Séparatisme: la création d'un délit d'entrave à la fonction d'enseignant interroge

Les forces de police françaises en faction devant le collège de Conflans-Saint-Honorine où le professeur Samuel Paty avait été assassiné, le 3 novembre 2020 (Photo, AFP).
Les forces de police françaises en faction devant le collège de Conflans-Saint-Honorine où le professeur Samuel Paty avait été assassiné, le 3 novembre 2020 (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 01 février 2021

Séparatisme: la création d'un délit d'entrave à la fonction d'enseignant interroge

  • La commission a adopté un amendement proposant de punir d'un an d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende «le fait d'entraver ou de tenter d'entraver par des pressions ou des insultes l'exercice de la fonction d'enseignant»
  • Une mesure hautement symbolique quelques mois après la mort de Samuel Paty, qui en revanche ne fait pas l'unanimité chez les profs

PARIS: Les députés ont récemment introduit dans le projet de loi « séparatisme », examiné en séance à partir de lundi, un délit d'entrave à la fonction d'enseignant, une mesure hautement symbolique quelques mois après la mort de Samuel Paty, qui en revanche ne fait pas l'unanimité chez les profs.

La commission spéciale a adopté le 21 janvier un amendement de la députée LR Annie Genevard proposant de punir d'un an d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende « le fait d'entraver ou de tenter d'entraver par des pressions ou des insultes l'exercice de la fonction d'enseignant » lorsque celui-ci applique les programmes édictés par l'Education nationale. 

Objectif : empêcher que des personnes, notamment des parents d'élèves, contestent le contenu de certains enseignements et fassent pression sur les professeurs.

A l'Assemblée, gouvernement et rapporteurs avaient argué initialement que la proposition LR était « superfétatoire » avec les nouvelles dispositions prévues par le projet de loi, comme le nouveau « délit de séparatisme » créé par l'article 4 ou le nouveau délit face à « la haine en ligne » de l'article 18.

Annie Genevard a expliqué tenir « à préserver une disposition réservée aux enseignants ». Elle dénonce « un manque de détermination du gouvernement » avec un texte qui est selon elle « un leurre ». « Emmanuel Macron affiche une forte intention, avant de reculer au moment de la mise en œuvre. Cela n’empêchera pas les Républicains de tenter d’améliorer ce texte très timide », a-t-elle lancé. 

« Faut-il une infraction spécifique sur les enseignants alors qu'ils sont déjà couverts ? » s'interroge un député de la majorité. « On comprend cependant le message que veulent envoyer les députés et il n'y a pas de raison de le zapper », poursuit-il. L'amendement LR a été adopté avec le soutien de députés LREM.

Cette proposition intervient trois mois après la mort du professeur d'histoire-géographie Samuel Paty, assassiné après avoir montré des caricatures de Mahomet en classe.

Le cas d'un enseignant lyonnais, victime d'accusations d'islamophobie par un parent d'élève après avoir évoqué en classe le principe de laïcité, a également été pris en exemple pour justifier la création de ce nouveau délit, déjà proposé en novembre dernier par le sénateur LR, Olivier Paccaud.

« Des actes concrets sur le terrain » 

Du côté de la communauté éducative, si les enseignants saluent la portée symbolique d'une telle disposition, ils estiment préférable d'appliquer les textes protecteurs qui existent d'ores et déjà.  

« Il est nécessaire de protéger les enseignants dans ce genre de contexte mais il existe déjà des choses pour les protéger à travers la protection fonctionnelle ou encore le code pénal, c'est déjà réprimé par la loi », confie Sophie Vénétitay, du Snes-FSU, le premier syndicat du secondaire.

Le problème, souligne-t-elle, « c'est que ces dispositions existantes ne sont pas saisies, la réactivité des institutions n'est pas à la hauteur alors qu'il faudrait des actes concrets sur le terrain pour protéger les personnels en ayant une meilleure coordination entre l'éducation nationale, la police et la justice », suggère-t-elle.

Rémy Sirvent, secrétaire national laïcité au Se-Unsa, va dans le même sens. « Ce délit d'entrave est positif mais je suis un peu dubitatif sur la mise en œuvre de ce genre de mesure car il ne s'agit pas de faire un énième article mais plutôt voir comment on peut accélérer les processus judiciaires existants pour que ce genre d'affaire soit traité plus rapidement et que les auteurs des faits soient jugés vite », propose-t-il.

D'autres saluent la volonté politique. « On est contents que ces sujets soient débattus, pour rappeler que l'école est un des piliers de la République et qu'il est important de la protéger », assure Jean-Rémi Girard du Snalc (secondaire). Il est selon lui cependant « important de voir si cette disposition a des conséquences juridiques, et si ce n'est pas le cas, cela ne sert à rien ». 

Pour les parents d'élèves, particulièrement concernés par l'amendement, la loi est déjà censée protéger la liberté pédagogique des enseignants. « On va créer des lois inutiles qui vont venir affaiblir les lois essentielles », estime Rodrigo Arenas, coprésident de la fédération de parents d'élèves FCPE. « On est en train de faire une loi qui est de nature à rassurer l'opinion publique mais qui ne sera pas efficace ».


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».


Selon ManPowerGroup, l'IA pourrait réduire l'importance des « compétences » dans le recrutement

Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
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  • L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences ».
  • « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

PARIS : L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences », selon un dirigeant de ManPowerGroup.

En effet, « les compétences pourraient s'avérer obsolètes dans six mois », explique Tomas Chamorro-Premuzic, directeur de l'innovation du géant américain du travail temporaire, rencontré par l'AFP au salon Vivatech, à Paris, qui ferme ses portes samedi.  Selon lui, « il vaut mieux savoir que vous travaillez dur, que vous êtes curieux, que vous avez de bonnes aptitudes relationnelles et ça, l'IA peut vous aider à l'évaluer ».

Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

Cependant, les tâches informatiques (utilisation d'Internet, messagerie, etc.) pouvant être accomplies de manière autonome par des agents d'IA connaissent une « rapide expansion ». 

Dans ce contexte, les employeurs pourraient rechercher de plus en plus de salariés dotés de compétences hors de portée de l'IA, telles que le jugement éthique, le service client, le management ou la stratégie, comme l'indique une enquête de ManpowerGroup menée auprès de plus de 40 000 employeurs dans 42 pays et publiée cette semaine.

M. Chamorro-Premuzic déplore toutefois que ces compétences ne soient pas encore davantage mises en avant dans la formation. « Pour chaque dollar que vous investissez dans la technologie, vous devez investir huit ou neuf dollars dans les ressources humaines, la transformation culturelle, la gestion du changement », dit-il.

Les craintes d'un chômage de masse provoqué par l'IA restent par ailleurs exagérées à ce stade, estime le dirigeant, malgré certaines prédictions alarmistes.

D'après Dario Amodei, patron de la société d'intelligence artificielle Anthropic, cette technologie pourrait faire disparaître la moitié des emplois de bureau les moins qualifiés d'ici cinq ans. 

« Si l'histoire nous enseigne une chose, c'est que la plupart des prévisions sont fausses », répond M. Chamorro-Premuzic.

Concernant le recrutement, activité principale de ManPowerGroup, le dirigeant ajoute que « les agents d'intelligence artificielle ne deviendront certainement pas le cœur de notre métier dans un futur proche ». Il constate également que l'IA est utilisée par les demandeurs d'emploi.

« Des candidats sont capables d'envoyer 500 candidatures parfaites en une journée, de passer des entretiens avec leurs bots et de déjouer certains éléments des évaluations », énumère-t-il.