entrée en Europe de viande, sucre, riz, miel et soja sud-américains, ce qui inquiète les filières concernées, lesquelles affirment que ces produits ne respectent pas les mêmes normes que les produits européens.

L'accord permettrait en revanche aux Européens d'exporter davantage de véhicules, machines, vins et spiritueux en Amérique du Sud.

Sur le terrain, la mobilisation a connu un léger regain mardi (53 actions mobilisant 1.600 personnes, selon le ministère de l'Intérieur) par rapport à lundi (35 actions mobilisant 1.200 personnes), mais elle reste nettement inférieure à celle de la semaine dernière (110 actions jeudi).

Certains agriculteurs sont mobilisés depuis plus de 10 jours, notamment contre l'abattage total des troupeaux dans lesquels des cas de DNC sont détectés dans le Sud-Ouest.

Mardi, le ministère de l'Agriculture a confirmé un nouveau cas de la maladie en Haute-Garonne, portant le bilan total à 115 foyers enregistrés depuis juin en France. Ce dernier troupeau concerné a été abattu.

Dans le Sud-Ouest, des blocages d'autoroute étaient notamment maintenus sur l'A63 près de Bordeaux ou sur l'A64 au sud de Toulouse ou près de Bayonne.

Au sud de Bordeaux, les manifestants de la branche locale du syndicat Coordination rurale - classé à droite - ont dit vouloir organiser un réveillon et une messe de Noël mercredi soir sur leur barrage, à l'instar des agriculteurs mobilisés près de Toulouse.


Mercosur: les syndicats rencontrent Macron à l'Elysée, la dermatose en toile de fond

Des agents de la police nationale française bloquent une route alors que des agriculteurs manifestent contre l'accord UE-Mercosur, alors que le président français Emmanuel Macron rencontre les lecteurs du quotidien « La Voix du Nord », à Arras, dans le nord de la France, le 19 novembre 2025. (AFP)
Des agents de la police nationale française bloquent une route alors que des agriculteurs manifestent contre l'accord UE-Mercosur, alors que le président français Emmanuel Macron rencontre les lecteurs du quotidien « La Voix du Nord », à Arras, dans le nord de la France, le 19 novembre 2025. (AFP)
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  • Emmanuel Macron reçoit les syndicats agricoles, opposés à l’accord UE-Mercosur, dont la signature a été reportée, mais les tensions restent fortes malgré les concessions évoquées par le gouvernement
  • La rencontre se déroule sur fond de crise sanitaire liée à la dermatose bovine et de blocages agricoles persistants, avec une remobilisation annoncée début janvier

PARIS: Emmanuel Macron reçoit mardi après-midi les syndicats agricoles pour parler de l'accord UE-Mercosur auquel ils sont opposés mais le sujet de la dermatose bovine sera difficile à éviter au regard des blocages routiers qui persistent sur le terrain.

La FNSEA, les Jeunes agriculteurs (JA), la Coordination rurale et la Confédération paysanne sont reçus à 16H30, ont-ils annoncé à l'AFP.

C'est la première rencontre entre le chef de l'Etat et les syndicats depuis début décembre et l'amorce de la crise qui secoue l'élevage français, face à la dermatose nodulaire contagieuse (DNC).

C'est aussi la première depuis l'annonce jeudi dernier du report de la signature du traité décrié entre l'UE et des pays du Mercosur, après une mobilisation de plusieurs milliers d'agriculteurs avec leurs tracteurs à Bruxelles.

Cet accord faciliterait l'entrée en Europe de viande, sucre, riz, miel et soja sud-américains, ce qui alarme les filières concernées qui affirment que ces produits ne respectent pas les mêmes normes, notamment environnementales et sanitaires, que les produits européens.

Il permettrait en revanche aux Européens d'exporter davantage de véhicules, machines, vins et spiritueux en Amérique du Sud.

Emmanuel Macron s'était félicité du report de la signature, demandant que les "avancées" réclamées par la France, mais aussi l'Italie, se concrétisent afin que "le texte change de nature".

Les syndicats agricoles sont remontés depuis des mois et demandaient au président de prendre clairement position, après que celui-ci eut déclaré en novembre être "plutôt positif" quant à la possibilité d'accepter l'accord.

Emmanuel Macron avait rencontré des représentants de différents syndicats à Toulouse mi-novembre, des manifestations ayant changé le programme d'un déplacement qui devait être consacré aux réseaux sociaux et au spatial.

- "Mercosur = NON" -

"Le message de la FNSEA au Président de la République restera inchangé, ferme et clair: Mercosur = NON", a indiqué mardi le syndicat dominant dans une déclaration à l'AFP. Son président Arnaud Rousseau fera une déclaration à la presse à l'issue. Il avait déjà rencontré le président mi-novembre.

La Coordination rurale et la Confédération paysanne, fer de lance de la contestation de la gestion de la dermatose par l'Etat et opposants historiques au traité UE-Mercosur, ont ensuite confirmé à l'AFP leur venue.

Pour ces deux syndicats, c'est la première rencontre entre le président et des représentants nationaux depuis le dernier Salon de l'agriculture.

Plusieurs sources diplomatiques ont indiqué que la nouvelle échéance visée pour la signature était désormais le 12 janvier au Paraguay.

"Nous ne nous contentons pas de nous opposer à cet accord. En l'état, nous obtenons des concessions inédites au bénéfice de nos agriculteurs, que cet accord soit signé ou qu'il ne le soit pas", a déclaré lors des questions au gouvernement mardi Jean-Noël Barrot, ministre des Affaires étrangères, citant des "mesures miroir pour garantir la réciprocité", des "contrôles douaniers" et des clauses de sauvegarde annoncées en septembre par la Commission européenne.

Les agriculteurs français ont déjà prévenu qu'ils se remobiliseraient début janvier, jugeant ces réponses insuffisantes.

Mais certains sont mobilisés depuis plus de 10 jours sur le terrain, notamment contre la stratégie gouvernementale pour lutter contre la dermatose bovine dans le Sud-Ouest, mais aussi ponctuellement plus au nord, contre le Mercosur et les autres crises qui pèsent sur le monde agricole.

En Gironde, la Coordination rurale (CR33) a annoncé organiser un "réveillon de Noël façon auberge espagnole" sur l'A63 au sud de Bordeaux.

"Le côté festif, ça permet de durer plus longtemps", résume à l'AFP Jean-Paul Ayres, porte-parole de la CR33, alors qu'un terrain de moto-cross a été improvisé sur le terre-plein central de l'autoroute.

Les bureaux centraux des syndicats se sont bien gardés d'appeler à lever les blocages, laissant les sections locales décider et appelant simplement au "repos" de leurs troupes et à une "trêve" pour certains pour mieux reprendre en janvier si nécessaire.

La mobilisation des agriculteurs a connu un léger regain lundi (35 actions mobilisant 1.200 personnes) par rapport à dimanche (23 actions), mais elle est nettement en baisse comparée à la semaine dernière (110 actions jeudi, 93 vendredi).


Vol au Louvre: une grille de protection installée sur la fenêtre empruntée par les cambrioleurs

Des ouvriers installent des grilles de protection en fer sur les fenêtres de la galerie d'Apollon du musée du Louvre, côté quai François Mitterrand, à Paris, le 23 décembre 2025, quelques semaines après que des voleurs aient utilisé un monte-meubles pour s'introduire dans le musée. (AFP)
Des ouvriers installent des grilles de protection en fer sur les fenêtres de la galerie d'Apollon du musée du Louvre, côté quai François Mitterrand, à Paris, le 23 décembre 2025, quelques semaines après que des voleurs aient utilisé un monte-meubles pour s'introduire dans le musée. (AFP)
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  • Une grille de protection a été installée sur la porte-fenêtre du Louvre utilisée lors du vol spectaculaire de bijoux du 19 octobre, dont le butin de 88 millions d’euros reste introuvable
  • Le musée renforce sa sécurité après de vives critiques : grilles supplémentaires, dispositifs anti-intrusion et vidéosurveillance accrue prévue d’ici 2026

PARIS: Une grille de protection a été installée mardi matin sur la porte-fenêtre du musée du Louvre à Paris, empruntée par les cambrioleurs lors du spectaculaire vol de bijoux du 19 octobre, a constaté un journaliste de l'AFP.

Le 19 octobre, quatre malfaiteurs ont réussi à approcher le bâtiment en camion-élévateur et à hisser deux d'entre eux jusqu'à cette fenêtre menant à la galerie d'Apollon, qui donne sur les quais de Seine, grâce à une nacelle.

Ils ont dérobé huit joyaux de la Couronne de France. Le butin, estimé à 88  millions d'euros, reste introuvable.

Depuis le cambriolage, la sécurité du musée le plus visité au monde se retrouve au cœur des critiques, le braquage ayant révélé une série de défaillances.

La grille de protection "est l'une des mesures d'urgence décidées après le vol ", a précisé mardi à l'AFP Francis Steinbock, administrateur général adjoint du musée.

Des "réflexions" sont en cours concernant la "sécurisation sur les autres fenêtres", a ajouté le responsable.

La présidente du Louvre, Laurence des Cars, avait assuré la semaine dernière devant les sénateurs français qu'une grille serait reposée "avant Noël". Elle avait précisé que la précédente avait été retirée en 2003-2004, lors d'importants travaux de restauration.

Autre chantier majeur: le renforcement de la vidéosurveillance sur les façades du palais. "Nous avons annoncé un dispositif d'une centaine de caméras positionnées autour du palais. Le marché a été signé et l'installation pourra débuter tout au long de l'année 2026 ", a précisé Francis Steinbock.

La semaine dernière, le Louvre avait également annoncé l'achèvement de la mise en place de dispositifs anti-intrusion autour du musée.

Du 15 au 18 décembre, les agents du Louvre étaient en grève pour réclamer de meilleures conditions de travail et des moyens supplémentaires pour la sécurité. Le mobilisation a été levée vendredi, mais les négociations se poursuivent entre les syndicats et le ministère de la Culture pour répondre aux inquiétudes des agents.