L'apprenti boulanger guinéen, symbole du "parcours du combattant" des mineurs migrants

Le boulanger français Stephane Ravacley (à gauche) travaille avec son apprenti guinéen, Laye Fode Traore, dans sa boulangerie, à Besançon, dans l'est de la France, le 19 janvier 2021. (SEBASTIEN BOZON / AFP)
Le boulanger français Stephane Ravacley (à gauche) travaille avec son apprenti guinéen, Laye Fode Traore, dans sa boulangerie, à Besançon, dans l'est de la France, le 19 janvier 2021. (SEBASTIEN BOZON / AFP)
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Publié le Samedi 23 janvier 2021

L'apprenti boulanger guinéen, symbole du "parcours du combattant" des mineurs migrants

  • Pour échapper à l'expulsion, Laye Fodé Traoré a dû obtenir une double légalisation de son état civil par les autorités guinéennes
  • Le patron boulanger Stéphane Ravacley, lui, veut "continuer le combat" et appelle à une réforme pour permettre aux étrangers de terminer leur formation, quel que soit leur âge

PARIS: A l'issue d'une grève de la faim très médiatisée de son patron boulanger au début du mois, le jeune apprenti guinéen Laye Fodé Traoré a été régularisé. Une affaire emblématique, estiment les défenseurs des migrants, du "parcours du combattant" des anciens mineurs isolés étrangers.

Avant que la préfecture de Haute-Saône ne délivre finalement un titre de séjour à cet ancien "mineur non accompagné" (MNA) pris en charge par l'aide sociale à l'enfance (ASE) puis menacé d'expulsion, l'idée circulait jusqu'au sein du gouvernement que l'histoire n'était qu'un "cas particulier", comme l'a affirmé la ministre du Travail Elisabeth Borne.

C'est pourtant "tout sauf un cas isolé", qui relève "au contraire d'une politique délibérée", balaye Violaine Husson, spécialiste de la question à la Cimade.

S'il n'existe pas de statistique sur le nombre d'anciens mineurs isolés étrangers - 31.000 en France selon les dernières données disponibles - visés par une obligation de quitter le territoire français (OQTF) une fois majeurs, Violaine Husson affirme que sa seule association en aide actuellement à 200.

"Depuis quelques mois, on assiste à une pluie d'OQTF au jour des 18 ans, alors que légalement ils ont jusqu'à 19 ans moins un jour pour faire leur demande de titre de séjour", explique-t-elle.

Elle met notamment en cause une circulaire du ministère de l'Intérieur datée du 21 septembre 2020, qui prévoit un examen anticipé du droit au séjour de ces jeunes dès leur 17 ans. Cette instruction a "changé la donne et amplifié la problématique", dit Violaine Husson.

"Parcours du combattant" 

Résultat, "tout ce qui a été mis en place en terme d'insertion pendant des années est balayé d'un revers de main par la préfecture", déplore-t-elle.

Pour échapper à l'expulsion, Laye Fodé Traoré a dû obtenir une double légalisation de son état civil par les autorités guinéennes.

Un cas "emblématique de ce qui arrive à des milliers de jeunes majeurs isolés étrangers", ont abondé d'une même voix le Syndicat des avocats de France (SAF) et l'ADDE (Avocats pour la défense des droits des étrangers).

"C'est le parcours du combattant", résume Brigitte Bertin, avocate spécialisée dans le droit des étrangers à Besançon, où se trouve la boulangerie du Guinéen. 

Tous les ex-MNA ne sont pas menacés d'expulsion, surtout ceux pris en charge par l'ASE avant 16 ans, reconnaissent les spécialistes.

D'ailleurs, l'une des très rares catégories de l'immigration à n'avoir pas reculé à cause de la pandémie de Covid-19 en 2020 est celle des titres délivrés aux étrangers entrés mineurs sur le territoire (+8%).

Ceux pris en charge après 16 ans doivent remplir plusieurs conditions: être engagés dans une formation qualifiante (CFA, Bac pro...), ne plus avoir de lien fort et régulier avec le pays d'origine, et justifier de leur identité.

"Continuer le combat"

C'est sur ce dernier point que le bât blesse, juge Amandine Dravigny, avocate de Laye Fodé Traoré: les Africains, notamment les Guinéens, voient leur identité régulièrement contestée car ils "ne sont souvent pas déclarés à la naissance, donc en arrivant en France, ils doivent faire une demande de jugement supplétif auprès d'un tribunal de leur pays pour attester de leur identité".

Un casse-tête administratif renforcé, par exemple, par une note du ministère de l'Intérieur datée du 1er décembre 2017, consultée par l'AFP, et qui préconise de "formuler un avis défavorable pour toute analyse d'acte de naissance guinéen" en raison d'une "fraude généralisée" de l'état civil dans le pays.

Face aux barrières qui s'accumulent, la mobilisation citoyenne et patronale s'organise: les pétitions se multiplient pour qu'Amadou, Sékou ou encore Yaya, apprentis cuisinier ou électriciens, échappent à l'expulsion. 

La situation actuelle relève de "l'incohérence", juge Laurent Delbos, de Forum réfugiés. "Ce sont des jeunes sur lesquels on a investi beaucoup d'argent (en les accueillant et les formant) et qui se retrouvent au final avec une OQTF".

Le patron boulanger Stéphane Ravacley, lui, veut "continuer le combat" et appelle à une réforme pour permettre aux étrangers de terminer leur formation, quel que soit leur âge.

"Ces gamins méritants, qui se lèvent à 3 heures du matin pour venir travailler à la boulangerie ou sur un chantier, qu'on les laisse vivre et travailler", peste-t-il. "Surtout si aucun autre n'est intéressé par le poste."


Moyen-Orient: À force de se vouloir équilibrée, la posture française en devient illisible

Le président français Emmanuel Macron est vu lors d'une cérémonie d'arrivée au sommet du Groupe des Sept (G7) au Pomeroy Kananaskis Mountain Lodge à Kananaskis, Alberta, Canada, le 16 juin 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron est vu lors d'une cérémonie d'arrivée au sommet du Groupe des Sept (G7) au Pomeroy Kananaskis Mountain Lodge à Kananaskis, Alberta, Canada, le 16 juin 2025. (AFP)
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  • En rappelant que l’Iran dispose de missiles pouvant atteindre le territoire français et qu’il soutient activement le Hamas et le Hezbollah, Barrot a justifié la fermeté de la diplomatie française à l’égard de Téhéran
  • Mais aussitôt, il a tempéré ses propos, indiquant qu’à ce stade, « les moyens militaires français n’ont pas été mobilisés », avant de renouveler un appel classique « à la retenue »

PARIS: Alors que la guerre entre Israël et l’Iran s’intensifie, la France tente de maintenir une ligne diplomatique fondée sur la retenue, la désescalade et l’équilibre.
Mais cette posture, censée affirmer une voix autonome au sein du concert international, peine désormais à convaincre. À force de vouloir ménager toutes les parties, la position française en devient brouillée, voire illisible.
S’exprimant le dimanche 15 juin, le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, s’est montré ferme : « Le programme nucléaire iranien a une vocation militaire. C’est une menace existentielle pour Israël, pour les pays de la région et pour nous aussi », a-t-il affirmé.
En rappelant que l’Iran dispose de missiles pouvant atteindre le territoire français et qu’il soutient activement le Hamas et le Hezbollah, Barrot a justifié la fermeté de la diplomatie française à l’égard de Téhéran.
Mais aussitôt, il a tempéré ses propos, indiquant qu’à ce stade, « les moyens militaires français n’ont pas été mobilisés », avant de renouveler un appel classique « à la retenue » à l’adresse de toutes les parties.
Le vendredi 13 juin, à la suite des frappes israéliennes contre des cibles iraniennes, Emmanuel Macron avait rappelé « le droit d’Israël à se protéger », tout en insistant sur la nécessité de « ne pas mettre en péril la stabilité de la région ».
Il est même allé jusqu’à affirmer que la France participerait « aux opérations de protection et de défense » d’Israël en cas de « représailles » menées par l’Iran, « si elle est en situation de le faire ».

La logique française se veut cohérente : elle soutient le droit d’Israël à se défendre, mais sans donner un chèque en blanc à la politique de Benyamin Netanyahou.

« J’ai marqué notre disponibilité en ce sens », a ajouté le président français lors d’une conférence de presse, et « à l’inverse, je n’envisage aucunement de participer à quelque opération offensive que ce soit. Ce n’est pas notre rôle », a-t-il fait valoir.
La condamnation française du programme nucléaire iranien est ancienne, tout comme son soutien au droit d’Israël à se défendre. Mais, par ailleurs, la France dénonçait, il y a quelques semaines, le blocus humanitaire imposé par Israël à Gaza, le qualifiant de « honte ».
La logique française se veut cohérente: elle soutient le droit d’Israël à se défendre, mais sans donner un chèque en blanc à la politique de Benyamin Netanyahou.
Cette même logique fait dire à Paris: oui à une riposte contre Téhéran si une ligne rouge est franchie, mais toujours dans une optique diplomatique.
À l’approche du sommet du G7 au Canada, Macron entend plaider cette voie médiane, espérant maintenir la France comme puissance d’équilibre. Mais encore faut-il être entendu et compris.
Dans les faits, Paris semble marginalisé. L’ambassadeur d’Israël en France, Joshua Zarka, a reconnu que Tel-Aviv n’avait pas informé la France de ses frappes.
« La relation n’est plus aussi proche qu’avant », a-t-il déclaré. Pour lui, la France reste un allié, « mais pas au point d’avoir été alertée », signifiant clairement que la critique française de la guerre à Gaza a éloigné les deux capitales.
Côté iranien, les leviers français sont tout aussi limités. Malgré les pressions exercées sur Téhéran, y compris une résolution récente de l’AIEA dénonçant l’enrichissement d’uranium par l’Iran, la République islamique reste sourde aux avertissements.

Les frappes croisées entre Israël et l’Iran ont aussi eu une conséquence immédiate : le report de la conférence de New York, prévue pour discuter de la reconnaissance d’un État palestinien, initiative portée conjointement par la France et l’Arabie saoudite.


Les menaces françaises de déclencher la procédure de « snap back » pour rétablir les sanctions, en cas d’absence d’accord sur le nucléaire, sont prises au sérieux, mais elles n’inversent pas la dynamique de confrontation.
Les frappes croisées entre Israël et l’Iran ont aussi eu une conséquence immédiate : le report de la conférence de New York, prévue pour discuter de la reconnaissance d’un État palestinien, initiative portée conjointement par la France et l’Arabie saoudite.
À Paris, on parle d’un simple report technique, mais en vérité, la flambée de violence a démontré le décalage entre la réalité sur le terrain et cette initiative diplomatique pourtant centrale.
Le président Macron, qui souhaitait inscrire cette reconnaissance dans une dynamique plus large d’accords régionaux, avec une normalisation entre Israël et certains pays arabes en contrepartie, doit composer avec un terrain à feu et à sang.
L’idée d’une « reconnaissance réciproque » (d’un État palestinien et de l’État d’Israël par de nouveaux acteurs) reste d’actualité, mais semble désormais hors de portée dans le contexte actuel.
Ce flou diplomatique se heurte aussi à une opinion publique française de plus en plus sceptique. Et Macron, en chute libre dans les sondages, doit composer avec un climat politique intérieur tendu.
Son autorité sur la politique étrangère, pourtant historiquement l’un des leviers du pouvoir présidentiel en France, semble contestée et contrariée.
Pour redevenir lisible et audible, Paris devra clarifier ses priorités : la dénonciation du programme nucléaire iranien ne peut s’accompagner d’une ambiguïté persistante sur la politique israélienne à Gaza et sur la reconnaissance par la France de l’État palestinien.


Metz: un forcené tué par balles, un policier touché à la main

Un homme "menaçant", détenteur de plusieurs armes à feu, a succombé à des blessures par balles lundi à Metz après un échange de coups de feu avec la police, tandis qu'un agent a été blessé, a annoncé le parquet. (AFP)
Un homme "menaçant", détenteur de plusieurs armes à feu, a succombé à des blessures par balles lundi à Metz après un échange de coups de feu avec la police, tandis qu'un agent a été blessé, a annoncé le parquet. (AFP)
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  • Alors que les forces de l'ordre interviennent, "l'homme est retranché chez lui et refuse de se rendre à la police", a poursuivi M. Grosdidier
  • Un peu avant 3H00, l'homme, installé au premier étage, "faisait feu depuis sa fenêtre sur la patrouille située dans la rue", a indiqué dans un communiqué le procureur de la République adjoint de Metz, Thomas Bernard

STRASBOURG: Un homme "menaçant", détenteur de plusieurs armes à feu, a succombé à des blessures par balles lundi à Metz après un échange de coups de feu avec la police, tandis qu'un agent a été blessé, a annoncé le parquet.

Les faits ont commencé dimanche soir dans une rue très passante de la vieille ville de Metz. "Vers 22h00, un individu menace depuis sa fenêtre, avec une arme à canon long, un passant", a rapporté le maire François Grosdidier sur sa page Facebook.

Alors que les forces de l'ordre interviennent, "l'homme est retranché chez lui et refuse de se rendre à la police", a poursuivi M. Grosdidier.

Un peu avant 3H00, l'homme, installé au premier étage, "faisait feu depuis sa fenêtre sur la patrouille située dans la rue", a indiqué dans un communiqué le procureur de la République adjoint de Metz, Thomas Bernard.

"Il sortait alors de son studio, tenant dans chaque main un revolver, et faisait feu sur les policiers présents dans le couloir", a-t-il ajouté. "Un policier était blessé à une main, tandis qu'un de ses collègues tirait à trois reprises, touchant l'individu à l'abdomen et au bras".

L'homme de 56 ans a été hospitalisé mais est décédé lundi matin. "Son casier judiciaire porte trace de neuf condamnations", selon M. Bernard.

Le policier blessé a également été hospitalisé.

L'homme détenait "plusieurs armes, de poing et d'épaule, dans son appartement", selon le maire qui a salué l'intervention des forces de l'ordre.


Tourisme en France : entre recherche de soleil, contraintes budgétaires et destinations alternatives

Cette photo prise le 22 mars 2024 montre un bateau navette naviguant sur la Garonne alors que l'église Saint-Louis-des-Chartrons (à gauche) surplombe les quais de Bordeaux, dans le sud-ouest de la France. Bordeaux accueillera certains des tournois de football des Jeux olympiques de Paris 2024 l'été prochain. (AFP)
Cette photo prise le 22 mars 2024 montre un bateau navette naviguant sur la Garonne alors que l'église Saint-Louis-des-Chartrons (à gauche) surplombe les quais de Bordeaux, dans le sud-ouest de la France. Bordeaux accueillera certains des tournois de football des Jeux olympiques de Paris 2024 l'été prochain. (AFP)
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  • les Français semblent partager la même priorité : partir en vacances sans trop grever leur budget.
  • L’ensoleillement demeure un facteur clé dans les choix de destination. Les zones méditerranéennes continuent de séduire, au détriment des régions plus tempérées

RIYAD : Alors que l'été 2025 se profile, les Français semblent partager la même priorité : partir en vacances sans trop grever leur budget. Si 61 % d’entre eux envisagent de prendre quelques jours de congé, selon un sondage OpinionWay pour Liligo, leur comportement de consommation évolue. Pour la première fois en cinq ans, le budget moyen baisse de 74 euros par personne.

L’ensoleillement demeure un facteur clé dans les choix de destination. Les zones méditerranéennes continuent de séduire, au détriment des régions plus tempérées comme la Bretagne, la Normandie ou le nord de la France. Cette tendance s’explique notamment par deux étés précédents jugés peu cléments sur le plan météorologique, ce qui dissuade certains vacanciers de s'y rendre à nouveau.

Dans les établissements touristiques du Grand Ouest, les professionnels constatent un recul des séjours d'une semaine, compensé par une légère hausse des courts séjours (2 à 6 nuits). Les réservations de dernière minute restent fréquentes et très dépendantes des prévisions météorologiques du dimanche soir.

Confrontés à une inflation persistante et à des inquiétudes concernant leur pouvoir d’achat, les Français adaptent leurs comportements. Ils réduisent leurs dépenses dans les restaurants, les commerces ou les activités annexes, et sont plus prudents dans la planification de leurs séjours. Les formules « tout compris », jugées plus économiques et prévisibles, rencontrent un succès croissant.

Selon le cabinet Pro tourisme, les prix des hébergements touristiques ont grimpé de 27 % en quatre ans. Dans ce contexte, les territoires proposant des tarifs plus accessibles, comme l’intérieur des terres ou les destinations proches des grandes agglomérations comme l’Eure, la Vienne, l’Ain ou l’Oise, enregistrent une forte progression des recherches, parfois jusqu’à +150 %.

Si les littoraux restent prisés, un rééquilibrage s’opère en faveur des zones rurales et périurbaines. Ces destinations sont non seulement plus abordables, puisque les locations y sont en moyenne 20 à 30 % moins chères que sur la côte, mais elles offrent également un cadre de vie plus agréable.

Ces destinations répondent à une demande croissante de nature, de tranquillité et d’authenticité. La France rurale, longtemps en retrait, bénéficie désormais d’une attractivité renouvelée. Un phénomène accentué par l’essor du télétravail, le besoin de déconnexion et la quête d’expériences plus simples. L’arrière-pays n’est plus perçu comme une alternative de repli, mais comme un véritable choix de qualité.

Sur le plan international, la France reste solidement installée comme première destination mondiale avec 100 millions de touristes étrangers en 2024, devant l’Espagne. Les métropoles touristiques qui accueillent une clientèle étrangère à fort pouvoir d’achat, comme Paris, Cannes, Nice ou les régions viticoles, affichent des perspectives encourageantes.

Les analystes estiment que les Jeux Olympiques 2024 ont amplifié la visibilité de la France sur la scène mondiale, générant un regain d’intérêt pour la capitale et ses alentours. À Paris, la fréquentation touristique devrait rester élevée en 2025 grâce à l’effet post-événementiel.

Entre contraintes économiques, recherche d’ensoleillement et désir de proximité, le tourisme en France est en pleine mutation. Les professionnels s’adaptent à une clientèle plus exigeante, plus mobile et surtout plus attentive à l’équilibre entre plaisir et dépenses. Le paysage touristique français, longtemps polarisé entre le littoral et la montagne, s’enrichit désormais d’une diversité de choix stratégiques, économiques et culturels.