À Beyrouth, Macron durcit le ton et appelle à un « profond changement du système »

« Il aurait été beaucoup plus facile pour moi de ne pas rencontrer vos dirigeants, mais c’est le peuple libanais qui les a élus c’est pour cela que je les ai rencontrés », a déclaré Emmanuel Macron aux Libanais.
« Il aurait été beaucoup plus facile pour moi de ne pas rencontrer vos dirigeants, mais c’est le peuple libanais qui les a élus c’est pour cela que je les ai rencontrés », a déclaré Emmanuel Macron aux Libanais.
Short Url
Publié le Vendredi 07 août 2020

À Beyrouth, Macron durcit le ton et appelle à un « profond changement du système »

  • Macron a annoncé une conférence d'aide pour le Liban « dans les tout prochains jours » et s’est dit en faveur d’une enquête internationale
  • Le président a assuré aux Libanais qu’il allait « demander un nouveau pacte national à toutes les forces politiques: si elles ne sauront pas tenir leurs engagements, je prendrais mes responsabilités ; je comprends votre colère »

BEYROUTH: En visite à Beyrouth après les explosions dévastatrices de mardi, le président français Emmanuel Macron a durci le ton jeudi contre les dirigeants libanais conspués par la rue, les exhortant à « changer de système » et à lutter contre la corruption après des visites dans des quartiers ravagés.

Il a annoncé une conférence d'aide pour le Liban « dans les tout prochains jours » et a appelé les responsables libanais à un profond changement. Il s’est également déclaré pour une politique de désassociassions du Liban (des conflits régionaux, ndlr), en assurant « le problème du Liban est d’avoir trop de monde autour de lui. »

Provoquées mardi par l'explosion de tonnes de nitrate d'ammonium à l'abandon au port de Beyrouth, les énormes déflagrations, les pires vécues au Liban, ont fait au moins 137 morts et 5.000 blessés, laissé sans abri des centaines de milliers de personnes, alors que des dizaines de personnes sont toujours recherchées. Elles ont détruit des quartiers et endommagé d'autres à plusieurs km à la ronde dans un pays déjà plongé dans une crise économique et sociale sans précédent et où près de la moitié des habitants vivent dans la pauvreté.

« Il y aura un avant et un après 4 août 2020. Dans les tout prochains jours, nous organiserons une conférence internationale de soutien et d'appui à Beyrouth et à la population libanaise », a annoncé M. Macron en conférence de presse, afin de mobiliser « des financements internationaux, des Européens, des Américains, tous les pays de la région et au-delà, afin de fournir des médicaments, des soins, de la nourriture », a-t-il déclaré. « Les financements sont là, ils attendent les réformes. Pas de chèque en blanc pour des systèmes qui n’ont plus la confiance de leur peuple, a-t-il averti. J'appelle à un ordre politique nouveau loin de la corruption organisée. » 

Le chef de l'Etat a souhaité par ailleurs, lors d'un point de presse, « que les enquêtes puissent se faire au plus vite dans un cadre parfaitement indépendant et transparent pour expliquer, rendre compte de ce qui s'est passé, des causes » des explosions sur le port de Beyrouth. Il s’est dit en faveur d’une enquête internationale.

M. Macron a ainsi réaffirmé le besoin pour le gouvernement libanais d'entreprendre « des réformes indispensables » pour éviter que le Liban ne s'enfonce davantage dans la crise aggravée par la pandémie de coronavirus. En réponse à une question, il a lâché : « Ce n’est pas moi qui ai mis le Hezbollah au gouvernement il y a 15 ans, mais je serai lâche et hypocrite de faire comme s’ils ne sont pas là ». « Il aurait été beaucoup plus facile pour moi de ne pas rencontrer vos dirigeants, mais c’est le peuple libanais qui les a élus c’est pour cela que je les ai rencontrés », a-t-il répondu.

« J’ai eu l’impression que le Liban et les Libanais ne sont pas non plus informés des réformes menées par le gouvernement, a-t-il encore estimé. (…) Il n’y a pas une solution française, mais on peut accompagner avec une méthode, il faut l’énergie du peuple, la volonté des dirigeants, et la pression pour appliquer.

Interrogé par un journaliste sur la possibilité de « sanctions » contre les dirigeants libanais en l'absence de progrès, le président français a dit: « je n'exclus rien, mais je pense qu'il faut faire les choses en bon ordre », assurant que ce n'était pas « la priorité en terme d'action ».

« Toute la solidarité de la France »

Le président français s'est rendu au palais présidentiel de Baabda, où il a rencontré M. Aoun, le Premier ministre Hassan Diab et le chef du Parlement Nabih Berri.

Au terme de sa rencontre avec le président Aoun, Emmanuel Macron a déclaré : « Un premier objectif de ce déplacement est d'apporter toute la solidarité de la France, du peuple français au peuple libanais après la terrible explosion du 4 août. Et j’ai, avant toute chose, une pensée pour celles et ceux qui ont péri dans cette terrible explosion ». « Il y a des ressortissants français apparemment, et donc, j'ai une pensée toute particulière pour nos ressortissants et binationaux, pour leurs familles, pour les familles de blessés et j'ai aussi une pensée pour toutes les Libanaises et les Libanais qui ont été touchés physiquement dans leur chair et dont les proches ont été touchés par cette explosion », a-t-il ajouté.

« Notre soutien a commencé avec trois avions qui sont arrivés hier, que nous avons affrété dans l'urgence avec des moyens médicaux, des premières forces de secours. Un autre arrive dans les prochaines heures avec des forces complémentaires, a poursuivi M. Macron. On a déjà de quoi soigner environ 500 blessés et nous allons continuer de compléter cela avec des moyens: médicaments, soignants, forces de police, de la nourriture et également de quoi reconstruire le plus vite possible ».

Le président français a annoncé également l'envoi du porte-hélicoptères amphibie le Tonnerre jeudi prochain à Beyrouth.

« Au-delà de l'explosion, a estimé Emmanuel Macron. Il y a aujourd'hui une crise politique, morale, économique et financière qui dure depuis plusieurs mois, plusieurs années, et celle-ci implique des initiatives politiques fortes. Il faut justement que des initiatives politiques fortes soient prises pour lutter contre la corruption, pour imposer la transparence, pour mener les réformes que nous connaissons et qui, depuis 2 ans, dans le cadre d'ailleurs, des programmes CEDRE, ont été portées : lutte contre la corruption, réforme du secteur de l'énergie et de l'électricité pour lutter contre les coupures que vivent aujourd'hui les Libanaises et les Libanais, lutte aussi contre l'opacité du système bancaire pour un audit transparent de la banque centrale et du système bancaire, enclenchement du programme FMI et poursuite de l'agenda CEDRE ».

« Je l'ai dit avec beaucoup de franchise. Il appartient aux dirigeants aujourd'hui en place, à un peuple souverain, de mettre en œuvre ces décisions, mais elles sont extraordinairement urgentes et elles doivent constituer pour moi un contrat politique nouveau qui est indispensable ».

Un retour le 1er septembre

« Le Liban n'est pas seul », avait tweeté M. Macron, en français et en arabe, à son arrivée à Beyrouth, où il a été accueilli par le président Michel Aoun.

Il s'est rendu dans les ruines du port de Beyrouth où étaient entreposées depuis des années 2.700 tonnes de nitrate d'ammonium qui ont explosé après un incendie, selon les autorités. Au port, un secouriste français a estimé qu'il restait de « bons espoirs » de trouver des survivants.

M. Macron, portant un masque de protection la plupart du temps, a ensuite fait le déplacement au quartier ravagé de Gemmayzé, près du port, où il a pu observer l'immense détresse et colère de la population, lors d'échanges avec des habitants. Il a serré la main à plusieurs personnes et a même pris dans ses bras une jeune femme.

« Aidez-nous! Révolution ! », « Le peuple veut la chute du régime », « Libérez-nous du Hezbollah, Michel Aoun est un terroriste ! », a scandé la foule. Ce à quoi, M. Macron a assuré qu'il proposerait « un nouveau pacte politique » aux dirigeants libanais et leur demanderait de « changer le système, d'arrêter la division, de lutter contre la corruption ».

Il a également « garanti » à la foule que l'aide envoyée aux Libanais n'irait « pas dans les mains de la corruption », alors que des Libanais lui demandaient de ne pas faire distribuer l'aide via les institutions de l'Etat. « Je comprends votre colère. Je ne suis pas là pour cautionner le régime, mais pour vous aider », a-t-il assuré.

Emmanuel Macron a par ailleurs promis à un Libanais qui l'interpellait qu'il reviendrait le 1er septembre au Liban « Mon ami, je suis là aujourd'hui, je vais leur proposer un nouveau pacte politique cet après-midi et je reviendrai pour le 1er septembre et s'ils ne savent pas les tenir les engagements, je prendrai mes responsabilités avec vous. » « J’attends des réponses des dirigeants libanais à propos des réformes, de la liberté d’expression et je reviendrai en septembre », a-t-il également assuré en soirée, déclarant: Bhebak Ya Lebnan, pour exprimer son amour pour le Pays du Cèdre.

Ce retour le 1er septembre devrait marquer le centenaire de la naissance du Liban, mais aussi « faire un point d'étape » sur « l'indispensable sursaut » attendu des responsables, selon lui.

Le président français a, sur un autre plan, tenu une réunion à la résidence des pins, résidence de l’Ambassadeur de France au Liban, avec les dirigeants des principaux partis politiques ainsi que des représentants clés de la société civile conviés à cette rencontre. Parmi ces dirigeants, les chefs du Courant du futur, Saad Hariri, des Forces libanaises, Samir Geagea, du Courant patriotique libre, Gebran Bassil, du Parti socialiste progressiste, Walid Joumblatt et Taymour Joumblatt, des Marada, Sleiman Frangié, des Kataëb, Samy Gemayel, mais aussi le chef du bloc parlementaire du Hezbollah, Mohammad Raad.


Israël rejette une enquête de l'ONU l'accusant de «génocide» à Gaza

Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts dans la bande de Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire palestinien. (AFP)
Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts dans la bande de Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire palestinien. (AFP)
Short Url
  • "Israël rejette catégoriquement ce rapport biaisé et mensonger et appelle à la dissolution immédiate de cette commission d'enquête", a indiqué le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué
  • Une commission d'enquête internationale indépendante de l'ONU a accusé mardi Israël de commettre un "génocide" à Gaza depuis octobre 2023 avec l'intention de "détruire" les Palestiniens

JERUSALEM: Israël a "rejeté catégoriquement" mardi le rapport d'une commission d'enquête internationale indépendante des Nations unies qui l'accuse de commettre un "génocide" dans la bande de Gaza depuis octobre 2023.

"Israël rejette catégoriquement ce rapport biaisé et mensonger et appelle à la dissolution immédiate de cette commission d'enquête", a indiqué le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué.

Une commission d'enquête internationale indépendante de l'ONU a accusé mardi Israël de commettre un "génocide" à Gaza depuis octobre 2023 avec l'intention de "détruire" les Palestiniens, mettant en cause le Premier ministre Benjamin Netanyahu et d'autres responsables israéliens.

En riposte à une attaque sans précédent du Hamas en Israël le 7 octobre 2023, Israël a lancé une offensive dans la bande de Gaza qui a fait des dizaines de milliers de morts et détruit une grande partie du territoire palestinien, où le mouvement islamiste palestinien a pris le pouvoir en 2007.

La commission, qui ne s'exprime pas au nom de l'ONU et est vivement critiquée par Israël, est arrivée "à la conclusion qu'un génocide se produit à Gaza et continue de (s'y) produire", a déclaré à l'AFP sa présidente, Navi Pillay.

Elle a conclu que les autorités et les forces de sécurité israéliennes avaient commis "quatre des cinq actes génocidaires" définis par la Convention de 1948 pour la prévention et la répression du crime du génocide.

A savoir: "meurtre de membres du groupe; atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale de membres du groupe; soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle; et mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe".

Cette commission a conclu que le président israélien, Isaac Herzog, Benjamin Netanyahu et l'ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, avaient "incité à commettre un génocide et que les autorités israéliennes (n'avaient) pas pris de mesures" pour les en empêcher.

Le ministère des Affaires étrangères israélien a accusé les auteurs du rapport de "servir de relais au Hamas", affirmant qu'ils étaient "connus pour leurs positions ouvertement antisémites — et dont les déclarations horribles à l'égard des Juifs ont été condamnées dans le monde entier."

L'attaque du 7-Octobre a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.

Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts dans la bande de Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire palestinien.

L'ONU y a déclaré la famine, ce qu'Israël dément.


«Gaza brûle», déclare le ministre israélien de la Défense après des frappes intenses

Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza. (AFP)
Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza. (AFP)
Short Url
  • "Gaza brûle. Tsahal frappe d'une main de fer les infrastructures terroristes, et les soldats de Tsahal se battent vaillamment pour créer les conditions nécessaires à la libération des otages et à la défaite du Hamas"
  • "Nous ne céderons pas et ne reculerons pas jusqu'à ce que la mission soit achevée"

JERUSALEM: Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza.

"Gaza brûle. Tsahal frappe d'une main de fer les infrastructures terroristes, et les soldats de Tsahal se battent vaillamment pour créer les conditions nécessaires à la libération des otages et à la défaite du Hamas", a déclaré M. Katz sur X.

"Nous ne céderons pas et ne reculerons pas jusqu'à ce que la mission soit achevée", a-t-il ajouté.

 


Le Qatar est le seul pays capable d'être un médiateur concernant Gaza, souligne Rubio

Short Url
  • Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a estimé mardi que le Qatar était le seul pays capable de jouer le rôle de médiateur pour Gaza
  • "Evidemment, ils doivent décider s'ils veulent le faire après la semaine dernière ou non, mais nous voulons qu'ils sachent que, s'il existe un pays dans le monde qui pourrait aider à mettre fin à cela par une négociation, c'est le Qatar"

TEL-AVIV: Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a estimé mardi que le Qatar était le seul pays capable de jouer le rôle de médiateur pour Gaza, malgré une frappe israélienne ciblant des dirigeants du Hamas dans l'émirat.

"Evidemment, ils doivent décider s'ils veulent le faire après la semaine dernière ou non, mais nous voulons qu'ils sachent que, s'il existe un pays dans le monde qui pourrait aider à mettre fin à cela par une négociation, c'est le Qatar," a déclaré M. Rubio aux journalistes alors qu'il se rendait à Doha depuis Israël.