Favoriser la diversité à l'ENA, un totem social pour Macron

Les locaux de l’Ecole Nationale de l’Administration, à Strasbourg (Photo, AFP).
Les locaux de l’Ecole Nationale de l’Administration, à Strasbourg (Photo, AFP).
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Publié le Jeudi 11 février 2021

Favoriser la diversité à l'ENA, un totem social pour Macron

  • En réformant des lieux emblématiques de la reproduction des élites, le chef de l'Etat entend promouvoir l' «égalité des chances»
  • Concrètement, le président annoncera la mise en place de voies réservées à des jeunes de milieux défavorisés, dont l'Assemblée a déjà voté le principe en novembre

PARIS: L'ENA et quatre autres écoles de la haute fonction publique devront accueillir dès la rentrée 2021 quelques élèves d'origine modeste ou des cités, une mesure de diversité sociale se voulant exemplaire que présente Emmanuel Macron jeudi à Nantes.

En réformant des lieux emblématiques de la reproduction des élites, le chef de l'Etat entend promouvoir l' « égalité des chances », volet social qui doit rééquilibrer un quinquennat actuellement marqué par de grandes lois sécuritaires.

Concrètement, Emmanuel Macron annoncera jeudi la mise en place de voies réservées à des jeunes de milieux défavorisés, dont l'Assemblée a déjà voté le principe en novembre. 

Il s'agit de créer 1 000 places dans des classes préparatoires -- deux par région -- qui préparent aux concours des grandes écoles de la fonction publique.

Les élèves de ces « Prépas Talents » seront sélectionnés sur des critères sociaux (revenus) et territoriaux, les candidatures issues des Quartiers prioritaire de la ville étant « vivement encouragées », explique un conseiller. Les étudiants recevront une allocation de 4 000 euros par an.

En une forme de discrimination positive, ils pourront passer un concours spécifique et des places supplémentaires leur seront réservées dans cinq grandes écoles. Ces places formeront un petit quota d'un maximum de 15% des effectifs admis par le concours externe (réservés aux candidats fonctionnaires). 

Il pourra ainsi y avoir à l'ENA (Ecole nationale d'administration), chaque année, six admis venant des « Prépas Talents », sur des promotions annuelles d'environ 80. 

Outre l'ENA, les écoles concernées sont l'Inet (Institut national des études territoriales), l'EHESP (Ecole des hautes études en santé publique, qui forme notamment les dirigeants des hôpitaux), l'ENSP (Ecole nationale supérieure de la police, qui forme les commissaires de police) et l'Enap (Ecole nationale d'administration pénitentiaire), pour les directeurs de prison.

Il n'est donc plus question de supprimer l'ENA, comme le chef de l'Etat -- qui est lui-même issu de cette école, comme son Premier ministre -- en avait évoqué la possibilité après la crise des « gilets jaunes ». 

Mais l'Elysée souligne le manque de diversité sociale de la formation la plus prestigieuse de l'Etat. 

Même si 29% de ses élèves sont boursiers, sa promotion actuelle n'a qu'un seul élève fils d'ouvrier alors que 70% ont un parent qui exerce un métier intellectuel. 

Or la haute fonction publique, selon le vœu de l'Elysée, doit faire preuve d'exemplarité en matière d'égalité des chances. 

« Depuis longtemps, la haute fonction publique présente une inégalité de faits, une pensée uniforme, des profils formatés », déplore un conseiller, qui se refuse néanmoins à parler de discrimination positive.

« Les formations au concours sont toutes localisées en région parisienne. D'où une reproduction sociale et une valorisation des codes sociaux propres à certains milieux. (...) Ceux qui dérogent à ces codes sont convaincus que ces carrières ne sont pas faites pour eux », ajoute-t-il.

Promesse républicaine

L’exécutif fait le lien entre l'ascenseur social pour ces jeunes et la lutte contre le séparatisme et souligne l'importance de promouvoir l'égalité des chances là où prospèrent des groupes islamistes.

« Si la promesse républicaine n'est pas tenue, elle sera remplacée par le repli communautariste ou extrémiste », résume la ministre de la Fonction Publique Amélie de Montchalin, à l'origine du dispositif.

Le chef de l'Etat échangera jeudi à l'Institut Régional d'Administration (IRA) de Nantes avec des élèves fonctionnaires, des élèves de classe préparatoire intégrée à l'IRA et des lycéens. 

Ces annonces s'ajoutent à une série de mesures en faveur de la réussite au mérite et pour lutter contre « les inégalités à la racine », un thème cher au chef de l'Etat.

Il avait ainsi annoncé en septembre l'extension à 200 000 élèves des « Cordées de la réussite », qui accompagnent des collégiens jusqu'à l'enseignement supérieur, un dispositif créé sous Nicolas Sarkozy. 

Dans le même esprit, outre le dédoublement des petites classes de primaire dans les quartiers défavorisés, le gouvernement a développé l'aide aux stages de 3e, l'aide aux devoirs et des « colonies apprenantes » cet été. 

Vendredi, Emmanuel Macron donnera également le coup d'envoi de la plateforme « Anti Discrimination » annoncée en décembre, qui permettra de signaler des cas de discrimination par internet et par téléphone, au 3928. Gérée par le Défenseur des droits et des associations, elle comprendra une dizaine de juristes spécialisés.


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».


Selon ManPowerGroup, l'IA pourrait réduire l'importance des « compétences » dans le recrutement

Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
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  • L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences ».
  • « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

PARIS : L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences », selon un dirigeant de ManPowerGroup.

En effet, « les compétences pourraient s'avérer obsolètes dans six mois », explique Tomas Chamorro-Premuzic, directeur de l'innovation du géant américain du travail temporaire, rencontré par l'AFP au salon Vivatech, à Paris, qui ferme ses portes samedi.  Selon lui, « il vaut mieux savoir que vous travaillez dur, que vous êtes curieux, que vous avez de bonnes aptitudes relationnelles et ça, l'IA peut vous aider à l'évaluer ».

Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

Cependant, les tâches informatiques (utilisation d'Internet, messagerie, etc.) pouvant être accomplies de manière autonome par des agents d'IA connaissent une « rapide expansion ». 

Dans ce contexte, les employeurs pourraient rechercher de plus en plus de salariés dotés de compétences hors de portée de l'IA, telles que le jugement éthique, le service client, le management ou la stratégie, comme l'indique une enquête de ManpowerGroup menée auprès de plus de 40 000 employeurs dans 42 pays et publiée cette semaine.

M. Chamorro-Premuzic déplore toutefois que ces compétences ne soient pas encore davantage mises en avant dans la formation. « Pour chaque dollar que vous investissez dans la technologie, vous devez investir huit ou neuf dollars dans les ressources humaines, la transformation culturelle, la gestion du changement », dit-il.

Les craintes d'un chômage de masse provoqué par l'IA restent par ailleurs exagérées à ce stade, estime le dirigeant, malgré certaines prédictions alarmistes.

D'après Dario Amodei, patron de la société d'intelligence artificielle Anthropic, cette technologie pourrait faire disparaître la moitié des emplois de bureau les moins qualifiés d'ici cinq ans. 

« Si l'histoire nous enseigne une chose, c'est que la plupart des prévisions sont fausses », répond M. Chamorro-Premuzic.

Concernant le recrutement, activité principale de ManPowerGroup, le dirigeant ajoute que « les agents d'intelligence artificielle ne deviendront certainement pas le cœur de notre métier dans un futur proche ». Il constate également que l'IA est utilisée par les demandeurs d'emploi.

« Des candidats sont capables d'envoyer 500 candidatures parfaites en une journée, de passer des entretiens avec leurs bots et de déjouer certains éléments des évaluations », énumère-t-il.