À Beyrouth, des médecins urgentistes racontent une nuit d’horreur après l’explosion

La puissante déflagration a fait jusqu’ici 137 morts et plus de 5000 blessés. Des dizaines de personnes seraient toujours portées disparues. (Anwar AMRO/AFP)
La puissante déflagration a fait jusqu’ici 137 morts et plus de 5000 blessés. Des dizaines de personnes seraient toujours portées disparues. (Anwar AMRO/AFP)
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Publié le Jeudi 06 août 2020

À Beyrouth, des médecins urgentistes racontent une nuit d’horreur après l’explosion

  • « J’ai vécu la guerre civile et j’ai soigné des victimes de l’invasion israélienne de 2006, je n’ai jamais vécu une chose pareille »
  • « Il y a une négligence criminelle de la part des autorités qui gèrent le port, des douanes, des autorités de sécurité, du corps judiciaire et des gouvernements successifs »

DUBAI: Les scènes des nombreux blessés se ruant dans les hôpitaux après les immenses explosions au Port de Beyrouth resteront longtemps gravées dans les mémoires. La puissante déflagration a fait jusqu’ici 137 morts et plus de 5000 blessés. Des dizaines de personnes seraient toujours portées disparues.

Mardi soir, des victimes grièvement blessées ont afflué au centre médical de Clémenceau, dans le quartier de Hamra. « Il y avait du sang partout, confie à Arab News Dr Walid Alamai, cardiologue de l’hôpital. J’ai 58 ans. J’ai vécu la guerre civile et j’ai soigné des victimes de l’invasion israélienne de 2006. Je n’ai jamais vécu une chose pareille. Jamais une bombe n’a causé des ravages à une aussi grande distance », assure t-il. Il explique que de nombreux patients, des enfants pour la plupart, souffraient de blessures au niveau des yeux ou avaient même perdu la vue, en raison des débris de verre.

Rapidement après l’explosion, tous les médecins et les infirmiers qui étaient en congés ont été réquisitionnés. « Nous avons réussi à bien gérer l’afflux de patients. Pourtant, nous n’avions jamais fait face à tel évènement. Nous avons soigné un grand nombre de cas en un temps record. »

Ces explosions interviennent à un moment critique, où le système de santé est durement frappé par l’effondrement économique en cours dans le pays depuis plusieurs mois, la pénurie d’électricité et une forte deuxième vague de coronavirus. Le Liban venait d’imposer un confinement pendant deux semaines, en raison du regain de l’épidémie. Mais mardi, les hôpitaux de Beyrouth se sont  trouvés confrontés à une urgence médicale tout à fait inattendue.   

« Nous avons même dû soigner les patients dans le noir, suite à une panne électrique »

Chirurgien au centre médical de l’Université Américaine a Beyrouth (AUBMC), Dr Ramzi Alami était parmi les médecins en première ligne. « Comme la plupart des hôpitaux, nous avons été submergés, ce soir-là, raconte t-il à Arab News. Nous avons été obligés de refuser plusieurs blessés. Les couloirs sont restés ouverts pour céder le passage aux cas les plus sévères. Je ne trouve pas les mots pour décrire ce que nous avons vu pendant cette longue nuit. Nous avions des malades dans les couloirs, par terre, partout. Nous avons même dû soigner les patients dans le noir, suite à une panne électrique. »

Les cas les plus sévères, selon lui, étaient blessés au niveau de la tête ou victimes de traumatismes crâniens. Au total, le centre médical a reçu en une nuit 55 cas médicaux graves. Les cas les moins sérieux ont été transférés dans des hôpitaux les plus proches. Certains hôpitaux se sont trouvés privés de courant électrique et sans générateur, en raison de l’explosion. Selon Dr. Samir Challita, un médecin vivant à Byblos, les hôpitaux de la capitale étaient tellement saturés que les patients sont arrivés jusqu’à cette ville côtière située à 30 km de Beyrouth pour se faire soigner.

« La deuxième plus grande explosion après Hiroshima et Nagasaki »

Dans cette période difficile, le Liban n’a pas été abandonné par les pays étrangers. Des avions en provenance du Golfe ont atterri à l’aéroport Rafic Hariri. L’Union européenne a assuré qu’elle allait envoyer 100 pompiers spécialisés et des experts de recherche et de sauvetage. Le président Donald Trump a assuré que les États-Unis étaient prêts à soutenir le Liban. Israël, qui est techniquement en guerre avec le Liban, a proposé d’offrir de l’aide médicale et humanitaire à son voisin.

Les Libanais estiment eux que la classe politique doit urgemment rendre des comptes après un tel désastre. « L’ampleur de la destruction est sans précèdent, explique à Arab News M. Nasser Saidi, ancien ministre de l’Economie et du Commerce et fondateur de Nasser Saidi & Co. A l’échelle mondiale, l’explosion, estimée a plus de 2300 tonnes de nitrate d’ammonium, est la deuxième plus grande explosion après Hiroshima et Nagasaki, plus dévastatrice que celle qui a eu lieu à Halifax (1917) et au Texas (1947). Le nitrate d’ammonium a été stocké au port de Beyrouth depuis 2014, exposant la ville à un énorme danger. Il y a une négligence criminelle de la part des autorités qui gèrent le port, des douanes, des autorités de sécurité, du corps judiciaire et des gouvernements successifs. Des avertissements ont été donnés, mais ils ont été ignorés. C’était un désastre qui devait arriver tôt ou tard », poursuit M. Saidi.

Selon lui, la crise économique, bancaire et financière va encore s’aggraver, de même que la dépréciation monétaire et l’inflation galopante. Avec la destruction du port, le Liban sera incapable d’importer nourriture, médicaments et autres produits essentiels. « Nous avons aujourd’hui besoin d’aide internationale, pas uniquement au niveau humanitaire, mais pour permettre des réforme politiques indispensables dans le pays, ajoute t-il. Le gouvernement de Diab ne peut pas continuer à faire porter toutes les responsabilités aux anciens gouvernements. »

Ce texte est la traduction d'un article paru sur ArabNews.com


Israël: des élus favorables à une loi instaurant la peine de mort pour les «terroristes»

 La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir. (AFP)
La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir. (AFP)
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  • Selon le médiateur israélien chargé des otages, Gal Hirsch, le Premier ministre Benjamin Netanyahu soutient cette initiative
  • La commission a approuvé un amendement au Code pénal, qui sera maintenant transmis au Parlement pour un vote en première lecture, une loi étant instaurée en Israël après une vote en troisième lecture

JERUSALEM: La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir.

La commission a approuvé un amendement au Code pénal, qui sera maintenant transmis au Parlement pour un vote en première lecture, une loi étant instaurée en Israël après une vote en troisième lecture.

Selon le médiateur israélien chargé des otages, Gal Hirsch, le Premier ministre Benjamin Netanyahu soutient cette initiative.

Dans une note explicative de la commission, il est indiqué que "son objectif est de couper le terrorisme à sa racine et de créer une forte dissuasion".

Le texte propose qu'un "terroriste reconnu coupable de meurtre motivé par le racisme ou la haine (...) soit condamné à la peine de mort - de manière obligatoire", ajoutant que cette peine serait "non optionnelle".

La proposition de loi a été présentée par une élue du parti Otzma Yehudit (Force Juive) d'Itamar Ben Gvir.

Ce dernier a menacé de cesser de voter avec la coalition de droite de Benjamin Netanyahu si ce projet de loi n'était pas soumis à un vote parlementaire d'ici le 9 novembre.

"Tout terroriste qui se prépare à commettre un meurtre doit savoir qu'il n'y a qu'une seule punition: la peine de mort", a dit le ministre lundi dans un communiqué.

M. Ben Gvir avait publié vendredi une vidéo de lui-même debout devant une rangée de prisonniers palestiniens allongés face contre terre, les mains attachées dans le dos, dans laquelle il a appelé à la peine de mort.

Dans un communiqué, le Hamas a réagi lundi soir en affirmant que l'initiative de la commission "incarne le visage fasciste hideux de l'occupation sioniste illégitime et constitue une violation flagrante du droit international".

"Nous appelons les Nations unies, la communauté internationale et les organisations pertinentes des droits de l'Homme et humanitaires à prendre des mesures immédiates pour arrêter ce crime brutal", a ajouté le mouvement islamiste palestinien.

Le ministère palestinien des Affaires étrangères et des expatriés, basé à Ramallah, a également dénoncé cette décision, la qualifiant de "nouvelle forme d'extrémisme israélien croissant et de criminalité contre le peuple palestinien".

"C'est une étape dangereuse visant à poursuivre le génocide et le nettoyage ethnique sous le couvert de la légitimité", a ajouté le ministère.


Frappes israéliennes sur le sud du Liban: deux morts 

Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah. (AFP)
Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah. (AFP)
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  • Selon un bilan provisoire, "une frappe ennemie d'Israël" dans la région de Nabatiyé a fait lundi "un mort et sept blessés, a indiqué le ministère de la Santé
  • Un drone a visé une voiture à Doueir, a rapporté l'agence nationale d'information Ani

BEYROUTH: Des frappes israéliennes sur le sud du Liban ont tué lundi deux personnes et blessé sept autres, a indiqué le ministère libanais de la Santé, au lendemain de la menace d'Israël d'intensifier ses attaques contre le Hezbollah pro-iranien.

Malgré un cessez-le-feu conclu en novembre 2024, Israël continue de mener des attaques régulières contre les bastions du Hezbollah. Et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a accusé dimanche le Hezbollah de tenter de se "réarmer".

Selon un bilan provisoire, "une frappe ennemie d'Israël" dans la région de Nabatiyé a fait lundi "un mort et sept blessés, a indiqué le ministère de la Santé.

Un drone a visé une voiture à Doueir, a rapporté l'agence nationale d'information Ani.

Sur place, un photographe de l'AFP a vu des pompiers tenter d'éteindre l'incendie de la voiture visée qui s'est propagé à d'autres véhicules à proximité. Des ouvriers ramassaient les bris de verre des devantures de commerces endommagées, a-t-il également constaté.

Une autre frappe sur un village de la région de Bint Jbeil a fait un mort, selon le ministère de la Santé.

Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah.

Des centaines de personnes ont participé à leurs funérailles dimanche dans la ville de Nabatiyé, scandant "Mort à Israël".

Le Hezbollah a été fortement affaibli par la guerre, avec notamment l'assassinat de son chef historique, Hassan Nasrallah, par une frappe israélienne en septembre 2024 à Beyrouth, mais il demeure financièrement résilient et armé.

Les États-Unis ont accru la pression sur les autorités libanaises pour désarmer le groupe, ce que le Hezbollah refuse.

"Nous attendons du gouvernement libanais qu'il fasse ce qu'il s'est engagé à faire, c'est-à-dire désarmer le Hezbollah, mais il est clair que nous exercerons notre droit à l'autodéfense comme convenu dans les termes du cessez-le-feu", avait averti le Premier ministre israélien dimanche.


La Turquie mobilise ses partenaires musulmans autour de Gaza

La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien. (AFP)
La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien. (AFP)
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  • Devant le Comité permanent pour la coopération économique de l'OCI, réuni lundi à Istanbul, le président turc Recep Tayyip Erdogan a critiqué l'attitude "très médiocre" d'Israël
  • "Nous devons apporter davantage d'aide humanitaire aux habitants de Gaza, puis commencer les efforts de reconstruction" a poursuivi le chef de l'Etat en appelant la Ligue arabe et l'OCI à jouer "un rôle moteur" en ce sens

ISTANBUL: La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien.

Les ministres de ces sept pays (Turquie, Arabie saoudite, Qatar, Emirats arabes unis, Jordanie, Pakistan et Indonésie), tous membres de l'organisation de la coopération islamique (OCI), avaient été reçus par Donald Trump fin septembre à New York en marge de l'Assemblée générale de l'ONU, avant la présentation du plan de paix américain six jours plus tard.

Devant le Comité permanent pour la coopération économique de l'OCI, réuni lundi à Istanbul, le président turc Recep Tayyip Erdogan a critiqué l'attitude "très médiocre" d'Israël depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu le 10 octobre, alors que "le Hamas semble déterminé" à respecter l'accord, estime-t-il.

"Nous devons apporter davantage d'aide humanitaire aux habitants de Gaza, puis commencer les efforts de reconstruction" a poursuivi le chef de l'Etat en appelant la Ligue arabe et l'OCI à jouer "un rôle moteur" en ce sens.

En amont de cette réunion, le chef de la diplomatie turque Hakan Fidan a reçu samedi une délégation du bureau politique du Hamas emmenée par Khalil al-Hayya, le négociateur en chef du mouvement islamiste palestinien.

Selon des responsables du ministère des Affaires étrangères, M. Fidan doit appeler à la mise en place de mécanismes permettant aux Palestiniens d'assurer la sécurité et la gouvernance de Gaza.

"Agir avec prudence" 

"Nous devons mettre fin au massacre à Gaza. Un cessez-le-feu à lui seul ne suffit pas", a insisté M. Fidan lors d'un forum à Istanbul.

"Nous devons reconnaître que Gaza doit être gouvernée par les Palestiniens et agir avec prudence", a encore souligné le ministre turc, plaidant de nouveau pour une solution à deux Etats.

Le chef de la diplomatie turque accuse Israël de chercher des prétextes pour rompre le cessez-le-feu.

Mais les efforts d'Ankara, qui multiplie les contacts diplomatiques avec les pays de la région et cherche à infléchir la position pro-israélienne des Etats-Unis, sont vus d'un mauvais œil par Israël qui juge Ankara trop proche du Hamas.

Les dirigeants israéliens ont exprimé à plusieurs reprises leur refus de voir la Turquie participer à la force internationale de stabilisation à Gaza.

En vertu du plan de Donald Trump, sur lequel est basé l'accord de cessez-le-feu, cette force de stabilisation, formée principalement de troupes de pays arabes et musulmans, doit se déployer à Gaza à mesure que l'armée israélienne s'en retirera.

Seuls des pays jugés "impartiaux" pourront rejoindre cette force, a cependant prévenu le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar.

Autre signe de la méfiance du gouvernement israélien : une équipe de secouristes turcs dépêchée pour participer à la recherche de corps, y compris israéliens, dans les ruines de Gaza, attendait toujours en fin de semaine dernière le feu vert israélien pour entrer dans le territoire palestinien, selon Ankara.