L'atelier Junod: où la tradition de l'art mécanique suisse embrasse le futur

Le maître suisse François Junod dont l’art ancien vient d’être distingué par les Nations Unies (Photo, AFP).
Le maître suisse François Junod dont l’art ancien vient d’être distingué par les Nations Unies (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Lundi 25 janvier 2021

L'atelier Junod: où la tradition de l'art mécanique suisse embrasse le futur

  • L'art ancien du maître suisse vient d'entrer au patrimoine culturel de l'humanité
  • Le savoir-faire qui a donné naissance aux montres et automates parmi les plus admirés au monde se transmet de génération en génération depuis des siècles dans ces montagnes du Jura

SAINTE-CROIX: Dans son atelier posé dans un écrin de neige, les chefs-d’œuvre mécaniques de François Junod prennent vie : les oiseaux sifflent et des personnages historiques écrivent de la poésie. L'art ancien du maître suisse vient d'entrer au patrimoine culturel de l'humanité.

Le savoir-faire qui a donné naissance aux montres et automates parmi les plus admirés au monde se transmet de génération en génération depuis des siècles dans ces montagnes du Jura, à la frontière franco-suisse.

Et désormais ce mariage intime entre la science, la technologie et l'art est distingué par les Nations unies. « Si les mécanismes sont généralement cachés, ils peuvent également être visibles, et cela contribue à la dimension poétique et émotionnelle de ces objets », souligne l'Unesco qui a inscrit en décembre cet artisanat sur sa liste du patrimoine culturel immatériel de l'humanité.

François Junod travaille à un androïde mécanique à l'effigie de Léonard de Vinci, lui-même inventeur et ingénieur de génie. Il a des paupières et ses yeux brillants suivent du regard sa main qui écrit de gauche à droite.

L’une des œuvres de l’atelier en train d’être confectionnée (Photo, AFP).

« C'est proche de la magie », lance le maître en donnant vie à la tête du père de la Joconde.

« Il y a un élan, un regain d'intérêt à travers ces objets-là parce qu'on est dans une période, une époque où on vit dans le tout électronique et de revoir des objets mécaniques, il y a tout un mystère qui réapparait, toute une magie qui revient, qui avait un peu disparu avant », explique François Junod.

« Je pense que c'est ça qui redonne de l'intérêt et qui fait revivre ce métier qui avait un peu disparu quand même ».

Murmure de rouages

L'atelier se trouve à Sainte-Croix dans l'Ouest de la Suisse, à seulement cinq kilomètres de la frontière française.

La région est intimement liée à l'horlogerie et aux arts mécaniques, depuis la persécution des protestants en France après la révocation de l'édit de Nantes. Les réfugiés ont apporté avec eux leur savoir-faire, leur culture et leur amour du travail bien fait.

La tranquillité des montagnes, « ça va très bien avec le métier », fait remarquer le maître. A 61 ans, il porte le flambeau d'une famille qui depuis quatre générations pratique la mécanique de précision dans ce village de 4 400 âmes.

Dans son atelier, les roues dentées et les pistons le disputent aux papillons mécaniques, à un cheval au petit galop, des boîtes à musique du XIXème siècle et des oiseaux géants aux couleurs chamarrées.

Ajoutant à l'atmosphère baroque, parmi une foule d'outils, trône un squelette coiffé d'un chapeau à plume qui sert à modéliser les mouvements, des bras et des jambes qui pendent du plafond au-dessus d'étagères chargées de têtes miniatures sous le regard d'un œil géant dont l'iris fait de la musique en tournant.

Patience et temps

François Junod et son équipe travaillent sur cinq à six pièces à la fois. L'art qu'ils pratiquent demande patience, ingéniosité et curiosité.

Il a fallu cinq ans pour réaliser l'automate incarnant le poète russe Alexandre Pouchkine, capable d'écrire 1 458 poèmes...à l'encre. Le tapis volant a demandé deux ans d'efforts.

« Il faut aimer la difficulté. Il faut de la patience. Il faut être passionné », énumère le maître des lieux, ajoutant : ce sont « vraiment de véritables objets d'art avec une complexité en tout point identique à l'horlogerie ».

Un automate à l’effigie de Leonard de Vinci à l’œuvre dans l’atelier Junod (Photo, AFP).

Au sein d'un même atelier chacun va réaliser un automate avec son propre style, souligne François Junod. « C'est ça qui lui donne une âme. Il a vraiment une âme ! Il n'y a jamais deux automates identiques ».

« C'est ça qui fait le charme du métier », dit-il.

La fée Ondine et le futur

Le charme intemporel de cet art séduit jusqu'à la génération smartphone. François Junod raconte comment sa fée Ondine, assise sur un nénuphar les ailes battantes alors qu'elle se réveille pour contempler un papillon s'échappant d'une fleur en train d'éclore a fasciné le public à Pékin, Londres, Paris ou Genève.

A chaque fois, des jeunes gens s'agglutinaient autour d'elle et la filmaient avec leur iPhone, « parce que ça bouge. C'est magique. C'est poétique. C'est la magie, le spectacle des automates », raconte-t-il.

Et s'il est l'héritier d'une tradition séculaire, il ne boude pas les nouvelles technologies. Bien au contraire. Il a embrassé l'impression 3D qui a ouvert de nouvelles possibilités permettant de dépasser les limitations des outils traditionnels.

« L'imagination peut aller plus loin. On a plus de possibilités » se réjouit le maître. « Presque tout est possible ».


La fête de la musique sous le signe du dialogue culturel franco-saoudien

Du 20 au 26 juin 2025, la Fête de la Musique résonnera dans trois grandes villes d’Arabie saoudite : Riyad, Khobar et Djeddah. (Photo Fournie)
Du 20 au 26 juin 2025, la Fête de la Musique résonnera dans trois grandes villes d’Arabie saoudite : Riyad, Khobar et Djeddah. (Photo Fournie)
Short Url
  • Née en France en 1982, la Fête de la Musique s’est imposée comme un événement planétaire célébré dans plus de 120 pays.
  • L’édition 2025 proposera une programmation riche et éclectique, reflet de la vitalité des scènes française et saoudienne contemporaines.

RIYAD : Du 20 au 26 juin 2025, la Fête de la Musique résonnera dans trois grandes villes d’Arabie saoudite : Riyad, Khobar et Djeddah. À l’initiative de l’ambassade de France, en collaboration avec l’Alliance française, Saudi Music Hub, Unstable, Hayy Jameel et MDL Beast, une série d’événements musicaux viendra marquer ce rendez-vous culturel international devenu emblématique.

Née en France en 1982, la Fête de la Musique s’est imposée comme un événement planétaire célébré dans plus de 120 pays. Fidèle à son principe fondateur, elle vise à rendre la musique accessible à tous gratuitement. Elle reste, cette année encore, un puissant vecteur de dialogue culturel. En Arabie saoudite, cette célébration musicale prend une dimension particulière, s’inscrivant dans un contexte de renouveau artistique et d’ouverture culturelle, en pleine résonance avec les objectifs de Vision 2030.

L’édition 2025 proposera une programmation riche et éclectique, reflet de la vitalité des scènes française et saoudienne contemporaines. Des artistes français seront présents, comme Karimouche, figure singulière du spoken word et de la chanson engagée, ou DJ SÔNGE, productrice électro aux univers immersifs et afro-futuristes.

Ces artistes partageront la scène avec des talents saoudiens tels que Kosh, beatmaker fusionnant rythmes traditionnels et basses électroniques, ou Seera, jeune espoir de la scène folk locale. Plusieurs artistes émergents, sélectionnés avec soin en collaboration avec les partenaires saoudiens, viendront compléter cette mosaïque sonore.

Chacune des villes participantes offrira une atmosphère unique. Riyad ouvrira le bal le 20 juin avec une nuit musicale au Unstable, lieu hybride emblématique de la scène urbaine saoudienne. Le 21 juin, Khobar prendra le relais au Saudi Music Hub, un espace dédié à la formation musicale, pour une soirée plus intimiste. Enfin, Djeddah clôturera cette semaine de célébration les 25 et 26 juin, au cœur du centre culturel Hayy Jameel, avec deux concerts présentés par des artistes féminines marquantes.

Au-delà des concerts, ces rencontres musicales seront l'occasion de moments de partage, de découvertes et d'échanges, favorisant la création de liens entre artistes et publics des deux pays. En soutenant la circulation des talents et la coopération artistique, la France réaffirme son engagement en faveur de la diversité culturelle et du dialogue entre les sociétés.

La Fête de la Musique 2025 est ainsi bien plus qu’un simple rendez-vous festif : elle est le symbole vivant d’une amitié en construction, portée par des sons, des voix et des émotions partagées.


La bibliothèque Jadal est une oasis culturelle dans la province orientale de l'Arabie saoudite

Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Short Url
  • Ali Al-Herz a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres, offrant aux visiteurs un espace où la mémoire, la philosophie et la culture prennent vie.
  • adal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

DHAHRAN : Dans le village tranquille d'Umm Al-Hamam, situé dans la province orientale de l'Arabie saoudite, une passion de longue date pour les livres s'est transformée en un havre culturel.

Ali Al-Herz, bibliophile et archiviste littéraire, a transformé sa maison en une bibliothèque d'exception nommée Jadal, un véritable trésor contenant plus de 37 000 livres, plus de 100 000 journaux et magazines, ainsi que des antiquités, dont certaines datent de plus d'un siècle.

Mais Jadal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

Al-Herz a déclaré à Arab News : « Depuis ma naissance, j'ai été entouré des livres de ma mère. J'ai grandi immergé dans cette passion, à tel point qu'elle m'a complètement envahi ; je suis devenu un rat de bibliothèque. »

L'étincelle qui a tout déclenché a été la rencontre d'Al-Herz avec l'épopée Sirat Antar à l'âge de 13 ans. « À partir de cette épopée, et à travers elle, j'ai commencé à explorer d'autres mondes », a-t-il déclaré. 

C'est cette curiosité et cette fascination qui ont finalement conduit Al-Herz à créer l'une des initiatives les plus originales du royaume d'Arabie saoudite.

Le nom « Jadal » signifie « débat » ou « discussion » en arabe, reflétant l'esprit curieux de la bibliothèque. Pour Al-Herz, l'objectif n'est pas seulement de préserver les textes, mais aussi l'idée de questionner et d'explorer les idées.

Al-Herz a déclaré : « J'ai choisi ce nom pour la bibliothèque, car il est profondément ancré dans l'histoire philosophique de la Grèce antique, ainsi que dans notre propre tradition culturelle arabo-islamique, en particulier dans notre héritage religieux. »

L'atmosphère philosophique imprègne les trois salles principales, nommées d'après Socrate, Platon et Aristote, qui accueillent les visiteurs dans un univers dédié à la lecture et à la réflexion. 

Des manuscrits rares, des textes anciens, des journaux et des antiquités ont été soigneusement archivés. Chaque pièce est un murmure du passé qui s'adresse à l'avenir. 

Al-Herz explique : « Même mon intérêt récent pour l'achat de livres s'est principalement orienté vers les éditions rares et les imprimés anciens, afin de créer une harmonie entre patrimoine et modernité. »

Mais Jadal ne se laisse pas envahir par la nostalgie, car Al-Herz organise toutes les deux semaines une réunion littéraire. Cet événement fait revivre une tradition qui était autrefois importante dans la vie intellectuelle des Arabes.

C'est un environnement où écrivains, universitaires et penseurs se réunissent autour d'un café arabe pour échanger des idées dans une atmosphère animée. 

À une époque où les gens recherchent des informations instantanées en ligne, Al-Herz continue d'utiliser des méthodes traditionnelles. « Il y a une lutte permanente entre deux générations », observe-t-il. « La victoire reviendra finalement à cette dernière génération, une fois que ma génération aura disparu. Les bibliothèques papier seront alors transformées en musées. »

Il a peut-être raison, mais pour l'instant, au cœur de la campagne de Qatif, la bibliothèque Jadal continue d'exister, et c'est un lieu où l'encre, la mémoire, le débat et le patrimoine continuent de façonner l'âme culturelle du Royaume. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com 


Amin Maalouf apporte un soutien inattendu aux langues régionales

Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
Short Url
  • Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs,
  • Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale.

PARIS : Une initiative d'un collectif visant à enseigner le patrimoine littéraire dans les langues régionales de France a reçu lundi  un soutien inattendu : celui du secrétaire perpétuel de l'Académie française, Amin Maalouf.

M. Maalouf, écrivain franco-libanais, a été élu en 2023 à la tête d'une institution dont la mission est de veiller au rayonnement et à l'intégrité de la langue française.

Toutefois, il soutient la démarche du Collectif pour les littératures en langues régionales, qui suggère un enseignement de ce type au collège ou au lycée, a indiqué ce collectif à l'AFP.

Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs, afin de sensibiliser à la « richesse de la production littéraire » dans d'autres langues que le français. 

« M. Maalouf, comme nous, est convaincu qu'il est nécessaire que les élèves français découvrent ces trésors culturels », écrit ce collectif à M. Bayrou, qui parle lui-même le béarnais.

Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale (de l'alsacien au tahitien, en passant par le basque ou le corse), traduits en français.

On y trouve entre autres un poème en provençal de Frédéric Mistral (prix Nobel de littérature en 1904) intitulé Mirèio, une chronique en breton de Pierre-Jakez Hélias intitulée Bugale ar Republik, un court récit en créole martiniquais de Raphaël Confiant intitulé Bitako-a, ainsi qu'une chanson en picard d'Alexandre Desrousseaux intitulée Canchon dormoire (plus connue sous le nom de P'tit Quinquin).

« Il ne s'agit pas de donner des cours de langues régionales, mais de présenter des œuvres issues des littératures en langues régionales, que ce soit en français ou en version bilingue », précise le collectif.

Idéalement, selon lui, les élèves aborderaient des langues issues d'autres régions que la leur. « Pourquoi seuls les élèves antillais apprendraient-ils qu'il existe une littérature en créole ? », demande ce collectif, qui présente son initiative à la presse lors d'une visioconférence lundi après-midi.