Après le coup d'Etat, la jeunesse birmane entre colère et peur de la répression

Un groupe de manifestants a organisé une manifestation à Mandalay le 4 février 2021 après qu'un coup d'État éclair ait mis un frein à la démocratie dans un pays qui avait pris le chemin de la démocratie, rendant les rênes du pouvoir aux militaires qui ont dirigé le Myanmar d'une main de fer pendant près de cinq décennies. (STR / AFP)
Un groupe de manifestants a organisé une manifestation à Mandalay le 4 février 2021 après qu'un coup d'État éclair ait mis un frein à la démocratie dans un pays qui avait pris le chemin de la démocratie, rendant les rênes du pouvoir aux militaires qui ont dirigé le Myanmar d'une main de fer pendant près de cinq décennies. (STR / AFP)
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Publié le Jeudi 04 février 2021

Après le coup d'Etat, la jeunesse birmane entre colère et peur de la répression

  • Depuis les raids militaires qui ont mené à l'arrestation de la dirigeante et des principaux membres du gouvernement lundi à l'aube, l'indigation couve parmi la population
  • Sans réussir à renverser la junte, les rassemblements avaient permis l'acenscion de dissidents tels qu'Aung San Suu Kyi, devenue le visage de la résistance à l'international

HONG KONG: Trois jours après le coup d'Etat qui a renversé le gouvernement civil d'Aung San Suu Kyi, une jeunesse birmane barricadée chez elle traque les rumeurs d'arrestations sur les réseaux sociaux, hésitant à défier les militaires dans la rue.

Depuis les raids militaires qui ont mené à l'arrestation de la dirigeante et des principaux membres du gouvernement lundi à l'aube, l'indigation couve parmi la population.

Mais en l'absence d'un signal fort de la part du gouvernement destitué ou de conseils de la part des vétérans du dernier coup d'Etat, la jeune génération se sent peu à même de se confronter aux troupes qui patrouillent dans les rues.

"Nous avons la volonté, la colère, l'anxiété", déclare Aye, qui demande que son vrai nom ne soit pas divulgué par crainte de représailles. Mais l'étincelle pour la suite "doit venir de personnes qui peuvent diriger", ajoute la jeune femme.

Aye est née en 1988, l'année où la répression sanglante des manifestations dans tout le pays a fait des milliers de morts. 

Sans réussir à renverser la junte, les rassemblements avaient permis l'acenscion de dissidents tels qu'Aung San Suu Kyi, devenue le visage de la résistance à l'international.

Tandis que la lauréate du prix Nobel 1991 passait ses années en résidence surveillée, Aye grandissait dans un camp de réfugiés en Thaïlande. 

Retournée en Birmanie en 2015, l'année où le parti d'Aung San Suu Kyi a pris le pouvoir, elle considère l'avenir de son commerce, à Rangoun, "complètement détruit" par le putsch. 

Avec son compagnon, "Ko Ko", elle fait des provisions d'eau et de nourriture dans l'intention d'utiliser son magasin comme refuge pour ses proches, en cas d'arrestation ou d'effusion de sang. 

Ko Ko, 22 ans, est dans un état d'hébétude depuis qu'il s'est réveillé, lundi, avec l'annonce du coup d'Etat à la radio. 

"En ce moment, tout le monde s'entend sur le fait que l'heure n'est pas venue de manifester", estime-t-il, se disant plus préoccupé par la file d'attente à la banque alors que tous essayent frénétiquement de retirer leurs économies.

"Effet palliatif" 

L'armée justifie sa prise de pouvoir en affirmant que le gouvernement s'est rendu coupable de fraudes lors des élections de novembre dernier.

Sur les réseaux sociaux, les birmans sont nombreux à contester ces allégations. C'est le cas de "Khin", une jeune femme de la côte sud.

Récemment retournée dans sa ville natale après avoir terminé ses études en Europe, elle estime que la plupart des gens qu'elle connaît ne croient pas que l'armée abandonnera le pouvoir après un an, comme elle l'a annoncé.

"Personne ne leur fait confiance", soupire-t-elle.

Jusqu'à présent, les plans de résistance se limitent à des actes pacifiques de désobéissance civile, mais la rage se répand sur internet. 

Les informations comme les rumeurs vont vite concernant les mouvements de chars et les arrestations de dissidents.

"Il est possible que les réseaux aient un effet palliatif", affirme Mary Callahan, professeur associé d'études internationales à l'université de Washington qui vit à Rangoun.

Mais depuis jeudi, l'organisation non gouvernementale Netblocks, qui surveille les coupures d'internet dans le monde, a déclaré que des fournisseurs en Birmanie bloquaient ou restreignaient l'accès à Facebook, Instagram et WhatsApp.

Selon un militant basé à Mandalay, la deuxième ville du pays, les habitants sont "confus, avec des informations contradictoires sur les médias sociaux et un manque de leadership politique après l'arrestation d'Aung San Suu Kyi".

Nombreux sont ceux qui craignent qu'une réaction de la population ne serve de prétexte pour prolonger le régime militaire. 

"Pour avoir vécu des décennies de régime militaire, nous savons à quel point les choses peuvent mal tourner", ajoute l'activiste. 


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
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  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.